Théorie du beau dans la nature et les arts
140 pages
Français

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Théorie du beau dans la nature et les arts , livre ebook

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Description

La beauté n’existe point par elle-même, et dans les objets que nous trouvons beaux, elle n’est qu’une relation qu’ils ont avec nous. Elle est en eux une qualité relative et secondaire (comme le froid et la couleur), qui n’a d’existence que dans le sentiment que nous en avons. Cependant le sentiment même de la beauté est une chose très réelle, dont notre âme est affectée par la présence des objets que nous trouvons beaux, dans telles circonstances que l’observation fait connaître.Fruit d’une sélection réalisée au sein des fonds de la Bibliothèque nationale de France, Collection XIX a pour ambition de faire découvrir des textes classiques et moins classiques dans les meilleures éditions du XIXe siècle.

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EAN13 9782346054336
Langue Français

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Extrait

À propos de Collection XIX
Collection XIX est éditée par BnF-Partenariats, filiale de la Bibliothèque nationale de France.
Fruit d’une sélection réalisée au sein des prestigieux fonds de la BnF, Collection XIX a pour ambition de faire découvrir des textes classiques et moins classiques de la littérature, mais aussi des livres d’histoire, récits de voyage, portraits et mémoires ou livres pour la jeunesse…
Édités dans la meilleure qualité possible, eu égard au caractère patrimonial de ces fonds publiés au XIX e , les ebooks de Collection XIX sont proposés dans le format ePub3 pour rendre ces ouvrages accessibles au plus grand nombre, sur tous les supports de lecture.
Paul-Joseph Barthez
Théorie du beau dans la nature et les arts
INTRODUCTION
Ce n’est pas dans l’état primitif que l’on a supposé sortent avoir été pour l’homme l’état de la nature ; ce n’est que dans la société que peut se former et se développer en lui le sentiment de la beauté.
L’homme qui était sorti brut des mains de la nature, acquiert, par degrés, dans sa réunion avec ses semblables, l’habitude d’une attention forte et répétée sur les divers agréments des objets qui peuvent l’affecter. Cette attention le rend capable de ressentir avec force ceux de ces agréments qui sont propres à faire naître chez lui le sentiment de la beauté.
Le soin de cultiver ce sentiment par des études bien faites dans les lettres et dans les arts, est du plus grand intérêt pour le bonheur des individus et pour celui des sociétés.
La culture des lettres et des arts accoutume l’homme, dès sa première jeunesse, à exercer ses facultés intellectuelles, et à rechercher en tout un esprit d’ordre. On peul sans doute n’occuper cet âge que des exercices qui fortifient la constitution du corps : mais lorsqu’on borne l’éducation à cet objet, l’homme reste exposé à toutes les dépravations de l’esprit et du cœur, dont les germes commencent à se développer alors, et qui peuvent devenir des principes de dégénération irrémédiables dans tous les âges suivants.
La culture du sentiment de la beauté dans les lettres et dans les arts, étend et perfectionne l’intelligence humaine. dont l’agrandissement ne peut être négligé sans une sorte de mutilation d’une partie principale des facultés que la nature a données à l’homme.
On doit regarder comme étant très intéressantes sous ce rapport une infinité de connaissances géométriques, astronomiques, etc. dont on ne voit point des liaisons immédiates avec des choses utiles aux besoins de la vie. Il est d’ailleurs facile d’élaguer, dans les études philosophiques, des fictions vaines auxquelles on peut être entrainé par un abus du raisonnement, comme, par exemple, celui qui mènerait à penser avec Berkley qu’il n’y a point de corps, et que tout est en représentation.
Le sentiment des beautés de la nature et de l’art donne à l’homme des réjouissances plus délicates que celles qui lui viennent par les sens. Il lui assure en même temps l’activité nécessaire pour ne pas trouver la vie insipide dans les longs intervalles des plaisirs physiques, lorsqu’il n’a point d’inquiétude sur ses besoins, et qu’il n’est point livré à des passions fortes.
Dans de telles circonstances, les hommes sauvages succombent au sommeil, et l’homme civilisé est accablé par l’ennui.
Cet état pénible est pour lui l’effet nécessaire de la satiété, qui vient des désirs faibles et vagues auxquels il est réduit, lorsque l’absence totale du sentiment de la beauté a désenchanté ses yeux des objets qui l’attachaient le plus à la vie, et détruit ce voile heureux que la nature avait jeté sur ces objets.
Mais l’homme ajoute à son bonheur, et perfectionne son être moral, quand il sait exciter et entretenir convenablement une assez grande diversité d’affections et de goûts que peut faire naître en lui le sentiment de la beauté.
