Ces étrangers parmi nous
242 pages
Français

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Ces étrangers parmi nous , livre ebook

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Description

Ce livre résulte de rencontres avec des ressortissants de pays que nous connaissons moins ou pas du tout, ces nouveaux étrangers qui un jour très prochain deviendront nos amis, nos voisins. Cette monographie a pour but une meilleure compréhension de l'autre, une approche de cette diversité foisonnante qui parsème la vie. C'est un outil de travail pour les enseignants, les travailleurs sociaux, les soignants, les éducateurs qui accueillent des personnes issues des nouvelles immigrations du XXIe siècle.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 mai 2011
Nombre de lectures 38
EAN13 9782296809192
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,1000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Ces étrangers parmi nous
Au Carrefour du Social
Collection dirigée par Marc Garcet et Serge Dalla Piazza
L’Association Interrégionale de Guidance et de Santé (AIGS) est née en 1964 de la volonté de quelques hommes de promouvoir la santé et la qualité de vie pour tous. Des dizaines de services de proximité et extrahospitaliers ont vu le jour pour accompagner, insérer, aider, soigner, intégrer, revalider, former des milliers d’usagers en mal d’adaptation personnelle ou sociale. En collaboration avec les éditions L’Harmattan de Paris, la collection Au Carrefour du Social veut promouvoir ce modèle et offrir une réflexion ou des rapports de ces pratiques et de ces innovations.
Déjà parus
Marc GARCET et Serge DALLA PIAZZA, L’économie ne peut être que sociale, 2011.
Serge DALLA PIAZZA et Marc GARCET (dir.), Rendre la commune aux citoyens, Citoyenneté et démocratie locale à l’ère de la mondialisation, 2010.
Serge DALLA PIAZZA et Marc GARCET (dir.), Jeunes, inactifs, immigrés : une question d’identité. Vivre dans un désert industriel, 2010.
Marc GARCET, Construction de l’Europe sociale, 2009.
Serge DALLA PIAZZA et Marc GARCET, L’avenir de l’homme en question, 2009.
Marc GARCET et Serge DALLA PIAZZA, En marche vers un idéal social, 2005.
Serge Dalla Piazza
Ces étrangers parmi nous
L’HARMATTAN
Illustration de couverture : Jamal Lgana, avec son autorisation.
© L’HARMATTAN, 2011
5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr
ISBN : 978-2-296-54991-3
EAN : 9782296549913
Que sont mes amis devenus ?
Merci à mes collègues Arlette, Christelle,
Lucienne, Nicole, Stéphanie
PROPOS LIMINAIRES
Je me souviens de cette institutrice de Cheratte, un bourg de la province de Liège, à l’est de la Belgique. Terre de charbon, durant plusieurs décennies, elle avait accueilli des immigrés. S’étaient ainsi succédé des Polonais, des Italiens, des Espagnols, des Marocains et, plus récemment, des Turcs. La plupart d’entre eux, au fil des générations, étaient restés. Les charbonnages avaient fermé et ils avaient ouvert un petit commerce, étaient allés travailler dans des usines plus loin ou avaient bénéficié d’allocations de chômage.
Progressivement, les gens s’étaient mêlés et parfois seuls les accents trahissaient encore l’origine. Les derniers arrivés éprouvaient plus de mal à s’habituer. Ils restaient groupés dans des quartiers ouvriers aux maisons toutes identiques. Ils gardaient leur langue, leurs habitudes, leurs mœurs. Le regroupement familial les y avait aidés. Ils avaient un code de vie à eux qui rendait les contacts difficiles. Leurs enfants, souvent nombreux, allaient à l’école publique de Cheratte. Certains avaient droit à un Imam pour l’enseignement de la religion musulmane. L’institutrice de 1 ère année avait dans sa classe 18 nationalités pour 24 élèves. Les petits belges étaient donc largement minoritaires. Cette Tour de Babel moderne n’empêchait pas les enfants de jouer ensemble durant le temps de récréation. Ne nous y trompons pas, me disait l’institutrice, un racisme latent reste présent, le plus souvent à l’égard de la minorité belge ou à l’égard plus généralement des Européens.
Il est bien difficile dans ces conditions d’enseigner. Cela devient individuel, car pour certains, la compréhension du langage oral n’y est pas. Il faut d’abord traduire les consignes avec des gestes ou des dessins, leur apprendre les rudiments de la langue française. Ne parlons pas du retard scolaire qui grandit chaque année. Les contacts avec les familles sont quasi inexistants. Impossible de se comprendre. Les exigences sont minimalistes : que les enfants apprennent le français et qu’ils respectent le code de conduite en classe. Le reste, le programme scolaire...
Souvent, cette institutrice se sentait dépassée, isolée, incomprise par sa direction. Souvent, elle avait peur des parents à la mine parfois patibulaire. Elle était malgré tout contente quand les enfants lui disaient bonjour en rue ou lorsqu’elle voyait que l’un ou l’autre poursuivait sa scolarité.
