LES NOUVELLES VOIES DE LA LITTÉRATURE AFRICAINE ET DE LA LIBÉRATION
158 pages
Français

LES NOUVELLES VOIES DE LA LITTÉRATURE AFRICAINE ET DE LA LIBÉRATION , livre ebook

-

158 pages
Français

Description

Les nouveaux écrivains africains abordent le millénaire en combattants peu conventionnels, mais courageux. Ils affirment l'irréductible volonté d'un continent-martyr d'imposer son originalité. Ils nous donnent des écrits fous, immoraux, cyniques, désabusés, comme des cris de douleur ou de dérision. Leur parole folle, mais aussi artistique et thérapeutique, malgré son originalité, rejoint plus souvent qu'on ne le croit celle de leurs grands aînés, Chinua Achebe ou Tchicaya U Tam'si. Elle ne peut laisser personne indifférent.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 décembre 2001
Nombre de lectures 70
EAN13 9782296271616
Langue Français
Poids de l'ouvrage 4 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0600€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Les nouvelles voies de la littérature et de la
libération africaines
(Une littérature « voyoue »)Collection Critiques Littéraires
dirigée par Maguy Albet et Paule Plouvier
Dernières parutions
Bernard HAMON, Georges Sand et la politique, 2001.
Marcel BOURDETTE-DONON, Raymond Queneau: l'œil, l'oreille et la
raison, 2001.
Corinne PELT A, Le romantisme libéral en France, 2001.
Stéphane MARTELL Y, Le sujet opaque, 2001.
Anthony SaRON, Hubert Aquin où la révolte impossible, 2001.
Odile SILVA,La fortune des Misérables de Victor Hugo au Portugal,
2001.
Edgard WEBER, L'univers romanesque de Rachid El-Daif et la guerre
du Liban, 2001.
Christophe CHABBERT, Malcolm de Chazal, l'homme des genèses,
2001.
Christophe Petrusmok de Malcolm de Chazal, 2001.
Maureen SMITH, Denise Levertov, le don de poésie, 2001.
Laure LÉVÈQUE, Le roman de l 'histoire, 2001.
Sylvie LOIGNON, Le regard dans l 'œuvre de Marguerite Duras, 2001.
Jean-Pierre BOULE, Hervé Guibert: L'entreprise de l'écriture du moi,
2001.Michel NAUMANN
Les nouvelles voies de la littérature et
de la libération africaines
(Une littérature « voyoue »)
L'Harmattan(Ç)
L'Harmattan, 2001
5-7, rue de l'École-Polytechnique
75005 Paris - France
L'Harmattan, Inc.
55, rue Saint-Jacques, Montréal (Qc)
Canada H2 Y 1K9
L'Harmattan, Italia s.r.I.
Via Bava 37
10124 Torino
L'Harn1attan Hongrie
Hargita u. 3
1026 Budapest
ISBN: 2-7475-1560-5INTRODUCTION
Rester là~tenir, dans l'ombre
de la cicatrice en l'air. (P. Celan)
~ ~
Alors que s annonçait I ère des indépendances les
littératures africaines en langues européennes recevaient un
accueil admiratif mais souvent sceptique quant à leur avenir. En
effet, d~une part les critiques conservateurs voyaient en cet élan
culturaliste un nécessaire réaj ustement qui corrigeait les
outrances des idéologies coloniales mais qui devait être suivi
d~unréalignement sur les modèles occidentaux et « universels»
~ ~expression individuelle, d autre part lesde développement et d
progressistes, comme Sartre, voyaient cette légititne affirmation
ethnique et nationale se fondre assez rapidelnent dans le courant
prolétarien. Le concept de totalité par exemple devait, pour les
uns, s~effacer devant l~individu, moteur du développement
capitaliste, pour les autres, devant le centralisme fondé sur la
classe ouvrière, souvent détourné par une rigide et dogmatique
bureaucratie de parti. Pourtant le sufi Tierno Bokar comparait la
totalité - l~ensemble dynamique de ce qui est - à une caravane
dont tous les membres~ partis du même lieu pour une même
destination, sont certes définis par le voyage qui les réunit, mais
aussi susceptibles de profiter de leurs irréductibles différences.
Ignorant le culturalisme révolutionnaire de Chinua Achebe, les
critiques ne voulaient voir dans ces pensées africaines que
nostalgie, naturalisme naïf, folklore, particularismes ethniques,
holisme romantique, mysticisme suspect, pensée magique,
collectivisme tribal, conformisme social, gérontocratie et
traditionalisme. Pourtant, à l'aube d'un nouveau millénaire, le
concept de totalité, débarrassé de cet héritage, pourrait se poser
en alternative d'une globalisation libérale et dérégulée.
Les pensées de la totalité, africaines, asiatiques,
amérindiennes ou européennes, originelles dans I~hulnanité,furent 10ngtel11ps récusées par l'humanisme positiviste qui
affirmait son droit de conquête à l'encontre de la nature et le
présentait COl11mela seule attitude qui puisse vaincre le
fatalisme, dominer le monde et mener au développel11ent. Les
