La Monadologie
141 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

141 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Description

Avant d’aborder le commentaire de la doctrine de Leibniz, essayons de nous placer, par un effort de pensée, dans la disposition d’esprit où se trouvait l’auteur de la Monadologie lorsqu’il conçut son système ; ou plutôt, puisque la doctrine des monades n’est qu’une des plus célèbres parmi les inventions multiples auxquelles la curiosité métaphysique a successivement demandé le secret de l’énigme universelle, tâchons d’éveiller en nous une curiosité du même genre.Fruit d’une sélection réalisée au sein des fonds de la Bibliothèque nationale de France, Collection XIX a pour ambition de faire découvrir des textes classiques et moins classiques dans les meilleures éditions du XIXe siècle.

Sujets

Informations

Publié par
Nombre de lectures 5
EAN13 9782346059416
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0030€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

À propos de Collection XIX
Collection XIX est éditée par BnF-Partenariats, filiale de la Bibliothèque nationale de France.
Fruit d’une sélection réalisée au sein des prestigieux fonds de la BnF, Collection XIX a pour ambition de faire découvrir des textes classiques et moins classiques de la littérature, mais aussi des livres d’histoire, récits de voyage, portraits et mémoires ou livres pour la jeunesse…
Édités dans la meilleure qualité possible, eu égard au caractère patrimonial de ces fonds publiés au XIX e , les ebooks de Collection XIX sont proposés dans le format ePub3 pour rendre ces ouvrages accessibles au plus grand nombre, sur tous les supports de lecture.
Gottfried Wilhelm Leibniz, Désiré Nolen
La Monadologie
AVANT-PROPOS
En faisant figurer la Monadologie sur la liste des ouvrages que les élèves auront à commenter, les auteurs du nouveau plan d’études ont marqué qu’ils considèrent a culture métaphysique comme un élément essentiel de la haute discipline classique, comme une condition indispensable de la véritable éducation philosophique.
Quoi qu’en pense le positivisme de notre temps, l’homme n’est pas près de se désintéresser des problèmes qui ont été la préoccupation et le tourment de tant de grands esprits dans le passé. La science a beau reculer indéfiniment les limites de ses investigations, elle rencontre toujours des bornes que ses principes et ses procédés lui interdisent de franchir. Elle laisse la curiosité aux prises avec des questions que tous les raisonnements du monde ne sauront persuader au Pascal qui s’agite secrètement au fond de toute âme généreuse, de traiter avec dédain, encore moins de délaisser avec indifférence.
Ce n’est pas seulement l’un des maîtres de la pensée moderne, ce n’est pas seulement Kant, qui déclare que ni la science, ni la critique n’ont réussi à le détacher de la métaphysique : les esprits les plus autorisés de notre temps professent à l’envi et témoignent par leur exemple que la curiosité métaphysique a ses droits imprescriptibles, contre lesquels la science mieux informée d’aujourd’hui ne prévaut pas plus que la science incertaine d’autrefois. Le succès du monisme contemporain, sous ses formes multiples et contradictoires, en Allemagne comme en Angleterre et même parmi nous, montre assez qu’il est plus aisé de décrier l’ancienne métaphysique que de rompre avec toute métaphysique. Et la difficulté qu’éprouvent les plus fervents adeptes du positivisme à ne pas s’écarter des pures données et des strictes méthodes de la science et à ne pas s’égarer de temps en temps dans les hypothèses du matérialisme, prouve que la métaphysique a des tentations auxquelles les plus prévenus ne savent pas se soustraire.
Un besoin aussi vivace, aussi général, en dépit de déceptions sans nombre, peut bien être considéré comme une disposition naturelle et indestructible de notre nature. L’éducation ne saurait la laisser sans règle et sans culture, livrée aux suggestions du caprice individuel ; elle doit s’imposer la tâche d’éveiller et de discipliner tout à la fois le sens métaphysique. Nulle étude n’y convient mieux que celle de la Monadologie.
D’autres modèles auraient pu, sans doute, être proposés aux jeunes intelligences : Bossuet et Fénelon auraient continué de leur offrir d’utiles enseignements. Mais on voit aisément les raisons qui leur ont fait préférer Leibniz. En ce dernier revivent, comme en eux, mais transformés, mais agrandis par une libre et originale interprétation, les principes essentiels de la philosophie de Descartes. Les préoccupations théologiques embarrassent et restreignent le libre essor de leur pensée ; et leur cosmologie est trop asservie aux hypothèses de la physique cartésienne. L’esprit de Leibniz est plus indépendant de l’autorité de la foi et de l’autorité d’une doctrine. La méditation ; du philosophe n’enlève rien chez lui à la curiosité du savant. La divination merveilleuse de son heureux génie l’engage dans toutes les voies où la science de l’avenir doit rencontrer ses plus brillants, succès. Leibniz est par là plus près de notre temps qu’aucun de ses illustres contemporains. A notre siècle, épris de la science, nulle doctrine philosophique ne saurait être présentée qui soit plus jalousie des droits, plus pénétrée du rôle, plus confiante dans les promesses de la science que celle de Leibniz. Pour faire cesser le divorce qui sépare, depuis trop longtemps, les savants et les philosophes, il est bon de rappeler aux uns et aux autres l’exemple instructif de Leibniz.
Ce n’est pas à un simple exercice, ni à la satisfaction d’une curiosité rétrospective que la Monadologie nous convie. La métaphysique de Leibniz est aujourd’hui la plus vivante de toutes celles que le passé nous a léguées. Si les esprits qui sont demeurés plus fidèles peut-être à la lettre qu’au sens de la doctrine de Kant s’interdisent scrupuleusement toute hypothèse métaphysique, ceux qui ne se résignent pas à faire ainsi violence aux impérieux instincts de l’intelligence, et le nombre en est beaucoup plus grand qu’on ne pense, aussi bien parmi les savants que parmi les philosophes contemporains, ceux-là semblent d’accord pour chercher dans la Monadologie ces vérités d’un ordre supérieur, et à tout le moins d’une nature spéciale, que la science a le droit d’ignorer, mais que réclament invinciblement les besoins moraux et esthétiques de l’âme humaine.
Nous inspirant de l’esprit même de Leibniz et « prenant le meilleur de tous côtés 1  » dans ses écrits, comme il aimait à le faire dans l’œuvre des autres, nous nous attacherons à mettre en lumière les parties durables de sa métaphysique, plutôt qu’à insister sur les lacunes ou les erreurs de sa doctrine persuadés que l’admiration convient mieux à la jeunesse que la critique. Nous nous aiderons, pour éclairer les obscurités de sa philosophie, des enseignements de notre temps, en même temps que nous chercherons dans les écrits de Leibniz le commentaire réclamé par l’extrême concision du texte de la Monadologie. Notre ambition serait satisfaite si nous réussissions à faire pénétrer jusqu’au cœur, non moins qu’à l’intelligence, de nos lecteurs quelques-unes des pensées du grand Leibniz.
1 Nouveaux Essais, chap. I.
NOTICE HISTORIQUE SUR LA VIE ET LES ŒUVRES DE LEIBNIZ
Né à Leipzig, en 1646, d’un père professeur à l’Université de cette ville, Leibniz montra, dès ses plus tendres années, l’insatiable curiosité et la merveilleuse facilité qu’il conserva jusqu’à ses derniers jours. A l’âge de huit ans, et à peine instruit des premiers rudiments du latin, il réussit, par un effort de son génie inventif, à comprendre Tite-Live dans l’original, s’aidant pour guider son interprétation des grossières images qui accompagnent le texte qu’il a sous les yeux.
Laissons-le raconter lui-même, sous le nom de Pacidius, ses premières impressions :
 
