Le voyage insensé
278 pages
Français

Le voyage insensé , livre ebook

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278 pages
Français

Description

Pour fuir la mort, l'homme a imaginé les dieux. Il a imaginé qu'il pouvait monter au ciel. Mais il a oublié qu'il était de la matière et que pour redevenir immortel, comme elle, il devait sortir de l'espace-temps. Dominé par la raison, empêtré dans les idées, l'homme est un croyant à la recherche d'un pouvoir impossible. Tant qu'il sera dirigé par l'illusion de la puissance il souffrira. Pour échapper à la mort il faut échapper au temps. Or le temps est une construction de l'esprit. Il suffit donc de vivre sans penser.

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Date de parution 17 mai 2018
Nombre de lectures 0
EAN13 9782140090578
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

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Extrait

Gilbert Andrieu
Le voyage insensé Pour fuir la mort, l’homme a imaginé les dieux
LE VOYAGE INSENSÉ
Gilbert Andrieu LE VOYAGE INSENSÉ Pour fuir la mort, l’homme a imaginé les dieux
Du même auteur
Aux éditions Actio L’homme et la force, 1988. e L’éducation physique au XX siècle, 1990. Enjeux et débats en E.P., 1992. À propos des finalités de l’éducation physique et sportive, 1994. e La gymnastique au XIX siècle, 1997. Du sport aristocratique au sport démocratique, 2002. Aux Presses universitaires de Bordeaux Force et beauté. Histoire de l’esthétique en éducation physique e e aux 19 et 20 siècles, 1992. Aux éditions L’Harmattan Les Jeux olympiques un mythe moderne, 2004. Sport et spiritualité, 2009. Sport et conquête de soi, 2009. L’enseignement caché de la mythologie, 2012. Au-delà des mots, 2012. Les demi-dieux, 2013. Œdipe sans complexe, 2013. Le choix d’Ulysse, 2013. Au-delà de la pensée, 2013. À la rencontre de Dionysos, 2014. Être, paraître, disparaître, 2014. La preuve par Zeus, 2014. Pour comprendre la Théogonie d’Hésiode, 2014. Jason le guérisseur au service d’Héra, 2014. Héra reine du ciel. Suivi d’un essai sur le divin, 2014. Héphaïstos, le dieu boiteux, 2015. Perséphone reine des Enfers. Suivi d’un essai sur la mort, 2015. Hermès pasteur de vie, 2016. Apollon l’Hyperboréen, 2016. Les deux Aphrodite, 2016. Poséidon, 2017 Le sens de la vie, 2017
© L’Harmattan, 2018 5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris http://www.editions-harmattan.fr ISBN : 978-2-343-14942-4 EAN : 9782343149424
PROLOGUE  «Bonjour ! C’est moi !  Messieurs ! Mesdames !  Je viens pourquoi ?  Pour dire un monologue 1  C’est le prologue !»  En 1892, Ruggero Léoncavallo écrivait un opéra qui devait rester célèbre pour son prologue. Il souhaitait que l’on rapproche le plus possible la fiction de la réalité et même qu’on en vienne à ne plus les distinguer. Il est resté une page appréciée des plus grands ténors du monde bien qu’il soit également bien servi par les barytons. Je garde personnellement en mémoire l’interprétation dramatique de Luciano Pavarotti 2 sans pour autant oublier la voix chaude de Tito Gobi .  Paillasse est un clown triste qui cache la cruauté de la vie derrière son visage enfariné. Ne serions-nous pas, les uns et les autres, des descendants de Paillasse ? Ou bien alors avons-nous gardé au fond de nous le conseil de l’auteur qui nous invite à rire de nos malheurs ?  La vie serait-elle une farce et en serions-nous les dindons ?
1 AUTRAN M. , J.CL Archives familiales. Livret français de Eugène Crosti. Vertsion 2. 2  C’était un air que reprenait souvent mon père qui l’avait adopté au conservatoire de Montpellier lorsqu’il avait obtenu son premier prix de chant.
