Engrenage
292 pages
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Engrenage , livre ebook

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Description

Dystopie - 600 pages


Il n'est plus question de vivre au cœur des Engrenages. Heaven et les siens doivent tenter leur chance à l'extérieur, dans un monde à la fois hostile et porteur d'espoir. Des ennemis auxquels ils ne s'attendaient pas les prennent pour cible, mais Heaven ne veut plus fuir. En mémoire de Gretchen, elle est bien décidée à se battre pour apporter sérénité et paix. Elle sait qu'en cas d'échec, toute l'humanité en pâtira.


Hélas, quand l’adversaire est mieux préparé, en surnombre, il est difficile de gagner sans sacrifice.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 20 mai 2020
Nombre de lectures 23
EAN13 9782379610325
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0045€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Engrenage – 3 – Un espoir dans les décombres

3 – UN ESPOIR DANS LES DÉCOMBRES

LUCIE GOUDIN
3 – UN ESPOIR DANS LES DÉCOMBRES

LUCIE GOUDIN





Mentions légales
Éditions Élixyria
http://www.editionselixyria.com
https://www.facebook.com/Editions.Elixyria/
ISBN : 978-2-37961-032-5
Réalisation de couverture : Didier de Vaujany
Photographie : Getmilitaryphotos
CHAPITRE 1


Heaven, le 13 novembre 2132.