Je me souviens encore de cette consultation d’un enfant tchétchène dans un service de santé mentale. La demande avait été introduite par un service social local, car son intégration scolaire était mauvaise et on se demandait s’il n’avait pas une déficience intellectuelle. Cela avait pris un certain temps pour organiser un rendez-vous avec la famille, le service social et l’interprète.
Après l’accueil social pour établir un début d’anamnèse, j’avais rejoint le groupe de dames dans le bureau. Il y avait là 2 assistantes sociales, l’interprète, la maman et le gamin d’une dizaine d’années. À mon arrivée, la maman et le gamin s’étaient levés et j’avais tendu la main vers la maman. Avec un air gêné, elle l’avait refusée et je venais de comprendre que j’avais commis une erreur culturelle. Je m’étais approché de l’enfant qui était assis devant le bureau et qui dessinait. Il m’avait regardé et s’était levé pour me céder sa place. Je l’avais refusée d’un geste, commettant ma deuxième erreur culturelle. J’avais refusé cette marque de respect, mettant l’enfant en échec et moi-même en situation inférieure.
Je m’étais ensuite isolé dans un autre bureau avec l’enfant et l’interprète. L’enfant avait réalisé sans crainte et sans difficulté particulière les tests proposés. Il n’est pas facile de travailler à trois alors qu’on est habitué à le faire en vis-à-vis. Tout prend du temps, on n’est pas vraiment certain des traductions. Parfois, il y a des conflits ethniques sous-jacents dont on n’est pas vraiment conscient. Parfois, il s’agit d’une seconde langue pour l’interprète qui vient en fait d’un autre pays. La confiance est nécessaire. L’enfant avait donc collaboré et j’avais appris qu’il avait des problèmes scolaires et de comportement dans son pays d’origine. Ici, il ne comprenait pas, était loin de sa famille, de son père resté au pays. Il vivait avec sa mère et une sœur aînée et il ne le supportait pas, ne comprenant pas une situation qui n’était effectivement pas très claire.
Quoi qu’il en soit, il était difficile à l’école, n’évoluait guère et il était surtout devenu le despote de sa famille, frappant sa mère, ne lui obéissant en rien, capricieux, autoritaire, violent, insupportable. Son institutrice était une femme.
Je n’en ai plus entendu parler, mais je me demande souvent ce qu’il devient. Son intégration est loin d’être assurée, tant que les secrets de son déplacement ne sont pas levés et tant que son père n’est pas là pour assurer l’autorité dont il a besoin pour grandir. En attendant, j’ai conseillé qu’on le mette plutôt, quel que soit son niveau scolaire, chez un instituteur.
Jacqueline travaillait dans l’administration de sa commune (municipalité) depuis de nombreuses années. Il ne s’agissait pas d’une ville. C’était tout petit et tout le monde se connaissait. Depuis quelques années, une partie de son travail avait changé. Elle était chargée des affaires sociales, d’aider les gens, d’évaluer leur détresse et leurs besoins matériels et d’introduire des demandes d’aide.
Dorénavant, elle était aussi chargée d’accueillir et d’aider à l’installation de familles issues de l’immigration. Certaines familles arrivaient directement de pays dont elle ne soupçonnait même pas l’existence. Ces nouvelles immigrations liées aux guerres le plus souvent étaient réparties sur le territoire. Cette politique existait depuis plusieurs années et devait favoriser l’intégration de ces nouveaux arrivés. Cela avait surtout pour but d’éviter la formation de ghettos culturels et l’explosion de violences.
Le problème était double pour elle. D’abord, elle recevait plus de familles que de logements disponibles et il lui arrivait de devoir utiliser provisoirement des logements insalubres. De plus, elle ne connaissait rien à la culture de la plupart de ces personnes, encore moins à leur langue. La communication était donc difficile, voire impossible. Il lui fallait beaucoup d’imagination pour faire face à des situations inattendues. Ses collègues se moquaient d’elle et lui conseillaient d’en faire moins. Son responsable direct tenait parfois des propos d’allure raciste, ce qui l’indisposait fort, mais elle n’avait jamais rien osé dire.
Jacqueline se souvient du cas particulier de ce couple libanais, arrivé avec 4 enfants, dont un petit Ali atteint d’autisme. Ses sœurs avaient été scolarisées rapidement et avaient vite appris des rudiments de français. Pour Ali, elle ne savait que faire. Comment le scolariser ? Comment l’aider ? Les parents ne parlaient que l’arabe et l’anglais. Elle avait fini par faire appel à un service d’intervention précoce qui était venu à domicile et dont les interve

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