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 Ne faut-il pas commencer par la vivre le plus possible avant de la juger et, pour cela, en finir avec les idées qui nous font oublier la nature originelle des actes les plus fondamentaux ?  En ajoutant des myriades d’explications, religieuses, philosophiques ou scientifiques n’avons-nous pas voilé l’essentiel de la vie et, bien entendu, de la mort ?  Il n’y a, dans cet essai aucune volonté d’imposer une vérité qui n’aurait pas été mise en évidence, tout juste une impression devenue pour moi une certitude : les mots nous trompent et l’histoire de notre espèce est une sorte d’illusion.  Parce que nous avons donné au temps une valeur qu’il n’avait pas à l’origine de la vie, parce que nous avons voulu croire à l’éternité, nous avons organisé notre existence comme une fuite en refusant de subir la mort et en considérant qu’il était possible de concevoir la vie comme un voyage vers 3 l’immortalité . L’homme passe son temps à l’organiser et trouve dans cette action le moyen d’oublier la mort qu’il préfère négliger ou cacher avec des mots. Certes, cela ne fut pas l’œuvre d’un jour et il a fallu qu’il découvre la possibilité de faire des choix, de programmer l’après et d’imaginer le futur. Ce ne fut pas le produit de sa volonté, ni de son génie, mais les conséquences d’un combat incessant dont l’effet majeur fut de rendre notre entité de plus en plus performante et malvoyante.  Parce que la mort s’imposait à nous et parce que nous faisions tout pour lui échapper, parce que le changement était une réalité que nous ne comprenions pas, nous avons fini par échafauder des stratégies et par penser que nous pourrions ne pas la subir. Le monde s’est bien transformé depuis nos premiers pas en tant qu’espèce particulière, mais nous n’avons pas véritablement changé d’attitude vis-à-vis de l’inconnu, de l’invisible. Nous avons poursuivi une multitude de recherches et nous les avons prolongées par autant d’explications, mais nous
3  Certains d’entre-nous ne prétendent-ils pas, une nouvelle fois, que nous serons bientôt capables d’arrêter le vieillissement, pourquoi pas la mort ? L’intelligence artificielle aurait-elle des vertus lui permettant de transformer nos fantasmes en vérités observables ?
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avons utilisé une curiosité naturelle sans nous apercevoir qu’elle nous projetait toujours plus loin et cela sans nous satisfaire pleinement. Entre le constat qui s’imposait et l’aveuglement progressif dû à notre intelligence, nous avons opté pour une cécité qui dissipait nos angoisses existentielles.  Je ne crois pas qu’il a fallu attendre bien longtemps pour que l’homme connaisse la peur, l’angoisse que pouvait faire naître un monde rempli de surprises et de dangers. Mais, cette peur fut aussi un aiguillon dans la recherche du plaisir et du bonheur. Comme chacun sait, l’homme devant le danger n’a que deux actions possibles : fuir ou combattre.  Nous avons pris l’habitude de distinguer ce qui relève de notre corps et ce qui relève de notre esprit. Mais cette image que nous avons forgée de l’homme nous trompe parce qu’elle est uniquement le fruit d’une façon de penser, qu’elle est née d’un besoin de nous organiser pour dominer le monde en oubliant que nous étions aussi des manifestations de la Matière et que son fonctionnement n’en était pas moins dépendant. Avant d’être des penseurs, nous avons été, et cela pendant longtemps, des acteurs totalement inconscients du pourquoi de leurs actes. Assez récemment, nous avons accordé à notre système nerveux un rôle qu’il n’a pas toujours eu et qui minimise ce qu’il fut lorsqu’il n’était qu’un outil indispensable pour survivre, lorsque nous n’étions guère différents d’autres êtres vivants qui partageaient le monde en même temps que 4 nous .  Avant de construire une explication lui permettant de se situer entre le connu et l’inconnu, avant de croire qu’il existait un monde où ses combats n’auraient plus de raison d’être, l’homme a commencé par tenter de maîtriser le face à face qui s’imposait à lui et à percevoir son environnement comme un
4 Je crois qu’il serait bon d’en finir avec l’idée que l’homme est venu au monde en même temps que toutes les autres espèces. D’autres formes de vie ont peuplé le monde bien avant lui et même dans l’eau où des comportements de survie sont observables avant d’être étudiés sur terre.
