Le voyage des Blanchisseuses
148 pages
Français

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Le voyage des Blanchisseuses , livre ebook

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148 pages
Français

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Description

Le tableau d'Edgar Degas Les blanchisseuses souffrant des dents fut dérobé en décembre 1973 au Musée des beaux-arts du Havre. L'auteur du vol disparut avec le célèbre tableau et ce n'est que trente-sept ans plus tard que la toile réapparut au catalogue de la maison d'enchères Sotheby's à New York. Entre ces deux faits marquants, les Blanchisseuses ont fait un voyage peu ordinaire, et c'est ce que raconte ce roman.

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Informations

Publié par
Date de parution 01 juin 2012
Nombre de lectures 10
EAN13 9782296494640
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0600€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Le voyage des Blanchisseuses
Gérard Serrie


Le voyage des Blanchisseuses


Roman


L’H ARMATTAN
Du même auteur


Rue du Grand Faubourg, Edition privée, Tarbes, 2011 (roman)


© L’H ARMATTAN , 2012
5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-96244-6
EAN : 978229696446

Fabrication numérique : Actissia Services, 2012
« L’art n’est pas un amour légitime ;
on ne l’épouse pas, on le viole. »
Edgar Degas
1 Henry
L a Garonne charriait une eau saumâtre, comme après chaque orage. Personne ne circulait sur les quais pour le remarquer. Pourtant le soleil lumineux rehaussait les couleurs. Le pont de Pierre étalait son ombre monumentale depuis la porte de Bourgogne jusqu’à la place Stalingrad. La famille Laroche habitait Bordeaux depuis plusieurs années. Henri, le fils de quinze ans, avait déjà eu l’occasion de nombreuses fois d’admirer ce paysage puisqu’il se trouvait sur le chemin le menant à l’école. Pourtant il savait qu’il le parcourait pour la dernière fois. C’était d’un air nonchalant qu’il rentrait chez lui. Comment allait-il annoncer la nouvelle à ses parents ? Sa mère lui pardonnerait rapidement, elle était tellement gentille avec lui, elle acceptait tout. Il n’avait pas de souci de ce côté. C’était plutôt son père qu’il craignait. Déjà, trois mois plus tôt, lorsqu’il était rentré chez lui avec une mauvaise note, il avait écopé d’une sérieuse raclée. Cette fois, le pire était à craindre. Il comptait sur sa mère pour contenir la colère du père. En général c’était ce qu’il se passait.
Henri traînait les pieds et n’avait plus envie de rien. Un énorme vague à l’âme l’envahissait. Plus il se rapprochait de la maison, moins il marchait vite. L’instituteur ne l’avait pas épargné. À chaque fois qu’Henri levait le nez, il ne manquait pas de le punir exagérément. Il est vrai qu’Henri ne s’intéressait pas à grand-chose à part le dessin. Finalement c’était en arrivant le matin que l’instituteur lui apprit, sourire aux lèvres, qu’il était renvoyé de l’école pour travail insuffisant. Henri avait rebroussé chemin. Il traînait son cartable au sol en se disant que de toutes les façons, il n’en aurait plus besoin. À cent cinquante mètres de la maison il s’arrêta et s’assit sur le bord du trottoir. C’est la voisine qui l’aperçut et s’approcha du jeune garçon. Elle comprit rapidement la situation et lui proposa de passer chez ses parents, avant qu’il ne rentre, pour arranger le retour du garçon.
La colère du père fut atténuée grâce à l’intervention de la voisine. La mère était ravie de la tournure des événements, elle ne souhaitait pas affronter son mari seul. Quant à lui, il n’osa pas dévoiler ses mauvaises manières devant la voisine. Une fois la nouvelle acceptée, il fallait bien trouver une solution. Le jeune garçon n’avait pas toutes les facilités pour suivre des études traditionnelles mais il fallait plutôt miser sur son attirance pour le dessin. Henri entra à l’école des Beaux-arts de Bordeaux en 1950. Il fut un peu surpris au début par les exercices à faire. Il fallait travailler les ombres, les perspectives, la composition, sans pour autant traiter un sujet complet. Pendant la première année, on n’abordait pas les couleurs. Henri préférait le dessin libre mais ce serait pour plus tard. Il fallait d’abord apprendre les bases. Une grande partie du programme était consacré à l’histoire de l’art. Ce domaine l’intéressait particulièrement.
