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Description
Sujets
Informations
Publié par | Nouvelle Cité |
Date de parution | 15 février 2018 |
Nombre de lectures | 4 |
EAN13 | 9782853139847 |
Langue | Français |
Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.
Extrait
Franz Coriasco
Chiara Luce
18 ans d’une vie lumineuse
Traduit de l’italien par
Emmanuel Iezzoni et Jean-Paul Teyssier
Récit
Nouvelle Cité
Franz Coriasco, Dai tetti in giù, Chiara Luce Badano raccontata “dal basso”, © 2010 Città Nuova Editrice, Via Pieve Torina 55, 00156 Roma (Italie).
Les notes de bas de page ont été ajoutées par les traducteurs et l’éditeur pour la publication en langue française.
Composition : Pauline Wallet
Couverture : Thomas Vivant
Illustrations de couverture :
p. 1, portraits de Chiara Luce enfant, adolescente et à la fin de sa vie
© Nouvelle Cité 2010, pour l’édition papier
© Nouvelle Cité 2015 pour l’édition électronique
Domaine d’Arny – 91680 Bruyères-le-Châtel
ISBN édition papier : 9782853136266
ISBN édition numérique : 978-2-85313-984-7
Sommaire
Prémisses et promesses
Ô mon pays campé sur la colline
Une histoire d’amour
C’est en apprenant que l’on apprend
Un train le long de la mer
Une fille de son temps
Chiara & Chiara
Les sons d’un clavier
Hôtesse de l’air ou pédiatre ?
Le crash
Vingt-cinq minutes
Un pas après l’autre
« Mes jambes folles »
La robe de mariée
elle et nous
Choses vues d’en bas
Chiara, l’obscurité et moi
Postface
Dans la même collection
Fin
À Teresa et Ruggero pour nous avoir donné Chiara.
Et à Chicca, pour m’avoir convaincu d’écrire ce livre.
Prémisses et promesses
La sainteté est une affaire mystérieuse, qui échappe et fascine comme rien d’autre.
L’histoire se corse pour ceux qui – et tel est mon cas – ne savent pas ou ne veulent pas croire que, de ce côté du Ciel ou de l’autre, il existe un Dieu capable de tout faire coller.
Bon. Au cours de ma vie, un étrange coup du destin m’a fait croiser pas mal de saints ou de gens soupçonnés de l’être.
Je les ai rencontrés personnellement, bien entendu. Je ne fais pas référence seulement à ces foules de bienheureux que, comme tout le monde, j’ai eu la chance de croiser et reconnaître, tout en sachant qu’ils n’atterriraient jamais sur un calendrier. Non, je dis de vrais saints, avec leur brave cortège de postulateurs, de causes arrivées à la dernière ligne droite, d’ aficionados très dévoués. En commençant par ma catéchiste (la future bienheureuse Maria Orsola) et en poursuivant avec deux des plus chers amis de ma jeunesse, Carlo Grisolia et Alberto Michelotti, dont les causes de béatification sont en cours. Il faut même ajouter deux papes (Paul VI et Jean-Paul II) ainsi que des champions de la foi de l’envergure de Chiara Lubich, Igino Giordani et Mère Teresa. Du beau monde, sans doute, avec qui j’ai eu la chance d’avoir des relations personnelles, insuffisantes toutefois pour devenir la personne meilleure que j’aspirerais à être ou pour m’arracher à cet agnosticisme qui me colle à la peau depuis des décennies. Si bien que je ne saurais même pas dire si de telles fréquentations épisodiques ont eu une trame, un but, un sens ou si elles furent le fruit d’une pure coïncidence.
Sans parler de Chiara Badano.
Chiara Luce Badano.
La meilleure amie de ma sœur Chicca.
Contrairement aux très honorables personnages mentionnés plus haut, Chiaretta 1 je l’ai vue grandir, passer de la petite fille à la jeune femme, de l’enfant pleine de rêves à la malade en phase terminale, de la personne apparemment ordinaire au témoin extraordinaire de sa Foi. C’est peut-être pour cela que sa pensée a continué, même après sa mort, à m’accompagner dans les innombrables enchevêtrements de ma vie et à toujours resurgir des creux les plus profonds de mon intimité.
Pourtant, je ne l’ai pas bien connue de son vivant. Un peu par ricochet, comme cela arrive souvent avec les meilleures amies de nos sœurs. Mais, de cette position marginale et insignifiante, j’ai beaucoup vu et entendu. Peut-être bien plus que ne le permettaient nos rencontres épisodiques et les croisements hasardeux ou forcés de nos existences respectives : si différentes d’ailleurs par l’âge, le milieu culturel, les goûts et le tempérament.
