Impressions d une vie
262 pages
Français

Impressions d'une vie , livre ebook

-

262 pages
Français

Description

A peine sorti de l'enfance et toujours affecté par la défaite de la France, le contre-amiral (CR) Louis Le Hégarat détermine sa voie et s'y engage sans réserve. Officier de marine, il exprime les impressions qu'il retient de certains événements vécus de 1953 à la chute du mur de Berlin. Ayant servi dans une unité de fusiliers marins en Algérie, il dit ce qu'il a ressenti sur le moment et bien plus tard à l'occasion de cette mission. Ayant quitté la Marine, l'auteur s'engage dans la vie politique. L'ancien militaire exprime, sans ambages, ses appréciations de la vie politique vécue de l'intérieur.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 novembre 2010
Nombre de lectures 169
EAN13 9782296447370
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

A Odile,mon épouse, et à ma filleSophie, qui ont supporté ces
impressions.

Ames parents qui m’ont ouvert les portes dularge.

"Lepassécommelerestenenous parvient qu’à travers le présent.
Nous le construisons comme nous pouvons et il finit toujours par
ressembler beaucoup plusà cequenous sommesaujourd’hui qu’à ce
qu’ilétaithier."
Jean d’Ormesson-Une fête en larmes–R LaffontParis2005

Avant propos

***

Lesévénements sesuccèdentaucoursd’unevie et j’aieula
certitude en les vivant qu’ilsétaientgravésdans mamémoire.Bien
sûr l’oubliamisdel’ordre dansces souvenirs.Voire…jenepuis
garantir qu’il n’yait pasintroduit quelques désordres.

Aprèsbiendeshésitations j’aichoisiderapporter simplement
quelquesévénements qui ontjalonnémon parcours. Jepropose
unelecturesincère,sinonauthentique, d’unevie, demavie. En
cette année2004, au momentde commencer,jenesais pasencore
cequejevaisconfierà ces pages, et pournepasêtre bridéparun
cadrequejemeserais imposéprématurément,jelesintitule
simplement"Impressions".Desimpressions,venuesd’une
tranquille explorationdemamémoire. Jeneraconteniune
histoire,ni monhistoire.Jenetranscris que des impressions que
j’aiéprouvées lorsdequelquesévénements qui m’ont marqué et
quej’ai retenus maisdont jenepeuxgarantir lastricte exactitude
historique. Les souvenirsdes périodes récentes sontévidemment
plus précis mais ils n’ont pas, en revanche,lerecul qu’ont les plus
anciens.

Jemepromèneraidonc dans mes souvenirscommej’aime àle
faire en parcourant les sentiersdenoscampagnes ouencore en
regardant lameret sonhorizon.Écriremescheminementsest
probablementhasardeux.Jesais quejeprendsainsi lerisque de
décevoiret peutêtremême depeiner.C’est pourquoije demande
quel’onveuille bien mepardonneraunomdel’amitié.

Première Partie

Del’École communale àl’Écolenavale

Chapitre Premier
L’enfance

1-C’était la guerre !

Si loin quejeremonte dans mamémoirej’ai lesentimentde
m’êtreouvertaumonde desadultesvers 1942.Drôle demonde en
véritCé !ar monenfance fut marquée,par la guerre déclarée en
1939et surtout par lesconséquencesdela défaite de1940.Maisà
partirde1943les réalitésdela guerre devinrentvéritablement
oppressantes pour tousetcette ambiancepesanten’épargnait pas,
loin s’enfaut,le garçonde10ans quej’étaisalors.La guerre,jela
connaissais, àvraidirejene connaissais qu’elle.Interminable,
cruelle, humiliante, ellem’était, d’une certaine façon, familière.En
écoutant lesconversationsdesgrandes personnes jem’efforçais
parfoisd’imaginerfurtivementuneFrancesansguerre et sans
occupants,maiscemondelà,quejesouhaitais siardemment,me
paraissait procéderd’un idéal inaccessible.Après les premiers
revers qui m’avaient profondément révolté et peiné,jesuivais tous
les jours lalenteprogressiondesalliés.Laprésence desAllemands
étaitunevexation permanente etDieusait s’ilsétaient présents,
installésdans lesdeuxchâteauxduBourgBlanc àquelques
centainesdemètresdenotremodeste demeure familiale dela
campagne dePlourivo prèsdePaimpol.Cetteprésencem’offensait
maiselleneme faisait pas peur,j’estimaisaucontraireque
beaucoup tropd’adultesétaientbien timorés,qui,sanscesse
exhortaientàlaprudencelesgarçonsdemonâge.

