Au vif de la violence
195 pages
Français

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Description

Les auteurs, sous la direction de Richard Hellbrunn, ont mené un travail destiné aux auteurs de violences intrafamiliales pendant cinq années dans le milieu associatif. Cet ouvrage a l'ambition d'ouvrir un espace de parole pour ces personnes qui ont achevé leur travail avec eux, afin qu'ils puissent dire ce qu'ils pensent de leur traversée, plus ou moins réussie, de la violence répétitive dans laquelle ils se sentaient enfermés.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 15 mai 2015
Nombre de lectures 42
EAN13 9782336381756
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0750€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
4e de couverture
Collection Andidote(s)
Collection Antidote(s)
dirigée par Chantal Selva
Créée en septembre 2012, la collection Antidote(s) donne des coups de projecteur sur une réalité sociale, économique, politique et culturelle en mutation, à partir de personnes ou d’organisations, qui ouvrent des clairières nouvelles grâce à leur intelligence des choses du monde.
Les auteurs de la collection viennent d’horizons très variés, apportant des éclairages singuliers du lieu de leur pratique. Ils donnent des pistes de réflexion à un public en recherche de repères, à partir d’essais, de récits de vie ou d’entreprises, de témoignages, mais surtout, en lui permettant de construire sa propre interprétation de la réalité sociale et de mieux s’y ancrer.
Antidote(s) aux idées reçues, au conformisme, au découragement, aux fanatismes, à la violence dans tous ses états, à toutes les formes d’immobilisme qui donnent de la société une idée fausse. Traverser les crises dans le mouvement de la vie.
Déjà paru
Laurent Hincker, Le harcèlement moral dans la vie privée,
une guerre qui ne dit pas son nom , novembre 2012
Patrice Haberer, Mots sauvages,
la forêt dernier refuge du sauvage , octobre 2013
Patrick Aïch, Grandir entre deux cultures,
Une bille de terre contre une bille de verre , avril 2013
Patrick Poirret, Le Téléphone de Grand Danger,
Un téléphone pour sauver la vie des femmes , décembre 2013
Richard Hellbrunn, À Poings Nommés ,
Genèse de la psychoboxe , avril 2014
Zair Kedadouche, Citoyens contre le racisme
et les discriminations , juin 2014
Jean-Claude Genot, Playdoyer pour une nouvelle écologie
de la nature , décembre 2014
Michèle Larchez et Nicolas Engel-Larchez, Parcours avec autisme(s),
Eloge d’une différence , mars 2015
Titre



