René Depestre
274 pages
Français

René Depestre , livre ebook

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274 pages
Français

Description

La mondialisation a forcé René Depestre à vivre dans une perspective d'élargissement et à forger des outils efficaces de résistance. Son caractère libre, solitaire et optimiste a su lui construire une solution originale, un habitat sans race, nationalité, frontières, blanc, étranger, noir et autres mythes qui avilissent la prodigieuse pluralité de notre univers. Depestre, à travers son œuvre et ses choix de vie, se propose de contribuer à la naissance d'une identité-monde, afin de pouvoir intégrer avec civisme et amour la terre-patrie.

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Informations

Publié par
Date de parution 01 février 2016
Nombre de lectures 5
EAN13 9782140000720
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

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Extrait

Sous la direction de FrantzAntoine L e c o n t e
René Depestre Du chaos haïtien à la tendresse debout
Espaces EL Littéraires
René Depestre
Du chaos haïtien à la tendresse debout
Espaces Littéraires Collection fondée par Maguy Albet Dernières parutions Yulia KOVATCHEVA,Modernité esthétique chez André Malraux,2015. Hanétha VETE-CONGOLO (dir.),Léon-Gontran Damas : Une Négritude entière,2015. Naïma RACHDI,L’art de la nouvelle entre Occident et Orient, Guy de Maupassant et L’Égyptien Mahmûd Taymûr, Influence de la littérature française sur la littérature arabe moderne, 2015. Augustin COLY,Duplications et variations dans le roman francophone contemporain, 2015. Marie-Denis SHELTON,Eloge du séisme, 2015. Marie-Antoinette BISSAY et Anis NOUAIRI,Lorand Gaspar et la matière-monde,2015. Thierry Jacques LAURENT, Le roman français au croisement de l’engagement et du désengagement,2015. Moussa COULIBALY et Damien BEDE, L’écriture fragmentaire dans les productions africaines contemporaines,2015. Jean Xavier BRAGER, De l’autre côté de l’amer, Représentations littéraires, visuelles et cinématographiques de l’identité pied-noir,2015. Isabelle CONSTANT,Le Robinson antillais. De Daniel Defoe à Patrick Chamoiseau, 2015. Tiannan LIU,L’image de la Chine chez le passeur de culture François Cheng, 2015. Jakeza LE LAY, Le Parnasse breton. Un modèle de revendication identitaire en Europe, 2015.Servilien UKIZE,La pratique intertextuelle d’Alain Manbanckou. Le mythe du créateur libre, 2015. Elena BALZAMO,« Je suis un vrai diable ». Dix essais sur Strindberg, 2014. Fatima AHNOUCH,Littérature francophone du Maghreb. Imaginaire et représentations socioculturelles, 2014. e Céline BRICAIRE,Une histoire thématique de la littérature russe du XX siècle. Cent ans de décomposition, 2014.
Sous la direction de Frantz-Antoine Leconte
René Depestre
Du chaos haïtien à la tendresse debout
© L’Harmattan, 2016 5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris http://www.harmattan.fr diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr ISBN : 978-2-343-05135-2 EAN : 9782343051352
Introduction Sur les traces de René Depestre Frantz-Antoine Leconte  Quand René Depestre m’accorde l’entretien du 28 octobre 1995 à New York, je suis pleinement conscient du rang qu’il occupe dans les lettres haïtiennes, caribéennes et francophones. Depuis un certain temps déjà sa notoriété est marquée par des réussites en poésie, dans le roman et la nouvelle, ainsi que dans l’essai. Des thèses ont été consacrées à ses écrits. D’importants prix littéraires les ont 1 récompensés . Notre rencontre new-yorkaise me met enfin de plain-pied avec le parcours d’un « animal marin » qui a été ballotté sans ménagements d’une rive à l’autre de la guerre froide.  Je me suis particulièrement intéressé aux liens de sang du poète avec Jacmel, sa ville natale. Le port du sud-ouest haïtien lui aura permis de relier la géographie métissée de ses travaux et de ses jours à unailleurs planétaire : Paris, Prague, Milan, Rio de Janeiro, São Paulo, Santiago de Chili, La Havane – Paris de nouveau et toujours très enrichissant – avant l’enracinement du vieil âge d’homme dans les vignobles de Lézignan-Corbières.  D’autres repères géoculturels auront compté sur son « métier à métisser » les expériences de l’existence aux quatre coins du globe : Buenos Aires, Vienne, Kingston, Mexico, Dakar, Moscou, Pékin, Hanoï, Kyoto. Dès l’enfance et l’adolescence, la négritude et la créolité oniriques des Haïtiens l’auront préparé à vivre intensément l’inverse des mythes de l’identité « qui ont profané, appauvri et déshonoré le divers et unique registre existentiel de l’espèce sur la planète ». L’identité-banianpropre à son tempérament lui a octroyé « le privilège d’appartenir à plusieurs mondes en une seule vie ». Il est fascinant de comprendre que le lieu jacmélien de naissance et de formation, une fois intégré à l’ordre esthétique de René Depestre, l’a immunisé à jamais contre les saisons de nostalgie et de deuil : le fameux dolorisme qu’on rattache d’habitude à la condition de l’exilé.  « Le seul moyen, m’a-t-il confié, qu’on m’ait laissé pour servir et aimer ma terre d’origine, ce fut, dès 1946, de la quitter vers les ailleurs d’Haïti. L’errance de toute la vie m’a promu Français à Paris, Tchèque à Prague, Brésilien à Rio et à São Paulo, Italien à Milan, Cubain à La
