Le Rôle moral de la bienfaisance
108 pages
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Description

§ 387. — J’ai consacré un ouvrage antérieur de cette série — les Principes de Psychologie — à démontrer que toutes les opérations intellectuelles peuvent se ramener en dernière analyse à des perceptions de ressemblances et de dissemblances, accompagnées d’un groupement mental des éléments semblables et d’une mise à part des éléments dissemblables. J’ai montré que le procédé intellectuel ainsi analysé constitue une différenciation par la perception et par la pensée des impressions que produisent sur nous les objets et les activités, qui nous environnent, ainsi qu’une intégration en une conception générale de chaque série d’impressions semblables ; le résultat étant la formation d’autant de conceptions générales différentes qu’il y a d’objets, d’actes ou de groupes combinés de ces derniers que le type particulier d’intelligence est capable de distinguer.Fruit d’une sélection réalisée au sein des fonds de la Bibliothèque nationale de France, Collection XIX a pour ambition de faire découvrir des textes classiques et moins classiques dans les meilleures éditions du XIXe siècle.

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EAN13 9782346060825
Langue Français

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À propos de Collection XIX
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Herbert Spencer
Le Rôle moral de la bienfaisance
PRÉFACE
En publiant, après la quatrième partie de la Morale de la Vie sociale déjà parue, cette cinquième et cette sixième partie, il m’est donné de terminer le second volume de mes Principes de Morale ; il y a quelques années, je n’espérais plus arriver si loin. Cependant ma satisfaction n’est pas complète, car je prévois que ces parties nouvelles ne répondront pas à l’attente générale. La Doctrine de l’Évolution n’a pas été pour moi un guide aussi sur que je le pensais, et la plupart de mes conclusions, obtenues par voie empirique, sont de celles qu’auraient pu élaborer des hommes doués de sentiments droits et d’une intelligence cultivée. En dehors de quelques sanctions générales auxquelles je me réfère indirectement, le lecteur rencontrera tout au plus quelques conclusions d’origine évolutionnaire éparses ou plus particulièrement rassemblées dans les derniers chapitres ; elles viennent s’ajouter aux conclusions ordinaires, mais elles en diffèrent parfois.
J’aurais dû prévoir ce résultat. La règle exacte des activités d’un être aussi complexe que l’homme, vivant dans des conditions aussi complexes que celles de la vie à l’état de société, ne se prête évidemment pas à des conclusions également définies dans toute l’étendue de sa juridiction. La division la plus simple — la conduite privée — dépend déjà naturellement en partie de la nature de l’individu et des circonstances où il est placé ; tout ce qu’il est possible de faire, c’est de prescrire des règles approximatives. Une compensation judicieuse entre les exigences auxquelles il faut satisfaire, et les extrêmes qu’il faut éviter, sera seule le plus souvent capable de nous guider.
Dans la première grande division de la conduite publique — la Justice — nous avons pu à la vérité formuler des conclusions d’une précision remarquable. C’est que fort heureusement la conception de l’équité ou de l’égalité domine la partie importante de la Morale, qui traite des justes rapports à établir entre les individus, sans tenir compte de leur nature, ni des circonstances ; l’idée de mensuration y a son mot à dire et nos déductions acquièrent de la sorte un caractère quantitatif qui les rapproche des sciences exactes. Mais si, quittant la catégorie importante des injonctions, qui en leur qualité de base d’une coopération sociale harmonieuse, sont impératives, nous abordons les deux divisions restantes, la bienfaisance négative et la bienfaisance positive, nous entrons dans une région où les complexités de la conduite privée se mêlent aux complexités de ses rapports avec la conduite non moins complexe des autres hommes, question qui comprend des problèmes pour la solution desquels aucune espèce de mesure ne vient à notre secours. Leurs éléments sont nombreux et variables. Ce sont les effets immédiats et les effets lointains de l’action sur le bienfaiteur et sur le bénéficiaire, sur les personnes qui vivent dans leur dépendance et sur la société elle-même. Aucun de ces effets n’est fixe ou susceptible d’être mesuré ; nos conclusions étant de nature empirique, ne seront que des approximations de la vérité.
En plus d’une certaine harmonie générale résultant de l’application du raisonnement évolutionnaire, le contenu de la cinquième et de la sixième partie de mes Principes de Morale ne méritera donc l’attention qu’aux trois points de vue suivants. En premier lieu on trouvera dans chaque partie, exposées avec précision, les exigences et les limites multiples, dont il faut tenir compte : nous contribuerons ainsi à la formation de jugements bien équilibrés. En second lieu, ce traitement méthodique conférera une certaine cohésion aux idées confuses et souvent contradictoires, qui règnent au sujet de la Bienfaisance et qui sont encore comme dispersées à tous les vents. En troisième lieu, le corps cohérent de doctrine, auquel nous arriverons, fournira une règle à plusieurs catégories de la conduite, dont la morale, telle qu’on l’entend d’ordinaire, ne s’est pas préoccupée.
H.S.