Le témoin absolument décalé d’une histoire franchement extraordinaire : voilà ce que j’ai été. Comme un quelconque centurion sur le Calvaire, un brancardier à Waterloo ou le concierge des Tours jumelles. Mais une histoire qui m’a marqué ; de la même façon qu’elle a marqué les nombreuses personnes qui n’ont connu Chiaretta qu’ après. Une histoire que je veux essayer de retracer dans le bouquin que je me prépare à écrire avec le soutien fondamental de ma sœur et des parents de Chiara (que j’aime énormément depuis plus de vingt ans). Avant tout pour vérifier si, par hasard, entre-temps quelque chose a pu m’échapper. Quelque chose d’important qui la concerne, ou qui me concerne… Surtout, j’aimerais bien faire les choses, en essayant, dans la mesure du possible, de fuir les pièges et les idées reçues qui caractérisent toute enquête rétrospective. Je chercherai jusque dans les recoins, surtout les moins fréquentés par les hagiographies classiques, en fouinant même là où l’éclat de la sainteté efface aussi bien les détails que les contours.
J’avoue aussi nourrir l’espoir de trouver en Chiara Luce un bon nombre de défauts. Non par goût de la contradiction iconoclaste, mais parce que je ne crois qu’à une des deux possibilités suivantes : ou bien, un saint sans défaut n’est pas si saint que ça, ou bien, en dépit de ce qui m’a toujours été raconté, la sainteté n’est pas une affaire pour tout le monde.
En ce moment, si je repense à Chiara Luce telle que je l’ai connue, il n’y a que deux choses que je sais ou pressens. Primo : on ne naît pas déjà saint car la sainteté, en plus d’être un choix, est un métier que l’on apprend au fur et à mesure. Deuzio : une histoire de sainteté n’a pas de fin heureuse, parce qu’il s’agit d’une histoire qui ne finit pas.
Ceci dit, cher lecteur, suis-moi. Si tu en as envie…
(1) Chiaretta est le diminutif du prénom Chiara. Il exprime une marque d’affection toute particulière.
Ô mon pays campé sur la colline
Sassello. C’est un de ces villages ordinaires qui somnolent depuis des siècles sur les hauteurs surplombant la mer ligurienne. Une variété d’hybrides dont on ne saurait dire s’ils sont les enfants d’une colline en proie à des envies de grandeur ou d’une montagne trop timide. Terre de frontière entre le couchant et le levant 2 , là où les Alpes s’adoucissent jusqu’aux Apennins. Un endroit pour passionnés de gîtes ruraux paisibles, VTT, ornithologie et autres agréments. L’arrière-pays ligurien est plein de lieux de cette espèce.
La première fois que j’ai entendu ce nom (par Chiara elle-même, j’imagine), je crois avoir tout de suite pensé par assonance au Brescello de don Camillo. Un de ces lieux à la fois délicieux et étouffants, parfaits pour y situer une histoire de province, remplie de valeurs limpides et antinomiques comme les aimait bien Guareschi 3 , ou, inversement, pour en dévoiler les contradictions extrêmes mais bien cachées sous la tranquillité laborieuse et l’hypocrisie typique d’un provincialisme bien de chez nous.
C’est là que Chiara Badano est née. Elle aimait Sassello de tout son cœur : parce que c’était sa terre, où habitaient ses gens. Chiara aimait tout de Sassello, les recoins les plus enfouis, les paysages environnants, les personnes. Elle disait que quand il neigeait on aurait dit une petite Suisse. Je crois que si Chiara n’avait pas grandi à Sassello nous n’aurions pas eu une Chiara Luce.
La route monte de la mer d’Albissola jusqu’à cette petite vallée où s’alternent rétrécissements et élargissements. C’est un peu comme la vie de la petite Chiara. Je n’y songe que maintenant, alors que je reviens à Sassello dans un but bien précis.
Le village est dominé par le mont Beigua d’où naît le torrent Sansobbia qui a creusé la vallée. Il se situe à un peu moins de 400 mètres d’altitude et il a environ 1 800 habitants répartis en à peu près 900 familles, et bien plus en été. Il est jumelé avec une petite ville espagnole appelée Alquerías del Niño Perdido et il a le même saint patron que Turin, ma ville : saint Jean-Baptiste que l’on fête