La couleur du soupçon
78 pages
Français

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Description

Une femme médecin en banlieue parisienne rejoint sa Creuse natale afin de retrouver un semblant de sérénité après une affaire de meurtre qui l’a conduite à suspecter un ami, ce qu’elle ne se pardonne pas. Des deux amours de sa vie (le dit ami et le commissaire chargé de l’enquête) elle ne saura lequel choisir.

Informations

Publié par
Date de parution 15 avril 2013
Nombre de lectures 0
EAN13 9782312009698
Langue Français

Extrait

La couleur du soupçon

Mychelle Marhos
La couleur du soupçon








LES ÉDITIONS DU NET 22 rue Édouard Nieuport 92150 Suresnes
À Bérivane.
















© Les Éditions du Net, 2013 ISBN : 978-2-312-00969-8
Un peu avant vingt et une heures une femme se dirige vers le boulevard de la Paix, absorbée elle marche à pas réguliers. Plus très sûre de l’urgence de sa démarche, mais au point où elle en est, c’est-à-dire à mi-chemin, autant aller jusqu’à son terme. Mars est un peu frais, la pluie de l’après-midi a laissé de grandes flaques frémissantes sous un vent du nord. Peut-être aurait-elle dû s’habiller plus chaudement. L’immeuble devant lequel elle s’arrête, n’est en rien différent des autres, gris sur ciel de suie, vétuste et sans grâce comme tous les édifices de cette petite ville, recroquevillée au pied d’une barre d’immeubles, à l’est de Paris . Avec difficulté elle pousse la lourde porte d’entrée. Elle y voit à peine. L’escalier est au fond d’un long corridor, grossièrement badigeonné d’une peinture, peut être verte dans des temps anciens. À la quatrième marche, la lumière s’éteint. Main crispée sur une rampe poisseuse, elle s’arrête. Dans le noir, mêlée à des relents d’eau de javel mal séchée, l’odeur des poubelles rangées au fond du couloir se fait plus intense. Juste au-dessus d’elle, à travers des carreaux opaques, un rayon de lune répand chichement quelques lueurs sur le premier palier. Bien que familière de tels endroits, la jeune femme renonce à gravir les quelques marches qui l’amèneraient au premier. Elle descend à reculons et s’appuyant sur le mur du couloir plongé dans l’obscurité, regagne la sortie.
Dehors, surprise par le grondement de la circulation, elle respire profondément. Les bruits de la nuit naissante, hennissements de motos savamment orchestrés par des cavaliers casqués et bottés de cuir, crissements de planches à roulettes sur le trottoir, cris d’enfants retardant le plus longtemps possible le moment de rentrer chez eux, ivrogne chantant à tue-tête, lui font soudain prendre conscience de ce qui l’a tellement perturbée.
Incroyable, pense-t-elle, le soir, dans ces logements mal insonorisés, surpeuplés, ce ne sont que cris d’enfants, hurlements de radio, disputes à tous les étages !
Elle lève la tête, la plupart des appartements sont éclairés. On peut apercevoir des silhouettes se mouvant à l’intérieur. Doutant de ses perceptions, elle promène à nouveau son regard du haut en bas de l’immeuble. Elle s’attarde sur le premier étage où elle devait se rendre. Deux des quatre fenêtres en façade, sont voilées par des rideaux. Dépitée, elle s’interroge.
J’ai vraiment eu la frousse, je ne pensais qu’à sortir de là au plus vite ! Insensé !
Frissonnante, elle remonte le col de son manteau, éparpille quelques gravillons du bout de sa chaussure, et se promet de revenir le lendemain.
Enfin peut être, j’ai eu peur. Je ne me l’explique pas, mais ce silence était tout sauf naturel.
Y pénétrer encore une fois, suffirait à effacer cette mauvaise impression. Elle ne peut s’y résoudre. Dans cette fragilité, inconnue d’elle jusqu’à ce jour, elle ne se reconnait pas. Humiliée, elle accepte mal d’avoir cédé à la panique. Dans la rue, le décor est habituel et l’atmosphère celle de chaque soir.
Espérant trouver chez son copain Paul réconfort et peut être explications, elle traverse le boulevard. En lui caressant les cheveux, il lui dira quelque chose dans ce goût-là : Enfin ! Marta, disparue depuis une semaine ! Trop de boulot, oui je sais, moi aussi, d’ailleurs !
Fermé le petit bistrot de Paul ! Marta n’aime pas les imprévus, elle ronchonne en silence.
Décidément tout va de travers ce soir ! Demain je prends mon petit déjeuner chez lui. Si quelqu’un peut m’éclairer, c’est bien Paul !
