Paul Valéry - André Gide
204 pages
Français

Paul Valéry - André Gide , livre ebook

204 pages
Français

Description

Le parti-pris de ce volume des " Etudes valéryennes" consacré à Paul Valery et André Gide est de replacer leurs relations sous le signe des "correspondances", au sens de convergences d'idées, sans qu'il soit néanmoins question de négliger leurs divergences. "Correspondance" enfin, car celles qu'ils échangèrent pendant plus d'un demi-siècle est loin d'être la partie la moins essentielle de leur œuvre. En se penchant sur les origines et les formes multiples de leur pensée, de leur engagement et de leurs réalisations, ce numéro tente de cerner ce qu'il reste des deux grandes figures de la modernité que furent Paul Valery et André Gide à l'heure de la post-modernité.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 novembre 2003
Nombre de lectures 36
EAN13 9782296343023
Langue Français
Poids de l'ouvrage 5 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0700€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

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Paul Valéry - André Gide:
CorrespondancesI
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I Textes recueillis et présentés par
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I 31e année - Novembre 2003
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L'Harmattan
Centre d'étude du XXème siècle - études valéryennes
Université Paul-Valéry, Montpellier III@ L'Harmattan 2003
5-7, rue de l'École-Polytechnique
75005 Paris - France
L'Harmattan, Italia s.r.l.
Via Bava 37
10124 Torino
L'Harmattan Hongrie
Hargita u. 3
1026 Budapest
ISBN: 2-7475-5541-0Préface
De l'intelligence et de la sensibilité:
Paul Valéry et André Gide
Frédéric CANOY AS
Arizona State University
Pour les lecteurs de Valéry et de Gide, le Journal littéraire de
Paul Léautaud constitue un document des plus précieux. Lié à
Valéry par des liens d'amitié étroits remontant du temps de leur
jeunesse lorsqu'ils passaient leurs soirées, l'été, à parcourir les rues
de la capitale perchés au sommet d'omnibus à impériale, recevant
fréquemment Gide - un ancien du Mercure de France passé à la
Nouvelle Revue française où Léautaud a publié en volume ses
chroniques dramatiques - dans son bureau du 26 de la rue de
Condé, l'auteur du Petit Ami a tracé à coup de petites touches et au
fil des ans un portrait minutieux et vraisemblable des écrivains
auxquels nous avons le plaisir et l'honneur de consacrer ce numéro
spécial du Bulletin des études valéryennes.1
Si Léautaud a beaucoup parlé de Valéry et de Gide dans les
pages de son journal, rares sont les récits où les deux amis
apparaissent ensemble. Il semble que Valéry et Gide se soient peu
croisés dans les bureaux du Mercure. Rares sont également, sous laFrédéric CANOY AS4
plume de Léautaud, les comparaisons entre les deux écrivains,
leurs deux noms figurant toujours séparément au hasard de leurs
visites au Mercure, des lectures de Léautaud ou encore de
l'actualité littéraire voire des rumeurs dont le chroniqueur se fait
l'écho, si bien que le Journal littéraire, document utile en ce qu'il
nous permet d'observer les mouvements de Gide et de Valéry, ne
nous dit rien des rapports entre les deux hommes ni de cette amitié
qui devait les unir jusqu'à la mort.
Une page du journal de 1932, cependant, livre l'anecdote
suivante: la lecture du livre de Léon Pierre-Quinf consacré à Gide
rappelle à Léautaud «ce que m'a raconté Valéry à l'époque du
Petit Ame [,] que ce livre avait extrêmement déplu à Gide et qu'il
[Valéry] l'avait amené peu à peu, en lui en parlant à plusieurs
reprises, à en penser moins de mal ».4 Cette anecdote nous
intéresse pour au moins trois raisons. Avant tout, il faut bien
reconnaître sa surprise à la lecture de cet épisode car on pourrait
s'attendre à y voir une situation à l'inverse de celle qui est ici
relatée: connaissant les goûts et la personnalité de Valéry et de
Gide, on s'attendrait en effet à ce que Valéry rejetât le style et le
sujet du Petit Ami et, au contraire, que Gide les louât. D'autre part,
cette anecdote nous permet de voir une facette souvent ignorée de
la personnalité de Valéry souvent taxé d'intransigeance lorsqu'il
s'agit de peser l'intelligence et de juger les travaux littéraires
d'autrui. Que Valéry ait pris la défense du Petit Ami contre les
