L Italie de nos jours
156 pages
Français

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L'Italie de nos jours , livre ebook

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Description

Voir, c’est savoir. Où le lecteur fait connaissance avec un peintre, un historien et un poëte. — Un livre maltraité. — Insurrection d’Ernest. — Réponse victorieuse de Léon. — La révolte capitule. — On fixe le jour du départ. — Manifeste du caissier de l’expédition. — Exposé du plan du voyage. — Allocution du chef d’équipement.LOIN de moi les bouquins et les descriptions ! fit Ernest en jetant le livre au milieu de l’appartement.Fruit d’une sélection réalisée au sein des fonds de la Bibliothèque nationale de France, Collection XIX a pour ambition de faire découvrir des textes classiques et moins classiques dans les meilleures éditions du XIXe siècle.

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Nombre de lectures 1
EAN13 9782346069231
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

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Extrait

À propos de Collection XIX
Collection XIX est éditée par BnF-Partenariats, filiale de la Bibliothèque nationale de France.
Fruit d’une sélection réalisée au sein des prestigieux fonds de la BnF, Collection XIX a pour ambition de faire découvrir des textes classiques et moins classiques de la littérature, mais aussi des livres d’histoire, récits de voyage, portraits et mémoires ou livres pour la jeunesse…
Édités dans la meilleure qualité possible, eu égard au caractère patrimonial de ces fonds publiés au XIX e , les ebooks de Collection XIX sont proposés dans le format ePub3 pour rendre ces ouvrages accessibles au plus grand nombre, sur tous les supports de lecture.

Edmond Roche
L'Italie de nos jours
I
PROJET DE VOYAGE

Voir, c’est savoir.

