Réalités et roman guinéen de 1953 à 2003 T3
141 pages
Français

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Réalités et roman guinéen de 1953 à 2003 T3 , livre ebook

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141 pages
Français

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Description

Si la ville guinéenne a beaucoup d'attrait sur les populations rurales, elle s'affirme aussi comme le lieu des illusions perdues. Cadre administratif aussi bien que politique, la ville engendre la misère, les souffrances, les arrestations arbitraires, l'emprisonnement, la prostitution. La ville apparaît vraiment comme le symbole de l'échec patent du régime politique installé au pouvoir à la faveur de l'indépendance du pays. C'est l'objet de ce troisième volume.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 02 octobre 2009
Nombre de lectures 152
EAN13 9782296682993
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Réalités et roman guinéen de 1953 à 2003
© L’Harmattan, 2009
5-7, rue de l’Ecole polytechnique, 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-09842-8
EAN : 9782296098428

Fabrication numérique : Socprest, 2012
Ouvrage numérisé avec le soutien du Centre National du Livre
Boubacar Diallo


Réalités et roman guinéen de 1953 à 2003


3. La peinture de l’univers urbain


L’Harmattan
Dédicace
Pour Clemenceau, mon Beau-fils, Fifi, ma fille,
Tommy et Teddy, mes petits-enfants,
en toute affection
Introduction
Un nombre important de romans guinéens exploite aussi bien les cadres des villes guinéennes, africaines que ceux d’ailleurs. Les écrivains manifestent là leur volonté de faire connaître aussi bien les cadres urbains du pays d’origine que ceux de l’exil en Afrique ou à l’étranger à travers toutes leurs réalités physiques et humaines. Déjà, Biram Sacko campait l’action de son roman Dalanda publié en 19 dans l’univers impitoyable de la ville de Dakar pour la parachever ensuite à Conakry. Mais, par rapport à la métropole sénégalaise, cet écrivain n’a fait qu’une description squelettique de la capitale guinéenne. Il faut véritablement attendre la parution en 1972 du roman d’Alioum Fantouré, Le Cercle des Tropiques, pour avoir dans le roman une vision panoramique de l’univers urbain guinéen. Si donc certains auteurs se bornent à représenter dans leurs textes la Guinée rurale comme le cadre de leur paradis d’enfance, d’autres, de loin les plus nombreux s’intéressent aussi bien au paysage rural qu’au décor urbain. C’est qu’à partir de 1966 « l’illusion lyrique » du combat pour l’indépendance a cédé la place, chez les écrivains guinéens notamment ceux de la diaspora, à la désillusion. Ces auteurs se mettent alors à exploiter dans leurs œuvres les cadres des grandes villes avec la volonté manifeste de dénoncer les tares du pays de plus en plus corrompu par l’assaut de la modernité. À travers les itinéraires des héros, le lecteur peut ainsi appréhender des articulations chronologiques comprenant l’entre-deux-guerres, les revendications nationales de l’après-guerre et les indépendances, qui dénotent une continuité dans la dégradation de la société dans les grandes cités. La ville africaine crée par le colonisateur devient alors avec les indépendances un cadre privilégié, surtout qu’elle est le siège du pouvoir, d’un pouvoir africain dont les romanciers entendent nous montrer – avec quelle passion – qu’il n’était plus idyllique, et qu’il représentait l’oppression d’une classe privilégiée sur la masse de la population.
Dans les villes modernes, la brutalité, la violence, l’opportunisme, l’arbitraire sont les maîtres maux dont les forces de l’ordre se font désormais l’écho. Elles illustrent bien un système qui est né, lui-même, de la violence et de l’intolérance. Ainsi va l’univers urbain tel qu’il est dépeint dans les œuvres des romanciers guinéens. On n’y décèle aucune description minutieuse de monuments, de feux, de buildings novateurs, d’avenues, rien qui soit la marque de progrès technologiques. La nouvelle société guinéenne est un véritable enfer dans lequel le citoyen est quotidiennement aux prises avec des conditions d’une survie problématique. La traduction dans les romans de cette situation tragi-comique de la Guinée ou d’ailleurs est la symbolisation de l’ensemble de l’imaginaire romanesque à travers des structures imaginaires significatives allant de la théâtralisation à des images de la rupture et du chaos.