critiques de Gide démontre au contraire combien celui-ci était
moins inflexible dans ses avis qu'on a l'habitude de le dire et
surtout plus sensible, plus susceptible d'émotion. Car loin d'être
un texte d'une importance capitale, tant de par son style que de
par ses idées, c'est avant tout pour son charme - un peu suranné
de nos jours - et sa légèreté que vaut Le Petit Ami, et nous ne
pouvons qu'exprimer notre étonnement en apprenant les réserves
émises par Gide.s Enfin, l'anecdote ci-dessus nous montre un
Valéry indulgent vis-à-vis des œuvres de ses amis et fidèle en
amitié: quoi qu'il pensât du Petit Ami, Valéry se devait de voler au
secours de son vieil ami Léautaud du moment que celui-là faisait
l'objet de critiques en son absence. Nul doute que, dans les salonsDE L/INTELLIGENCE ET DE LA SENSIBILITÉ 5
qu'il fréquentait, Valéry prit plus d'une fois en son absence la
défense de Gide, qui en avait par ailleurs bien besoin, et ce, au nom
de l'amitié.
Cette générosité de l'âme que nous venons d'évoquer à propos
de Valéry, cette fidélité dans l'amitié et les devoirs qui en
incombent ne se retrouvent pas - c'est le moins que l'on puisse dire
- chez Léautaud. Ni la générosité - plus souvent tournée vers les
exclus et le monde des animaux que vers celui des écrivains et de
la société -, ni l'amitié ne constitue pour lui des obstacles lorsqu'il
s'agit d'évaluer, de juger voire même de condamner une œuvre ou
son auteur. Les louanges de Léautaud à l'égard des écrivains et des
livres de son temps en sont d'autant plus précieuses qu'elles sont
rares et sincères. Léautaud n'a jamais eu peur d'éreinter un ami ni
de massacrer un collègue.6 Et il ne s'en est jamais privé, tant dans
ses chroniques théâtrales que dans les pages de son journal. S'il est
tout prêt à reconnaître à Valéry un talent «indiscutable », il
n'hésite pas à émettre des doutes sur son œuvre et à remettre en
cause son admiration inconditionnelle pour Mallarmé, influence
que pour sa part Léautaud a définitivement rejetée après l'avoir
subie lui-même dans sa jeunesse. De même, s'il trouve en Valéry
un homme « délicieux », Léautaud ne manque jamais cependant
d'ironiser sur le caractère mondain de la personnalité de Valéry et
surtout sur son côté rusé en affaires lorsqu'il s'agit de négocier
avec les éditeurs. Certes, le traitement injuste de Léautaud par
Vallette, dont l'employé du Mercure de France se plaint sans cesse
dans son journal, et l'incapacité de Léautaud, fidèle à tout prix à la
maison où il fait ses débuts et où il a publié la plupart de ses textes,
à négocier un sort plus enviable nous permet d'interpréter la
critique adressée à Valéry comme une réaction teintée de jalousie
vis-à-vis de ce dernier.
Il n'en demeure pas moins qu'en dépit des réserves et des
critiques qu'il peut bien avoir envers son ami, Léautaud est tout à
fait conscient du caractère unique de œuvre de Valéry et de lal'
position enviable de celui-ci dans les Lettres. Sans doute l'une et
l'autre lui rappellent-elles le rôle qu'ont joué, dans le monde des
idées en France et dans sa vie personnelle, quelques années plusFrédéric CANOY AS6
tôt, des figures telles que Marcel Schwob et Remy de Gourmont,
dont Léautaud fut très proche tant sur le plan des rapports
humains que du point de vue des idées. Or c'est bien à Gourmont
que Léautaud pense immédiatement en songeant à écrire un
hommage à Valéry :
Je pensais ce soir, après son départ [il s'agit de Valéry], en faisant mes
commissions. Je devrais écrire sur lui ce long article auquel je pense
depuis deux ou trois ans, analogue à mes Notes et souvenirs sur
Gourmont, un article complet, depuis le début de nos relations, dans
lequel je dirais les choses franchement [...] Personne ne pourrait écrire
un article de ce genre. Il ne me donnerait pas beaucoup de peine et
bien tort de ne pas le faire. Le publierm'amuserait à écrire. J'ai
maintenant, et surtout après sa charmante intervention dans l'affaire
Bibliothèque Doucef, ce n'est pas possible. J'entends les côtés: argent,
liaison, vanité, fréquentation de gens dont il disait pis que pendre
autrefois.8
Si le nom de Gourmont vient aussitôt à l'esprit de Léautaud
lorsqu'il pense à Valéry, c'est qu'il reconnaît chez ce dernier le
même effort pour, selon le mot de Gide, « nous 

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