Anti-manuel de psychiatrie
84 pages
Français

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Anti-manuel de psychiatrie , livre ebook

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Description

À l'issue d'une longue carrière de rencontre avec les psychotiques, un psychiatre hospitalier cède à la tentation de transmettre un vademecum de psychiatrie éclairée par la philosophie phénoménologique. Il s'agit de déconstruire les savoirs académiques pour restituer l'incarnation des vécus des malades par leur récit en première personne : ceux-ci apparaissent alors comme des éclaireurs, aux confins de l'ontologie, en crise permanente face au surgissement des événements de vie qu'ils ne peuvent intégrer dans un monde partagé.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 12 juin 2020
Nombre de lectures 0
EAN13 9782336902210
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0800€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
4e de couverture
Collection
Psycho – logiques
Collection fondée par Philippe Brenot et dirigée par Joël Bernat
Sans exclusives ni frontières, les logiques président au fonctionnement psychique comme à la vie relationnelle. Toutes les pratiques, toutes les écoles ont leur place dans Psycho – logiques.
Déjà parus
Pascale CASTRO-BELLOC, Le pervers narcissique et ses masques. Le mythe, son cheval de Troie , 2020.
Cécile WYLER (dir.), La thérapie par la ChoZif’ ou l’art de mettre en scène l’inconscient , 2020.
Anna CURIR, Fernando DE FELICE, De la science-fiction à la science , 2020.
Stéphanie GERMANI, Coulisses de psychothérapies (en prison) , 2020.
Ginette JUBINVILLE, L’art et l’architecture au temps des premiers aliénistes français , 2020.
Jean-Paul DESCOMBEY, La psychiatrie sinistrée, toujours , 2019.
Claudine LEGUEIL BOURDIOL, Promenade en violence. Et si l’agresseur était aussi une personne ?, 2019.
Marie-France BLÈS, S’adresser à l’autre, Regards croisés sur le langage de l’adulte, du bébé et de l’adolescent, 2019 .
Bernard MAROY, La dépression et son traitement. Aspects méconnus , Nouvelle édition, 2019.
Pierre DELMAS, Petit traité de psycho-mythologie ou le pouvoir évolutif du mythe , 2019.
Patrick ALARY, Puisque je passais par là… De la psychiatrie de secteur à la réhabilitation polaire , 2018.
Myriam NOEL-WINDERLING, Vaincre vos traumatismes par la méthode IPSCi. Une histoire naturelle de la souffrance et de la guérison, 2018.
Didier BOURGEOIS, Le syndrome de Schopenhauer, Variante psycho-sociale des troubles du comportement à l’adolescence , 2018.
Titre
Pierre Legrand





Anti-manuel de psychiatrie

Manifeste pour une réconciliation entre psychiatrie et philosophie
Copyright


























© L’Harmattan, 2020
5-7, rue de l’École-Polytechnique, 75005 Paris
http://www.editions-harmattan.fr
EAN Epub : 978-2-336-90221-0
Exergue
Un homme se possède par éclaircies et même quand il se possède, il ne s’atteint pas tout à fait.
Antonin Artaud, L’ombilic des limbes
Préface
Non, je ne vais pas imposer aux éventuels lecteurs une autobiographie du psychiatre faisant retour sur quarante années d’exercice pour y dresser un portrait mythique : à mi-chemin entre Pasteur au service de la science, Schweitzer, médecin au service des Africains colonisés et Mère Térésa comme icône de la compassion… Louis Pasteur comme icône de la science qui sauve les vies, Albert Schweitzer comme icône de la médecine auprès des déshérités, Mère Térésa comme icône du sacrifice de soi au secours des pauvres… Savoir, Soigner, Aimer… Ces icônes ne sont pas absentes du monde de la médecine hospitalière mais elles font de l’ombre sur la clarté de la rencontre avec autrui…
Non, c’est un métier presque comme un autre… Toutefois, il peut survenir dans le fil d’une carrière au service des pauvres en esprit que la science dévoile la fragilité de ses fondements, un vide abyssal ne permettant pas de trouver un lieu stable pour la rencontre. Puisque la science a pris la place centrale de la connaissance de l’humain en prenant acte sur l’efficience de sa technique pour traiter les maladies avec un succès incontestable, il peut arriver à un psychiatre de terrain d’appeler à la rescousse la philosophie.
Ce texte tente de rendre compte de cette conversion vers la philosophie ou plutôt du chemin critique au sens d’une décision de se tourner vers autrui avec une autre posture, voire une absence de posture.
Comment la philosophie peut venir à un psychiatre ? Tel est le chemin que je vais tenter de vous faire suivre.
Pourquoi un anti-manuel ? Il ne s’agit évidemment pas de reprendre le chemin de l’antipsychiatrie, chemin politique qui a montré son impasse face à la réalité indépassable de la psychose qui résiste à toute explication contextuelle. Il y a une essence de la psychose que ne peut entamer une causalité, par exemple, socio-familiale. Dénier cette essence, ce serait dénier la maladie avec la souffrance indicible qui est liée aux vécus de malades mentaux. Il ne s’agit donc pas d’un manuel d’antipsychiatrie.
Anti-manuel, cela signifie un renoncement éthique pour se présenter dans la rencontre à mains nues, c’est-à-dire sans le secours d’un manuel, d’une technique qui vont constituer autant d’obstacles à cette rencontre avec un autre moi-même. Toutes les taxinomies ont eu pour objectif de dresser une ligne de partage entre les normaux et les anormaux.
Du côté de la philosophie, le fou prend la place de l’être dénué de raison comme un avatar de l’être de nature, un animal doté d’un langage dont il ne fait usage que dans l’insensé. Le fou peut parfois prendre une posture critique comme un persan venant d’un autre monde pour visiter le nôtre et s’autoriser une fausse naïveté du regard.
Du côté de la médecine, le fou a perdu une fonction essentielle qui le place à la limite de l’humain, fonction d’un organe cérébral ou fonction d’un comportement adapté à la norme. Certes, la médecine contemporaine depuis Cangulihem n’assimile plus la norme à une quantité mesurable mais plutôt à une capacité d’adaptation au monde autorisant de remplacer le concept vague de guérison par celui de restauration, toutefois, la norme n’a pas été éradiquée de la pensée médicale.
D’ailleurs, puisque l’anti-manuel veut se défaire de tout préjugé, il faut aussi se demander si la psychiatrie comme médecine de la conscience peut rester dans l’orbite de la médecine. Celle-ci ne fonctionne que sur une épistémologie de la perte, perte d’un organe devenu comme une partie morte du corps vivant ou perte d’une fonction (insuffisance cardiaque, rénale, pulmonaire…). C’est dire que le modèle de compréhension ne peut être que le corps mort de l’anatomiste sur la table de dissection ou bien le corps machine du physiologiste.
La conscience ne peut se disséquer dans l’anatomie du cerveau et la conscience réduite à une machine même complexe échappe encore au modèle cybernétique du cyborg.
Par commodité, acceptons de maintenir la psychiatrie dans l’orbe de la médecine malgré tout car si la médecine scientifique, voire scientiste, inspirée des neurosciences trouve sa limite dans la singularité des situations cliniques obligeant à une incessante nouvelle nosographie, il reste précieux de prendre de la médecine le modèle de la relation à deux, du colloque singulier tout en n’oubliant pas que la connaissance qui en émerge, ne peut être que résultante de la double modification dans ce dispositif de l’observateur et de l’observé. On peut même aller jusqu’à proposer comme outil de différenciation les modifications de la conscience de soi du médecin sous l’effet de la rencontre avec les consciences perturbées des malades mentaux, le fameux diagnostic par sympathie de Rümcke. Les grands praticiens vous diront que le diagnostic de psychose se fait dans la première minute de la rencontre par le partage d’une atmosphère, par sympathie.
Soit, nous gardons la psychiatrie dans la médecine (pour l’instant !) mais avec quels outils médicaux ?
Le modèle anatomo-clinique de Laënnec peut-il servir le psychiatre ? Celui-ci supposerait une causalité dont la science expérimentale ne peut se passer, un lien indissoluble entre la lésion et le symptôme, entre le corps et le vivre. Malgré tous les efforts des savants, ce lien n’a jamais été établi sur le corps mort, la dissection des cerveaux de schizophrène n’a rien montré de probant. Une nouvelle tentative a donné un vertige aux neuro-scientifiques en permettant d’observer le cerveau vivant en fonction de ses opérations mentales par neuro-imagerie (IRM fonctionnelle). Par exemple, il est possible de montrer comment une pensée peut allumer certaines zones du cortex cérébral. Certains imprudents ont pu alors établir ce fameux lien de causalité entre ces zones et l’activité de pensée sans s’interroger s’il s’agissait d’une cause ou d’une conséquence. D’autres encore plus imprudents ont proposé aux magistrats d’établir des preuves de culpabilité d’un prévenu en le soumettant à cette neuro-imagerie pour établir scientifiquement une preuve d

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