La Berthe, etcaetera
218 pages
Français

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La Berthe, etcaetera , livre ebook

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Description

Dans le village de Feurs en Bugey, la Berthe, vieille paysanne, préfère vivre retirée au milieu de ses hectares.
Du haut de sa propriété, elle surveille le maire, ce fourbe Perrin.
Leurs empoignades remontent à l’enfance et entretiennent la liesse des villageois.
Paul, un gone débarqué de lyon, va explorer sa ferme et provoquer des réactions en chaine qui vont transformer le village.
Ces collisions et l’entraide entre des personnages typés, émouvants ou cocasses vous donneront envie de les rejoindre, participer à la foire de Feurs, et pourquoi pas, changer de vie !
Rouquinos le chat, Mars le cheval comtois de la belle Gabrielle, la douce Inès, Sara et Louis enfants lunaires, Souzix, l’ancien garagiste, Dièse et Bémol, jumeaux boulanger aux mots mélangés, Dédé Lapince, Enzo, les forains et cætera… vous attendent avec bienveillance.

Informations

Publié par
Date de parution 06 juillet 2018
Nombre de lectures 1
EAN13 9782312059761
Langue Français

Extrait

La Berthe , etcaetera
Myriam Melis
La Berthe , etcaetera
LES ÉDITIONS DU NET
126, rue du Landy 93400 St Ouen
© Les Éditions du Net, 2018
ISBN : 978-2-312-05976-1
Jean Perrin
À bord de sa Renault Express, le béret vissé sur sa tête, Jean Perrin, chaque matin, l’heure variant selon la saison, commençait son tour du village aux premières lueurs du jour.
Il était né et avait passé toute sa vie à Feurs en Bugey, c’était son fief. Il y avait eu ses deux fils, sitôt après avoir épousé la demoiselle des postes et ainsi mis fin à sa courte carrière.
Instituteur toute sa vie essentiellement dans son village, il en avait aussi toujours été conseiller municipal. Selon les retournements de tendances ou les étranges pertes de mémoire des électeurs, il avait alterné ses rôles entre la majorité et l’opposition. Et bien qu’il fut autant courageusement critiqué de dos que salué de face, il en était à son troisième mandat consécutif de maire. La vieille garde du village ne se résolvait pas à confier « son pays » aux nouveaux habitants.
Il était pourtant bien à l’origine du plus bel afflux migratoire. Les terres patiemment achetées quelques centimes au cours des décennies étaient devenues des hectares. Au gré des successions et des remembrements, il avait regroupé ses plus belles parcelles en bordure de village et le long de la départementale, et le dernier Plan Local d’Urbanisation les avait judicieusement rendues constructibles…
Évidemment , il avait fait englober dans ce PLU toutes les parcelles jouxtant les siennes dans la perspective d’une « urbanisation globale réfléchie ». Personne n’était dupe, mais la crainte de perdre la poste, des classes de primaires et les derniers commerces avait permis de faire valider le projet. Pour d’autres, voir leurs parcelles passer de 30 centimes à 60 euros du mètre carré ne nécessitait pas de longues heures d’explications, et avait calmé toute velléité d’opposition.
De toute façon, la demande était là. Le village situé à une heure seulement de Lyon avait vu quelques années plus tôt arriver quelques jeunes couples pleins d’ardeur qui avaient commencé à rénover des maisons de village, voire des granges ! Les prix avaient commencé à grimper, cela avait alimenté les conversations des habitués du bar « chez Colette ». Il fallait tout de même être un peu bredin pour payer si cher ces maisons à étages, et toutes à refaire. Et puis la route jusqu’à Lyon, il fallait tout de même payer l’essence ! Et les voir s’agiter, faire les travaux eux-mêmes, camper à moitié pour économiser… ils allaient bien se fatiguer !
Mais le mouvement s’était amplifié, et les prix itou.
Les vieilles maisons redevenaient pimpantes. Certains commencèrent à se dire que finalement, leurs enfants ne viendraient jamais habiter la maison de feu grand-mère, ou qu’ils n’avaient plus vraiment besoin de cette grange dont le toit serait bientôt à repasser… Ceux qui n’avaient rien à vendre commencèrent à râler en pensant à ce qu’ils avaient refusé d’acheter pour rien dix ans plus tôt ! S’ils avaient su ! Ce qu’ils auraient gagné aujourd’hui ! Et oui, à l’instar de nos belles laitières, si l’on rumine en regardant le train passer… c’est que l’on n’est pas dedans !
Donc depuis cinquante ans et au volant de son Express blanche aujourd’hui (deux cent quatre-vingt mille kilomètres au compteur tout de même), toujours aussi sec et aussi nerveux, Jean Perrin faisait son habituelle tournée.
