Controverses et polémiques religieuses
175 pages
Français
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Description

Le discours polémique à l'égard d'un système de croyances différent, ou d'un même système à des fins offensives ou défensives constitue un des modes du dialogisme religieux. Ces discours sont enracinés dans des contextes particuliers durant l'Antiquité et les Temps Modernes. Les différentes contributions ont su tenir compte de l'inscription locale et temporelle qui seule permet de décrypter les raisons profondes de ces controverses derrière lesquelles se cachent bien souvent des enjeux de pouvoir.

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Publié par
Date de parution 01 novembre 2007
Nombre de lectures 77
EAN13 9782296185449
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

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Extrait

INTRODUCTION
JANINE DESMULLIEZ,RALPH DEKONINCK
et MYRIAM WATTHEE-DELMOTTE
Ni lacontradiction n’est la marque
de fausseté, ni l’incontradiction
n’est marque de vérité.
BlaisePascal
Pensées sur la religion
La notion de «dialogisme » avancée par Mikhaïl Bakhtine, extrêmement
productive en analyse du discours où elle a suscité un approfondissement du
concept d’énonciation, ne l’est pas moins dans l’histoire des idées où elle peut
désigner la relation des divers discours quimodèlent l’énonciation polyphonique
d’une époque et d’une culture. À ce titre, elle éclaire les interactions qui
déterminent le champ des représentations et leur propagation; elle ind ique en
effet qu’il y a lieu de comprendre l’évolution des imaginaires co llectifs (et,
partant, individuels) sur unmode discursif et nonautonome.Cetaccent porté sur
la dimension relationnelle dans l’expression des idées et les faits qui en
découlent a de quoi interpeller les chercheurs, a fortiori lorsqu’il touche les
objets decroyancereligieuse.
À cet égard, un réseau international de recherche et de formation à la
recherche ayant pour thème: «l’étude des dialogismes religieux ausein d u
monde occidental de l’Antiquité à nos jours» s’est constitué en 2001 entre
l’Université Charles de Gaulle-Lille 3, l’Université catholique de Louvain
(Louvain-la-Neuve), l’Université Libre de Bruxelles, l’Institut catholique de
Lille, l’Université d’Artois et l’Université de Barcelone. Une première journée
d’étudess’est déroulée à l’Université de Lille 3 le 8 novembre 2002, une
seconde à Louvain-la-Neuve le 17 novembre 2003, une troisièmeàLille 3 le 22
novembre 2004. Les éditeurs remercient les auteurs qui sont intervenus lors de
ces trois journées et qui ont inauguré ce nouvel axe d’échanges
1pluridisciplinaires .
1Cet ouvrage est publié grâce au financement accordé pour les «Actions de Recherches
concertées (ARC)» par la Direction générale de l’Enseignement non obligatoire,
Direction de la Recherche scientifique, de la Communauté française de Belgique». Nos
remerciements s’adressent également à Nathalie Coisman et François-Xavier Lavenne
pour leurrelectureattentive duvolume .6 JANINE DESMULLIEZ,RALPH DEKONINCK et MYRIAM WATTHEE-DELMOTTE
Par «dialogismes religieux », il faut entendre toutes les formes d’échanges
discursifs entre plusieurs religions, aussi bien sur le mode des divergences que
sur celui des convergences. Ces premières journées ont permis d’étudier les
controverses et polémiques religieuses durant l’Antiquité et leur résurgence aux
Temps modernes, deux périodes de crise profonde durant lesquelles semet en
place une polarisation extrême donnant lieu à une construction d’imaginaires
antagonistes. Le discours polémique comme forme agressive de la
communicationcombattant,à des fins offensives ou défensives, d’autres discours
qui relèvent soit de systèmes de croyances différents, soit du même système,
constitue l’un des modes de ce que l’on peut appeler le dialogisme religieux .
Dansses manifestations les plus radicales, il repose sur des désaccords de fond
rendanttoutecoexistence difficile,voireconflictuelle.
C’est le cas dans l’Antiquité lorsque s’affrontent païens et chrétiens avant
313, date à partir de laquelle le christianisme est toléré dans l’Empire. Céline
Blas, dans son étude sur la représentation des premierschrétiens, décrit l’attitude
de lettrés païens qui se penchent sur «le cas chrétien » et expriment tour à tour
