Les lettres d Alep
150 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

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Description

Juillet 2012, la guerre fait rage en Syrie depuis un an et demi. Les auteurs, tous les deux alépins, sont restés sur place. Tout au long de ces années de guerre, ils ont écrit des lettres à l'intention de leurs amis. Ils brossent un tableau de la situation et racontent les souffrances des déplacés, la misère des pauvres, la détresse des habitants et l'atrocité de la guerre. Ce livre n'est pas un ouvrage politique ; les auteurs ne prennent pas position, ne racontent pas les faits militaires, ne jugent pas les parties. Ils décrivent leur réponse à ces drames par l'accompagnement, la solidarité, la compassion et le don de soi à travers leur association, les "Maristes Bleus".

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Informations

Publié par
Date de parution 12 mars 2018
Nombre de lectures 0
EAN13 9782336829470
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,1200€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Nabil ANTAKIet Georges SABÉ Les lettres d’Alep
Contact Les Maristes Bleus Alep-Sxrie Facebook : Maristes Alep E-Mail :nabilantaki@hotmail.com frgsabe@hotmail.com
© L’Harmattan, 2018 5-7, rue de l’École-Polytechnique, 75005 Paris http://www.editions-harmattan.fr EAN Epub : 978-2-336-82947-0
F Leyla, Le cœur de notre trio depuis le début.
Avant-propos
Ce livre n’est pas un ouvrage politique, ni une chronique de ce qui se passe en Syrie. La guerre atroce qui s’y déroule a déjà fait, en sept ans, plus de 3 50 000 morts, 500 000 blessés, un million d’exilés, quatre millions de réfugiés dans les pays limitroph es et huit millions de déplacés internes qui n’habitent plus leur domicile. Elle a démoli l’infrastructure du pays, ruiné l’économie, détruit un patrimoine archéologique unique au monde, poussé l’ élite à l’exil, volé l’enfance des petits et l’avenir de plusieurs générations de Syriens. Pourtant, ce livre ne prend pas position, ne raconte pas les faits militaires, ne juge pas les parties, ne rentre pas dans les négociations et ne prédit pas l’avenir. Il est tout simplement la compilation de lettres écrites par deux témoins syriens, l’un religieux, l’autre médecin, qui ont vécu la guerre dans leur ville, Alep. Ils racontent, dans ces lettres, les souffrances des déplacés, la misère des pauvres, la détresse des habitants et l’atrocité de la guerre ; et ils décrivent aussi leur réponse à ces drames par l’accompagnement, la solidarité, la compassion et l e don de soi à travers leur association, les « Maristes Bleus ». Ce livre se veut être un témoignage de Solidarité, un acte de Foi, un message d’Espérance et un hymne d’Amour.
Prologue
Il fait très chaud à Alep ce lundi 23 juillet 2012. Comme tous les jours, nous quittons nos domiciles vers 9 heures du matin pour aller à notre local au quartier de Cheikh Maksoud situé sur une colline à la périphérie nord de la ville. Des familles chréti ennes, qui étaient venues s’installer là il y a une cinquantaine d’années, ont changé son nom et l’ont baptisé Jabal Al-Saydé, ou la colline de Notre-Dame. C’est le quartier le plus pauvre d’Alep. Dans notre local, nous avons regroupé l’ensemble de nos activités pédagogiques à l’intention de ces familles que nous secourons. Ce jour-là, en allant à Jabal Al-Saydé, nous voyons des colonnes de fumée monter vers le ciel et croisons des dizaines de milliers de personnes port ant des baluchons et errant dans les rues, à la recherche d’un abri. Certaines se sont installées dans les jardins publics, mais la majorité a forcé les portes des centaines d’écoles publiques qui étaient fermées à cause des vacances d’été et s’y sont installées. En quelques jours, 500 000 personnes ont quitté leur domicile situé dans les quartiers est et sud d’Alep et sont devenues des déplacées. Elles le sont toujours. Les quartiers qu’elles habitaient ont été pris par les rebelles et sont le théâtre de violents combats. À Jabal Al-Saydé, il y a 4 écoles publiques où se sont entassées environ 300 familles. Démunies de tout, logeant dans des écoles sans eau, ni électricité ni sanitaires, elles n’ont ni matelas pour dormir, ni nourriture pour survivre. Impossible de rester indifférents ! Sans hésiter, notre groupe décide de les prendre en charge. Avec une trentaine de bénévoles, nous nous rendons dans ces 4 écoles et tentons de remédier au plus urgent. Les jours suivants, pour nous identifier, nous portons tous des T-shirts bleus. À notre arrivée, les déplacés crient : Les Bleus sont arrivés ! Ce jour-là, notre groupe prend pour nom les « Maristes Bleus » (bleus pour la couleur des T-shirts et Maristes parce que, religieux consacrés et personnes laïques, nous partageons le charisme, les vertus, 1 les valeurs et la spiritualité des « Frères Maristes » ). Mais notre histoire ne commence pas ce jour-là. Elle a débuté il y a bien plus longtemps.
