LES DERNIERS JOURS DU DIABLE
526 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

LES DERNIERS JOURS DU DIABLE , livre ebook

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526 pages
Français

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Description

Depuis la mort de sa femme, Simon Fillipini, divisionnaire au commissariat de la rue Louis-Blanc, est un homme perdu. Des meurtres en série vont, malgré tout, lui apporter une improbable raison d'espérer. Mais les choses ont-elles toujours l'air de ce qu'elles sont ? ŠChristine Dumonteil nous livre ici un roman où Dieu, le diable et le coeur de l'homme sont au centre du récit.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 juin 2011
Nombre de lectures 82
EAN13 9782296463868
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,1350€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Maquette de la couverture : Osama Khalil
Illustration de la couverture : peinture de F. Guémiah
Les derniers jours du diable


Christine Dumonteil
Le Scribe cosmopolite – Littérature
Collection dirigée par Osama Khalil


©
Le Scribe l’Harmattan
ISBN : 978-2-296-54651-6

Fabrication numérique : Socprest, 2012
Ouvrage numérisé avec le soutien du Centre National du Livre
A Hélios et Naryaba, mes chevaux d’orgueil
Pour Jean, Christophe et Julien
Je vis en Dieu, plein de Sa Force, quand les autres, vides de Lui, sont encore à naître.
I l avait depuis plusieurs jours le sentiment d’être épié et, même ici, dans ce lieu familier et désert, cette certitude ne le lâchait pas. Il se retourna très vite, mais il n’y avait rien ni personne, sauf la nuit et, au bout, le gouffre noir de l’escalier de la rue des Couronnes. S’il ne les voyait plus, il imaginait les grilles bleues de la maison de Sasha. Le souvenir dissipa son malaise. Il pressa le pas, heureux de retrouver le confort de sa voiture. Avant même qu’il ne soit atteint, il sut qu’il était en danger. Un coup s’abattit sur lui. Il tomba en avant.
Au bord de l’inconscience, il aperçut un homme à ses côtés qui récitait, tête basse, la prière des morts. Son corps se crispa d’effroi puis le ciel bascula, emportant avec lui un tonnerre d’images et un grand soleil écarlate. La poitrine brûlante, il le vit fondre sur lui, à la fois éclat et flamme, matière et souffle, porteur de tous les rêves poursuivis, jamais atteints. Il sourit, impatient de les rejoindre, étonné d’être heureux.
L e passage Plantin grouillait de flics. Son étroitesse compliquait la tâche de la police scientifique mais délimitait, de fait, la scène de crime. Peu fréquenté le jour, désert la nuit, c’était une venelle étroite et très courte, reliant la rue du Transvaal à la rue des Couronnes. Parallèle à la Villa Castel, il était bordé à droite par un mur aveugle haut de plusieurs mètres, à gauche, par une série de petites maisons avec des cours en façade. Autrefois habitées par des ouvriers qui ne rêvaient que d’une HLM à Sarcelles, elles s’arrachaient aujourd’hui à prix d’or.
Il avait fallu un concours de circonstances – un groupe de fêtards qui s’était égaré – pour découvrir le corps si tôt dans la nuit. Le procédurier de la crim’ venait de terminer les premières constatations. Le mort, Marc Mirard, cinquante ans, avait succombé, comme les autres, à une rupture de l’aorte abdominale, provoquée par une lame longue et rigide. Le décès remontait à moins de deux heures, donc vers minuit.
Bien que l’affaire soit suivie par le 36, on venait d’y adjoindre Simon Fillipini, divisionnaire au commissariat de la rue Louis-Blanc. Malgré sa fonction, c’était un homme de terrain. D’origine italienne, il était né à Belleville et y vivait toujours. La cinquantaine à peine entamée, massif, puissant, le front haut et large, le poil noir, le sourcil broussailleux, l’œil aigu, le nez busqué, la lèvre charnue, il tenait de l’aigle, de l’ours et de la montagne qui les abrite. Paradoxal et secret, il avait bâti toute sa carrière sur une intuition qui ne l’avait jamais lâché. Dès le premier crime en Août, il avait senti que celui-ci ouvrait sur une série : moins par la façon dont l’homme était mort que par le message qu’il délivrait. Un rosaire dans la main droite, un caillou noir dans la gauche, la tête inclinée sur l’épaule droite, les bras en croix, tout cela tenait du rite et sans doute aussi du religieux. La suite lui avait donné raison. Malgré les moyens et l’énergie engagés, on n’avait jusqu’alors rien retrouvé, ni ADN, ni traces papillaires. Cette fois encore, il en était convaincu, l’identité judiciaire ne trouverait rien. Le tueur était un exécuteur méthodique et organisé qui avait tout prévu. Le lieu, l’identité des victimes, mais aussi, il le sentait, leur place dans cette marche vers la mort et le châtiment. La veille, après trois mois de silence, il avait écrit à la presse. Une courte lettre, pleine de folie. Malgré une mémoire approximative, il l’avait encore en tête :