Henri habitait encore chez ses parents lorsqu’il sortit de l’école des Beaux-arts en 1955. Il fit la connaissance de Juliette pendant sa dernière année d’étude. La jeune fille avait vingt ans et suivait les mêmes cours que lui. C’est elle qui lui fit connaître l’atelier de Maître Pierre. Situé au bout de la rue Sainte Colombe, le petit atelier avait une grande réputation. Henri se présenta chez Maître Pierre avec l’espoir improbable d’y trouver une place. Il fallut peu de temps au Maître pour découvrir les facilités dont disposait Henri. Il lui proposa un travail, pas très bien rémunéré, certes, mais un travail quand même. Juliette, quant à elle, préféra un emploi de vendeuse dans un magasin qui n’avait rien à voir, ni de près ni de loin, avec l’art puisqu’elle vendait des caleçons pour hommes. L’objet l’embarrassa un peu au début, puis finalement elle en souriait, surtout quand elle voyait l’air gêné des clients n’osant pas entrer dans les détails relatifs au confort de l’article devant la jeune femme.
Cinq ans s’écoulèrent sans que le travail d’Henri n’évolue. Il décida de quitter l’atelier de Maître Pierre et de rechercher autre chose. Il n’avait pas d’idée précise. C’est au hasard des rencontres qu’il se présenta pour un poste de vendeur dans une agence immobilière. Après tout, pourquoi pas, il n’avait jamais pratiqué le commerce, c’était l’occasion pour lui de tester ses talents de séducteur. Dans l’agence, on lui avait confié la vente des locaux industriels. C’était un domaine un peu particulier, très dépendant de la réglementation. Les clients faisaient leur choix par rapport à des critères techniques et objectifs, ce qui n’était pas le cas pour les biens privés où le coup de cœur l’emportait presque toujours sur la raison.
Bordeaux continuait son extension, le commerce battait son plein, les nouvelles implantations fleurissaient un peu partout autour de la grande ville. Henri épousa Juliette le 15 mars 1962. Ils habitaient un appartement au cinquième étage dans la rue de la Devise, pas loin de la place de la Bourse. Leur bonheur fut de courte durée. Un an plus tard, elle s’enfuit avec le patron du magasin de caleçons. Ce dernier avait poussé sa conscience professionnelle à l’extrême pour former son personnel à une meilleure connaissance des articles. Le divorce fut prononcé quelques mois plus tard.
C’est en 1963 qu’Henri, âgé de trente ans, fit une rencontre qui bouleversa irréversiblement sa vie.
2 Charles
L ’Allemagne venait d’occuper l’Autriche. Le III ème Reich poursuivait son inexorable invasion. La France et l’Angleterre protestèrent mollement. L’intention des Allemands, complètement aveuglés par Hitler, se révélait à la face du monde. C’est dans ces conditions troubles que Charles naquit, juste avant la seconde guerre mondiale, en 1938.
Son père travaillait au service des douanes du Havre. Il avait commencé en bas de l’échelle, comme simple employé. Le tri des dossiers sans grande importance occupait tout son temps. Sa patience et son sérieux étaient appréciés. Il devint chef du service de la documentation. Chaque nouvelle pièce était soigneusement identifiée. Le titre et un court descriptif résumant l’essentiel étaient rapportés sur une fiche numérotée. Les fiches étaient soigneusement classées dans un énorme bac. Il était le seul à maîtriser ce classement. Grâce à lui, lorsqu’un douanier avait besoin d’un renseignement, il le trouvait sans aucune difficulté.
La mère de Charles consacrait son temps à ses sept enfants. La charge de travail était d’une telle importance qu’elle ne pouvait envisager aucune autre activité. La famille vivait sous le toit de l’administration des douanes. Pour faciliter la vie des fonctionnaires, des logements assez sommaires avaient été construits. Certes, le confort n’était pas une priorité mais la prise en charge d’une partie des loyers arrangeait bien les employés des douanes dont la rémunération n’était pas particulièrement élevée. Il y avait également une sécurité de l’emploi appréciable.
Le père de Charles disparut, malheureusement trop tôt, suite à une maladie que les médecins de l’époque ne savaient pas soigner. Charles n’avait que cinq ans et sa mère dut faire face seule à la situation. Elle profitait cependant d’une pension allouée par le service des douanes qui lui permettait au moins de nourrir les enfants. Ce n’était pas suffisant pour le reste. Elle accepta le travail de femme de chambre dans un hôtel pr

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