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adversaire. Nos ancêtres ne pouvaient pas avoir une quelconque notion de supériorité. Elle n’a pu se développer qu’à partir d’une efficacité de plus en plus grande dans leur effort de survie et la découverte que le monde pouvait être dominé, au moins partiellement. Pour comprendre nos comportements actuels, il faut en rechercher l’origine et surtout ne pas penser que l’homme a toujours médité sur sa nature et celle du monde. Il n’a pas toujours bénéficié du cerveau dont il se sert aujourd’hui et la séparation du corps et de l’esprit ne s’est faite que lentement en nous faisant perdre le sentiment d’un équilibre des forces. Il a fallu que l’homme découvre qu’il pouvait réussir ou vaincre pour qu’il s’enhardisse et commence à désirer transformer le monde à partir de ses propres besoins, mais aussi, et de plus en plus, à partir de ses désirs, de son imagination. Le hasard l’a peut-être servi ! Mais, s’il n’avait pas exploré spontanément l’inconnu, le hasard ne lui aurait peut-être pas été d’un grand secours.  Le monde n’est pas devenu du jour au lendemain un territoire de chasse, un territoire à surveiller et à défendre ! Je reste convaincu que la Matière a donné à chaque forme livrée à elle-même la curiosité nécessaire à sa survie. Cette curiosité ne pouvait déboucher que sur une lutte ou une fuite. La notion de lutte peut être trompeuse et je voudrais préciser que pour moi, la lutte comprend deux forces en apparence opposées : la combativité et l’amour.  Nous sommes tellement enfermés dans des confrontations d’idées et dans une normalisation politique ou économique, qui n’a rien à voir avec un comportement de survie ordinaire, que nous ne doutons plus d’une vérité qui n’est qu’un ensemble d’idées reçues, de justifications artificielles. Celles-ci permettent à certains de s’imposer à partir d’une simple suggestion qui, au demeurant, n’a aucun lien avec un réel que plus personne ne soupçonne. Politiques et religions ne se posent plus des problèmes de survie comme l’homme à son origine, mais des problèmes de pouvoir ! Si, au tout début de son existence, l’homme n’avait d’autre souci que celui de survivre, l’évolution de sa forme et de sa structure a donné de plus en plus d’importance à l’idée qu’il commençait à se faire du monde et du rapport qu’il entretenait avec lui. Lorsque les
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aèdes parlent des guerres que Zeus doit gagner pour dominer les dieux de première génération, ils ne font que résumer des millions d’années pendant lesquelles l’homme ne pensait pas encore, mais aussi pendant lesquelles naissait un usage de plus 5 en plus complexe de son cerveau .  Loin de moi la volonté de remettre en question toutes les avancées de la science, mais ses explications, aussi utiles soient-elles, ne peuvent, à elles seules, rendre compte d’un passé qui s’est construit sans elles. C’est ce passé, difficilement observable, qui permet la multiplication des idées, que ce soit sur le plan religieux, politique ou philosophique. Il a fallu de l’amour pour que nos cellules s’agglomèrent, il a fallu un autre amour pour qu’elles se reproduisent, il a fallu la lutte pour qu’elles progressent dans leur capacité d’adaptation, il faut la mort pour qu’elles redeviennent des parcelles de Matière.  Pour comprendre l’idée de fuite, il faut se souvenir que l’homme n’a pas toujours donné la priorité à l’idée, encore aurait-il fallu qu’il puisse en avoir une, et que, dans l’adversité, la fuite puisse prendre un sens bien précis : celui d’éviter un danger, une mort prématurée.  La fuite sur laquelle je voudrais attirer l’attention est d’une autre nature. C’est celle qui peut naître dans l’imagination des hommes, que chacun peut connaître au plus profond de lui-même et qui tentent de combattre une sorte d’enfermement ou la domination des autres servis par un imaginaire collectif. Il s’agirait ici de refuser la récupération par la raison d’un certain nombre d’idées au profit d’une minorité, ou l’endoctrinement des masses crédules au profit de tous les clergés du monde.  Disons, sans attendre, que tous les discours, quels qu’ils soient, sont l’œuvre d’une minorité qui cherche à s’imposer et
5  Je ferai souvent référence à la mythologie grecque que je connais mieux. Pour moi, la mythologie est une interprétation du passé qui nous livre, à l’aide de symboles, l’idée que les aèdes antiques se faisaient de leurs ancêtres, de leur histoire. Mais leurs symboles permettent de dépasser l’histoire et d’atteindre l’homme en profondeur, autrement qu’un récit qui se veut objectif.
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