La femme parfum
229 pages
Français

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La femme parfum , livre ebook

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Description

Voilà un roman qui part d'une enquête policière dans le monde du stylisme, pour allier considération sur l'art, sur les échanges et les rapports Nord-Sud. Ce récit, avec ses péripéties et ses rebondissements, est un voyage dans l'espace entre Dakar, Gorée, le village de Sinthiou Pathé, Fongolimbi et l'Occident. Le prétexte est alors trouvé pour parler de l'amour, de la liberté, de la condition de l'homme et surtout de la femme, de l'esthétique, de l'industrie culturelle.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 janvier 2011
Nombre de lectures 98
EAN13 9782296686717
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0850€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

L A FEMME-PARFUM
 
roman
 
 
Première édition parue en mars 2010
aux Presses Universitaires de Dakar
sous le titre « La Femme-Parfum »
D ernières parutions
chez L’H armattan- S énégal
 
SOW Abdoul, Mamadou Racine Sy. Premier Capitaine noir des Tirailleurs Sénégalais (1838-1902) , collection « Mémoires & Biographies », septembre 2010.
 
KÉBÉ Abdoul Aziz, Serigne Abdoul Aziz Sy Dabbâkh. Itinéraire et enseignements , coll « Mémoires & Biographies » juin 2010.
NGAÏDE Abderrahmane, Le bivouac , suivi de Fresques d’exil , juin 2010.
 
FALL Iba, Crise de socialisation au Sénégal , essai. Suivi de Réflexion sur les ontologies bambara et peule en rapport avec la crise ontologique mondiale , mai 2010.
 
KANE Coudy, La quête identitaire chez les écrivains de la moyenne vallée du fleuve Sénégal , mars 2010.
 
KANE Abdourahmane, Destin cruel , roman, janvier 2010.
 
BA Daha Chérif, Crimes et délits dans la vallée du fleuve Sénégal de 1810 à 1970, collection études africaines, janvier 2010.
 
SARR Pape Ousmane, Les déboires de Habib Fall , suivi de Blessures de mon pays , nouvelles, décembre 2009.
 
MIKILAN Jean, Le conseil des Esprits , décembre 2009.
 
CHENET Gérard, El Hadj Omar. La grande épopée des Toucouleurs , théâtre, novembre 2009.
 
BARRO Aboubacar Abdoulaye, École et pouvoir au Sénégal. La gestion du personnel enseignant dans le primaire , novembre 2009.
A BDOULAYE É LIMANE K ANE
 
 
L A FEMME- P ARFUM
 
roman
 
 
L’H ARMATTAN-SÉNÉGAL
DU MÊME AUTEUR
 
Le Prince Malal , Paris, Bayard, Collection « J’aime lire’’, 1987.
La Maison au figuier , Dakar, NEAS, 1992, (réédité NEAS-SEPIA, 1995).
Les Magiciens de Badagor , Paris, SEPIA, 1996.
Markéré , Dakar, NEAS, 2000.
Les cinq secrets de mon père , Dakar, NEAS, 2003.
 
 
Cet ouvrage a été édité grâce au Fonds d’aide à l’Édition
du ministère sénégalais de la Culture et des Loisirs /
Direction du Livre et de la Lecture.
 
 
© L'HARMATTAN-SÉNÉGAL, 2011
« Villa rose », rue de Diourbel, Point E, DAKAR
 
Fabrication numérique : Socprest, 2012
Ouvrage numérisé avec le soutien du Centre National du Livre
 
http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
senharmattan@gmail.com
 
ISBN : 978-2-296-10291-0
EAN : 9782296102910
 
À tous les créateurs, individuels et collectifs,
qui luttent pour la liberté de création
la protection du patrimoine et une vie décente.
 