« J’ai juré de vous émouvoir, écrivait Bernanos il y a plus de soixante ans. Ce qu’il s’était promis, je l’ai fait, j’ai remué vos vieilles peurs. Depuis trois mois, à travers moi, vous ne parlez que d’elles. Vos provocations m’ont souvent blessé. Mais quand j’étais atteint, je me disais que Dieu l’avait voulu. A quinze ans, je savais déjà que j’étais promis à un destin exceptionnel. Comme vous. Je ne l’ai pas oublié. Vous, si. L’amour, le pur amour de Dieu, rayonne sur ma vie, si beau, que j’en ai parfois le souffle coupé. Il n’empêche rien, mais il transforme tout. La grande nouvelle, c’est que vos tristes petites vies de combinards vont bientôt voler en éclat. Pour que l’homme vive, il faut que la Bête meurt, dit l’Ecclésiaste. Elle va mourir et vous serez enfin rendu à vous-mêmes, autrement dit au Seigneur. Demain ce monde sans joie sera mort. Dieu arrive, écoutez le venir. »
Les mains dans les poches, le col relevé, il fixait le corps, allongé à cinq ou six mètres de l’entrée de la rue du Transvaal, seul au milieu des lumières bleues des gyrophares et des hommes en combinaison blanche. Les gars qui l’avaient découvert étaient en train de boire un café, complètement dégrisés. On avait bien sûr relevé leur identité, mais on ne trouverait rien de ce côté-là. Il rentra la tête dans les épaules pour lutter contre le vent qui filait, insidieux et glacial. En quelques heures, la température avait chuté d’une quinzaine de degrés, passant d’un printemps frais au plus noir de l’hiver. C’était fréquent en Novembre. Marc Mirard, jambes serrées, bras écartés, en position de crucifié, malgré le sourire qui semblait flotter sur ses lèvres, avait un air d’abandon dédaigneux. Il était bronzé. Cette bonne mine, malgré la lividité due à l’hémorragie, dans ce passage obscur – trois des lampadaires n’éclairaient plus, il faudrait interroger les riverains pour savoir depuis quand – avait quelque chose d’incongru, comme si l’homme allait se relever et rentrer chez lui. Même dans la mort, il gardait un air conquérant : visage romain encadré de cheveux courts d’un brun très sombre, front haut, nez fort et busqué, lèvres minces, tout en lui respirait l’énergie et même l’impatience, alors que l’attitude, tête inclinée sur l’épaule droite, trahissait la soumission et le remords. Il s’accroupit. La chemise était inondée de sang, mais aussi la veste, épaisse, de bonne coupe et les pavés autour de lui. Les mains étaient soignées. Il se redressa, sortit son calepin, nota l’information. Le froid s’insinuait en lui, comme une eau noire. Il avait envie d’un café brûlant et très fort, mais il ne parvenait pas à quitter le mort. Celui-ci lui racontait une histoire. Pour l’instant, égaré par tous ces paradoxes, il ne l’entendait pas. Au-dessus de sa tête, le ciel, piqué d’étoiles, avait un air d’indifférence glacée. Il resserra sur lui les plis de son manteau. Ce long couloir ouvert sur les ténèbres avait quelque chose d’irréel, comme un mauvais rêve, précis, décalé, angoissant. Malgré les flics en pagaille, l’ombre du tueur, il le sentait, rôdait, évanescente et lourde. Quatre meurtres en trois mois, et ce n’était pas fini. Il avait l’impression d’être une vieille baraque ouverte à touts les vents. A peine terminée l’enquête sur Louis, l’enfant assassiné, il se retrouvait là. Les meurtres d’enfant, même aujourd’hui, après trente ans de métier et une plongée quotidienne dans l’horreur, le laissait toujours aussi troublé, surtout si l’un des parents, comme c’était le cas, était le meurtrier. Il avait encore dans l’oreille, les cris de la mère quand elle avait appris la vérité. Et voilà que le tueur au rosaire, comme on l’appelait dans les journaux, prenait la relève. Tout se précipitait. Et demain, et le jour d’après, qu’arriverait-il ? Dans ce jeu d’ombres où la mort le disputait à la vie, avait-il encore sa place ? Un an plus tôt, il aurait dit oui sans hésiter, mais Françoise était morte et tout avait perdu son sens, le monde pr&#

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