Pour Léa
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Français

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Description

Pour Léa tente de décrire la vie quotidienne de quelques Français en 2017 et dans les années suivantes, à la suite de la victoire électorale d’un parti populiste, le Front Patriotique.
Vous y trouverez Léa, passionnée de langues et qui veut travailler dans le tourisme, son frère Matéo et ses difficultés scolaires, ses parents qui ne demandent qu’à bien vivre dans la banlieue de Toulouse. Et Stéphanie, qui veut le meilleur pour le village de Champagne dont elle est le maire. Et aussi Youssef, passionné de culture française et qui veut faire don de ses recherches à son pays d’adoption.
Mais la vie de tout ce petit monde va basculer parce que « les loups regardent vers Paris » et que les guetteurs n’ont pas vu l’imminence du danger.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 21 mars 2017
Nombre de lectures 0
EAN13 9782312051093
Langue Français

Extrait

Pour Léa
François Citayen
Pour Léa
Vous ne pourrez pas dire que vous ne saviez pas
LES ÉDITIONS DU NET
126, rue du Landy 93400 St Ouen
© Les Éditions du Net, 2017
ISBN : 978-2-312-05109-3
À ceux qui vous disent :
« on a tout essayé,
pourquoi pas le Front ? »
P REMIÈRE PARTIE
Dors , petite France , dors !
Sylvain
7 mai 2017, 20 heures
« OUAAAAAIS !!!!! YOU ! YOU ! YOU ! »
Les cris de joie venaient de la rue, bientôt relayés par les pétards et par un concert de klaxons qui dura jusqu’au petit matin. Dans son salon, devant la télévision qui annonçait les résultats du second tour, Sylvain Demaison ne partageait pas l’allégresse générale. Oh, bien sûr, lui aussi avait voté pour Martine Lagach, mais sans enthousiasme. Il était simplement fatigué de tous ces politiciens coupés des réalités et incapables de ramener le pays dans la prospérité. Comme disait son collègue Ludo : « On a tout essayé sans résultat, pourquoi pas essayer le Front Patriotique ? »
Cela faisait exploser Éric, le délégué syndical : « Mais vous voyez pas que l’essayer, c’est l’adopter ? Le Front Patriotique aux élections, c’est comme le dentifrice qui sort du tube : très facile dans un sens, impossible dans l’autre ? »
On en avait assez, des radotages d’Éric ! Et puis : qu’est-ce qu’ils avaient obtenu, les syndicats ?
Malgré tout, Sylvain n’était pas sûr d’avoir fait le bon choix. En fait, ce qui avait le plus fait pencher la balance, c’est le cambriolage dont il avait été victime : au retour du réveillon de la Saint-Sylvestre, il avait retrouvé sa maison saccagée, la façade taguée et les objets de valeur disparus. Chose curieuse, toutes ses bouteilles de Bordeaux étaient cassées dans la cave. « Signé Nitouche, avaient dit les policiers, il ne supporte pas le Bordeaux ! » Nitouche et sa bande avaient été interpellés, mais pas incarcérés ! Bien que récidivistes ! Sylvain était furieux, d’autant que son assureur avait trouvé la faille permettant de ne pas le rembourser. Au procès, Nitouche s’en était tiré avec six mois, dont quatre avec sursis, et Sylvain avait décidé de voter Lagach.
Pourtant, à part cet événement très pénible, tout allait plutôt bien pour lui. Sa maison proche de Toulouse était dans un coin sympa, sa femme et lui avaient un emploi stable chez un sous-traitant d’Airbus, leur fille Léa, seize ans, marchait bien au lycée et avait de bonnes copines. C’était plus difficile pour Matéo, qui rencontrait des difficultés en lecture et ramait en CM2.
La campagne des présidentielles avait battu tous les records : après les primaires, tous ces politiciens, de l’extrême gauche au PS , avaient fini par s’unir derrière Bernard Hémon . Quelle cuisine ! Mais Bernard Hémon répétait : « Il faut faire bloc face au péril du FP ! » Il y eut bien sûr Hercule Mélanjon , du Front Gauchiste , qui disait : « La politique néfaste menée depuis cinq ans est seule responsable de cette situation : qu’ils assument maintenant ! ». Et Armand - Noël Micron s’était également maintenu pour le premier tour : « Je me sens responsable des millions de Français qui sont derrière moi et mon mouvement " En route !" Et tous les deux disaient : " Nous sommes pour le rassemblement face aux périls qui menacent la France . Mais rien ne prouve que Bernard Hémon aura plus de voix que moi, et ce serait donc à lui de s’effacer {1} ". »