La mise en exergue de la spécificité du monde urbain dans l’étude des villes modernes de la Guinée, d’Afrique ou d’ailleurs telles qu’elles apparaissent dans les romans, paraît s’exercer au niveau du paysage, des collectivités et des individus ainsi qu’au travers des structures imaginaires.
Il s’agit d’examiner les thèmes ou les milieux de prédilection des romanciers inspirés par les villes guinéennes ou celles d’ailleurs, dénonçant les tares des grandes cités de plus en plus corrompues par l’assaut de la modernité. Cette physionomie des villes guinéennes reste toujours actuelle. Puisque les transformations sociales dont la ville est le creuset réagissent négativement sur les individus, il convient de dégager l’impact de la vie urbaine sur la subjectivité des personnages, notamment des héros en suivant la variation du jugement porté sur cette société au rythme des grands courants historiques mentionnés précédemment. Aussi faut-il montrer comment, à travers la société urbaine, de plaidoyer pour l’assimilation avant la Deuxième Guerre mondiale, elle devient critique de la colonisation pendant la période de lutte pour l’émancipation nationale, pour s’orienter après 1966, vers la satire de la société postérieure à l’indépendance. Il faut aussi s’interroger sur l’aventure urbaine du héros qui connaît, au mieux, un aboutissement terne, au pire une issue fatale. La fréquence des dénouements sombres ne paraît pas devoir être expliquée entièrement par le désir de peindre fidèlement la réalité sociale, car, l’attrait des villes sur les masses rurales, un aspect important de cette réalité n’est pas, en général, fidèlement étudié par les romanciers. En fait, s’ils conçoivent la ville comme un piège, ils ne négligent d’en décrire l’appât. Enfin la volonté moralisante de mettre en garde le lecteur contre les dangereuses séductions de la ville s’explique par des symboliques imaginaires associant tour à tour des éléments naturels ou des animaux bienfaisants ou malfaisants aux malheurs collectifs ou individuels.
CHAPITRE I : La peinture de l’univers urbain
Il n’est pas inutile de rappeler que la ville moderne, la mégalopolis africaine qui s’est développée depuis les indépendances africaines de façon démentielle, résulte du fait colonial. Elles s’affichent désormais comme « (…) des excroissances monstrueuses à travers la géographie physique et humaine ». Les textes écrits avant ou après les indépendances, qui ont la ville pour thème central, sont nombreux. De Ville Cruelle d’Eza Boto à Amours de villes , villes africaines, recueil de nouvelles réunies à l’instigation de Fest’Africa, de Lemona du Nigérian Ken Saro-Wiwa à Temps de chien du Camerounais Patrice Nganang, la représentation fictionnelle de la ville se conjugue avec des maux qui brisent les symboles communément attachés à ce lieu. Elle est le lieu de la précarité matérielle et de la ségrégation sociale. En outre, la ville incarne les gens qui l’habitent. Elle les forme, mais elle est aussi à leur image. Il s’établit alors une interaction entre elle et ses habitants sous forme d’un jeu de miroirs. La ville guinéenne apparaît dans le roman sur un double plan. Quand on en rêve à partir de la campagne, c’est la ville belle et séduisante, le site du bonheur et de la réussite. Lorsqu’on y arrive, c’est la ville de toutes les désillusions, une véritable jungle où le chômage endémique, la misère, l’individualisme, les vices et la violence sont susceptibles soit de dépersonnaliser ou de dégrader inexorablement l’individu, soit tout simplement de l’anéantir. Le rapport entre la ville fictive et les villes réelles ayant déjà été dégagé dans l’étude spatio-temporelle, il sera question, ici, de brosser, tels que présentés dans les romans, les grands traits de l’univers urbain. La ville est d’abord le lieu où se côtoient des personnages aux origines et aux dialectes différents.

La réalité linguistique de la ville
De même que les romanciers guinéens qui s’inspirent du cadre traditionnel le témoignent sur le plan linguistique par l’introduction des langues nationales dans leur récit, de même d’autres, parmi ceux qui tirent leur matière de la vie des grandes cités guinéennes ou africaines, ne se privent pas d’introduire dans leurs textes des mots et expressions du français "petit nègre" et du français populaire ivoirien et de l’anglais. Si l’usage du français "petit nègre" est une réalité lingui

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