Où le lecteur fait connaissance avec un peintre, un historien et un poëte. — Un livre maltraité. — Insurrection d’Ernest. — Réponse victorieuse de Léon. — La révolte capitule. — On fixe le jour du départ. — Manifeste du caissier de l’expédition. — Exposé du plan du voyage. — Allocution du chef d’équipement.
L OIN de moi les bouquins et les descriptions ! fit Ernest en jetant le livre au milieu de l’appartement.  — Voilà deux jours que tu maltraites singulièrement ma bibliothèque, dit Léon, en ramassant le volume et en l’examinant avec une paternelle sollicitude.  — Tu nous dois l’explication de cette mauvaise humeur, Ernest, hasardai-je à mon tour.  — Une délicieuse reliure de Capé, reprit Léon en palpant le livre avec la précaution d’un médecin appelé près d’un passant qui vient de faire une chute.  — Tes livres m’obsèdent, répliqua Ernest avec vivacité, je dirai plus : ils m’irritent ; je trouve qu’il est superflu de prendre sans cesse l’avis des autres, et qu’il serait temps de voir par nous-mêmes ce que nous voulons voir.  — Ma foi, dis-je à Léon, franchement, je suis de l’avis de maître Ernest.  — Toi aussi, me répondit-il avec un douloureux étonnement ; un poëte qui fait fi des précieuses ressources de la science, de l’histoire, de l’archéologie, c’est déplorable, c’est à ne plus croire à rien.  — Il n’est pas besoin de pâlir sur un amas d’in-folio, d’in-quarto, d’inoctavo, pour entreprendre un voyage en Italie, dit Ernest avec décision ; peu m’importe le passé ; je suis de mon époque et c’est mon époque que je veux connaître.  — Merveilleuse façon de raisonner, vraiment ! fit Léon avec un sourire de fine raillerie : ainsi, les études de nos illustres devanciers sont lettre morte, toi seul verras bien ce qu’il faudra voir, toi seul formuleras l’appréciation exacte des hommes et des choses, toi seul discerneras le vrai de l’erreur, le beau du laid ; en vérité, c’est par trop audacieux.  — Audacieux tant que tu voudras ; mais mon avis est qu’à force de rabâcher incessamment les opinions des autres, on finit par abdiquer sa personnalité ; on s’identifie avec les sentiments et les opinions de ces illustres devanciers dont tu me parlais tout à l’heure avec tant d’emphase ; on en arrive à ne plus voir que par eux, et à chausser avec docilité des besicles rétrospectives qui vous faussent le regard et vous fatiguent le promontoire nasal.  — Eh bien ! fixons le jour du départ, mes amis, dis-je, croyant par cet argument terminer la discussion.  — Là n’est pas la question, reprit Léon avec feu ; il est évident que demain, ce soir, nous pouvons nous mettre en route ; mais je liens à prouver à mon frère que j’étais dans le vrai en insistant pour que nous nous livrions tous trois à ces études préparatoires, que je considère comme indispensables. Eh quoi ! nous formons un beau jour le projet de visiter l’Italie, la nation mère du monde moderne, le sol où se sont débattues et où se débattent encore les destinées de l’humanité, ce grand foyer intellectuel d’où les conquêtes des sciences et les splendeurs des arts ont rejailli sur toute l’Europe, d’où est parti le mouvement politique, le mouvement religieux, le mouvement artistique ; ce pays dont l’histoire est notre histoire, dont le passé côtoie notre passé, dont le présent intéresse notre présent, et nous Artistes, nous fils de l’intelligence, nous ferions comme le bourgeois stupide qui voyage sur la foi des itinéraires et des cicéroni, et qui, en fait de souvenirs, rapporte triomphalement une broche en mosaïque pour madame et la recette du macaroni pour sa cuisinière ! Non, continua-t-il avec une éloquence entraînante, je n’admets pas une pareille aberration d’esprit. en ma qualité de prétendant futur au noble titre d’historien, j’ai consciencieusement relu avec amour tous les écrivains anciens et modernes de l’Italie : César, Tacite, Suétone, Salluste, Machiavel, Zani, le comte Daru, Sismondi, Cantu et tant d’autres ; toi, dit-il en se tournant vers Ernest, j’ai eu soin de te faire connaître tout ce qui a rapport à la peinture et à la sculpture non-seulement par les livres, mais en allant examiner ensemble les originaux et les copies des chefs-d’œuvre de Raphaël, du Titien, de Tintoret, de Véronèse, du Corrège, du Dominiquin, enfin de tous les maîtres, depuis les gothiques jusqu’aux modernes ; quant à toi, me dit-il, en ta qualité de poëte, de fils aimé de la Muse, tu as vécu en douce compagnie avec Dante, Pétrarque, le Tasse, l’Arioste, l’école Berniesque étincelante d’une fantaisie délicate, Goldoni, Alfieri, Gozzi, Manzoni, Caporali, Léopardi ; et comme la Musique est sœur cadette de la Poésie, et que tu as l’heureux privilége d’être à la fois musicien et poëte, tu as demandé le secret de leur art à tous les maîtres, depuis Palestrina jusqu’à Rossini ; en fait d’Archéologie, nous avons fraternellement accompli ensemble notre tâche, les ruines et les palais trouveront à qui parler, et je puis le dire avec l’orgueil d’une conscience satisfaite, nulle part nous n’aurons à subir l’embarras de l’ignorance ; nous sommes devenus antiquaires : nous avons étudié les poteries de Faenza, les verreries de Venise, les faïences de Lucca della Robbia, les majoliques de mastro Giorgio, les gravures de Marc-Antoine Raimondi, les ciselures de Benvenuto Cellini, de Ghirlandajo, et tout ce monde de statues qui jaillit du marbre de Carrare de Michel-Ange à Canova. Eh bien ! moi historien, toi peintre, toi poëte, si Dieu a déposé en nous ce rayon d’intuition qui constitue le génie, nous verrons toutes ces choses non par les yeux de nos devanciers, mais par le regard intérieur agrandi et assuré par eux ; notre angle visuel s’arrêtera sur un aspect inaperçu, particulier à notre organisation, et nous créerons, parce que nous aurons vécu dans la société intime des créateurs. J’ai dit.  — Et tu as merveilleusement dit, m’écriai-je enthousiasmé ; la révolte capitule, Ernest et moi demandons merci ; tu as eu raison, dix fois, cent fois raison !... Quand partons-nous ?  — Quand vous voudrez, répliqua Léon heureux de son triomphe.  — Alors, allons demain matin aux passe-ports, faisons nos malles le soir, et en route après demain matin, dit Ernest.  — Après demain, c’est convenu, dit Léon.  — C’est convenu, repris-je : après demain nous disons adieu au macadam, aux boulevards constellés de tiers d’agents de change et de courtiers marrons ; nous fuyons les cancans des journaux, les médisances des salons ; nous dépouillons l’habit parisien pour endosser le costume commode du cosmopolite. Oh ! mes amis :

« Voyager en artiste, un bâton à la main, Sac au dos, feutre au front, l’allure insoucieuse, Jeter à tous les vents son âme aventureuse, Ne pas regretter hier en pensant à demain, S’écarter à plaisir de la route suivie, Marcher libre et joyeux, c’est une noble vie. » Pardonnez-moi cette réminiscence poétique, mais elle est en situation, comme disent les auteurs dramatiques.  — Tu es tout pardonné, dit Ernest ; citer rentre dans tes attributions.  — Sans doute, dit Léon ; mais, puisque nous en sommes sur ce chapitre, entendons-nous une dernière fois. Vous m’avez nommé le caissier de la troupe, chacun de vous me remettra donc demain la somme fixée ; je commencerai mes fonctions par inscrire l’article passe-ports sur mon carnet de dépense ; et, à ce propos, je vous avertis à l’avance que je tiendrai serrés les cordons de la bourse commune ; je n’admettrai les extra qu’après une étape fatigante ou dans les cas exceptionnels ; est-ce convenu ?  — C’est convenu.
Maintenant, Ernest a dû tracer l’itinéraire raisonné du voyage, j’en demande immédiatement la communication.  — Voici, dit Ernest en

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