Sans compter que le PS avait trouvé le moyen de s’offrir une panne informatique juste avant le premier tour ! Des rigolos ! Naturellement , ils avaient joué les victimes. Et qu’est-ce qu’ils avaient trouvé comme excuse ? C’étaient les Russes ! Le Canard Enchainé avait même titré : Le PS victime d’un vi-russe. Interrogé au journal de 20 heures au sujet de l’ingérence possible de son ami Vladimir Poutine dans la campagne, Florent Flipot avait été très net : « La question que vous me posez est grave et souligne la vulnérabilité de l’ensemble de notre société vis à vis des technologies nouvelles, et en particulier informatiques. Et je tiens à souligner que dans le programme du Front Patriotique il est prévu une assistance des administrations locales pour la simplification des démarches des petites et moyennes entreprises qui ont été abandonnées par des décennies de gestion par l’UMPS ! Il est temps d’en finir avec cette incurie des politiciens incompétents et corrompus que nous subissons depuis des années ! »
Ce qui n’arrangeait rien pour tous ces politicards, c’était toutes les révélations à leur sujet apparues brusquement fin mars sur les réseaux sociaux, comme si cela avait été concerté et planifié : le compte caché de Manuel Vals à l’étranger, les milliards versés au Roi du Maroc pour qu’il calme les banlieues, et j’en passe. C’est vrai, il y avait aussi : les attentats de Paris étaient téléguidés depuis l’Élysée …
Bref, ils avaient eu ce qu’ils méritaient : Martine Lagach : 33 % ; Nicolas Juillion : 28 % ; Bernard Hémon ; 24 %, Armand-Noël Micron : 9 % et Hercule Mélanjon : 6 %.
Évidemment le report de voix de gauche sur Nicolas Juillion avait été problématique, malgré le chœur des soutiens de l’UMPS. D’autant que Hercule Mélanjon avait appelé à voter blanc : « Écoutez, le peuple de gauche en a marre de ces appels au vote républicain ! Et au bout du compte, c’est toujours lui qui trinque. Hé bien oui, c’est comme ça ! Même si ça ne vous plait pas, Messieurs les journalistes ! Qui êtes-vous, pour donner des leçons au peuple qui souffre depuis tant d’années ? Mais ça, vous ne le voyez pas {2} ! »
Sans compter l’interview télévisée de Nicolas Juillion par Roxane de Saint-Amand : elle avait été particulièrement éblouissante d’ironie moqueuse envers celui qu’elle appelait en privé « ce fils d’un notaire de province {3} . »
Et le 7 mai, ça y était : taux de participation : 55 %, Nicolas Juillon 49,8 %.
Et Martine Lagach : 50,2 %
Hervé
12 juin 2017
Hervé Martin contemplait, perplexe, le courrier qui venait de lui être remis : une convocation chez le commissaire Leblanc, pour le jour-même ? C’était une erreur, il ne pouvait pas en être autrement. Un homonyme, par exemple. Après tout, il y a plus d’un âne qui s’appelle Martin, à ce qu’on dit.
Ça tombait mal, mais il allait passer au commissariat, afin de régler rapidement cette question, avant de passer au SAV pour récupérer son ordi : on était à quelques jours du premier tour, et ce n’était pas le moment de perdre son temps à des détails. Ils avaient eu assez de soucis comme ça, et pas mal de temps perdu à rédiger de nouveau les tracts et professions de foi, perdus par la faute d’un virus qui s’était attaqué à son ordinateur.
Mieux : il en profiterait pour porter plainte contre Gérard Nauset, le candidat Frontiste, dont les attaques personnelles relevaient maintenant de la diffamation : retoucher les photos où il embrassait des enfants lors d’une cérémonie, afin de suggérer la pédophilie était abject. Il essayait sans doute de masquer son manque d’idées sur l’avenir de la circonscription ? En effet, son programme n’était rien d’autre qu’un copier-coller des éléments de langage que le Front Patriotique distribuait à ses candidats, et qui pouvait s’appliquer autant à Roubaix qu’à Nice ou à Strasbourg. Médiapart avait d’ailleurs affiché différents programmes de candidats du Front : identiques aux mots près ! Sans oublier de parler, à chaque fois, de ce « territoire oublié par l’état et les investisseurs ». Ah, si, il y avait une différence : à Paris on laissait entendre que « Paris payait pour la province », alors qu’on province, on insistait sur « le déséquilibre qui n’avait que trop duré dans les investissements et les emplois entre Paris et les Régions ». Risible…
Hervé, lui, n’avait pas trop de souci à se faire pour sa réélection : originaire de la région, dont il était l’élu depuis longtemps, son ancrage local était solide. Il avait grandi dans la ZUP de Paillac, sa ville natale, d’où son père partait travailler le matin à Mobylette. Et puis, par ses démarches, il avait tiré d’affaire pas mal d’entreprises du secteur et donc cont

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