fermiers du passé qui sacrifiaient à la terre-111ère avaient
pourtant fait de l'Afrique un continent exportateur de céréales et
la communauté des talibe du sage malien Tierno Bokar, au
début du Xxo, animée par une pensée qui respectait toutes les
formes du vivant, animaux et végétaux compris, n'en fut pas
moins économiquel11ent prospère. L'argument était en réalité
purement idéologique: le dilemme ainsi posé à l'Afrique,
encore accepté par Sheik Ahmidou Kane dans son roman
philosophique, Aventure ambiguë, mais rejeté par Mudimbe
dans ses essais, était de ressembler à l'Occident ou de périr. Les
dernières décades du Xxo siècle se chargèrent de donner raison
au second de ces penseurs. Les accusations portées en 1968 par
les luttes contre le capitalisme et l'agression US au Viet Nam,
puis, un peu plus tard et sur un autre registre, par les
écologistes, montrèrent le caractère destructeur de la rationalité
occidentale. En 1989, à l'Est, les mythes d'un humanisl11e
conquérant, plus bureaucratique que socialiste, déjà mis à mal
par les dissidents inspirés par les pensées russes de la total ité,
s'écroulaient avec le mur de Berlin. Au même moment, COl11me
s'ils répondaient aux vagues démocratiques qui venaient de
balayer les fascisl11es sud-al11éricains, les peuples africains
ébranlaient nombre de dictatures, marxisantes ou
prooccidentales, souvent justifiées par un particularisme fondé sur
un holisme caricatural.
Mais au moment où la littérature africaine, expression
d'une pensée de la totalité irréductible à de semblables
simplifications, semblait pouvoir nous livrer une vision et un
langage libérateurs, sous l'effet d'une terrible crise économique,
elle vacilla et nous proposa, au contraire, une vision hallucinée
et désespérée d'un l110nde crépusculaire, fou, déstructuré,
malade, en guerre. Les héros du passé qui s'étaient levés pour
retrouver, à l'issue d'un voyage orphique de redécouverte de
leurs racines, les grandes traditions religieuses et sociales de
l'Afrique, cèdent la place aux picaros roués des villes
6tentaculaires qui n'ont d'autre ambition que de survivre au jour
le jour. Violent, cynique, amoral, ce nouveau courant constitue
ce que nous nommons, à l'aide d'un néologisme fidèle à son
esprit, une littérature « voyoue ». Pourtant, avant de renoncer à
donner aux hommes saisis dans le processus actuel de
globalisation un concept (la totalité) et une littérature qui
suscitent leur combat, nous voudrions revisiter les traditions
thérapeutiques africaines qui, depuis Inaintenant cinq siècles
d'oppression et de crises, ont fait de la parole des écrivains du
continent une parole réparatrice et libératrice.
1°) LITTERATURE ET DEPOSSESSION:
Mai 2000: la couverture d'un magazine éconolnique
montre en premier plan un combattant sur un fond de carte qui
dessine le continent africain. Le titre: The Hopeless Continent.
« Hopeless» signifie soit sans espoir, soit incapable. D'autres
images semblables ont fait la une de nos organes
d'information: guerriers affublés de perruques, vêtus de robes
de mariées, ongles peints, lunettes de soudeur, talismans autour
des bras, colliers de dents, scarifications qui les protègent des
balles, armes automatiques qui ont robotisé leur corps, pauses
de gladiateurs somnambules sous l'emprise de l'alcool et des
drogues, extase délnesurée qui confond crime et sexualité, ogres
terrifiants, émissaires de I'horreur absolue... Et la longue litanie
de leurs crimes: amputations, viols, tortures, massacres de
civils... Symboles de fraternité, d'adresse artistique et
d'intellectualité, mains et têtes tranchées remettent en cause les
fondements culturels de l'humanité auxquels l'Afrique a
pourtant tellement contribué. L'énergie qui émane de ces
hommes dépasse de loin celle qui est nécessaire à la
préservation de la vie, même en temps de guerre: elle est égale
à l'horreur qui les a ébranlés et dont ils se libèrent aux dépens
de leurs victimes.
L'Occident aurait tort de n'y voir que la
désynchronisation d'un continent par rapport à la globalisation.
Méfions-nous d'un logos instrumentalisé par la valeur
d'échange et corrompu par le mythe kantien de la culpabilité de
7ceux qui, soit disant par paresse et relâcheInent, n'accèdent pas
à notre modernité.1 Le cauchemar du retour à la nature sauvage
et le salut qu'apporterait la rationalité technologique ne relèvent
que des I11ythes anglo-saxons de l

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents