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Description
Sujets
Informations
Publié par | Le Lys Bleu Éditions |
Date de parution | 04 septembre 2019 |
Nombre de lectures | 1 |
EAN13 | 9791037700568 |
Langue | Français |
Informations légales : prix de location à la page 0,0020€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.
Extrait
Nadia Belkacemi
L’Homme, le sucre et la révolution.
Roman
© Lys Bleu Éditions – Nadia Belkacemi
ISBN : 979-10-377-0056-8
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle .
L’Homme, le sucre et la révolution
« Ceci est un conte, la vérité est parfois dans ce qui semble le plus improbable et les faits paraissant réalistes sont peut-être ceux qu’on a imaginés.
Ce n’est pas l’histoire d’un pays, c’est beaucoup plus l’histoire d’hommes et de femmes, nés dans un pays donné mais qui pourraient être de partout et de nulle part. »
Chapitre 1
Comment cela a pu se passer …
Je me suis endormi sur un lit de
Questionnements…
Au matin
Les réponses ont fondu dans un café amer,
Tels des morceaux de sucre
De même taille…
De même saveur…
Les premiers rayons de soleil arrivèrent à peine à le tirer de sa torpeur.
Comme chaque matin, depuis un certain temps déjà, il se réveillait angoissé à l’idée d’affronter, encore, une autre journée.
Une journée de plus à attendre une nuit perturbée et sans rêve.
La vie de tant de personnes lui semblait juste une trêve dans une mort commune partagée, dès la naissance, par ceux nés du mauvais côté de la providence.
Certains trouvaient le moyen de sourire malgré tout. Lui, il savait que c’était sans espoir. Cela devait être déjà écrit quelque part.
Écrit où ?
Sa pauvre mère aurait parlé de destin. Il pensait plutôt à une farce.
Quelqu’un, caché quelque part, devait bien trouver amusantes les gesticulations de pauvres gens comme lui. Dans le cas contraire, tout ceci aurait été plus inutile encore. Si personne ne regardait cette tragédie, ne s’amusait de ce spectacle, combien seraient grotesques tous ces pauvres acteurs, ignorant que chacun est le reflet de l’autre, pens ant le leur unique et singulier.
Que les histoires émanent d’eux, reviennent vers e ux et ils en étaient le centre. Certains s’imaginant, peut-être, qu’elles deviennent insignifiantes, dénuées de sens, une fois eux-mêmes disparus.
Il était convaincu que si chacun pouvait se voir, il découvrirait en l’autre son exacte image : une illusion. Cependant, cette lucidité aurait fini par parsemer l’univers de bris de glaces fracassées par tous les Hommes découvrant leur insoutenable vérité.
L’aveuglem ent était-il la seule posture salutaire imaginée par l’énigmatique metteur en scène pour toutes ces vies ?
Ce salut illusoire lui était-il refusé spécialement ou bien, tout comme lui, les autres en étaient conscients mais faisaient semblant avec plus de conviction ?
Il se retourna dans son lit, crut sentir une présence familière : sa mère, morte pourtant depuis un certain temps déjà.
Yema…
Le mot sortit de sa bouche sans qu’il soit sûr de l’avoir prononcé.
La main de sa mère caressa dans un rêve son front fermé. Il se laissa aller à une soudaine quiétude.
Il lui arrivait parfois, dans le silence de l’aube succédant à une nuit d’insomnie, d’entendre le froissement de ses vêtements pendant qu’elle priait. Une paix envahissait tout son être.
Il redevenait petit garçon regardant sa mère exécuter un rituel immuable et monotone. Rien dans son visage, dont il épiait les expressions, ne trahissait pourtant ennui ou lassitude.
— Il t’a déjà répondu yema ? lui avait-il murmuré une fois.
— Qui ça ? Avait-elle répliqué, étonnée. Elle venait de plier son tapis de prière, sans doute en train de songer à l’organisation de sa journée.
La voix de son fils l’avait prise de court. Elle le croyait encore endormi.
Celui à qui tu parles chaque jour, seule dans le noir.
Il s’attendait à ce qu’elle se mette en colère, sachant toute l’importance de la foi dans sa vie. Elle termina de ranger ses affaires, plongée dans une silencieuse réflexion.
— Oui, avait-elle fini par dire.
Elle avait ensuite enchaîné d’un ton doux mais ferme.
— D’ailleurs, je lui parle tout le temps et pas que seule dans le noir. Il m’a répondu à plusieurs reprises même quand je n’osais pas lui demander des choses.
— Comme quoi par exemple ? lui avait-il rétorqué sceptique et provocateur.
Sa mère avait eu un sourire tristement tendre. Il commençait à regretter son ton moqueur lorsqu’elle se décida à lui lancer avant de s’en aller :
— Quand tu consentiras à t’adresser à lui, ya weldi, tu le sauras bien tout seul. Ce ne sont pas des choses qui se racontent, elles se sentent c’est tout ! Si tu ne les sens pas, tu ne pourrais pas les comprendre.
C’était une réplique dénuée de colère. La patience de sa mère face à ses piques sur ce sujet, l’avait toujours intrigué .Comment une femme aussi simple pouvait-elle montrer ce recul face à ceci alors que des universitaires pouvaient perdre toute mesure, parfois pour un simple doute exprimé ?
Il songea à la pertinence de ses paroles . Il n’avait, lui-même, aucune explication rationnelle à sa propre sérénité quand il la regardait sur son tapis. Il avait toujours trouvé étrange qu’un homme ayant clos la porte de son désarroi à une quelconque invocation, humaine ou autre, soit aussi réconfortée par l’abandon de sa mère à la prière.
Se laissait-il aller ainsi, enfant rassuré par cette foi insensée mais tranquille, en dépit de toutes les menaces extérieures ?
Probablement.
Quand sa mère s’en est allée, elle avait fermé derrière elle, définitivement, les portes d’un passé où il trouvait, parfois, refuge. Désormais, il était condamné à se lever, chaque matin, adulte et solitaire.
L’appartement, minuscule pourtant, lui était apparu si vaste, sans limites rassurantes, propre à les contenir, son désespoir et lui. Une douloureuse évidence le happa alors. Seule sa mère vivait vraiment en ces lieux. Dans ses gestes quotidiens, ses petites manies et jusqu’à dans son silence, résidait l’unique réalité palpable.
Lui tournait en rond, se servait des choses mais ne laissait aucune empreinte. Les objets, même mille fois utilisés par lui, ne le reconnaissaient pas.
Pourtant chaque ustensile chez lui avait une histoire. Sa mère, dans tous les cas, lui en donnait une. Souvent, elle tenait en une phrase. D’autres fois, c’était presque un conte, tant elle y reliait des symboles mystiques.
Les mots destin, chance ou malchance y trouvaient toujours une place.
Sa mère affirmait, à plusieurs reprises, que tout était question de destin. Il fallait l’accepter pour avoir la chance de connaître la paix. Dans des moments de grande lassitude, il lui arrivait d’envier son fatalisme reposant. Le plus souvent, il le