Ce fut la nuit la plus difficile de toute ma vie.
Pourtant, par le passé, j’avais subi des maux de ventre douloureux, suscités par une faim lancinante qui me tenait éveillée. Combien il y en avait eu ? Je ne saurais le dire avec exactitude, compter ce genre de choses étant assez morbide.
À d’autres moments, je m’étais efforcée de chasser le sommeil, de manière tout à fait délibérée. Certains services au bar «  Les pupilles s’affolent  » avaient été très éprouvants, surtout quand les clients se faisaient rares. Être surprise par le patron en train de roupiller sur le comptoir aurait donné lieu à un licenciement immédiat. C’était hors de question !
Et puis, je me souvenais de mes pleurs, de mes efforts pour demeurer silencieuse quand me démangeait l’envie de hurler toute la souffrance de mon cœur et la cruauté des riches envers les pauvres. La disparition de mon père, puis l’envoi d’Ash aux Racines avaient provoqué mon chagrin et bien plus encore.
Contre toute attente, j’avais retrouvé les deux. Papa était vivant et, durant ces sept années d’absence, avait bâti un monde à l’extérieur, loin des amas de métal que j’avais toujours connus. Quant à mon frère aîné, il devait par deux fois sa liberté à la chute d’un Engrenage.
Jusqu’à présent, le bonheur nous échappait malgré tout. Tel un filet d’eau, il s’évanouissait à peine arrivé au creux de nos mains. Tant de vies avaient été fauchées ces derniers mois. Rien ne serait jamais plus pareil. Il était des cauchemars qui ne vous quittaient qu’à votre mort.
Au bout de notre chemin, la lumière cesserait-elle de vaciller, illuminerait-elle un futur à l’image de nos rêves, de nos désirs ? Je l’espérais de tout mon cœur.
En attendant, nous traversions un enfer blanc à perte de vue. La première journée de marche ne nous avait fait aucun cadeau. Trois heures après notre sortie du tunnel, les flocons s’étaient remis à tomber sur cette terre devenue silencieuse. Là où nous aurions dû mettre trois jours pour atteindre le premier refuge, le double serait nécessaire. Avancions-nous seulement dans la bonne direction ? Suivions-nous le même sentier invisible que celui emprunté par Ash et Gina ? Je l’ignorais. Les traces de leurs pas avaient été effacées.
En début d’après-midi, l’épaisse couche de neige me força à porter Angel sur mon dos. Être ralentis, ce que ses petites jambes ne manqueraient pas de faire, n’était pas envisageable. Les mouvements nourrissaient une chaleur corporelle suffisante, nous ne pouvions pas nous permettre de nous immobiliser en attendant que ma sœur se fraye un chemin.
Par chance, le vent ne soufflait plus. Avec illusion, j’espérais qu’il en serait toujours ainsi.
Quand l’obscurité tomba sur le monde, nos membres engourdis par l’atmosphère glaciale ne nous portaient presque plus. Pour autant, je soufflai de soulagement. À ce moment-là, je pensais prendre un peu de repos bienvenu. Que nenni !
À journée difficile, nuit tout aussi compliquée.
De celle-ci, je m’en souviendrais.
Nous prîmes la décision de n’allumer aucun feu, afin de préserver notre position des prédateurs qui auraient tôt fait de ne faire qu’une bouchée de nous. Grand mal nous en prit. Dans le froid mordant, nous tînmes bon une heure.
Chacun notre tour, nous essayâmes de mettre le feu à un tas de brindilles trouvées en creusant au pied des arbres. Toutes nos tentatives se soldèrent par un échec cuisant. Nous abdiquâmes et passâmes les tours d’horloge suivants à nous serrer les uns contre les autres. Nos lèvres bleuirent. Dans nos grelottements, nos dents s’entrechoquèrent et brisèrent le silence nocturne.
Nos souffles créaient de petits nuages blancs. Le froid piquait, mordait, puis anesthésiait. Glissés sous nos draps fins, nous avions tous subi des nuits à grelotter et à se rouler en boule pour échapper au froid qui se glissait dans les demeures, tels des fantômes au sein des rêves. Ce n’était rien en comparaison de ce que nous éprouvions sous ce ciel d’encre. En réalité, il était plus aisé de combattre des monstres que cet ennemi invisible, tout aussi mortel.
Je pris le premier tour de garde. Tantôt, je surveillais les alentours d’un danger portant des crocs, ou des griffes acérées, tantôt je m’assurais que nul ne passait de vie à trépas dans son sommeil.
L’angoisse grandissait de minute en minute. Jusqu’à présent, je n’avais pas réellement douté de ce voyage. Au contraire, il avait été pour moi une forme de délivrance. Désormais, je ne portais plus la même certitude. Les conditions météorologiques ne jouaient pas en notre faveur, et il était fort probable que nous ne parvenions pas à destination.
Seule, je me laissais aller au pessimisme.
Je déglutis péniblement. Tout était de ma faute. Je n’aurais jamais dû chercher cette porte aux Racines, je n’aurais pas dû nourrir l’ambition de rejoindre papa en traversant un territoire hostile, inconnu, en pareilles circonstances. Certes, l’Engrenage était en péril à cause du gel, mais des hommes avaient tout fait pour organiser l’évasion du peuple avant qu’il ne soit trop tard.
Des hommes…
Une larme s’échappa et se cristallisa avant même d’atteindre le sol.
Il m’était si difficile de songer à Kragen ! Cet homme, que j’aimais tant, était sûrement mort à l’heure qu’il était, tué d’une balle ou par l’effondrement des rouages. Comme son métier l’exigeait, son propre sort passait après celui des civils. Sa priorité était de les évacuer, quitte à donner sa vie. Même si des avions-cargos étaient encore en partance lorsque les miens et moi avions fui la catastrophe, Kragen n’avait pas pu quitter l’Engrenage à temps, pas quand il y avait autant de monde à sauver et autant d’obstacles en travers de la route. Cette fois, il y était resté.
Cette conclusion me retournait l’estomac, encombrait ma gorge de sentiments trop lourds à porter, embuait mes yeux, me comprimait le cœur dans un étau.
Kragen avait été le premier homme auquel j’avais confié mon cœur, et voilà que maintenant, il me fallait imaginer un futur sans lui. Je le répétais, pour au moins la millième fois, la vie était vraiment injuste. Arriverais-je à faire face, à aller de l’avant ? À supporter cette peine ? À l’oublier ? Rien n’était moins sûr. Tous ces moments vécus avec Kragen, qu’ils soient bons ou mauvais, je n’aurais pas souhaité les vivre avec quelqu’un d’autre.
Chaque souvenir de lui s’imposait à moi sans pitié. Malgré tous les problèmes rencontrés, nous étions toujours revenus l’un vers l’autre, jusqu’à ce qu’il y ait celui de trop. Insurmontable, il resterait mon plus gros échec, à jamais.
— Pourquoi pleures-tu ? m’interrogea Angel, d’une voix ensommeillée.
Un sursaut de surprise plus tard, je me rendis compte que deux rivières de tristesse sillonnaient mes joues. Absorbée par mes pensées moroses, je ne les avais même pas senties, pas plus que les gigotements de ma petite sœur que je tenais étroitement entre mes bras.
— Ce n’est rien, lui assurai-je. Rendors-toi.
— J’ai froid.
Je l’embrassai sur le sommet de son crâne et resserrai un peu plus mon étreinte. Mon amour pour elle raviva celui que j’avais perdu. La douleur surgit de nouveau, plus perfide, plus aiguë. J’enfouis mon nez dans ses cheveux blonds, fermai les yeux de toutes mes forces pour contenir mes larmes, pinçai mes lèvres jusqu’à m’en faire mal afin de garder enfouis au fond de moi mes regrets et cette culpabilité qui, tels des rats, me rongeaient centimètre par centimètre. Comme je m’en voulais d’avoir gâché notre relation, d’avoir laissé ma jalousie façonner une version altérée des faits !
Mon regard se posa sur les personnes qui m’accompagnaient. Je puisais la force d’avancer en chacune d’elles. Ma mère n’avait jamais abandonné, en dépit des malheurs qui s’étaient abattus sur notre famille au fil des ans. À aucun moment, elle n’avait songé à renoncer à la vie, là où d’autres se seraient précipités dans la mort avec un soulagement évident.
Erin et Kate avaient, toutes les deux, perdu des êtres chers : la première, son petit-ami, la seconde, ses parents. L’une affrontait les lendemains en se forgeant une carapace, en se retenant aux amis qui lui restaient. L’autre s’accrochait à mon frère cadet, Finn, à l’idyllique futur qu’ils s’imaginaient.
Les sentiments néfastes revinrent au galop, enfoncèrent la porte que je tentais de garder fermée à leur approche. Je luttai pour les repousser, mais voir les doigts des amoureux entrelacés me poignardait le cœur de part en part. D’un côté, j’étais contente pour eux, d’un autre côté, je les enviais de parvenir à préserver leur amour sur le long terme.
Tenant tête aux regrets tenaces, je poursuivis mon inspection. Mes yeux tombèrent sur ma cadette, de nouveau endormie contre ma poitrine. Je songeai à tous ces instants de notre quotidien durant lesquels elle aurait pu se plaindre. Elle ne l’avait jamais fait, ce qui lui avait valu son surnom de petit ange. Pour elle, je ne pouvais pas renoncer au goût de la vie, céder à mes faiblesses émotionnelles.
À côté de moi, Erin remua, secouée de spasmes, comme si elle tentait de se dégager d’un piège. Bientôt, ses yeux s’ouvrirent. J’y vis un voile de tristesse et détournai le regard. Je détestais percevoir ce sentiment chez les autres, parce qu’il me rappelait la mienne et, dès lors, je sombrais au cœur de mes tourments. C’était un cycle sans fin, mais je bataillais pour ne pas en faire le tour trop vite.
Sans préambule, Erin me proposa :
— Je p-peux p-prendre la r-relève, s-si tu veux.
Devant sa mauvaise élocution due à ses violents frissons, elle se frictionna les jambes ainsi que les

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