La lecture à portée de main
Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage
Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage
Description
Sujets
Informations
Publié par | L'Harmattan |
Date de parution | 01 décembre 2010 |
Nombre de lectures | 247 |
EAN13 | 9782296714229 |
Langue | Français |
Poids de l'ouvrage | 14 Mo |
Informations légales : prix de location à la page 0,0700€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.
Extrait
LE TAOÏSME FENGLIU
Une voie de liberté spirituelle en Extrême-Orient
Ouverture philosophique
Collection dirigée par Aline Caillet, Dominique Chateau,
Jean-Marc Lachaud et Bruno Péquignot
Une collection d’ouvrages qui se propose d’accueillir des travaux originaux sans exclusive d’écoles ou de thématiques.
Il s’agit de favoriser la confrontation de recherches et des réflexions qu’elles soient le fait de philosophes "professionnels" ou non. On n’y confondra donc pas la philosophie avec une discipline académique ; elle est réputée être le fait de tous ceux qu’habite la passion de penser, qu’ils soient professeurs de philosophie, spécialistes des sciences humaines, sociales ou naturelles, ou… polisseurs de verres de lunettes astronomiques.
Dernières parutions
Susanna LINDBERG, Entre Heidegger et Hegel , 2010.
Albert OGOUGBE, Modernité et Christianisme. La question théologico-politique chez Karl Löwith, Carl Schmitt et Hans Blumenberg , 2010.
Hervé LE BAUT, Présence de Maurice Merleau-Ponty , 2010.
Auguste NSONSISSA, Transdisciplinarité et transversalité épistémo-logiques chez Edgar Morin , 2010.
Stéphane KALLA, L’acte de la Perception, Pour une métaphysique de l’espace , 2010.
Jules Bourque, L’humour et la philosophie. De Socrate à Jean-Baptiste Botul , 2010.
Philippe RIVIALE, Heidegger, l’être en son impropriété , 2010.
Sylvain PORTIER, Fichte, philosophe du « Non-Moi », 2010.
Camilla BEVILACQUA, L’espace intermédiaire ou le rêve cinématographique , 2010.
Djibril SAMB, Le Vocabulaire des philosophes africains , 2010.
Xavier ZUBIRI, Traité de la réalité , 2010.
Marly BULCÃO, Promenade Brésilienne dans la poétique de Gaston Bachelard, 2010.
Martin MOSCHELL, Divertissement et consolation Essai sur la société des spectateurs , 2010.
Antoine Marcel
LE TAOÏSME FENGLIU
Une voie de liberté spirituelle en Extrême-Orient
L’Harmattan
Du même auteur
L’Esprit du Bonsaï , Nathan, Paris 1993. Nouvelle édition, revue et corrigée, Les Deux Océans, Paris, 2004.
Nan Shan, Recueil de la Colline du Sud , Les Deux Océans, Paris, 1997.
Nan Shan, Au Sud des Nuages , Les Deux Océans, Paris, 2001.
Nan Shan, Dresser des pierres, planter des bambous – l’art du jardin selon Nan Shan maître jardinier du Zen , Les Deux Océans, Paris, 2002.
Carnet Chinois , Arléa, Paris, 2002.
L’Inscription chinoise du Zen , Les Deux Océans, Paris, 2004.
Le Jardin du lettré , Alternatives, Paris, 2004.
L’Appel des grues dans le ciel clair – Éveil, vagabondages et poésie dans la tradition excentrique du taoïsme et du chan , essai, Les Deux Océans, Paris, 2006.
Traité de la cabane solitaire , Arléa, Paris, 2006.
Zen & Connaissance – vers une écologie spirituelle , Oxus, Paris, 2009.
Un monde se lève – le court poème d’éveil, son art et sa philosophie , Accarias-L’Originel, Paris, 2010.
Le Sourire du Bouddha – essai sur la Perfection de Sapience , Les Deux Océans, Paris, 2010.
© L’Harmattan, 2010
5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr
ISBN : 978-2-296-13622-9
EAN : 9782296136229
Fabrication numérique : Actissia Services, 2012
Introduction
_____
Aller avec le vent , voilà la proposition poétique qu’entend investiguer et poursuivre cet ouvrage.
Fengliu , « aller avec le vent », tel est le style de vie qu’adoptèrent en Extrême-Orient – Chine, Corée, Japon – nombre de lettrés, de moines excentriques, de peintres et de poètes, de l’antiquité à nos jours. Inspirés par un puissant désir de liberté spirituelle, ces hommes, comme ils le purent, vécurent leur ivresse d’éveil en vagabonds, en fou-poètes, tantôt en solitaires, dans des ermitages de montagne, près d’un temple zen, tantôt en compagnie d’amoureuses, de courtisanes du monde des saules et des fleurs. Bohème, dandysme, existentialisme, les références qui sont les nôtres, pour appréhender l’esprit créatif et libertaire du fengliu sont maladroites, inadéquates et insuffisantes.
