Faiseur de rêve
103 pages
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Faiseur de rêve , livre ebook

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Description

Elle s’appelle Lou et vit dans la rue après le grand effondrement de l’économie mondiale. Lui n’a pas de nom, juste un matricule, car il n’existe pas vraiment. Il sort d’on ne sait où, d’ailleurs. Il est son petit homme des rêves et elle lui accorde une confiance aveugle sans comprendre pourquoi. Dans une ville coupée du monde par de gigantesques remparts, ils traquent le tueur en série au masque de porcelaine qui sévit à la nuit tombée : Mécanique Asylum. Mais des ombres tout droit sorties de 39-45 envahissent la Vieille ville et entraînent les deux jeunes gens bien plus loin que ce qu’ils pouvaient imaginer, à l’origine de toute vie.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 14 septembre 2015
Nombre de lectures 5
EAN13 9782953430462
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0010€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Faiseur de rêve
 
 
 
 
Aude Réco
 
 
Chapitre I
 
La fillette courait à perdre haleine. Du haut de ses huit ans, elle n’osait affronter du regard ce qui la poursuivait. L’ombre fondit sur elle. S’ensuivit un bruit horrible, celui de la chair mutilée, puis le cri d’une enfant qui mourut dans sa gorge noyée de sang.
Lou Mira Vor aurait hurlé à son tour si deux mains gantées ne s’étaient pas soudain posées sur son visage.
Le grand brun aux yeux gris clair qui se tenait derrière elle pouvait la sentir trembler à travers son manteau. Elle avait la nuque raide, le corps parcouru de spasmes.
— Chut, fit-il sans quitter du regard le cadavre éparpillé sur les pavés humides.
Lou essaya de tourner la tête. L’inconnu l’en empêcha.
— Chut, répéta-t-il.
Il ôta la paume de sa bouche et lui caressa un instant les cheveux, comme pour la calmer.
Devant eux, la silhouette se redressa avant de filer. Son festin terminé, plus rien ne la retenait là.
— C’est bien, glissa l’homme en retirant son autre main. Oui, très bien.
— Que… qu’est-ce qui est très bien ? articula la jeune femme, transie d’effroi et incapable d’ouvrir les yeux.
Son cœur cognait contre sa poitrine. Cette petite fille avait été massacrée en une poignée de secondes. Lou garderait à jamais le souvenir épouvantable de cette nuit de décembre.
— Le fait que vous ayez su conserver votre sang-froid, expliqua l’homme d’une voix douce. C’est très bien.
Il parlait d’un ton presque maternel.
— Dites-moi que vous n’allez pas me tuer, murmura-t-elle.
— Si je l’avais voulu, vous seriez morte depuis longtemps. Bien sûr que je ne souhaite pas vous tuer. Venez, maintenant. Éloignons-nous.
Il lâcha Lou, qui, dans un mouvement empreint d’hésitation, pivota sur ses talons. Elle manqua s’effondrer dans ses bras et se rattrapa au col de son manteau.
Ils firent quelques pas en direction de la Grand-rue. La Vieille ville était déserte à cette heure tardive. La pleine lune, majestueuse, trônait dans un ciel dépourvu d’étoiles et chargé de neige. Sa lueur blanchâtre projetait sur la route les ombres des immeubles et boutiques alentour. La cité semblait se dérouler en une dimension opaque aux pieds des deux jeunes gens. Rien ne bougeait. Rien ne paraissait vivre. Pas un son. Pas une silhouette. Ils marchèrent sur plusieurs mètres et lorsqu’ils furent assez éloignés, l’homme parla enfin.
— Ne me remerciez pas, surtout, dit-il en affichant une affreuse grimace.
Le rouge monta aux joues de Lou, qui balbutia un remerciement. Son cœur battait toujours la chamade et la tête lui tournait un peu. Le froid et la peur l’avaient étourdie.
— Merci.
— Non ! s’exclama son inconnu.
Sa moue mua en une expression indéfinissable.
— Je vous avais demandé de ne pas le faire. J’ai horreur que les gens me…
Il s’interrompit. Intriguée, la femme le fixait comme pour essayer de le jauger. Il lui prit la main pour l’emmener ailleurs. Aussitôt, une vague de chaleur envahit Lou. Sa sensation de vertige diminua à mesure qu’ils remontaient la Grand-rue, dont les pavés usés jusqu’à l’os glissaient par temps de pluie. Bordée de pubs et d’échoppes, elle était la plus belle de toute la Vieille ville avec ses façades pastel, ses vitrines toujours impeccables et ses trottoirs fleuris. De grands lampadaires noirs s’élevaient presque à hauteur des toits pentus. Leurs lueurs paraissaient se perdre dans le ciel, presque mourantes quand le vent en faisait vaciller la flamme. La rue traversait une bonne partie du bourg, contournait la place, longeait la rivière jusqu’à se diviser en une multitude de ruelles arpentant la vallée loin devant. L’homme s’arrêta sur la place. La main toujours dans la sienne, Lou l’imita. Elle se sentait étrangement en confiance.