leur méfiance, leur appréhension et leur rejet de cette nouvelle religion. Ces
relations conflictuelles permettent néanmoins l’instauration de dialogues: en
effet, Juan Antonio Jiménez Sánchez rappelle les critiquesadressées par l’Église
aux jeux théâtraux qualifiés d’idolâtriques, d’immoraux, mais démontre que ces
critiques n’empêchèrent pas la conversion des acteurs auchristianisme; il fait le
récit, à partir d’histoires véridiques et légendaires, des conversions miracule uses
des acteurs sur scène: l’acteur était en train de parodier les rites chrétiens,
généralement le sacrement du baptême, lorsqu’il a une vision céleste et se
convertit devant son public, ce qui lui vaut d’être arrêté et persécuté. Dans un
second article, J. A. Jiménez Sánchez analyse l’évolution de la position de
l’Église face à la christianisation des spectacles de la tradition romano-païenne,
rappelant les critiques faites par les Pères de l’Église qui suivent une trad ition
littéraire remontant à Tertullien (folie au cirque, luxure au théâtre et cruauté à
l’amphithéâtre).En effet, le délit principal imputéaux spectacles était l’idolâtrie,
le péché le plus grave pour un chrétien. Désormais dans l’Empire chrétien, cet
argument devient inefficaceavec les lois qui sécularisent les jeux;Cassiodoreau
eVI siècleadmettait même la valeur culturelle decertains spectacles et leur utilité
pour lacollectivité.On voit là lerapprochement entre deuxtraditions opposées.
Mais le discours polémique peut relever du même système de croyances: à
l’intérieur du christianisme s’affrontent dans l’Antiquité des catholiques
orthodoxes qui suivent leCredo duconcile deNicée de 325 reconnaissant leFils
consubstantiel au Père (homoousios) et les adeptes de la doctrine d’Arius, parmi
lesquels l’empereur Constance II. Janine Desmulliez, en présentant la crise
arienne dans la province de Campanie, insiste sur la virulence de cette
polémique: par exemple les nicéens font de Constance II l’image de l’empereur
persécuteur plus cruel que les anciens tyrans Néron, Dèce et Maximien. Comme
autre exemple de controverse au sein d’un même système de croyances, Raúl
Villegas Marín étudie la réception de l’Augustinisme dans les monastères
provençaux, et montre que ce sont des lieux d’opposition à la doctrine de la
prédestination et de la grâce défendue par Augustin. De même, Josep Vilella,INTRODUCTION 7
dans sa présentation d’Ydace, un chroniqueur de son temps, insiste sur
l’inquiétude de cet évêque de Chaves face aux hérésies qui semaintiennent en
Espagne, en particulier face à la vitalité du priscillianisme qui subsiste; il
dénonce certains évêques contaminés par la contagion de cette hérésie affirmant
qu’ils doivent être excommuniéss’ilsrefusent de lacondamner.
Le second volet dece volume estconsacréaux Temps modernes, moment o ù
se déclare une profonde crise née, elle aussi, d’une dissension interne a u
e
christianisme.Parmi les débats qui ontagité lesconsciences au XVII siècle, il en
est un qui a longtemps occupé le devant de la scène, celui suscité par le
jansénisme. Toon Quaghebeur revient sur ses origines en enquêtant sur les
relations entre l’Université de Louvain et le Saint-Office. Au-delà des idées
reçues, il nous fait découvrir une réalité diffractée au prisme des enjeux
institutionnels propres au berceau louvaniste de la querelle, ce qui le conduit à
conclure en l’existence de jansénismes, ouvrant ainsi la voie à une révision
historiographique en la matière.
Les deux articles suivants abordent la construction imaginaire de la femme
e eentre XVI et XVII siècles. À travers l’affaire Marthe Brossier, Jean Leclercq,
décrit la manière dont cet imaginaire passe de l’ancienne diabolisation de la
sorcière à une première tentative de rationalisation de la différence, débouchant
sur uneapproche psychologique de la folie, le disco urs derelégation de l’autre se
faisant désormais au nom d’une nouvelle argumentation, qui se réclame d ’une
nouvelle vérité. Ici encore se révèle l’importance de l’inscription des lieux
communs dans un contexte particulier. Sandrine Lely présente, quant à elle, un
livre déroutant signé par Poulain de la Barre et consacré à l’égalité des sexes,
sujet polémique s’il en est, où se mêle

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