C’était la guerre.Elleoccupait toutes mes pensées quandmon
esprit n’était pasabsorbépar lescontingencesdumoment:le
ravitaillement, et puis surtout l’école,l’école,l’école…La
présencepesante et presquetranquille des soldatsallemandsdans
notrepaisible hameaubienàl’écartdetoutcentre apparent

d’intérêt, avaitquelque chose d’incongru,voire d’indécent.Les
occupants se comportaient comme des propriétaires ordinaires et
définitifs des lieux.Les appréciationsélogieusesde certains de mes
compatriotesqui insistaient sur leurcorrectionm’exaspéraient.
Cette situationétait insupportable et ilfaudraitbien y mettre finen
leschassant.Je guettais tous lescommentaires quiaffirmaientque
lavictoire desalliésfinirait pars’imposer,j’auraisvouluêtre
insensible auxcommentairesallantdans l’autresens,mais ils
m’atteignaient profondément.

C’était la guerre.Alors quetropdeFrançaisaffichaient leur
résignation,ilyavaitheureusementdans monentouragequelques
personnescourageusesetd’abord bien sûr,mamère.Elle faisait
facetouteseule depuisbientôt troisansauxdifficultésdetous
ordresdelapériode.Jen’ai pas lesouvenirdel’avoirentenduse
plaindre.C’estavecsonaccordquemon père avait quittéla
métropolepourcombattre, ailleurs, cetennemi qui nousentourait.
J’essayaisd’imaginer oùpouvaientêtremaintenant mon père etun
demes oncles,quiavaient rejoint tousdeuxlesForcesNavales
FrançaisesLibres.Jenemanquais jamaisd’adresseravantde
m’endormiruneprière àlaViergepour luidemanderde bien
veiller sureuxetdeles ramenervivantsetvictorieux,leplus tôt
possible.J’éprouvais poureuxdeuxet tous lesautres "gaullistes"
une admirationetune fiertéprofondes maiscontenues.

Ilavaitfalluattendre1943pour queles partisansduGénéral
cessentdesetaire.Jemesouviensavoir subiauparavant, àl’école,
desvexations, commeparexemple celle d’être considéré comme
filsdu"déserteur"!Déserteur ?Jenemesouviens pasd’avoir
douté del’issue dela guerre.Jemesouviensen revanche d’avoir
enragé de devoir, àl’école, dessiner leportraitduMaréchal– au
faitc’est peutêtrepourcelaquejenepourrai jamais,par lasuite,
dessiner quoi que cesoitdeprésentable.Fin 1943 c’était sûr,le
ventavait tourné,lesalliés s’étaient repriset marchaientvers la
victoire,mais quand donc arriveraient-ils ?Detempsen tempsun
tract larguépar lesavionsanglais remontait lemoraldes "vrais
Français".J’enavaisconservéun,longtemps,qui sentaitbon
l’Angleterre,lerevanche,laliberté,lavictoirce :’étaitun tract
annonçant lamise en service d’unchasseurallié-
leMustang

14

dont les performances annoncéesétaient exceptionnelles.C’était
une preuve écrite,s’ilen fallaitune,quenotrelibérationétait
entreprise et j’imaginais toutceque cenouvelavion pouvait nous
apporter.

C’était la guerre.J’imaginais tout particulièrement les
affrontementscruelsen meravec ces sous-marinsallemandsqui
infligeaientdelourdes pertesauxflottesalliées. J’avaisfroid dans
le dosàl’annonce dutonnage descargoset pétrolierscoulés.Je
suivais laprogressiondesalliés sur tous lesfrontsenécoutant,
malgrél’interdictiondel’occupant,laBBCet sonémissiondes
«Français parlentaux Français».Nousavions trouvéune carte
d’Italie et nous marquionsd’une épinglelapositiondenosarmées.
LesdébarquementsenAfrique duNordpuisenSicile après les
âprescombatsdeTunisie étaientautantd’événementsacclamés ici
comme d’authentiques victoires.Lapropagandenazie avaitbeau
apposerde grandesaffiches montrant la carte d’Italie etunescargot
auxcouleursalliées remontant la botte et soupirant, «It’salong
way toRome !», celanetrompait plus personne.Lesalliés
progressaient partout,lesRussesenfonçaient lesarmées
allemandes.Jevoyais, audessusdePaimpoletducampallemand
dePlounez,les raidsdesbombardiersen piqué delaRAF, attaques
accompagnées par lesclaquements rageursdelaDCAallemande et
ponctuées par lesexplosions sourdeset puissantesdesbombes.Les
survolsdesformationsde forteressesvolantesdevenaientfréquents
et jem’enthousiasmaisendénombrant lesappareilsvolanten
altitude, horsdeportée delaDCA,versdelointainescibles
allemandes.Lesannoncesdepertesdesous-marinsallemands se
succédaientdepuisquelquesmois.Lesalliésgardaient lamaîtrise
delamer indispensablepour libérer laFrance.Ici mêmeles
occupantsallemandsduchâteau voisindevenaientdeplusen plus
vieux,larumeur rapportaitqu’ils revenaientdufront russe.Les
collabosfaisaient, disait-ondans monentourage, grisemine.
L’issue, dont jen’avais,jelerépète,jamaisdouté, étaitmaintenant
proche.<

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