Désir d être et parole poétique
393 pages
Français

Désir d'être et parole poétique , livre ebook

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393 pages
Français

Description

La parole poétique jaillit-elle du désir d'être ? La phénoménologie de Mikel Dufrenne est confrontée à la lecture de poètes. L'expérience poétique est décrite par Dufrenne, pour en analyser les conditions de possibilité, et formuler l'hypothèse de son origine, s'inspirant de Spinoza lu par Schelling : une Nature au double visage, tantôt bienveillant tantôt aveugle. Ici la tentation métaphysique de passer du transcendantal à l'ontologique fait l'objet d'une critique. La question vise alors l'éthique du désir du sujet, auquel répond l'éclairage de psychanalystes. Enfin, la nature du désir d'être se précise à l'écoute des textes des poètes.

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Date de parution 27 février 2020
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EAN13 9782140143793
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

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Extrait

MarieClotilde Roose
DÉSIR D’ÊTRE ET PAROLE POÉTIQUE
OUVERTURE PHILOSOPHIQUE ESTHÉTIQUE
Ouverture philosophique Collection dirigée par Dominique Chateau, Jean-Marc Lachaud et Bruno Péquignot
Série Esthétique
Une collection d’ouvrages qui se propose d’accueillir des travaux originaux sans exclusive d’écoles ou de thématiques. Il s’agit de favoriser la confrontation de recherches et des réflexions, qu’elles soient le fait de philosophes « professionnels » ou non. On n’y confondra donc pas la philosophie avec une discipline académique ; elle est réputée être le fait de tous ceux qu’habite la passion de penser, qu’ils soient professeurs de philosophie, spécialistes des sciences humaines, sociales ou naturelles, ou… polisseurs de verres de lunettes astronomiques. La série « Esthétique » vise la théorie de l’art ancien comme contemporain ainsi que la réflexion sur le goût et les pratiques esthétiques.
Dernières parutions
Yohann GUGLIELMETTI,Silence, bruit et musique au cinéma, 2020. Daniel DEFAYS,Là où les sens se rencontrent, HarmonieS 1 et 2,2019 Bruno DESCHENES,Une philosophie de l’écoute musicale, 2018. Juan GARCÍA-PORRERO,Peinture et représentation. L’avènement pictural, 2018. Claude MOLZINO,Figures d’un monde en sursis. Un dialogue entre philosophie et photographies du temps présent, photographies de Matthias Koch, 2017. Hugues HENRI,L’art brésilien au féminin,2017. Gisèle GRAMMARE,Contrehorizon ou l’œuvre aux noirs, essai de peinture, 2016Xavier D’HÉROUVILLE,Les ménines ou l’art conceptuel de Diego Vélasquez, 2015. Doh Ludovic FIÉ,L’École de Francfort et la critique de la modernité. Le paradoxe de l’œuvre d’art, 2015. Sous la direction de Dominique BERTHET,Une esthétique du trouble, 2015. Frédéric MONTÉGU,Image et abstraction dans l’œuvre de Mark Rothko. Tome 2 : Réhabilitation de l’œuvre entière, 2014. Frédéric MONTÉGU,Image et abstraction dans l’œuvre de Mark Rothko. Tome 1 : Période dite de la maturité, 2014. Jean VION-DURY et Christian XERRI (dir.),Plaisir esthétique dans les arts, 2014. Francesca CARUANA (dir.),Ecritures et inscriptions de l’oeuvre d’art,2014. Sous la direction de Dominique BERTHET,L’insolite dans l’art, 2013.
Marie-Clotilde Roose
DÉSIR D’ÊTRE ET PAROLE POÉTIQUE
© L’Harmattan, 2020 5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris
www.editions-harmattan.fr
ISBN : 978-2-343-19557-5 EAN : 9782343195575
En mémoire de ma sœur Alix et de Leïla du Castillon
