Ce qu enfermer veut dire
140 pages
Français

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Ce qu'enfermer veut dire , livre ebook

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Français

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Description

Contre la barbarie des châtiments d'autres temps, l'enfermement carcéral parut longtemps s'imposer comme la peine prudente et républicaine par excellence. En l'état, la prison contemporaine est le spectre de la peine de mort. Elle figure une mise au ban brutale et accomplit une « politique du débarras ». Or, le délinquant demeure un citoyen. Et les délits et les crimes sont aussi les symptômes des déviances d'une époque. Des prisons efficaces doivent être ouvertes, respectueuses du droit des hommes qu'elles punissent.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 16 octobre 2019
Nombre de lectures 1
EAN13 9782336883533
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0900€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
4e de couverture
Collection
Collection La Justice au quotidien fondée et dirigée par Jean-Paul Céré
La collection L A J USTICE AU QUOTIDIEN a pour objectif de rendre le droit accessible à tous, aux professionnels comme aux particuliers. Elle se destine à la publication d’ouvrages, rédigés par des spécialistes reconnus, permettant de présenter de manière fonctionnelle et complète le système de justice actuel et de proposer des solutions aux problèmes juridiques de la vie courante.
1. Le permis à points (J.P. Céré)
2. Le droit de l’affichage (P. Zavoli)
3. La médiation pénale (P. Mbanzoulou)
4. La responsabilité des constructeurs (S. Bertolaso et E. Ménard)
5. Le contrôle fiscal des particuliers (E. Péchillon)
6. Les référés d’urgence devant le juge administratif (J. Gourdou et A. Bourrel)
7. La responsabilité des services de police et de secours (X. Latour)
8. Le procureur de la République (J.C. Dintilhac)
9. Les surveillants de prison (J.C. Froment)
10. Le droit des peines (G. Lorho et P. Pélissier)
11. Les droits des mères. Vol. 1 (S. Gamelin-Lavois et M. Herzog-Evans)
12. Les droits des mères. Vol. 2 (S. Gamelin-Lavois et M. Herzog-Evans)
13. L’expropriation pour cause d’utilité publique (G. Ganez-Lopez)
14. Le droit de grève (F. Chopin)
15. Les PV de stationnement (J.P. Céré)
16. Les droits de l’acquéreur d’un bien immobilier (F. Cohey-Cordey)
17. Election et modes de scrutins (B. Pauvert)
18. Les locations en meublée (J. Cayron)
19. Le placement sous surveillance électronique (Ch. Cardet)
20. Le droit des associations (K. Rodriguez)
21. La réglementation du travail des chauffeurs routiers (S. Carré)
22. La concurrence déloyale (A. Lecourt)
23. Les procès devant le tribunal d’instance (Ph. Flores)
24. Les saisies immobilières (Ph. Soustelle)
25. Les pensions alimentaires (M. Rebourg)
26. Les sanctions en droit des assurances (J.C. Ponge)
27. Les prisons en Europe (S. Snaken et F. Dünkel)
28. Le secret professionnel (B. Py)
29. La garde à vue (S. Bourretz)
30. Paroles d’enfants, paroles de juges (M. Redon)
Titre

Nadia T AÏBI





Ce qu’enfermer veut dire

La République et la démesure de la peine
Copyright






















© L’HARMATTAN, 2019
5-7, rue de l’École-Polytechnique, 75005 Paris
http://www.editions-harmattan.fr
EAN Epub : 978-2-336-88353-3
Exergue

