Pour un communisme végétal
637 pages
Français

Pour un communisme végétal , livre ebook

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637 pages
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Description

La métaphysique a tenté de faire monde en recourant au sacrifice : toutes les formes de vie sont prises dans l'opposition entre un ciel noble (Dieu, la substance, la subjectivité) et une terre abjectée, lieu des déchets avec ses animaux et ses plantes. Cet ouvrage critique cette domination des métaphysiques sacrificielles, depuis le plan hétérogène d'affirmation d'une nouvelle philosophie de la Nature : son axiome égalitaire est que toutes les formes de vie participent à l'éclosion du nouveau dans l'être. Il s'agit alors de se mettre à leur écoute, pour chercher un modèle qui permette de cueillir le réel dans sa diversité. Non seulement les plantes sont bonnes à penser, mais elles sont des ressources inouïes pour lancer de nouveaux mondes, riches en relations et entités.

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Informations

Publié par
Date de parution 23 décembre 2019
Nombre de lectures 0
EAN13 9782140138805
Langue Français
Poids de l'ouvrage 6 Mo

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Extrait

de faire monde, qui repose sur le geste du sacriîce : toutes les formes
du monde, pour la conquête d’un feu cosmique qui înirait toujours par servir à faire monter les fumées du sacriîce des autres formes de vie. Cette domination de métaphysiques sacriîcielles est critiquée par l’auteur de cet essai, depuis le plan hétérogène d’afîrmation d’une
Il s’agit alors de se mettre à l’écoute des végétaux comme îctions
dans sa diversité : humains, plantes, animaux…
Les deux versants de l’œuvre de J.M.G. Le Clézio : des miroirs fous
Le Principe de oraison. Manières
Thierry Marin
POUR UN COMMUNISME VÉGÉTAL
Critique des métaphysiques sacrificielles
Pour un communisme végétal
La Philosophie en commun Collection dirigée par Stéphane Douailler, Jacques Poulain, Patrice Vermeren
Nourrie trop exclusivement par la vie solitaire de la pensée, l'exercice de la réflexion a souvent voué les philosophes à un individualisme forcené, renforcé par le culte de l'écriture. Les querelles engendrées par l'adulation de l'originalité y ont trop aisément supplanté tout débat politique théorique.  Notre siècle a découvert l'enracinement de la pensée dans le langage. S'invalidait et tombait du même coup en désuétude cet étrange usage du jugement où le désir de tout soumettre à la critique du vrai y soustrayait royalement ses propres résultats. Condamnées également à l'éclatement, les diverses traditions philosophiques se voyaient contraintes de franchir les frontières de langue et de culture qui les enserraient encore. La crise des fondements scientifiques, la falsification des divers régimes politiques, la neutralisation des sciences humaines et l'explosion technologique ont fait apparaître de leur côté leurs faillites, induisant à reporter leurs espoirs sur la philosophie, autorisant à attendre du partage critique de la vérité jusqu'à la satisfaction des exigences sociales de justice et de liberté. Le débat critique se reconnaissait être une forme de vie.  Ce bouleversement en profondeur de la culture a ramené les philosophes à la pratique orale de l'argumentation, faisant surgir des institutions comme l'École de Korcula (Yougoslavie), le Collège de Philosophie (Paris) ou l'Institut de Philosophie (Madrid). L'objectif de cette collection est de rendre accessibles les fruits de ce partage en commun du jugement de vérité. Il est d'affronter et de surmonter ce qui, dans la crise de civilisation que nous vivons tous, dérive de la dénégation et du refoulement de ce partage du jugement.
Dernières parutions
Javier AGÜERO ÁGUILA,Chili : les silences du pardon dans l’après Pinochet, 2019. Rafael VALIM,d’exception, La forme juridique du État néolibéralisme, 2019. Louise FERTÉ, Anne-Claire HUSSER (dir.),L’institution scolaire au prisme de la modernité, Jalons pour une étude des discours e pédagogiques au XIX siècle,2019. Régine FOLOPPE,Baudelaire et la vérité poétique, 2019. François BRETEAU,La poétique de l’ironie, Essai,2019. Daniel ALVARO,Le problème de la communauté. Marx, Tönnies, Weber, 2018. Philippe GRANAROLO,En chemin avec Nietzsche, 2018.
Thierry MARIN
POUR UN COMMUNISME VEGETALCritique des métaphysiques sacrificielles
Du même auteur Les deux versants de l’œuvre de J.M.G. Le Clézio: des miroirs fous au visage indien,2 tomes, Villeneuve d’Ascq, Presses Universitaires du Septentrion, 1999.Le roman sériel : J.M.G. Le Clézio et Hubert Lucot, Lyon, Éditions Horlieu, 2000. Pour un récit musical, Paris, L’Harmattan, 2002.Le Principe de floraison. Manières végétales de faire des mondes, Paris, Max Milo Éditions, 2012. © L’Harmattan, 2019 5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Paris http://www.editions-harmattan.fr ISBN : 978-2-343-18918-5 EAN : 9782343189185
àma Caro, encore et toujours et pour Samuel, Lola et Lucas
Introduction