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Havane, sans cesser un instant d’être l’Haïtien émerveillé à tous les autres carrefours nourriciers de la tendresse et de la liberté. J’ai assumé et j’ai rejeté successivement lesmoi,je, vécu à tour de rôle dans le catholicisme, l’indigénisme, la négritude, le surréalisme, sans parler du ‘socialisme réel’ qui a failli truquer sans merci mon itinéraire d’électron libre. »  Le Depestre que je rencontre en 1995 est loin de la date charnière de la « révolution de 1946 », du temps de l’immédiat après-guerre où sa génération (celle des Jacques Stephen Alexis, Gérald Bloncourt, Théo Baker, Roger Gaillard, Joachim-Francis Roy, Albert Mangonès, Marie Vieux-Chauvet) échoue ‒ malgré la juvénile force de contestation de l’hebdoLa Ruche– à entraîner le tiers d’île dans une dynamique de refondation du déjà célèbre « surplace existentiel » qui aura fait d’Haïti un « hapax politique et constitutionnel dans l’histoire de la décolonisation ».  Un an auparavant, au début de 1945, à dix-neuf ans, Depestre a l’audace de se présenter à l’Imprimerie de l’État (organisme gouvernemental qui n’a rien d’une maison d’édition) pour oser, avec un toupet du tonnerre, décider son directeur Daniel Bayard à éditer le manuscrit deÉtincelles, ses premiers poèmes. Les petits textes lyriques du débutant élèvent l’espérance des Haïtiens à des hauteurs de femmes et d’hommes libres : en effet, ils exaltent la justice à mettre partout debout, aux Caraïbes et dans les Afriques noires, en harmonie avec la civilité, la tendresse du vivre-ensemble sous le soleil, l’éparse beauté de la condition humaine qu’il conviendrait de rassembler pour sauver le monde. Le coup de dés initial projette d’emblée un précaire destin individuel dans le contexte général de résistance des cultures et des peuples aux assauts des empires coloniaux.  L’homme jovial avec qui je m’entretiens en 95 a, depuis des années, tourné le dos aux utopies contestataires de sa jeunesse. Sans s’avouer pour autant vaincu, il est sereinement conscient de l’ampleur de ses naufrages à Port-au-Prince, Prague, Moscou, Pékin et à La Havane des frères Castro. Il est dès lors en quête de l’aventure métisse, panhumainement civique, qui l’aiderait à recycler les jalons de son équipée d’écrivain et de citoyen de la terre-patrie. En 2011, soit quinze ans plus tard, le voici qui associe volontiers ses nouvelles formes d’esprit et de sensibilité à la mondialité qui est appelée, à ses yeux, à servir de garde-fou universel pour éviter la tragédie sans rivages que serait une mondialisation seulement économique et numérique, à la merci des prédateurs des marchés financiers.
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 Comment appréhender l’œuvre plurielle et pétillante de René Depestre eu égard à des problématiques aussi diverses et composites que le colonialisme, l’épidermisation des luttes sociales, la carnavalisation des aventures historiques, la négritude, le réalisme merveilleux, l’onirisme surréaliste, le marxisme, l’érotisme solaire ? Y a-t-il une thématique plus récurrente que les autres ? S’agit-il plutôt d’un constant renouvellement, une progression permanente, un incessant besoin de recyclage pour déjouer les pièges et les embuscades des idéologies de l’époque ? La plupart de ces questions ont trouvé des réponses satisfaisantes dans notre entretien de 1995 « Depestre par lui-même ». Il y a lieu toutefois de faire avancer bien plus loin l’exploration grâce aux travaux des chercheurs qui ont analysé les succès, les échecs, les doutes, les débats que le parcours de l’auteur dePoète à Cubaa suscités.  Faut-il situer Depestre comme un poète des ruptures ? Sa poésie constitue-t-elle une réponse à la liberté existentielle et ontologique ? Qu’est-ce qu’une esthétique de la liberté ? Peut-on parler d’un surréalisme à la Depestre ? Son « moi », « je », poétique est-il dilué dans l’universel ? Autant d’interrogations de fond qui passionnent Robenson Bernard dans son étude, « Depestre en état de poésie ».  Comment concilier « l’animal marin » politique, l’écrivain au renom international, le chantre créole de la négritude et de la francophonie ? Comment éclairer l’analyse psycho-dynamique de l’imaginaire qu’on relève dansLe mât de cocagne et la trajectoire d’Henri Postel ? Le narrateur fait-il preuve d’une conception contagieuse et didactique de la liberté ? Le destin d’Hadriana est-il une métaphore érotique de la condition créole et franco-haïtienne en général ? Étienne Télémaque édifie le lecteur dans son texte « Depestre, écrivain de toujours ».  La négritude de Depestre met-elle surtout l’accent sur la capacité esthétique du peuple haïtien et des autres peuples noirs à refonder l’identité historique anéantie par les persécutions de la traite atlantique ? Y a-t-il substitution du contexte racial au contexte colonial ? Quelle est son interprétation originale quant à la crise identitaire due à la condition nègre imposée par le système plantationnaire ? En quoi consiste la critique de l’anthropologie coloniale ? Bernadette Carré Crosley en parle avec pertinence dans « Depestre : une épreuve idéologique ». Les premiers dissidents de la négritude Frantz Fanon, Jean-Marie Ndengue, Marcien Towa, Stanisla Adotevi, ont vu dans le mouvement
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