Voyage vers le destin
16 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Voyage vers le destin , livre ebook

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Description

Comment pouvait-elle savoir, en quittant la misère, qu'elle allait vivre l'horreur ?

Lorsque je suis partie d’Anjouan, je ne savais pas à quoi m'attendre, ni ce qui allait m’arriver. Étant encore une enfant, j’étais surtout heureuse de quitter une famille au sein de laquelle je ne m’étais jamais sentie à ma place. Cependant, les choses ne se sont pas déroulées comme je les avais imaginées.

Voici le récit de vie poignant et authentique d'une jeune fille des Comores.

EXTRAIT

Je ne me souviens pas exactement du jour de notre départ. Un après-midi, mon cousin Bacar m’a demandé de ne pas sortir avec les autres enfants de la famille en sachant que je m’étais habituée à nos virées. Lorsque nous sommes partis, mon cousin a pris avec lui le peu d’affaire que je possédais puisque lors de ce genre de traversée, il faut toujours voyager léger. Il m’a enfilé un tee-shirt à manches longues prêté par une de mes tantes, pour éviter que je ne prenne froid durant le voyage en mer ; ce tee-shirt appartenait à ma cousine qui s’appelle Ida, il s’agissait d’un cadeau de son père que je n’ai jamais rendu.
Nous sommes sortis de la maison pour nous diriger vers la mer où nous devions partir. Étant nombreux, tous ceux qui nous croisaient savaient bien où nous allions car ce défilé, ils y étaient tellement habitués qu’ils n’y prêtaient plus attention. Au contraire, beaucoup semblaient envier ceux qui partaient car selon eux : ils ont les moyens et le courage pour partir surtout dans des conditions déplorables. Nous sommes arrivés à la mer où nous devions partir car le départ n’allait pas se passer dans un aéroport ; les gens ont dû nager quelques mètres pour accéder à la barque. Je n’ai pas eu besoin de faire cet acte car mon cousin m’a portée sur ses épaules. Mon cousin était un habitué comme beaucoup de gens. Avant mon départ pour Mayotte, mon cousin avait déjà effectué plusieurs allers et retours entre Mayotte et Anjouan, et à chaque départ, il prenait la barque de son frère. Je ne pense pas que j’aie ressenti la peur un seul instant durant la traversée, une chose est sûre : je suis incapable de le refaire. Je ne dirais pas que je n’avais pas le choix car tous ceux qui le font semblent ne pas l’avoir non plus, malheureusement. La misère qui sévi dans nos îles nous pousse à quitter femmes, enfants, mères et pères pour l’eldorado de Mayotte.

À PROPOS DE L'AUTEURE

Ansufia Bacar est née le 22 décembre 1989 à Mirongani aux Comores. Elle est arrivée à Mayotte à 7 ans. Elle a fait ses études à Mamoudzou et obtint son baccalauréat technologique spécialité Gestion des Ressources Humaines en 2009. Elle a suivi des études de sociologie à Amiens, et en parallèle, a poursuivi une formation de juriste d’entreprise, obtenue en 2016. L’écriture a toujours fait partie de sa vie, elle y porte un grand intérêt, au point d’y consacrer une grande partie de son temps, malgré son emploi d’agent commercial.

Informations

Publié par
Date de parution 29 janvier 2020
Nombre de lectures 42
EAN13 9791023610734
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0027€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Ansufia Bacar
Voyage vers le destin


« Cette histoire est triste mais au moins c’est la mienne. »
« Ne me jugez pas vous ne savez pas ce que j ’ai pu endurer. »
Tu ne m’as pas détruit mais tu as juste fait de moi une infirme.
Sous cette plume je ne raconterai que mon vécu, peut-être qu’il m’arrivera de comparer ce qui est comparable sans le vouloir.
Je viens d’un petit village qui se trouve dans ce qu’on appelle, dans le jargon comorien « Bavou la Chissioini », c’est un village situé à quelques kilomètres de la capitale d’Anjouan. Il se nomme Mirongani, lequel se situe dans le pays Comoros, dans la division administrative suivante : île Autonome d’Anjouan. Mirongani a une population de 882 habitants, ce qui représente 0,33% de l’ensemble de la population de la région.


Île Autonome d’Anjouan
Je suis née dans une famille nombreuse de sept enfants, je suis le troisième enfant de mes parents ; ma mère est la troisième épouse de mon père et la dernière. Mon père , loin de la polygamie, s’est remarié trois fois après deux divorces. Il s’est marié à une première femme avec qui il a eu une fille que je n’ai rencontrée que deux fois alors qu’on vivait dans la même ville durant plus de deux ans. Parce que ma demi-sœur n’acceptait pas notre famille paternelle du fait que notre père ait divorc é d’avec sa mère ; après sa séparation, il s’est remarié mais il n’a pas eu d’enfant. Étant donné qu’il n’a pas eu d’enfant avec cette dernière, alors il a divorcé pour se remarier avec ma mère, qui lui a donné ce qu’il a toujours cherché « les enfants », sept enfants dont je suis la troisième.
Contrairement au système marital Africain, aux Comores c’est le mari qui intègre la famille de sa femme. C’est ce que les anthropologues appellent « système matrilinéaire ». En cas de divorce, c’est l’homme qui part de la maison, cette maison est la propriété de la femme. Dans le système comorien, c’est la famille de la femme qui construit la maison conjugale et ceci pour éviter qu’en cas de séparation la femme ne se retrouve à la rue avec ses enfants.
Donc, on comprend l’instabilité familiale de mon père du fait qu’après chaque mariage il a dû se déplacer pour suivre sa femme. L’union de mes deux parents était loin d’ être un coup de foudre, mon père ayant été confié par sa mère à ma grand-mère maternelle, toutes les deux étant amies. Mon père, étant le cadet de sa mère, et cette dernière se trouvant malade, avait fait un vœu à son amie qui était celui-ci :
– Occupe-toi de mon enfant car celui-ci a un bon cœur.
Et ma grand-mère maternelle mourut alors que mon père n’ était encore qu ’un enfant. Et mes grands-parents maternels s’en occupèrent comme si celui-ci était le leur. Par cet immense geste mon père fut élevé par ses futurs beaux-parents et vit grandir celle qui allait être sa femme et mère de ses enfants sans le savoir. Je me souviens d’une anecdote qu’il m’a dite un jour : lorsqu’il était jeune, alors qu’il vivait avec mes grands-parents maternels, il disait tout le temps à ma grand-mère que ma tante sera sa femme et apparemment cela faisait ricaner ma grand-mère.
Après deux divorces, mon père souhaitait se remarier et l’un des oncles de ma mère dit à mon père :
– Tu t’embêtes à chercher une femme alors que ma sœur a plusieurs jeunes filles.

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