Roogo
207 pages
Français
207 pages
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Description

Naaba Gandaogo de Roogo : un roi et son royaume se retrouvent happés dans les servitudes et les grandeurs du temps qui passe ! Telle est la trame de Roogo. Un mélange relevé d'onirisme et de rêve, mais aussi de réalité prenant appui sur l'histoire et la légende entremêlées.. Mais au-delà des visées expansionnistes, des résistances et des vaines possessions, Roogo est un subtil et élégant plaidoyer sur et pour la diversité culturelle.

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Informations

Publié par
Date de parution 01 septembre 2004
Nombre de lectures 175
EAN13 9782296369559
Langue Français
Poids de l'ouvrage 4 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0750€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

ROOGO
L'histoire est entièrement vraie, puisque je l'ai
imaginée d'un bout à l'autre.
Boris VIANDu même auteur
« Cinéma et télévision: Quelles perspectives pour
l'Afrique », in L'Afrique et le centenaire du cinéma
(collectif), Éditions Présence africaine, Paris, 1995.
Prolégomènespour l'action au sein du ministère de la
Communication et de la culture, Éditions Sidwaya,
Ouagadougou, 1996.
« Demain Mrique : Cauchemar ou espoir» inl'
Carrefour de la pensée, (collectif), Le Mans, France,
Éditions complexe, 1998.
Culture et développement en Afrique, LHarmattan,
2000.
Les enjeux politiques et économiques des NTIC :
Le cas de l'Afrique, L'Harmattan, Paris, 2001.Mahamoudou Ouédraogo
ROOGO
Roman
eHarmattan@
L'Harmanan, 2004
5-7, rue de l'École-Polyrechnique
75005 Paris
FranceL'Harmanan, Iralia s.r.l.
Via Degli Arrisri, 15
10124 Torino
L'Harmanan Hongrie
Hargira u. 3
1026 Budapesr
ISBN: 2-7475-6924-1
EAN 9782747569248PREMIÈRE PARTIE
Le réelChapitre premier
Gagamba
Depuis un long moment, la caravane déchirait la
savane et y serpentait. C'était non sans une certaine
grâce et surtout une assurance réelle. Cette caravane
s'apparentait à un corps vivant. Et elle s'étirait de
manière imperturbable sur une longue distance. La
colonne mouvante, quasi silencieuse, évitait au
maximum les chemins connus, qu'empruntaient
ordinairement les marchands de cola qui faisaient
régulièrement le déplacement à Salga. L'allure
d'ensemble de la colonne était harmonieuse, mais
variait en fonction des lieux traversés. Le convoi,
tantôt, se frayait le passage en ralentissant au
maximum le pas, tantôt évoluait pratiquement au pas de
course. Ce serpent humain ressemblait à un ver de
terre. Mais les cavaliers et les fantassins qui étaient
placés soit en avant, soit en retrait, ou de manière
latérale par rapport à la masse de l'ensemble des
guerriers, donnaient de ce «ver humain »,
l'impression qu'il avait des pattes et des poils. Un certain
sentiment, malaisé à définir, se dégageait de ce
mouvement d'ensemble. C'était une forme d'élégance
mêlée de tristesse. Ce corps, à l'unité perceptible,
paraissait parcouru par un ondoiement diffus et noble,
ruisselant à travers la nature.
En tête du convoi se positionnaient les guerriers
d'un certain âge, les yeux cernés et le regard
farouchement marqué par les sillons de l'expérienceROOGO
que confèrent la pratique du terrain et une sagacité
sculptée par les échecs mais aussi les succès. Certains
combattants tenaient des lances bien aiguisées, dont les
bouts brillaient sous le reflet des rayons du soleil. Cette
scène saisissante ressemblait à une procession où et
troupe et soleil et savane étaient complices.
Certains guerriers, plus jeunes, armés de leurs flèches
empoisonnées, scrutaient presque toutes les directions à
la fois, afin de ne pas se laisser surprendre par un
quelconque danger. Tout le monde était sur le qui-vive, et
l'ensemble de ce corps s'accordait sans fausse note ni
désordre. Le mouvement était bien étudié, et la
hiérarchisation, ainsi que la discipline régnaient de toute
évidence, à en juger par la progression à la fois minutieuse
et ordonnée de la troupe. Ceux des combattants
disposés en position frontale, tout comme les guerriers
placés de manière latérale, se rejoignaient de temps en
temps en un mouvement que l'on eût dit synchronisé.
La mesure se jouait dans les regards. À la tête, tout
comme à la queue du convoi, on observait les mêmes
actes tactIques.
Les caravaniers, du haut de leur monture,