Avertissement Ce livre reprend l’essentiel de la thèse « Désir d’être et parole poétique. De la tentative phénoménologique à la tentation métaphysique. D’une lecture de Mikel Dufrenne à une lecture des poètes : Yves Bonnefoy, Philippe Jaccottet, François Jacqmin, Roberto Juarroz, Annie Reniers », dirigée par Jean-Jacques Wunenburger, soutenue le 19 juin 2006 à l’Université Jean Moulin Lyon 3, en présence du jury composé de Raymond Court, Natalie Depraz et Carole Talon-Hugon. Elle a reçu fin 2006 le Prix Charles Plisnier de la Province du Hainaut. Pourquoi y revenir ? En hommage à Yves Bonnefoy (1923-2016) et surtout à la liberté que porte en elle la poésie – liberté inaliénable, mais menacée, que n’éteindront ni les idéologies ni les illusions d’une toute-puissance humaine, même ‘‘augmentée’’ par les nouvelles technologies. La poésie tient en elle les paradoxes du désir : à la fois désir d’infini et rappel de la finitude, déroutant le projet de totale maîtrise par l’intellect. En effet, expliquait le e poète lors de la 322 conférence à l’Université de tous les savoirs, le 17 novembre 2001 : « L’intellect qui se réduit au concept s’enferme dans l’énigme, avec, par-dessous ses pensées les plus actives et mêmes les plus fructueuses, une angoisse donc, et fondamentale. Et aussi bien, dans son inquiétude, il sera tenté de bâtir, à l’aide d’une poignée de concepts, quelques pseudo-objets qui, eux, vont lui paraître pensables de fond en comble et – intemporels comme le concept les fera – lui serviront de refuge contre cette angoisse (…). Mais il va de soi que ces constructions idéologiques se font vite les procédés par lesquels la volonté de puissance s’assure la domination sur les foules. Telle est l’origine des malheurs qui rongent les sociétés. Et telle est la raison qui peut donner à penser, qu’il arrive aussi qu’on prenne conscience de ce danger, de ces malheurs, et qu’on essaie de s’en délivrer. Ce souci, ce besoin, cette tentative de parler et de penser autrement, ce va 1 être la poésie, au moins j’en fais l’hypothèse. » Telle est aussi l’hypothèse qui a guidé ce travail, sous l’aiguillon du désir d’être. 1  Conférence publiée sous « La parole poétique par Y. Bonnefoy », inUniversité de tous les savoirs, L'Art et la culture, volume 20, Ed. Odile Jacob, Paris, Poches, 2002, pages 74-94 (citation : p. 78). Remarque importante : toutes les références qui suivront sont renvoyées à la bibliographie en fin d’ouvrage.
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Préface
Il m’a fallu quelques années avant de m’autoriser à inviter Marie-Clotilde Roose, en novembre 2018 dans le cadre du séminairePrésentations poétiques du monde, que je coordonnais depuis trois ans au sein de l’UMR CNRSPassagesà Bordeaux. Il faut dire que je ne savais alors presque rien ni de la poésie ni de la philosophie… J’avais mené jusque-là des recherches fondamentales en sciences de la vie et je venais d’intégrer un laboratoire de sciences humaines et sociales, où je proposais une animation scientifique autour de la dimension poétique en science. Il s’agissait d’y présenter notre travail à l’aune de notre vécu et de nos désirs personnels, dans un effort de synthèse, de recherche d’une unitévivante entre le sujet-cherchant et la personne singulière que nous sommes. Cette idée m’était venue d’une ethnographie de la lecture à voix haute où la pensée merleau-pontienne selon laquelle « la 2 parole est un geste et sa signification un monde » ne cessait de se vérifier : les mots en traversant le corps revêtent une matérialité, ils évoquent un vécu incarné dans la voix du locuteur. Il me semblait que cette dimension, qualifiée naïvement depoétique, était aussi présente dans la parole de mes collègues scientifiques et que son dévoilement recouvrait des enjeux d’ordre épistémologique et d’ordre éthique. En quête du sens de ce qu’est le poétique, je lus la thèse de Marie-Clotilde Roose, qui par ailleurs s’intéressait aux spatialités, comme la plupart de mes collègues géographes, sociologues, architectes, etc. J’y ai découvert que nous partagions un intérêt commun pour le poète argentin Roberto Juarroz, dont j’avais lu et reluPoésie et création, une analyse