L’utilité principale de ces goûts multipliés qu’inspirent à l’homme divers genres d’objets où il sent de la beauté, et auxquels il partage son attention, est d’aider sa raison à combattre toute passion dominante pour laquelle il pourrait être maîtrisé si ces affections étaient concentrées sur un seul genre de ces objets.
C’est surtout par ces heureuses diversions que l’homme peut arrêter en lui la formation et les progrès de toute passion unique, qu’il peut se défendre de l’exagération des illusions que cette passion lui cause, et en dissiper le délire, dès qu’il tend à troubler la paix intérieure ou à dégrader son caractère.
Après qu’une semblable passion a extrêmement affaibli toutes les autres affections qui lui étaient étrangères ou opposées, si elle vient à rencontrer des obstacles insurmontables, elle cause la ruine des forces de l’âme, surtout chez les hommes doués d’une très grande sensibilité.
La raison seule, lorsqu’elle n’est point aidée par un concours de goûts variés pour des beaux objets de divers genres, n’offre, en général, que des secours impuissants pour prévenir et dissiper l’égarement d’une passion qui ne permet de sentir la beauté que dans les objets uniques, ou dans les objets d’un seul genre.
On doit même reconnaître que les seuls conseils de la raison étant inutiles pour vaincre une passion forte, comme celles de l’amour, de l’ambition, de la fortune ou de la gloire, etc., ils ne servent le plus souvent qu’à produire des incertitudes, des troubles, des repentirs qui empêchent les contentements réels que cette passion pourrait donner.
Ces vaines oppositions de la raison et de la passion dominante, n’opèrent alors que des alternatives nuisibles dans la conduite des hommes qui ne peuvent être ni conséquents, ni heureux, et qui semblent gouverner leur vie au hasard. En effet, il est certain, comme l’a dit Horace a , qu’on est moins malheureux par la constance dans des penchants même vicieux, que par une inconstance perpétuelle entre le vice et la vertu.
L’utilité générale qu’a la culture assidue des beautés qui sont propres aux lettres et aux arts, est de développer de plus en plus chez l’homme le sentiment de la beauté, et de perfectionner, par ce moyen, son être moral.
L’habitude de sentir les beautés qui résultent de la comparaison des divers objets de l’intelligence, dispose à goûter le sentiment du beau moral, qui est le principe de toutes les vertus. L’âme est alors continuellement portée à comparer et à raisonner ses affections, et à préférer constamment celles qui sont le plus conformes à des motifs d’ordre et de régularité. Ces affections qu’elle préfère, étant plus nobles et plus délicates, lui font sentir sa dignité et son élévation au-dessus des objets sensibles ; elles la disposent habituellement au sacrifice des jouissances personnelles qui ne sont que d’un intérêt vulgaire.
L’esprit de l’homme étant ainsi éclairé, et perfectionné par l’étude des lettres et de la philosophie, conçoit les vertus auxquelles l’homme peut s’élever d’une manière beaucoup plus parfaite et plus grande que ne peut les concevoir un pâtre, un laboureur ou tout autre homme d’une condition obscure dont l’éducation n’a point étendu les lumières naturelles. Celui-ci ne peut que parcourir sans cesse un cercle de vertus communes dans lequel il est entraîné comme automatiquement, par la nécessité, l’habitude et l’exemple de ses pareils.
Ainsi la culture des belles-lettres et des beaux-arts, étant bien dirigée, a une influence salutaire sur le perfectionnement des mœurs. Elle a, pour cette fin, des avantages plus sûrs, quoiqu’ils paraissent moins directs, que ne peuvent avoir des cours de morale pratique. Horace a dit avec raison que les caractères des actions humaines, soit belles, soit vicieuses, sont beaucoup mieux sentis et jugés dans les fables des poèmes d’Homère, que dans les traités de Chrysippe et d’autres philosophes qui ont écrit sur la morale.
L’utilité que peut avoir l’influence des lettres et des arts sur les mœurs, ne doit pas être encore problématique, malgré tous les nuages d’assertions sophistiques et superficielles dont Rousseau a enveloppé cette question.
Une considération essentielle suffit pour dissiper ces vaines assertions. Sans doute il arrive très généralement qu’en même temps que la lumière des arts et des sciences s’élève et s’augmente chez un peuple, la pratique des mœurs simples et l’exercice d’une probité ordinaire y deviennent plus rares et moins faciles. Mais cet effet, qui est étranger à l’état des sciences et des arts chez ce peuple, est seulement une suite naturelle des progrès vicieux qu’y a faits la civilisation.
A mesure que la marche progressive de la civilisation multiplie des rapports et des intérêts contraires entre les hommes qui

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