regardaient dans toutes les directions. Par le jeu du partage
des rôles, aucun espace des zones parcourues
n'échappait au quadrillage qui se faisait au fur et à mesure que
cette armée avançait. Ainsi, on pouvait noter, détachés
aussi bien de la tête du convoi des cavaliers que de sa
queue, des soldats armés de - zanfo - les massues du
pays des Dossés, et de carquois, mener un curieux
manège. Tantôt ils accéléraient la course et revenaient
peu après à proximité de la troupe, tantôt ils entraient
en profondeur dans les hautes herbes bordant la route,
10LE RÉEL
revenant ensuite furtivement à l'arrière de la troupe
couvrir sa marche. Ils accomplissaient ainsi un
remarquable travail d'éclaireurs et de guetteurs. Au moindre
signe ou bruit insolites, ces hommes se chargeaient
d'avertir en extrême urgence la caravane; puis, au
besoin, ils constituaient le premier cercle de bouclier
humain et ils se sacrifiaient ainsi pour que les autres
frères d'arme puissent organiser la défense.
Au milieu de cette troupe sur la défensive,
chevauchant une monture quelconque, pareille aux
autres montures, se tenait Baba Gandaogo, le roi des
Dossés.
Son cheval évoluait au même rythme que les autres
chevaux. Pas de signes ostentatoires particuliers qui
pouvaient trahir son rang de chef incontesté et suprême
du Doogo, son royaume. Ainsi, même le
harnachement, d'habitude doré et tissé avec soin, avait été ôté de
la monture royale, pour des raisons stratégiques de
camouflage visant la protection du roi.
Baba Gandaogo était un bel homme. D'un
physique massi£ fortement impressionnant, le roi avait
le teint noir et mat, les yeux légèrement colorés d'un
rouge viE Il se dégageait de son être un charisme à la
fois gracieux et violent, le tout comme entremêlé d'un
halo de mystère et d'une sorte de tranquillité intérieure.
Avec la troupe et sans échange intempestif de parole, il
était en harmonie totale et en grande communion. Il
était difficile de pénétrer sa pensée, encore moins de
décrypter les messages que, de toute évidence, il
partageait avec la troupe qui avançait toujours plus en
profondeur dans la savane.
IlROOGO
Les montures étaient comme dopées par le but
du voyage, et les cavaliers et les fantassins en étaient
galvanisés. Et tout cela semblait se renforcer, se
mettre en relief au fur et à mesure que le convoi
avançait. Le pas cadencé de la monture du Roogo
Naaba le soumettait à un mouvement à la fois
régulier et précis. Tout son corps balançait et sa tête
qui, au lieu du traditionnel bonnet royal, était
recouverte, tout comme les têtes de beaucoup
d'autres cavaliers, d'un simple couvre-chef de
combat, faisait un hochement qui semblait être une
forme d'acquiescement. Tout autour de lui, les
autres combattants évoluaient de la même manière.
Le plus naturellement du monde, sans en avoir
particulièrement l'air, ils constituaient une protection
rapprochée rendant le roi inaccessible. Voir son roi
pris en otage était l'une des pires ignominies que
pourrait vivre le Roogo. Aussi, Baba Gandaogo,
comme il se devait, avait pour la circonstance du
sunadré (un poison aussi violent que le cyanure),
qu'il introduirait au creux d'une de ses gencives,
pour rejoindre les ancêtres et éviter la honte selon
l'imparable philosophie du « koum saw yandé », à
savoir: plutôt la mort que l'infamie, qui régissait le
Roogo.
*
**
Une forte tête que ce Baba Gandaogo, qui avait
de par ses actions et autres coups d'éclat, fortement
12LE RÉEL
ébranlé le royaume du Roogo, aussi bien par la manière
dont il avait vécu son enfance et son adolescence, que
par celle, rocambolesque, dont il avait accédé au trône,
bousculant au passage la loi des pères. Mais c'était là, le
style de Baba Gandaogo.
Naaba Dobgo avait vu le jour par une soirée de
vendredi. Du fait que sa mère n'était pas dans les bonnes
grâces de la cour, il avait été victime d'intrigues de
palais, au point que, tout prince héritier qu'il avait été,
il avait attendu qu'une autre épouse du Roogo Naaba
enfantât, pour qu'on annonçât officiellement sa
naissance à lui et seulement après l'annonce de la naissance
de celui qui, chronologiquement, était son demi
petitfrère. Ainsi, son demi-frère, par les manœuvres
politiciennes, devint son grand-frère. Aussi, l'enfance de Baba
Gandaogo s'étai

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