Londres, avril 1893.
LA BIENFAISANCE NÉGATIVE
CHAPITRE PREMIER
DES DIFFÉRENTS GENRES D’ALTRUISME
§ 387. — J’ai consacré un ouvrage antérieur de cette série — les Principes de Psychologie  — à démontrer que toutes les opérations intellectuelles peuvent se ramener en dernière analyse à des perceptions de ressemblances et de dissemblances, accompagnées d’un groupement mental des éléments semblables et d’une mise à part des éléments dissemblables. J’ai montré que le procédé intellectuel ainsi analysé constitue une différenciation par la perception et par la pensée des impressions que produisent sur nous les objets et les activités, qui nous environnent, ainsi qu’une intégration en une conception générale de chaque série d’impressions semblables ; le résultat étant la formation d’autant de conceptions générales différentes qu’il y a d’objets, d’actes ou de groupes combinés de ces derniers que le type particulier d’intelligence est capable de distinguer. Dans ses phases inférieures, ce procédé est celui d’une classification inconsciente, qui par de nombreux degrés s’élève à la classification consciente en usage chez les hommes de science.
M. le professeur Bain en particulier et avec lui quelques autres penseurs ont donné le nom de discrimination 1 à l’acte mental qui nous permet de classer à tout instant et d’une manière trop rapide pour être observée, les actions et les objets environnants qui nous frappent, et de régler en conséquence notre conduite. C’est par voie de discrimination que s’opère tout acte intellectuel ; c’est par un accroissement continu de la faculté de discriminer que l’intelligence humaine s’est élevée du plus bas au plus haut échelon. La raison en est claire : pendant tout le cours de l’évolution vitale et à travers toutes ses formes, la pratique, l’habitude et la survie des mieux adaptés ont poussé au développement de cette faculté, puisque, appliquée à propos, elle constituait un moyen de salut, tandis que son absence était une cause de perte de la vie. Notons quelques exemples caractéristiques de ce développement.
Regardez le ciel, fermez les yeux et faites passer votre main devant eux : vous distinguerez l’absence de la présence d’un objet opaque interposé. Qu’un objet soit présenté devant vos yeux fermés par une autre personne, vous ne pourrez pas à l’état passif dire si c’est une main, un livre ou une motte de terre, si c’est un objet rapproché d’un petit volume ou un objet éloigné plus volumineux. Cette expérience nous fournit l’image de la discrimination visuelle la plus réduite, telle que l’effectuent les êtres inférieurs possédant seulement des yeux rudimentaires et composés de minimes parcelles de substance colorée légèrement sensible à l’impression de la lumière. Il va de soi qu’un être doué d’une vue aussi rudimentaire court de grands dangers ; il ne parvient pas à distinguer entre l’observation du mouvement d’un roseau plongé dans l’eau qu’il habite et celle produite par le passage d’un animal ; il ne sait si elle est produite par le passage à proximité d’un animal de petite taille, ou par celui d’un animal plus grand passant à distance ; il ignore si cet animal est inoffensif et susceptible de lui servir de proie ou s’il est redoutable et doit être évité. L’un des moyens de maintenir la vie fait défaut ; l’être en question est exposé à la perdre de bonne heure.
Franchissant les degrés intermédiaires, observons chez les herbivores les conséquences de la présence ou de l’absence de la faculté de classer les espèces et les propriétés différentes des plantes. L’apparence, l’odeur, le goût détournent tel animal d’une herbe vénéneuse ; tel autre aux sens moins affinés l’absorbe et meurt. A mesure que l’intelligence se développe, ell

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