« Demain, grâce à vous, la justice française ne sera plus une justice qui tue. Demain, grâce à vous, il n’y aura plus, pour notre honte commune, d’exécutions furtives, à l’aube, sous le dais noir, dans les prisons françaises. Demain, les pages sanglantes de notre justice seront tournées À cet instant plus qu’à aucun autre, j’ai le sentiment d’assumer mon ministère, au sens ancien, au sens noble, le plus noble qui soit, c’est-à-dire au sens de “service”. »
Robert Badinter (Garde des Sceaux), Extrait du discours prononcé le 17 septembre 1981 devant l’Assemblée Nationale.
Introduction
La loi du 9 octobre 1981 entérine l’abolition de la peine de mort en France. Pour les abolitionnistes cette décision grâce à laquelle l’État renonce à l’exercice de la peine de mort fonde sa nature républicaine et démocratique. Elle confirme aussi l’intuition que pour être efficient le pouvoir doit nécessairement être limité. Aussi nulle faute et nul fauteur de troubles ne peuvent conduire l’institution à une telle impasse que pour se maintenir elle doive tuer. Au contraire, elle doit chercher à maintenir en son corps l’individu déviant. L’organisation démocratique est par nature résiliente, elle se remet des coups, des crimes et des petites frappes. Les individus sont autant de libertés et le défi d’une telle organisation est de les tenir ensemble. Cependant, cet ordre est-il parfaitement instauré ? Serait-il autre chose qu’une image totalitaire et morbide de lui-même ? Ne faut-il pas admettre qu’il tend infiniment à l’être ? Et dans cette perspective, l’institution carcérale n’est-elle pas une réponse à double tranchant ? À la fois celle qui remplace la peine capitale et celle qui pour bien prendre sa place justement l’accomplit en produisant l’effacement du corps des délinquants ?
En effet, les fondements idéologiques de la République occidentale contemporaine instaurent la liberté individuelle et en font un levier politique. En porte à faux, la prison est une institution problématique. Elle dit au contraire que dans certains cas on peut priver l’homme de liberté.
Les conditions de détention si aménageables soient-elles, ne sont que la face émergée du problème. Comme telles, elles le masquent. Nous nous interrogeons communément sur la surpopulation, les souffrances psychologiques et physiques endurées par les détenus comme si ces phénomènes étaient en eux-mêmes des troubles auxquels il était possible de remédier. On pourrait parer ainsi en général aux difficultés relatives au système carcéral comme il est possible de le faire dans le système éducatif ou hospitalier. Nous faisons donc comme si l’enfermement carcéral était un fait social normal que nous pourrions glisser au rang d’ objet naturel. Or, la prison – institution fer de lance de l’administration pénitentiaire – n’est pas un simple rouage de l’État et de l’ordre légal. Elle figure l’extrémité violente des réponses possibles de l’État de droit : priver des hommes de liberté.
Or, qu’est-ce que priver un homme de liberté ? Faut-il rappeler la très grande gravité d’une telle décision ? Car n’est-ce point – comme le dit Socrate – risquer toujours de lui faire abdiquer son humanité ? Qu’est-ce qui en effet peut encore distinguer un homme sans liberté ? Serait-il donc possible d’être singulier, digne et responsable et tout en même temps non-libre ?
La tradition philosophique qui fait de la liberté la condition absolue de l’affirmation d’une humanité placée au-dessus des autres êtres vivants par le rang et la dignité se serait donc fourvoyée ? À moins que l’humanité se perde au délit commis (et non point à la faute qui au contraire est originelle) et se maintienne à la porte des prisons. Mais alors qui sont ces êtres qui circulent dans les coursives des maisons d’arrêts, centre de détentions et autres centrales de France ? Sont-ce des êtres toujours déjà « indignes » ? Que reste-t-il des hommes en détention ? Sont-ce les zombis de la République : pas tout à fait abolis ?
Nous articulerons notre préoccupation suivant trois moments :
– D’abord nous montrerons à travers l’exposé critique de ce qui fût nommé la science des crimes que la situation des détenus est celle de personnes mises au ban de la société. Cette séparation entre la vie carcérale et la vie « hors des murs » rend difficile, sinon impossible une transformation réelle de la condition carcérale.
– Cette mise au ban est le produit d’une confusion entre la nécessité de répondre aux délits et la tendance de l’institution à exercer un contrôle « en amont » sur des groupes de personnes susceptibles de nuire aux intérêts de la société. Nous aborderons l’idéologie suivant laquelle il existe des irrécupérables contre lesquels la seule politique viable serait une « politique du débarras ».
– Du fait de cette séparation, les conditions de détention n’apparaissent pas au citoyen français « moyen ». Le mythe d’une société juste parce qu’ayant renoncé à la peine de mort est d’ailleurs persistant. Or, l’abolition de la peine de mort n’a de valeur authentique et profonde que par la reconnaissance qu’elle implique de la valeur de l’existence humaine. Aussi elle devrait s’accomplir dans des transformations radicales concernant la vie des détenus où dignité et l’exercice de la responsabilité sont au centre.
À partir de cet état des lieux notre hypothèse est simple : l’amélioration des conditions carcérales est possible si et seulement si la détention fait partie de la vie sociale. Autrement dit si le détenu demeure un citoyen. La peine pour être Républicaine doit s’exercer au sein de la sociét&

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