Nous voudrions montrer, dans le premier tome de notre trilogie, comment nos manières de penser se sont logées dans un pli bien particulier et une manière unique et unilatérale de composer des mondes, qui reposent sur un schème du sacrifice, qui ne convient plus aux enjeux de notre temps. Le règne quasi unilatéral de ce schème dans l’histoire de la métaphysique s’est payé d’un double sacrifice, dans la pensée de l’être et celle de l’apparaître, aux très lourdes et destructrices conséquences pratiques, qui nous rend pour le moment incapables de penser les puissances des autres formes de vie : cellules, animaux, plantes… Pour suspendre la domination de ce schème du sacrifice et nous ouvrir enfin à des altérités qui ne soient pas nécessairement humaines, nous montrerons comment ce schème n’est pas le seul disponible pour configurer des mondes et avancerons que le schème animiste est celui que nous avons besoin de réactiver pour nous situer à la hauteur de nos enjeux cosmopolitiques : ce schème se paie de sacrifices bien moins lourds, nous permet d’accueillir enfin dans notre pensée métaphysique d’autres formes de vie, et nous restitue par effet en retour nos propres puissances d’agir. Il ne s’agira pas simplement de modifier notre conception de l’être en tant qu’être pour accueillir en son sein de nouvelles entités, selon un processus assez commun d’extension de la communauté ontologique, qui continuerait cependant de laisser dans l’ombre la présupposition la plus lourde et la plus ininterrogée de toute notre métaphysique occidentale : le privilège de l’homme comme seul foyer d’apparaître, de pensée ou de représentation de l’être en tant qu’être. L’univocité ontologique de Duns Scot reste prise dans cette figure de la simple extension de la communauté ontologique, sans remise en cause de la présupposition que l’homme est le seul foyer d’apparaître à qui apparaît cette nouvelle communauté ontologique élargie. Ce qu’il nous faudra interroger pour suspendre la domination de ce schème du sacrifice, c’est le règne massifde cette présupposition, qui ne concerne plus seulement le domaine de l’ontologie et de l’être en tant qu’être, mais aussi et surtout le domaine des foyers d’apparaître de l’être en tant qu’être: la phainologie comme discours de l’apparaître de l’être en tant qu’être à des foyers d’apparaître. Il est pour le moins surprenant que toutes les métaphysiques depuis Parménide et Platon aient fait de l’ontologie le centre unique de leur interrogation, sans placer au centre de leur thématisation l’opération d’apparaître de cet être. Cette non-thématisation de la phainologie devra attendre la phénoménologie de Hegel
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ou plutôt sa doctrine de l’Essence pour sortir de l’ombre et parvenir à une pleine thématisation. Cela ne veut pas dire que ces métaphysiques n’aient pas pensé cette dimension phainologique de l’apparaître, puisqu’elles y étaient toutes contraintes: il faut bien que l’être en tant qu’être apparaisse à un quelconque foyer d’apparaître pour se manifester. Mais cet apparaître n’est pas venu à une entière thématisation, par une sorte de contrainte d’essence ou de nécessité pratique sécrétée par la domination d’un schème du sacrifice. C’est parce que l’homme de la domestication des plantes et des animaux s’est placé en surplomb du monde et des autres formes devie qu’il s’est cru un être à part, exceptionnel, supérieur à ces autres formes de vie, dans une situation analogue aux divinités: le nouveau cosmopouvoir qu’il venait de conquérir lui donnait un pouvoir sur toutes les autres formes de vie, qui le rapprochait des divinités ou du Dieu juif ou chrétien accordant les flux cosmiques à toutes les forces de vie. Les autres formes de vie étaient réduites au rang de matériaux inertes, corvéables à merci, et l’homme se pensait le seul à faire apparaître de la nouveauté dans l’être: l’être en tant qu’être ne pouvait que se réduire à une communauté d’entités ontologiques inférieures à son propre être d’homme, et surtout, cet homme était le seul à penser l’être en tant qu’être comme animal raisonnable ou pensant, età pouvoir le faire apparaître par sa pensée ou son travail. Il était le sommet de la communauté ontologique et l’unique foyer d’apparition de l’être. Ou plutôt, la conquête de son nouveau cosmopouvoir le plaçait juste au-dessous des divinités ou du Dieu dans sa capacité à animer et relancer les flux de donation cosmique. La réduction des foyers d’apparaître de l’être au seul foyer humain est donc un geste arbitraire, qui nécessite une justification. La pensée ne saurait être la manière unique de faire apparaître de l’être en tant qu’être. La révolution darwinienne a opéré un choc : elle montrait enfin que toutes les formes de vie faisaient apparaître de la nouveauté dans l’être, sans passer nécessairement par la modalité de la pensée. Mais ce choc n’en fut un que parce que les métaphysiques avaient fini par imposer comme une évidence impensée ce qui n’était en rien évident: le fait que l’homme était le seul foyer d’apparaître de l’être. Pourtant, dans les schèmes animistes des chasseurs-cueilleurs, ce privilège de l’homme était inconcevable: les formes de vie humaines entraient dans des relations avec d’autres formes de vie non humaines, qui participaient à égalité à la relance des flux cosmiques. Cette pluralité phainologique des foyers d’apparaître transparaît encore dans la philosophie d’Aristote et sa pensée de la diversité des agirs naturels immanents, même si elle commence à être recouverte par une noétique qui place peu à peu l’homme au surplomb du monde, juste au-dessous du surplomb divin. Comme le geste de cette érection de l’homme en surplomb n’avait rien d’une évidence et risquait d’apparaître comme l’hégémonie arbitraire d’un foyer particulier d’apparaître imposé aux autres formes de vie comme une universalité sans contestation, il fallait justifier en raison ce
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