La philosophie du fengliu , qui est aussi un art de vivre tout imprégné de taoïsme, est apparue en Chine au cinquième siècle et n’a cessé, depuis, d’exercer son influence sur la culture chinoise, puis japonaise. Libertaire et libertine, elle constitue un important contrepoint aux austères valeurs confucéennes face auxquelles elle apparaît comme une façon d’épicurisme, un ascétisme de bon vivant.
L’idée de fengliu s’origine dans le taoïsme philosophique du Laozi et du Zhuangzi, classiques dans lesquels l’écoulement spontané de l’eau est une métaphore du grand Tao. Dans le fengliu , en l’occurrence, c’est le souffle plus inconstant et capricieux du vent qui sert de modèle à l’insaisissable.
風流 fengliu , « aller avec le vent », est une expression composée de deux caractères chinois dont le premier signifie vent , et le second – qui comporte la clef de l’eau et celle du fleuve {1} – couler , s’écouler . Un dictionnaire de la langue chinoise, de nos jours, pour traduire fengliu donne en général deux sens distincts. Le premier sens est remarquable et élégant , le deuxième est léger, licencieux . Quant au terme fûryû , si l’on s’accorde au Japon pour dire qu’il signifie "beau", son sens reste insaisissable – l’ouvrage qui suit va tenter de montrer pourquoi et comment.
Il s’agit là de sens évolués, mutés au cours de l’histoire, car à l’origine la métaphore désignait la transmission et l’influence du tao – feng signifie aussi "méthode" – des anciens. C’est en effet une vie conforme au tao de Laozi et de Zhuangzi que le poète Taoyuanming (365-427) se proposa de retrouver en retournant vivre aux champs. Fengliu , alors, désigna un style de vie solitaire, simple et poétique, visant un accord serein avec le cours des choses.
Le caractère feng , vent, que l’on retrouve dans fengshui , mot passé tel quel dans notre langage, ou fengjing , « paysage », désigne non seulement le vent mais l’atmosphère et ses changements, l’incessante mutation du ciel et son écho dans le cœur de l’homme. Feng , c’est aussi les brumes flottantes de la peinture de paysages montagnes et eaux, lien manifeste entre le vide du ciel et la forme des dix mille phénomènes, le signe, en somme, de l’apparaître de l’être-temps. Ainsi, aller avec le vent est la philosophie d’une résonance intime et joyeuse avec l’émergence des dix mille choses, un art de se mettre au diapason de ce qui est, un art de vivre très pragmatique, au plus près des différents aspects très concrets d’une existence vécue pour de vrai, au jour le jour. Au cours des siècles, cependant, des Song aux Qing, de Heian à Meiji, usé par les références, se copiant et se caricaturant lui-même, cet art de vivre s’est transformé au point de devenir peu à peu, malgré des périodes de renouveau, une simple mode affectée et creuse.
En littérature on trouve l’influence de la poétique philosophique du fengliu dans des formes aussi diverses que le carnet secret , les notes de chevet , dans les recueils de recettes de vie heureuse, les carnets de voyage et même certains romans érotiques.
Au Japon le sens de l’expression a continué d’évoluer, au contact de la culture bouddhiste japonaise très imprégnée du sentiment de l’éphémère, il s’est nuancé, puis s’est édulcoré aussi, au point d’être simplement employé pour 雅 miyabi , qui signifie « élégance raffinée ».
L’investigation que nous allons entreprendre, cependant, montrera que dès lors que l’on en a bien vu les racines originelles fortement ancrées dans le confucianisme, puis le taoïsme et le bouddhisme chan, les diverses acceptions de l’expression aller avec le vent procèdent d’un même substrat philosophique, et présentent une cohérence qui échappe à toute appréhension extérieure par trop formelle ou académique. Comme il en est dans l’école chan/zen, on est ici au-delà des écritures, dans la tradition d’une transmission de cœur à cœur, dont le véritable sens ne peut se situer que dans un vécu.
Pour nous, Occidentaux, cette recherche d’un parfait réglage de tout ce qui constitue réellement l’existence, la nourriture, le sexe, la toilette, l’habillement, l’aménagement de maisons et jardins, a quelque chose de rafraîchissant, car que la vérité de la vie soit dans la vie et non au monde des idées – Platon, Kant – ou dans celle d’un dieu créateur, ne nous est pas si habituel. Que liberté spirituelle et libertinage soient en profond accord ne l’est pas non plus.
La cultu