« Wilhelmus Pacidius.... impetu quodam animi ad litterarum media delatus, pari in iis libertate versabatur. Nam cum domesticæ bibliothecæ opportunitatem haberet, abdebat se in ea totos sæpe dies octannis puer, et vixdum latine balbutions, obvios quosque libros nunc arripiebat nunc deponebat, et sine delectu aperiens claudensque nunc libabat aliquid, nunc transiliebat, prout claritate dictionis aut jucunditate argument invitabatur. Credidisses eum fortuna pro præceptore uti, atque illud « Tolle, lege » sibi dictum putare. Erat enim alieno consilio per fortunam carenti propria per æ atem necessaria temeritas, cui succurrere Deus solet. Et certe tulit casus, ut in veteres primum incideret, in quibus ille initio nihil, paulatim aliquid, denique quantum satis esset intelligebat ; utque in sole ambulantes etiam aliud agendo colorantur, tincturam quamdam non dictionis tantum, sed eti sententiarum contraxerat. Unde ad recentiores delato sordebant quæ tunc in officinis regnabant tumentes ampullæ nihil dicentium, aut fracticentones repetentium aliena, sine gratia, sine nervis ac lacertis, sine ullo ad vitam usu : putares alteri cuidam mundo scribi, quem illi jam tum modo rempublicam, modo Parnassum appellabant ; cum veterum cogitata mascula et ingentia et excitata et velut supereminentia rebus et omnem vitæ humanæ tractum velut in tabula complexa, dictionem autem naturalem et claram et profluentem et rebus parem, longe alios motus animis ingenerare meminisset. Fuit hoc discrimen tam notabile, ut ex eo tempore duo sibi axiomata. constitueret : quærere semper in verbis cæterisque animi signis claritatem, in rebus usum 1  »
 
Leibniz complète ces renseignements dans un passage de son autobiographie. « J’étais heureux de voir en personne devant moi la plupart des écrivains de l’antiquité, que je

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents