L homosexualité au front durant la Grande Guerre
98 pages
Français

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L'homosexualité au front durant la Grande Guerre , livre ebook

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Description

Sujet tabou, l'homosexualité durant la Grande Guerre n'a pratiquement jamais été abordée. Le patriotisme et l'honneur souffraient de ces pratiques "contre nature" et il convenait donc de les taire. Longtemps soumise à la loi du silence, l'armée a peu à peu dévoilé ses secrets et le Service Historique de la Défense a rendu disponibles les dossiers des conseils de guerre et les archives. C'est ainsi qu'a pu être étudié le cas du caporal Moret, fusillé le 10 mars 1915 pour "abandon de poste en présence de l'ennemi". En fait, il avait quitté sa tranchée pour tenter de rendre compte à l'aumônier des actes homophiles auxquels se livraient les hommes de son escouade. L'auteur livre un ouvrage hybride où la fiction complète habilement les données authentiques sur lesquelles il s'appuie.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 03 mars 2020
Nombre de lectures 1
EAN13 9782336895024
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0950€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
4e de couverture
Titre
Jean-Michel AUXIÈTRE avec le concours d’Yves Guiet, historien





L’homosexualité au front durant la Grande Guerre

Le témoignage dérangeant du caporal Moret



Postface de Bernard Héraud
Copyright
Du même auteur


Jacques Lanzmann ou le sens de la marche , Université François Rabelais, Tours, 1994
Par monts et par mots , Éditions L’Harmattan, Paris, 2000
Tsomo, l’exilée tibétaine , Éditions L’Harmattan, Paris, 2010
La Route des copains , Éditions Publibook, Paris, 2011
L’Aristocrate et le brayaud , Mon Petit Éditeur, Paris, 2012
L’Inde qu’il ne faut pas voir , Éditions L’Harmattan, Paris, 2012
L’Ermite de Mafate , Mon Petit Éditeur, Paris, 2012
La Ballade de Martin Nadaud , Mon Petit Éditeur, Paris, 2013
Petits bonds en arrière , Mon Petit Éditeur, Paris, 2014
Nouvelles vagues , Mon Petit Éditeur, Paris, 2015
Un paysan creusois en Antarctique , Éditions L’Harmattan, Paris, 2016
En Islande, sur la route du Pourquoi-Pas ?, L’Harmattan (Collection Les Impliqués), Paris, 2017








© L’Harmattan, 2020
5-7, rue de l’École-Polytechnique ‒ 75 005 Paris
www.editions-harmattan.fr
EAN Epub : 978-2-336-89502-4
Prologue
Il est deux personnes sans lesquelles le présent ouvrage n’aurait pu voir le jour. Bernard Héraud, un ami de longue date, m’instruisit tout d’abord du destin tragique de l’un de ses lointains parents, le caporal Jean, Auguste Moret, durant la Première Guerre mondiale, et sut me convaincre d’en effectuer la relation, le commentaire et l’analyse. Mais pour poser les bases de cette tâche ambitieuse, l’aide d’un historien compétent s’avérait indispensable. Elle me fut apportée par Yves Guiet, professeur d’histoire et géographie au lycée Raymond Loewy de La Souterraine (Creuse), dont l’excellente synthèse du dossier Moret, sur consultation des archives du Service Historique de la Défense, est la pièce maîtresse du récit qui va suivre.
Autour de ce document inspiré de l’authentique compte rendu du conseil de guerre exposant ce cas singulier, j’ai laissé errer mon imagination. De la jeunesse du héros, de sa personnalité, de ses conditions de vie antérieures, on ne connaît, en effet, qu’assez peu de choses. En outre les affaires de mœurs contre nature qu’il dénonce et ont, à ses dires, motivé son repli, depuis les tranchées de première ligne où il s’est senti menacé, s’appuient sur son seul témoignage. Ces assertions, comme on le verra, sont formellement démenties par les protagonistes supposés du drame – car c’est bien d’un drame qu’il s’agit – évoqué dans le rapport officiel. C’est pourquoi, en dehors de l’écrit d’Yves Guiet et des informations diverses fournies par Bernard Héraud, neveu de la troisième génération de Jean, Auguste Moret, on reste dans le domaine de la supposition, de l’hypothèse, de l’arbitraire.
Cet ouvrage n’énonce aucune vérité. Si le contexte historique et militaire est respecté et cerne au plus près la réalité du moment, si les faits et les propos révélés par le conseil de guerre et retranscrits par Yves Guiet, n’autorisent nulle controverse, l’affaire en elle-même, dans sa complexité et l’incertitude de ses données, doit être considérée avec la plus grande prudence. L’interprétation qu’Yves Guiet, Bernard Héraud et moi en avons faite et les conclusions qu’elle a entraînées, ne sont ni des affirmations, ni des thèses avérées. Elles ne sont que le fruit d’une intime conviction qu’un mûr examen du dossier et une recherche d’indices vraisemblables (mais non prouvés) ont ancrée en nous. De par l’absence d’éléments établis, de par l’abondance de situations fictives visant à combler les manques liés à une tragique réalité, Le témoignage dérangeant du caporal Moret est avant tout un récit, dont les racines plongent dans l’univers tangible, absurde et démentiel de la Grande Guerre.
1
En cette froide matinée de décembre, un léger manteau blanc recouvrait la campagne creusoise. Bernard et moi avancions lentement sur l’étroite route à lacets où s’inscrivait l’empreinte de nos pas. Nulle autre trace n’y apparaissait. Les alentours étaient déserts. Pas le moindre souffle de vent. Les branches des arbres, dépouillées de leurs feuilles, s’enchevêtraient en une géométrie statique et désordonnée que dédaignaient les corbeaux, retenus dans le lointain par quelques graines isolées qu’ils tentaient, à grands coups de bec, d’extraire de la terre enneigée où elles se trouvaient enfouies. Sous le ciel morne la nature, figée dans une immobilité sépulcrale, semblait endormie à jamais.
L’esprit occupé par diverses interrogations, nous n’échangions aucune parole. Tout demeurait étrangement silencieux. Seul le crissement de nos semelles sur la mince pellicule durcie par le gel venait troubler cette immense quiétude d’où sourdait une vague angoisse. Avec un peu d’imagination, on eût pu se croire enfermés dans un décor de bout du monde, ou aux limites secrètes d’une planète inhabitée.
Ce lourd silence me pesa bientôt. J’éprouvai le besoin de le rompre :
— Dis-moi Bernard, ça va ? lançai-je à mon compagnon de façon toute machinale.
— Oui, ça va, me répondit-il, sauf que j’ai une bonne bousinade ! Je n’aurais pas dû prendre ces mitaines qui ne protègent quasiment rien.
La bousinade. L’onglée. Ce simple mot me ramena quelque soixante-dix années en arrière, au temps où je parlais patois avec mes camarades de classe, tous fils et filles de paysans qui, comme moi, fréquentaient l’école de Jalesches. Depuis nos villages respectifs, nous parcourions chaque jour dix kilomètres à pied, aller et retour s’entend, pour nous rendre à ce temple du savoir où officiait une institutrice remarquable à qui je dois mon entrée au lycée et les études qui suivirent. La bousinade, ce froid intense qui saisit les doigts et les paralyse au point de ne plus pouvoir actionner une fermeture-éclair ou resserrer la lanière d’un cartable, j’en souffris souvent sur le chemin des aubes glaciales et des inquiétants crépuscules.
Aussi, dès que Bernard eut prononcé ce terme étranger aux non-initiés, mille souvenirs me revinrent en mémoire. Je me revis traversant la lande embrumée, chaussé de gros brodequins, engoncé dans un épais manteau, frileusement encapuchonné, cache-col au ras des yeux, et accompagné de ma grand-mère maternelle qui, à l’approche de la cinquantaine, n’hésitait pas à aligner les kilomètres pour me faciliter la route. Ce qui suscitait la risée des petits campagnards plus endurcis que moi.
Jalesches n’était pas bien loin du lieu où nous nous trouvions, et l’envie me vint de faire demi-tour pour revoir la petite école chère à mon cœur. Mais je me ravisai aussitôt. C’était une idée stupide. L’école n’existait plus, du moins dans sa forme initiale. Plus d’estrade magistrale, plus de pupitres, plus de bancs, plus de gros poêle en fonte que l’on alimentait en bûches apportées chaque matin et où l’on réchauffait notre déjeuner. Refait à neuf, l’intérieur du bâtiment avait été transformé en une mairie rutilante où Bernard Héraud occupa les fonctions de premier magistrat de 1995 à 2007.
C’est à cette époque que nous apprîmes à nous connaître et que naquit notre amitié. Nous travaillâmes conjointement sur le dossier du docteur Jean Turquet, et Bernard me procura la documentation précieuse – quoique rare – qui me permit d’étayer le roman Un paysan creusois en Antarctique (Éditions L’Harmattan, avril 2016). Nous avions également ébauché, sur les communes de Jalesches et Clugnat, le tracé d’un sentier de randonnée portant le nom du docteur Turquet, mais le temps et la disponibilité nous manquèrent pour parachever ce projet. Il est encore d’actualité et peut être repris à tout moment.
À l’origine du déclic qui me poussa à écrire Le roman du Docteur Jean Turquet, Bernard, depuis plusieurs mois, piquait une fois de plus ma curiosité en promettant de me révéler un sujet de nature exceptionnelle et qui le touchait de près, propre à fa

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