Un mystérieux courrier, semblant l’inviter à un rendez-vous au 14 boulevard De La Paix, un soir après vingt heures trente, est à l’origine de sa mésaventure. Paul connaît beaucoup de monde, Martha aussi, mais ce n’est pas le même. Pour regagner son appartement, elle longe le square, sorte de passerelle à sens unique entre le quartier où elle travaille et celui de son habitation. D’un côté, une vie compliquée où la débrouille est de rigueur. De l’autre, une certaine nonchalance, des jardins, le calme la nuit. Aucune fusion entre les deux, sauf pour Marta qui espérant ne pas sombrer dans la routine, à un cabinet traditionnel a préféré un poste de médecin dans un centre médico social. En paix avec elle-même, elle pense avoir assumé au mieux les chicaneries de l’administration, parfois l’hostilité de certains patients largement compensée par la reconnaissance du plus grand nombre. On l’écoute. Elle fait de la médecine mais pas seulement. Aider les gens avec tous les moyens dont elle dispose, c’est-à-dire sa bonne volonté et l’engagement pris à ses débuts, est fondamental. Seul ce comportement lui assure équilibre et tranquillité d’esprit.
Contrariée et pas vraiment apaisée par le confort de son salon où, à peine rentrée, sans même enlever son vêtement, elle ouvre un tiroir, en sort une lettre reçue le matin même. D’une enveloppe ordinaire, portant son nom et son adresse écrits très lisiblement, elle retire un morceau de papier qu’elle lisse sur le bureau du plat de sa main. Découpée dans un journal, une publicité, rien de plus ! À l’origine de son équipée de la soirée, elle la réexamine pour la énième fois :
(Laïla voyante extra lucide, sur rendez-vous de quatorze heures à dix-huit heures 14 bd de La Paix)
Extra lucide, encerclé d’un gros trait de crayon rouge et (au stylo feutre bleu) pas avant vingt heures trente, l’ont décidée à se rendre à l’adresse indiquée, le soir même. Dans ce petit morceau de papier, Marta a cru déceler l’appel pressant de quelqu’un dans le besoin. Répondre à ce genre de requête fait partie du rôle qu’elle entend jouer dans sa fonction. Sans ironie aucune, ses bons amis la surnomment sœur Paradis. Aider efficacement en soignant, trouver des solutions aux maux innombrables d’une population plombée par la rudesse de l’existence, sont des actes primordiaux dans son objectif de vie. L’apitoiement seul ne sert à rien. La mauvaise conscience pas davantage. Ce soir, la sensation d’échec l’embarrasse et grève méchamment son moral . Désemparée, boire une tisane lui parait être un piètre remède mais elle n’a pas d’autre idée. À petites gorgées, elle absorbe le liquide bouillant en s’efforçant de tracer le profil du messager . Dénonciateur, mais de quoi, de qui ? Personne n’osant pas aller la consulter à son cabinet, farceur, ou tout bêtement une pub personnalisée ?
Voyante ou pas, elle ne connaît pas de Laïla. Paul, lui doit savoir. Des tas de gens défilent dans son petit café. Elle glisse le morceau de journal dans son sac à main et machinalement range l’enveloppe au fond d’un tiroir. Avant de se coucher, Marta se regarde longuement dans le miroir de la salle de bain, cherchant à se reconnaître dans l’image qu’il lui renvoie, tant son aventure de la soirée l’a troublée. En face d’elle, un beau visage aux traits réguliers, cerné de longs cheveux blonds et lisses, en parfaite harmonie avec des yeux gris vert, un peu tristes. Elle se tire la langue. Ce n’est pas suffisant pour enlever un arrière-goût de ratage tout au fond de sa gorge. Difficile de s’endormir ce soir là, elle se tourne et se retourne dans son lit. Revivre la scène de l’escalier, éprouver la même émotion, admettre sa trouille dans un silence inexplicable si ce n’est par un quelque chose qu’elle ne saurait définir, tout cela la plonge dans l’exaspération. L’inhospitalité de ces immeubles, elle en a la triste habitude. Pourquoi ce soir, se sentir chassée ? Déçue par la fermeture du Petit Café de la Paix, elle se sent étrangère à elle-même.
***
Ah ! Paul que de souvenirs, une vingtaine d’années environ. Inséparables depuis les années de fac, Marta, Paul et Fréderic, chacun d’eux enfant unique, elle en médecine, les deux garçons en droit et aujourd’hui, bizarrement réunis, tous les trois dans un coin p

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