Il repérait tous les couche-tard et les lève tôt, surveillait l’évolution de tous les travaux déclarés ou non, la croissance des jardins ou des piles de bois… surprenait les amants cachés dans les voitures ou au détour des chemins… Il était autant détesté que craint pour cela, car il était sans pitié et prêt à tous recours pour obtenir ce qu’il désirait, il savait aussi bien accorder une faveur que divulguer un secret.
Mais il avait ainsi secouru le vieil Émile tombé au lever dans sa cuisine, en remarquant ses volets inhabituellement clos à 7 heures du matin. Ce sauvetage avaita momentanément cloué le bec à ceux qui lui reprochaient ses méthodes inquisitoires.
Après le tour du village ancestral, il faisait un passage dans le nouveau lotissement construit sur ses anciennes terres. En bordure, cette garce de Berthe continuait à déverser la paille souillée de ses lapins, poules et quatre chèvres. Elle n’avait pas apprécié les nouvelles constructions, et comptait bien rappeler les limites de son territoire. Heureusement qu’elle n’avait plus de vaches !
Elle avait ainsi parfumé les soirées barbecue du premier été de ses nouveaux voisins. Jean Perrin se demandait si elle n’avait pas augmenté son élevage suite à la première pétition…
Il commença à remonter le chemin vicinal, ce fameux caillou dans sa botte !
Il avait perdu son procès en appel, et ne décolérait pas.
Il avait signé un compromis de vente sur ses terrains de l’autre côté de chez la Berthe, mais le chemin qui y menait traversait en partie les terres de cette carne, ne faisait que trois mètres de large, et elle avait refusé de céder le moindre centimètre pour en permettre l’élargissement ! Donc pas de permis de lotir !
Elle ne voulait pas « d’une autoroute » au milieu de ses terres.
Le procès avait donné un extraordinaire sujet de conversation, de paris et d’engueulades dans les chaumières et « chez Colette », le café local. Berthe n’avait jamais fait d’efforts pour se rendre sympathique auprès de ses congénères, mais la majorité se délectait en douce de voir Perrin se prendre une déculottée.
Cela avait aussi été divertissant pour les juges : Perrin hors de lui et la Berthe venue en blouse à petites fleurs, jouant la pauvre petite vieille harcelée, avec « son pauvre Léon bien fatigué », avaient fini par échanger leurs compliments habituels : « bec à foin » « vieille taupe » « gueule à ressort » « mégère » « rapière » « pignouf »… suivis par la rituelle conclusion de Berthe depuis soixante ans, accompagnée d’un dynamique bras d’honneur « Jean Perrin : j’en gagne deux ! ». Cela changeait des divorces et des délits routiers, enfin un beau sujet de narration au cours d’une prochaine soirée !
En remontant le chemin, il ruminait encore. Ce n’est pas qu’il avait besoin d’argent, bien au contraire, mais quand il voulait quelque chose, il ne tolérait aucune opposition. À la sortie du tribunal, la Berthe lui avait déclaré que statistiquement en tant qu’homme il devait mourir avant elle, et qu’il avait donc perdu sur toute la ligne, et qu’à son enterrement, sur le registre, elle écrirait « enfin ! »… Et bien ça, on verrait !
Et tous les matins il l’apercevait sur le pas de sa porte, et tous les matins, quand elle l’apercevait, elle lui faisait son bras d’honneur. Léon était décédé un mois plus tôt. Mais la Berthe se tenait toujours aussi droite.
Il se demanda soudain ce qu’il ferait si un jour elle n’apparaissait pas. Maintenant qu’il n’y avait plus le Léon, qui saurait s’il lui était arrivé quelque chose ? Elle n’avait plus de famille, vivait presque en autarcie, il n’y avait que cette curieuse aïeule en Aixam pour lui rendre visite.
Devrait-il monter et entrer comme il avait fait pour l’Emile ? Elle serait capable de hurler à l’assassin en cas de vie, et des rumeurs pourraient démarrer en cas de trépas… oh la carne, morte ou vive, elle aurait passé sa vie à l’emmerder ! Il refit machinalement son toc : lever son béret de la main gauche et passer sa main droite sur le dessus de son crâne. Certains irrespectueux disaient qu’il espérait toujours découvrir une repousse de ses cheveux.
Ce matin encore, il aperçut ce gamin qui remontait le pré en courant depuis le nouveau lotissement. Il l’avait déjà vu plusieurs fois à la même heure aller ainsi jusque dans la grange. La Berthe avait-elle vu le manège ? Bah, c’était son problème à elle, et avec un peu de chance, le gamin mettrait le feu à la grange…
Pendant qu’elle était occupée à lui faire son bras d’honneur, ce dernier filait dans son dos. L’idée d’un bel incendie redonna le sourire à Perrin !
Le chaton
Sale moment : à 15 ans, Grisoune venait encore

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