EN ATTENDANT LE JUGEMENT DERNIER
208 pages
Français

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EN ATTENDANT LE JUGEMENT DERNIER , livre ebook

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Français

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Description

Guinguinéo, paisible village africain au coeur de la France coloniale, vit au rythme de l'harmattan et de l'hivernage. Mais au cours d'un conseil de village convoqué afin de statuer sur la paternité d'un nouveau-né à l'aspect fort inquiétant, des personnages se révèlent, qui s'allient et s'affrontent au fil des circonstances narrées avec un humour renversant par le vieux conteur Ablaye Banana. Mais à l'orée des indépendances, sauront-ils tirer leur épingle du jeu ?

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 septembre 2011
Nombre de lectures 75
EAN13 9782296467187
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

En attendant le Jugement dernier
Encres Noires
Collection dirigée par Maguy Albet et Emmanuelle Moysan

Dernières parutions
N°351, Lottin WEKAPE, Montréal, mon amour , 2011.
N°350, Boureima GAZIBO, Les génies sont fous, 2011.
N°349, Aurore COSTA, Les larmes de cristal Nika l’Africaine III, 2011 .
N°348, Hélène KAZIENDE, Les fers de l’absence , 2011.
N°347, Daniel MATOKOT, La curée des Mindjula. Les enfants de Papa , 2011.
N° 346, Komlan MORGAH, Étranger chez soi , 2011.
N°345, Matondo KUBU TURE, Des trous dans le ciel , 2011.
N°344, Adolphe PAKOUA, La République suppliciée , 2011.
N°343, Jean René OVONO MENDAME, Les zombis de la capitale , 2011.
N°342, Jean René OVONO MENDAME, La légende d’Ebamba , 2011.
N°341, N’do CISSÉ, Les cure-dents de Tombouctou , 2011.
N°340, Fantah Touré, Des nouvelles du sud , 2011.
N°339, Harouna-Rachid LY, Les Contes de Demmbayal-L’Hyène et Bodiel-Le-Lièvre, 2010.
N°338, Honorine NGOU, Afép, l’étrangleur-séducteur, 2010.
N°337, Katia MOUNTHAULT, Le cri du fleuve , 2010.
N°336, Hilaire SIKOXTNMO , Aupoteau , 2010.
N°335, Léonard MES SI, Minta , 2010.
N°334, Lottin WEKAPE, Je ne sifflerai pas deux fois , 2010.
N°333, Aboubacar Eros SISSOKO, Suicide collectif Roman , 2010 .
N°332, Aristote KAVUNGU, Une petite saison au Congo , 2009.
N°331, François BINGONO BINGONO, Evu sorcier. Nouvelles, 2009.
N°330, Sa’ah François GUIMATSIA, Maghegha’a Temi ou le tourbillon sans fin , 2009.
N°329, Georges MAVOUBA-SOKATE, De la bouche de ma mère , 2009.
Sémou MaMa DIOP


En attendant le Jugement dernier
© L’Harmattan, 2011
5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-55483-2
EAN : 9782296554832

Fabrication numérique : Actissia Services, 2012
A mes frères et sœurs de
sang et de convictions
A notre fraternelle
accointance
« Notre plus grande faute, le blasphème perpétuel que nous commettons, c’est notre incapacité à nous envisager nous-mêmes. »

Léonora Miano, romancière
camerounaise
Palabre I L’ENFANT NOIR
Conseil de village
A l’époque les dieux étaient généreux


La lune se faufilait entre de faméliques nuages. Les nuages d’une saison sèche sahélienne sevrés d’eau depuis des lunes et sucés quotidiennement par un soleil aux dards incisifs et gloutons. Aux abords des concessions, grillons et cigales composaient des mélodies insipides et monotones, tandis que libellules, moustiques et autres diptères insignifiants s’adonnaient à leurs besognes nocturnes. Pour bercer la morne cadence de leur existence, quelques villageoises entonnaient des comptines sans tête ni queue. De temps à autre, quelques mélopées ponctuaient ces histoires banales nées depuis une aube lointaine et transmises de génération en génération. Un vent tiède et timide s’essayait de temps à autre à quelques caresses qui faisaient frémir les branchages clairsemés des acacias et de l’énorme flamboyant au centre de la place du village sous lequel se tenait le conseil.
Le conseil du village, un collège de dix vieillards complètement amortis, sans valeur résiduelle. Des hommes terminés s’appuyant en permanence sur une canne, se tenant les reins, soupirant à chaque mouvement. Des cheveux tout blancs, bourgeons de la mort, envahissaient leurs crânes bientôt fossiles. Les rides se bousculaient sur leur face émaciée et vétuste pour s’emparer des dernières surfaces lisses. Un caftan grossier drapait leur corps osseux pendant qu’un pantalon bouffant occultait leurs jambes rachitiques. Sous d’autres cieux, des vieillards aussi périmés seraient internés dans un lieu très discret où ils attendraient avec une sénile quiétude la visite annoncée de l’ange de la mort. Les membres de notre conseil du village, quant à eux, étaient élus par le consentement tacite de tous les habitants et légitimés par la vieille gérontocratie africaine. C’étaient eux qui statuaient en première et dernière instance et c’était de leurs bouches édentées qu’émanaient des sentences dont nul ne pouvait interjeter appel.
Chaque réunion du conseil était un évènement à Guinguinéo. Toutes affaires cessantes, hommes et femmes, vieillards et jouvenceaux s’y rendaient, quand bien même le litige à trancher ou la décision à prendre serait d’une piètre importance. En vérité, c’était occasion de tromper l’affligeante monotonie des journées qui s’étalaient mornes et infinies, alourdies par un harmattan impitoyable. Car Guinguinéo n’était qu’un ensemble de hameaux regroupant des phratries d’agriculteurs et de pasteurs sédentaires. La vie des adultes était rythmée par l’alternance des deux saisons sahéliennes. La saison des pluies qui n’allait pas au-delà de trois lunes. La saison sèche pour le reste. Mais à l’époque, les dieux étaient généreux et les pluies étaient assez régulières pour assurer de bonnes récoltes, de très bonnes récoltes. L’herbe n’était pas rare. Les bovins se régalaient copieusement, s’accouplaient royalement et se multipliaient. Les vaches étaient, harmattan comme hivernage, pleines. C’était avec beaucoup de générosité qu’elles laissaient les veaux téter gloutonnement et les hommes traire abondamment leurs grosses mamelles.
Certains soirs, lorsque la lune était pleine et le ciel placide et constellé, des mbapat, tournois de lutte traditionnelle, se déroulaient. Occasions pour les jeunes hommes, vêtus d’un cache-sexe dérisoire, d’étaler leurs muscles, leur adresse et leur courage et de s’adjuger en cas de victoire les faveurs des jouvencelles.
D’autres soirs, c’était au tour des jeunes femmes et des adolescentes d’attirer le regard des hommes. Sous leurs camisoles en cotonnade multicolore, elles se ceignaient de leurs plus beaux pagnes qu’elles exhibaient délicatement lorsqu’elles s’invitaient au milieu du grand cercle formé autour des batteurs de tam-tam. C’était le s abar. Concours de souplesse et d’élégance, de coquinerie et de coquetterie, à l’issue duquel des cœurs chaviraient, des fiançailles se nouaient, des querelles germaient.
Quant à mes petits compagnons et moi Ablaye Banana, à peine perchés sur nos dix pluies, nous étions dans ce que nous appelons ici notre « oh-la-la », et que le Toubab aurait surnommé nirvana. Une sorte de période d’insouciance, d’irresponsabilité, de liberté. Nous courions, sautions, gambadions. A l’époque, il n’y avait pas encore d’école à Guinguinéo. La plus proche se trouvait à une demi-journée de marche, à Gossas chef-lieu du département. Nos seules obligations étaient d’aider nos parents à défricher les champs à l’approche de la saison des pluies et de participer aux moissons trois lunes plus tard.
C’est vous dire, les enfants, que le temps et l’espace étaient nos plus sûrs alliés. Aux premières lueurs du jour, alors que les mortiers des femmes étaient encore renversés et que les oiseaux les plus matutinaux avaient à peine entamé leur aubade, le torse et les pieds nus, le pantalon bouffant jusqu’aux genoux, nous sortions de nos demeures pour n’y revenir que quand le soleil mourant poussait son dernier soupir vespéral.
Au commencement, notre activité favorite était la chasse aux oiseaux. Armés de frondes, nous faisions un carnage dans le ciel. Moineaux et marabouts, chouettes et hiboux, faucons pèlerins et crécerelles, colibris, pies, perruches, martins-chasseurs, pigeons bisets, ibis, touraco… Aucun planeur, aucun voltigeur ne prit à défaut notre dextérité. Nous ne faisions pas de quartiers. Entre becs crochus, longs ou recourbés, serres acérées ou pattes palmées, plumages colorés, ternes ou sombres, nos pierres ne faisaient point de distinction.
Bientôt l’oiseau se fit rare. Comme s’ils s’étaient concertés nos amis planeurs et voltigeurs boycottèrent le ciel de Guinguinéo. Les oiseaux migrateurs changèrent leur plan de vol. Les sédentaires volèrent plus haut, hors de portée de nos pierres.
Alors on se tourna vers les rongeurs. Nous fîmes la fête aux rats avec nos pièges disséminés à travers le village. Ce faisant nous nous rapproch&#

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