C HAPITRE PREMIER
 
Elle ne savait pas nager et n’avait jamais appris à le faire. Elle avait vu les garçons et les filles de son âge plonger et elle avait fait comme eux. Le fleuve l’avait engloutie, puis déposée quelques instants plus tard sur la berge, dans le clapotis des vagues. Elle s’était levée, avait regardé autour d’elle et s’en était allée sans piper mot.
Assise à même les carreaux de son vaste atelier, Kadia racontait cette aventure ancienne à une douzaine d’adolescentes fascinées par sa grâce et son assurance. Elles se délectaient de ces paroles crues que la jeune femme semblait puiser au fond de ses entrailles.
Un brin philosophe, elle déclama une phrase devenue son expression fétiche : « La vie est ainsi faite. Elle est imprévisible, elle est pleine de surprises ». Et elle raconta comment elle avait failli, une autre fois, bien plus tard, se faire écrabouiller par un camion-citerne. Elle roulait sur un vélo pour la première fois. À vive allure. Elle n’était jamais montée auparavant sur une bicyclette. Un miracle. On l’avait extraite de sous le mastodonte, indemne et à peine surprise de ce qui venait de lui arriver. Et elle leur dit encore qu’elle avait compris que notre existence est une succession de risques de noyade auxquels on échappe par chance, par ruse ou par savoir-faire. Aussi Kadia est-elle toujours sur ses gardes sans pour autant s’empoisonner la vie avec des lamentations et des récriminations quand, après lui avoir souri, de temps en temps la vie semble lui faire la grimace.
L’atelier est vaste. Il est éclairé par la lumière qui tombe des hautes fenêtres vitrées et par de grandes lampes à néon suspendues au plafond, aux murs et dans les couloirs. Ceux-ci mènent aux pièces de ce complexe abritant maints autres laboratoires d’idées sur les costumes et les parures. Tout est sens dessus dessous. Les ballots de pagnes tissés se mêlent aux rouleaux de pièces d’organdi ; des costumes achevés trônent à côté de patrons encore accrochés à des chevalets ; de grandes bobines de fils de toutes les couleurs pendent de la vaste table. Autour de celle-ci, tenant au bout de leurs doigts longs et effilés des ciseaux marqués aux initiales de la maîtresse des lieux, des jeunes filles taillent dans des matières brutes les formes qui vont soulever l’enthousiasme des passionnés de stylisme. Dans dix jours, c’est le rendez-vous annuel pour la présentation des nouvelles créations de leur patronne.
De l’avis de tous ceux qui la connaissent, Kadia semble se nourrir plus volontiers de rêves fous de couleurs et de perles rares pour vêtir des corps imaginaires de femmes que de riz au poisson. Elle ne déteste certes pas ce plat, mais en consomme avec beaucoup de modération et préfère s’en tenir à un régime alimentaire d’une stricte frugalité. Aussi est-elle souvent elle-même un modèle lorsque, voulant expliquer aux autres ce qu’elle ressent au plus profond de son être, elle estime que les mots sont lents, longs et trop vagues. Dans de telles situations, elle passe outre les manières habituelles et laisse parler ses doigts, les traits de son visage et son corps gracile qu’elle soumet alors, pour la bonne cause, aux fantaisies de la création. Dans dix jours, cette dizaine de jeunes filles va se transformer en œuvres d’art vivantes et ambulantes sur les planches de ce lieu mythique qu’est « La Toile arc-en-ciel ». Les dépliants touristiques ont porté ce nom aux quatre coins de la Terre. Ils vantent la régularité de ce rendez-vous, les mille couleurs de ses guirlandes, ses fumets de poisson et de merguez et ses exhalaisons d’arômes de jus de goyave, de corossol, de papaye et de cajou.
Pendant que les douze jeunes filles l’écoutaient religieusement, une radio, enfouie sous les rouleaux de taffetas, laissait échapper des mélodies voluptueuses de Wasis Diop. Justement, celui-là, Kadia l’a plus souvent rencontré à Paris, en Hollande et à New York qu’à Dakar, où il ne vient que rarement. Il sera de la partie dans dix jours, en nombreuse et joyeuse compagnie, aux côtés des fidèles de ces trois journées annuelles au cours desquelles s’expriment surtout les corps et les matières qui les peignent et leur donnent vie. Kadia se tut un moment, apparemment sous le charme de la musique. En vérité, elle pensait à ce qu’elle voulait dire à ces jeunes filles et surtout comment elle allait le dire. Puis, se fiant comme d’habitude à son instinct, elle déclara :
« Vous êtes douze. Quelles sont, parmi vous, les deux qui vont porter les robes – fétiches de cette année au défilé ?
Ce fut le silence total. Même la voix de Wasis Diop disparut quelques secondes, comme par respect pour ces délibérations muettes. L’une des deux robes fétiches de cette édition a été baptisée, par la magicienne du fil, « La Femme-laser ». Tout à fait dans le style de ce qui justement l’a rendue célèbre. Après « La Femme-calebasse » et « La Femme-chapeau de paille », l’année d’avant elle avait touché le sommet de la fantaisie avec « La Femme-nénuphar ». C’était un modèle où le mannequin était habillé de tiges et de feuilles de cette plante des étangs et des lacs, taillés en colliers et jupe courte. Kadia reprit la parole :
Évidemment, l’ennui avec mes modèles et mes créations, c’est que personne ne peut les porter pour se rendre à l’ambassade d’Arabie ou à celle du Maroc à l’occasion la Fête du Trône.
 
Cette remarque sembla libérer les concurrentes et ce fut l’hilarité générale. Les robes qui portent la griffe particulière de Kadia n’ont qu’un lointain rapport avec le prêt-à-porter. Par leur forme audacieuse et leur extravagance, elles semblent parfois ê

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