éthique, esthétique et gnoséologique de la poésie, pour qui la poésie n’est pas « l’organisation plus ou moins artificielle, calculée, discursive, de certaines réalités. […] Elle estlani «  vie », cette espèce de discoursde la vie qui distrait de la vie et finalement l’occulte », elle affronte « le 3 problème d’éprouver la vie comme une continuité, […] comme une unité » . Ceci n’est pas sans évoquer la pensée d’Aristote selon laquelle l’activité poétique (poiein) est une re-création (mimèsis) de l’activité (energeia) que constitue la vie. De même que la poésie « cherche à penser comme il arrive 4 qu’on vive » selon Yves Bonnefoy, la « vraie rencontre » et la confiance
2 Maurice Merleau-Ponty,Phénoménologie de la perception, Ed. Gallimard, Paris, 1988, p. 214. 3  Roberto Juarroz,Poésie et création (dialogues avec Guillermo Boido), Ed. José Corti, 2010 [1980], pp. 65 et 67 – les italiques sont de l’auteur. 4 Yves Bonnefoy,Entretiens sur la poésie. 1972-1990, Mercure de France, Paris, 1990, p. 266.
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dans la pensée des poètes furent majeures pour Marie-Clotilde Roose. Un point essentiel nous relie ainsi fondamentalement, dans nos recherches respectives et en l’équipe dePassages: une quête vers ce qui se tisse entre la poésie et la vie. A-t-elle quelque chose à voir avec la pensée de Boris Cyrulnik selon laquelle tout homme qui a approché la mort est condamné à 5 la poésie ?
Dans le texte originellement intituléDésir d’être et parole poétique. De la tentative phénoménologique à la tentation métaphysique, Marie-Clotilde Roose repart du phénomène poétique tel que le concevait Mikel Dufrenne (1910-1995), pour qui il constitue l’objet d’une tension entre Nature et liberté du sujet. Selon le philosophe, l’homme poétique étant le miroir où la Nature se dévoile à elle-même, la liberté humaine est donc réduite à être agie par celle-ci ; elle consiste à mimer la liberté de la Terre-Mère elle-même, véritable artiste. Telle la béatitude de l’enfant sous la protection de sa mère, l’innocence de l’homme poétique est la vertu première de l’homme libre pour Dufrenne. Soumis à une tentation métaphysique, celui-ci suggère que la liberté humaine est suspendue aux désirs de la Nature, Nature naturante ou Gaïa… Or celle-ci a-t-elle une volonté propre ? Et quel(s) désir(s) exerce-t-elle sur l’homme ? Dans sa lutte contre tout dualisme entre corps et esprit, chair et sens, nature et langage, Dufrenne élude l’éthique du sujet, sa liberté de conscience, de parole et d’action. Selon Marie-Clotilde Roose : « c’est à la viedans son unitéque doit ramener la poésie et la pensée du poétique : à l’existence des sujets […]. Là réside non seulement le droit, la possibilité, mais encore la responsabilité de penser le poétique : en cette quête d’une présence et d’un 6 sens à partager, à partir du poème […] » . Elle appuie cette critique par l’écoute attentive de poètes contemporains, étudiés notamment par la méthode phénoménologique, une méthode inspirée de Husserl, qui convient particulièrement aux arts, que ce soit en littérature, en architecture ou en aménagement des espaces. Par un cheminement théorique et discursif, tout en donnant la parole aux poètes, aux penseurs et aux psychanalystes, c’est du sensvifde la relation entre soi et ce qui se donne, à travers la chair autant que le langage, dont il est question dans cet ouvrage véritablement passionnant.
Sonia Dheur, Chargée de recherche au CNRS
5  Cette pensée fut rappelée par la comédienne Isabelle Carré alors qu’elle était invitée par Boris Cyrulnik lors d’une émission de France Inter consacrée à ce dernier : https://www.franceinter.fr/emissions/le-grand-atelier/le-grand-atelier-22-aout-2019. 6 Citation p. 49 de la thèse originale, chapitre 1, §3 « Penser le poétique ? ».
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