L’eau de deux fontaines frétillait jour et nuit au rythme d’un ballet interminable. Les candélabres formaient un arc de cercle tout autour. Leur lumière dansante mêlée aux ondulations du liquide valait à elles seules un spectacle, mais Lou ne s’y intéressait guère. Elle connaissait ces mouvements, cette grâce par cœur. Elle n’avait d’yeux que pour son mystérieux sauveur qui, lui, rêvassait volontiers devant une telle beauté. Il arborait une tenue assez ordinaire : pantalon et chemise sombres avec un manteau grand ouvert par-dessus. Il mesurait un bon mètre quatre-vingt, soit une tête de plus que Lou environ, quand elle portait ses bottes à talons. Ses prunelles gris clair lui donnaient un côté « homme sans âge ». Son teint pâle renforçait cette impression, tandis que sa barbe naissante soulignait une négligence craquante. Lou le distinguait difficilement, mais au moins assez bien pour constater un air préoccupé. Il la toisa du regard.
— J’ai un œil plus gros que l’autre, mes oreilles sont décollées, que sais-je encore ? demanda-t-il.
Elle rit. Elle rit à gorge déployée. Il pensa qu’elle pétait les plombs. Soit. Si cela lui permettait de relativiser…
— Absolument pas, pouffa-t-elle.
Elle étouffa un nouveau rire.
— Vous vous moquez de moi, mademoiselle.
Les traits de la jeune femme se durcirent tout à coup, présageant un moment désagréable.
— Qui êtes-vous ? interrogea-t-elle d’un ton maladroit.
— Personne. Enfin si, moi. Personne en particulier, néanmoins.
— Vous deviendriez peut-être plus causant en présence d’un flic ou deux, menaça Lou en ouvrant la marche.
Dépassé, le grand brun pensa qu’il ne comprendrait jamais rien à la gent féminine. Il se garda d’en parler et essaya plutôt d’éclaircir la situation.
— Puisque je vous dis que je n’ai pas de nom ! s’exclama-t-il. On ne m’en a jamais donné. Juste un numéro.
Lou fit des yeux étonnés.
— Comme… un matricule ? articula-t-elle. Enfin quoi, tout le monde possède un nom !
Elle revint sur ses pas.
— Pas moi, déclara l’homme. Je ne suis qu’un passant, parfois un vagabond. Personne de bien important. Je vous ai seulement sauvé la vie. Si Mécanique Asylum vous avait repérée…
Lou se figea. Les dernières paroles de l’inconnu lui glacèrent le sang. La réalité remonta alors à la surface avec une rare violence. Lou vacilla et se ressaisit à peu près. Les battues, le couvre-feu, les meurtres… Cette terreur omniprésente qui sévissait depuis des semaines…
— Vous m’avez sauvé la vie, répéta-t-elle d’une voix blanche.
Elle secoua la tête.
— Comment souhaiteriez-vous vous appeler ? questionna-t-elle en changeant de sujet.
— Euh…
Un sourire qu’elle espérait encourageant étira ses lèvres, mais son inconnu venait visiblement de perdre sa langue.
— Que diriez-vous d’Adam ? lança-t-elle avec entrain.
— Qui incarnerait mon Ève ?
Sa bouche se tordit.
— Moui, concéda-t-elle. Trop rigide, vous avez raison. J’aime bien Jonathan.
— Trop long. En revanche, Nat ou Nathan serait parfait, mademoiselle… Mademoiselle comment, déjà ?
— Lou. Lou Mira Vor.
Nathan la salua d’un signe de tête digne d’un gentleman. Lou. Ce prénom lui allait comme un gant. Elle avait vraiment tout d’une Lou dans sa robe à pois blancs et sa veste grenat un peu usée. Et sa chevelure flamboyante…
— Vraiment, vraiment tout d’une Lou, confirma-t-il.
— Je vous demande pardon ?
— Non, rien. Vous n’avez pas respecté le couvre-feu, Lou Mira Vor. Et cette gosse non plus. Vous avez vu ce qui lui est arrivé. J’aurais aimé que vous n’assistiez jamais à une boucherie pareille.
La jolie rousse se mordit la lèvre inférieure et Nat se maudit en silence pour avoir manqué de tact. Il préférait de loin les yeux vert d’eau de sa nouvelle amie qui pétillaient de malice.
— Qui vous a parlé de moi ? lâcha-t-elle en adoptant un ton sec.
— Attendez une minute. Je sais ce que vous pensez. Vous ignorez qui je suis, vous ne m’avez même jamais croisé et je me tiens pourtant devant vous. Sans mon intervention, vous seriez morte. J’ai sauvé la vie d’une parfaite inconnue, ce qui est presque trop beau pour être

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