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Description
Sujets
Informations
Publié par | L'Harmattan |
Date de parution | 24 août 2020 |
Nombre de lectures | 0 |
EAN13 | 9782336906683 |
Langue | Français |
Informations légales : prix de location à la page 0,1050€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.
Extrait
Couverture
4e de couverture
Dernières parutions
La Philosophie en commun
Collection dirigée par Stéphane Douailler, Jacques Poulain, Patrice Vermeren
Nourrie trop exclusivement par la vie solitaire de la pensée, l’exercice de la réflexion a souvent voué les philosophes à un individualisme forcené, renforcé par le culte de l’écriture. Les querelles engendrées par l’adulation de l’originalité y ont trop aisément supplanté tout débat politique théorique.
Notre siècle a découvert l’enracinement de la pensée dans le langage. S’invalidait et tombait du même coup en désuétude cet étrange usage du jugement où le désir de tout soumettre à la critique du vrai y soustrayait royalement ses propres résultats. Condamnées également à l’éclatement, les diverses traditions philosophiques se voyaient contraintes de franchir les frontières de langue et de culture qui les enserraient encore. La crise des fondements scientifiques, la falsification des divers régimes politiques, la neutralisation des sciences humaines et l’explosion technologique ont fait apparaître de leur côté leurs faillites, induisant à reporter leurs espoirs sur la philosophie, autorisant à attendre du partage critique de la vérité jusqu’à la satisfaction des exigences sociales de justice et de liberté. Le débat critique se reconnaissait être une forme de vie.
Ce bouleversement en profondeur de la culture a ramené les philosophes à la pratique orale de l’argumentation, faisant surgir des institutions comme l’École de Korcula (Yougoslavie), le Collège de Philosophie (Paris) ou l’Institut de Philosophie (Madrid). L’objectif de cette collection est de rendre accessibles les fruits de ce partage en commun du jugement de vérité. Il est d’affronter et de surmonter ce qui, dans la crise de civilisation que nous vivons tous, dérive de la dénégation et du refoulement de ce partage du jugement.
Dernières parutions
Pierre-François MOREAU et Lorenzo VINCIGUERRA (dir.), Spinoza et les arts , 2020.
Thierry MARIN, Les métaphysiques sacrificielles comme maintien de l’ordre cosmopolitique, 2019.
Thierry MARIN, Pour un communisme végétal. Critique des métaphysiques sacrificielles, 2019.
Javier AGÜERO ÁGUILA, Chili : les silences du pardon dans l’après Pinochet , 2019.
Rafael VALIM, État d’exception, La forme juridique du néolibéralisme , 2019.
Louise FERTÉ, Anne-Claire HUSSER (dir.), L’institution scolaire au prisme de la modernité, Jalons pour une étude des discours pédagogiques au XIX e siècle, 2019.
Régine FOLOPPE, Baudelaire et la vérité poétique , 2019. François BRETEAU, La poétique de l’ironie, Essai, 2019.
Daniel ALVARO, Le problème de la communauté. Marx, Tönnies, Weber , 2018. Philippe GRANAROLO, En chemin avec Nietzsche , 2018.
Muhamedin KULLASHI
Foucault et Lefort : regards croisés sur la modernité
Invention des disciplines ou invention de la démocratie moderne ?
Copyright
© L’Harmattan, 2020 5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris
www.editions-harmattan.fr
EAN Epub : 978-2-336-90668-3
Dédicace
À Valdete et Bardhi, Ylli et Mariel, Louan et Elyne
Exergue
Je tiens à exprimer ma reconnaissance à mes Collègues et Ami(e) s du Département de Philosophie de l’Université Paris 8.
Préface
Théories politiques et figures du déni
À bien des égards, l’ambition du travail de Muhamedin Kullashi dans cet ouvrage est de restaurer la valeur philosophique de l’œuvre de pensée de Claude Lefort. Œuvre dont la fortune théorique a pâti du reproche qu’il adressait aux intellectuels et aux philosophes de gauche de faire montre d’un « aveuglement obstiné » en matière de philosophie politique. Cécité volontaire s’exprimant dans leur refus de problématiser au terme d’une analyse différentielle, la spécificité du phénomène totalitaire et conséquemment, d’identifier la singularité de la démocratie en régime de modernité.
Mais ce travail ne se limite pas à proposer une apologétique raisonnée de Claude Lefort. Muhamedin Kullashi déploie ici un espace de pensée où se trouve récusée une réception par trop immédiate de la syntaxe du titre et du sous-titre de son livre. À l’alternative simplifiée, à la confrontation immédiate, s’agissant de caractériser thématiquement notre modernité politique 1 – « Invention des disciplines ou invention de la démocratie » –, soit Foucault ou Lefort, l’Auteur avec subtilité et précision, fondées sur une grande instruction des doctrines convoquées, ne répond jamais en terme d’adjonction, Foucault et Lefort, ni en terme hiérarchique. En effet, une logique du croisement, soit un principe d’articulation ponctuel des lignes argumentatives singulières et souvent parallèles où chacun des auteurs interpellés est mis à l’épreuve de la pensée de l’autre de telle façon qu’apparaissent tant les divergences de leurs positions que les points de convergences de certaines de leurs analyses, organise la démonstration générale de l’ouvrage. Mais si les lignes se coupent et se recoupent en certains points du plan immanent de déploiement et de déplacement de la pensée à l’œuvre, elles ne se confondent jamais.
Avec une très grande rigueur, par exemple, L’Auteur nous met en garde contre la confusion de l’usage commun des noms et la détermination en compréhension et en extension des concepts. Ainsi la lecture que propose Foucault dans le séminaire du Collège de France, Le pouvoir psychiatrique , de la destitution de Georges III, « décapité par la folie » revient à montrer qu’au pouvoir souverain fait suite « un pouvoir anonyme, multiple, blafard, sans couleur. » Lorsque le pouvoir n’est plus substantiellement identifié à celui qui l’exerce, il se transforme en « machinerie » dont nul ne peut plus se prévaloir d’en être le propriétaire. Or, si cette thèse n’est pas sans évoquer le « pouvoir comme lieu vide », pouvoir inappropriable de la démocratie moderne selon Lefort, elle ne saurait nous autoriser à confondre les deux doctrines au regard de leur analyse globale de la question du pouvoir.
Au nombre des points d’apparente rencontre figure également la lecture contrastée de Kantorowicz et de la théorie des deux corps du Roi, de Shakespeare et de Machiavel. Nous apprenons ainsi, comment et à quelle fin Lefort et Foucault ont lu ces auteurs et admirons la lecture de ces interprétations par l’Auteur qui en restitue la logique, le principe et les enjeux de pensée respectifs. Philosopher pour Muhamedin Kullashi revenant ici à lire et à relire la lecture des grands auteurs pour en révéler les gestes d’appropriation générateurs de leur propre philosophie.
La figure du déni
À de nombreuses reprises, l’Auteur invoque la figure du déni 2 plus encore que celle de l’ignorance : déni de la division entre l’État et la société civile chez Marx, déni totalitaire des divisions constitutives et irréductibles de toute société, revers de la croyance en une société unifiée homogène et transparente à elle-même, déni de la singularité du totalitarisme, de l’existence du goulag, « dénégation du principe des droits de l’homme dans le totalitarisme », déni ou méconnaissance de l’originalité c’est-à-dire de l’événementialité du régime démocratique moderne et de ses caractéristiques fondamentales : désintrication du pouvoir, désincorporation, lieu vide 3 et inappropriable du pouvoir, dissolution des repères de la certitude, indétermination, mode de partage irréductiblement conflictuel de définition du légitime et de l’illégitime sans promotion d’un Garant absolu ou transcendant, sans clôture du débat.
À ne penser la distinction entre la démocratie moderne et le totalitarisme que sous le chef d’une différence de degré et non de nature 4 , c’est-à-dire d’essence, à condamner la « démocratie totalitaire » en s’inspirant des analyses de Tocqueville, on tombe en « absurdité » selon Lefort 5 . En régime démocratique, l’État tutélaire ou l’