*****
C’était en 1986, en avril plus précisément. Frère G eorges SABÉ, un Frère Mariste alépin découvre, en raccompagnant la cuisinière du couvent chez elle, qu’elle habite un bidonville. « Le camp des Arméniens » se trouvait en pleine ville d’Alep, mais peu de gens connaissaient son existence parce qu’il était entouré de murs assez hauts pour ne pas être vu de l’extérieur. Des Arméniens, fuyant le génocide en 1915, s’étaient donc installés dans des baraques de fortune sur ce terrain. Au fil des ans, ayant travaillé dur, ils ont pu le quitter pour s’installer dans des immeu bles convenables. Ainsi, au fil des années, des familles pauvres s’y succédaient. Frère Georges, avec lequel mon épouse Leyla et moi entretenons une relation assez profonde et travaillons ensemble dans le domaine du scoutisme et de l’éducation des jeunes, nous a fait part de sa découverte. Surpris, nous avons été voir et nous avons découvert la misère. Nous avons trouvé là 100 familles, souvent nombreuses, habitant chacune une baraque en tôle de 4 m x 4 m. Il n’y avait que deux robinets d’eau et deux sanitaires pour tou t le bidonville. De plus, elles venaient de recevoir un avis d’expulsion de la municipalité qui voulait agrandir la cour de récréation d’une école publique avoisinante ; avis d’expulsion sans dédomm agement puisque le camp était installé illégalement sur un terrain municipal. Les bulldozers étaient là, prêts à démolir le camp. Devant la catastrophe qui guettait ces familles, nous ne pouvions pas rester de simples spectateurs de ce drame humain. Dans l’urgence, nous avons relevé le défi et tenté de leur trouver un logement
décent. Grâce à la générosité de nombreux donateurs, nous avons commencé à acheter de petits appartements où nous logions les familles en prenant soin d’inscrire, au registre foncier, l’appartement en leur nom. Elles devenaient ainsi propriétaires, pour la première fois de leur vie, elles qui n’avaient jamais rien possédé que leur misère. Pour nom, nous avons choisi les initiales L.B. Chez ces familles, nous avons découvert la pauvreté extrême, matérielle et le plus souvent mentale. Il fallait les aider à se mettre debout, sur pied. Avec des dizaines de jeunes bénévoles, nous les avons accompagnées pour leur apporter une aide psychologi que, leur trouver un emploi, soutenir leurs enfants dans leurs études et surtout, être présents à leurs côtés. Au fil des ans, le nombre de familles accompagnées a dépassé le nombre des habitants du camp des Arméniens. Elles sont devenues des centaines, toutes des pauvres parmi les plus pauvres d’Alep. En 1995, L.B. a été rebaptisé en « L’Oreille de Dieu ». C’est ainsi qu’avec Margot, frère Hakim et des cent aines de jeunes adultes, nous avons poursuivi durant vingt-six ans, jusqu’en 2012, notre action de solidarité et caritative pour secourir les plus démunis d’Alep. Mais celle-là est une autre histoire. Nous la raconterons peut-être un jour.
*****
Le 15 mars 2011, les « évènements » commencent en S yrie. Au début, Alep fut relativement épargnée. La vie continuait normalement, quoique la guerre s’approchât rapidement, atteignant la campagne autour de la ville. Puis, des voitures piégées, des incursions momentanées des rebelles en ville, des escarmouches armées dans les quartiers périphériques signifiaient que les évènements allaient se précipiter chez nous. Et arrive le 23 juillet 2012, date de l’invasion et de la prise des quartiers est et sud d’Alep par les rebelles. En quelques jours, 500 000 personnes se déplacent vers la partie tenue par le gouvernement. C’est à ce moment que notre groupe « L’Oreille de D ieu » se métamorphosa en les « Maristes Bleus ». 2 Nous étions en contact permanent avec une amie française très chère, Françoise Parmentier qui téléphonait tous les jours pour prendre de nos nouvelles. Très vite, elle décide de lancer un appel à travers son carnet d’adresses pour une campagne de dons en notre faveur. Françoise nous suggère d’écrire une lettre pour expliquer la situation aux donateurs re potentiels. C’est ainsi que fut écrite la 1 lettre d’Alep. D’autres l’ont suivie d’une façon irrégulière jusqu ’à ce que nous décidions de les écrire une fois tous les trois mois, alternativement, frère Georges et moi. Dès le début, la diffusion de nosLettres d’Alep a été fulgurante. Elles sont traduites en anglais, espagnol, italien, portugais et allemand et touchent des dizaines de milliers de personnes. Elles tissent une toile d’amitié internationale autour des « Maristes Bleus ». Beaucoup d’amis, de journalistes et même des écrivains et des maisons d’édition nous ont suggéré de les publier mais nous avions jugé, à l’époque, que c’était prématuré. Maintenant que les combats ont cessé à Alep, nous pensons le moment venu de les colliger et de les publier. Nous les éditons telles quelles, sans aucune modification.
*****
Nous racontons dans nos lettres les drames que nous avons vécus à travers les nombreuses personnes de nos proches qui ont été tuées, blessées, amputées ou disparues ; la misère et la souffrance des familles déplacées que nous avons secourues et qu’i l fallait loger, nourrir, vêtir et soigner ; la
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