Sous la direction
de Richard Hellbrunn




Au vif de la violence

*

Écouter et accompagner les auteurs
de violences intrafamiliales
Copyright
























© L’Harmattan, 2015
5-7, rue de l’École-Polytechnique, 75005 Paris
www.harmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr
EAN Epub : 978-2-336-73186-5
Avant-propos
« Toute action se passe, ou entre des amis, ou entre des ennemis, ou entre des gens indifférents l’un pour l’autre. Qu’un ennemi tue ou veuille tuer son ennemi, cela ne produit aucune commisération, sinon en tant qu’on s’émeut d’apprendre ou de voir la mort d’un homme quel qu’il soit. Qu’un indifférent tue un indifférent, cela ne touche guère davantage, d’autant qu’il n’excite aucun combat dans l’âme de celui qui fait l’action : mais quand les choses arrivent entre des gens que la naissance ou l’affection attache aux intérêts l’un de l’autre, comme alors qu’un mari tue ou est prêt à tuer sa femme, une mère ses enfants, un frère sa sœur ; c’est ce qui convient merveilleusement à la tragédie. »
A RISTOTE 1
Cette citation est là pour nous rappeler que les ressorts émotionnels de la tragédie sont immanquablement sollicités dès que l’action se déroule dans l’espace familial, lieu tragique par excellence, puisque dès notre naissance, et avant même notre conception, la condition humaine nous y attend, avec tout ce qu’elle comporte d’inéluctable, que ni les sentiments d’amour, ni les bonnes intentions ne suffisent à apaiser.
Là comme ailleurs, nous n’en avons pas fini avec la violence !
Le rapport d’information, enregistré à La présidence de l’Assemblée Nationale le 7 juillet 2009, fait au nom de la Mission d’évaluation de la politique de prévention et de lutte contre les violences faites aux femmes, n’hésite pas à parler d’un « phénomène de masse » à propos des violences au sein du couple, qui toucheraient 1,3 million de femmes qui « vivent chaque jour dans la violence de leur conjoint », soit dix pour cent des femmes. Cette violence est décrite comme étant à la fois « banale et grave » : une femme meurt tous les deux jours et demi sous les coups de son conjoint, compagnon ou de son ex. « Ces deux chiffres ne doivent pas conduire à opposer une violence quotidienne, mais de faible gravité, à une violence rare, mais extrême. Il existe, en effet, souvent un continuum de violences entre celles qui paraissent comme anodines et les plus graves. »
Mais comment comprendre que la famille, généralement et idéalement conçue comme un lieu de sécurité, d’amour et de transmission, puisse se dévoiler, d’une manière aussi massive, comme pouvant être un espace de violence et de destruction, qui s’étend du harcèlement aux coups, et parfois jusqu’au meurtre ?
Il y a là un paradoxe qui ne manque pas de nous heurter : le lieu même où nous pensons enfin être en sécurité, en rentrant à la maison, dans le « Heim », pour dire les choses avec la concision de la langue de Freud, est statistiquement celui où nous risquons le plus de mourir de mort violente. Cette pensée ne manque pas de réveiller en nous un sentiment « unheimlich » d’inquiétante étrangeté. Force nous est alors de considérer que la violence est transversale : au sujet, à la famille, aux groupes et aux institutions.
Il nous revient en mémoire, pour autant que la famille constitue, dans la tradition occidentale, le lieu complexe où tente de se conjuguer, non sans mal, l’institution et l’amour, cette pensée de Freud, qui nous est rappelée par André Green :
« Lorsqu’il pense à l’état amoureux, à la passion amoureuse, Freud, suivant en cela le jugement commun, répétera, après tant d’autres : “L’amour est une courte folie” ; Il faut aller jusqu’au bout de ce raisonnement : si Eros, les pulsions de vie, englobent la sexualité et l’amour au point de les identifier à la vie même, et si l’on reconnaît que l’amour comporte nécessairement cette dimension folle, alors toutes les vicissitudes de l’Eros sont entachées d’un potentiel de folie qui est au cœur de leur manifestation, dans tous les aspects qui en dérivent, jusque dans la sexualité la plus normale et jusque dans les racines infantiles de celle-ci. » 2
Ce qui touche ici à la fois à un tragique, qui, de son propre mouvement, porte plutôt au silence qu’au commentaire ou à l’interprétation, et à un espace familial, traditionnellement enclos dans une sphère privée, qui éclate sous l’effet d’une violence interne, mais également environnementale, jusqu’à en être fragmenté et pris en charge par l’État, nous interroge sur ce qu’il serait tout de même possible de dire de notre place à propos de la violence familiale en essayant de ne pas tomber dans notre objet.
D’une certaine façon, parler, c’est prendre le risque de trahir la vérité d’une violence qui ne peut pas se dire, et se taire, c’est être complice de sa répétition.
Ce qui, médiatiquement et politiquement se communique le mieux, et ne fait courir aucun risque à personne, c’est l’indignation qui serait, par elle-même, prometteuse de changements par l’annonce d’une éradication de la violence qui pourtant, depuis le commencement, habite les humains. Il n’est pas certain que l’orchestration d’un sentiment d’insupportable aussi fortement exprimé soit-il, puisse être ici suffisante. Au plan politique, nous n’en sommes plus à nous demander si l’État est capable de concevoir une stratégie adaptée aux problématiques de violence telles qu’elles apparaissent actuellement, et s’il est disposé à y mettre les moyens. Il faudra pour cela attendre le redressement du pays.
Cet avertissement de Jacques Beauchard date de 1981 :
« L’engagement de l’État dans la société conduit à un seuil au-delà duquel l’État n’assure plus la prévention globale de la violence, il n’arbitre plus les dissensions et, en tant que partie prenante, contribue au contraire à les sous-tendre ; seule la mise en œuvre de contrôles de plus en plus diversifiés et puissants lui permet de demeurer le plus puissant des protagonistes des conflits internes. » 3
Plus récemment, Laurent Hincker, dans son livre consacré au « Harcèlement Moral dans la Vie Privée » replace cette problématiqu

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