Du servage au salariat agricole dans l Europe des paysans
403 pages
Français

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Du servage au salariat agricole dans l'Europe des paysans , livre ebook

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Description

L'histoire des ouvriers agricoles en France est bien connue à ce jour suite aux différentes études, recherches et témoignages. Ces approches de la réalité permettent de lever le voile sur leurs difficiles conditions de vie et de travail trop méconnues jusque-là. Dans le présent ouvrage, nous souhaitons, dépassant le seul cadre du territoire français, axer notre démarche à l'échelle du continent européen par le biais des recherches entreprises dans chaque pays concerné.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 janvier 2011
Nombre de lectures 285
EAN13 9782296716285
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,1500€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Du servage au salariat agricole
dans l’Europe des paysans
du Moyen Âge au XX e siècle
© L’Harmattan, 2010
5-7, rue de l’École-polytechnique ; 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-13877-3
EAN : 9782296138773

Fabrication numérique : Socprest, 2012
Pierre Piégay


Du servage au salariat agricole
dans l’Europe des paysans
du Moyen Âge au XX e siècle
CARTE DE L’EUROPE EN 1900
CARTE DE L’EUROPE EN 2010
INTRODUCTION
Le présent ouvrage n’est pas une suite directe de notre précédente recherche mais la question qui sera traitée reste la même : les conditions d’existence des ouvriers agricoles. Nous écrivions que parmi ces ouvriers agricoles, les plus nombreux étaient les « domestiques agricoles et les servantes de ferme » aux 19 e et 20 e siècles.

Dans les années 1950, ces domestiques et ces servantes, comme les appelaient eux-mêmes les exploitants agricoles, étaient logés et nourris par leurs employeurs. Ils représentaient encore environ 60 % de l’ensemble des ouvriers agricoles, mais ceux seulement logés, plus nombreux encore puisqu’ils étaient dans la décennie de 1950 près de 80 % (76,50 %). Certains, très peu nombreux, étaient seulement nourris : 8 % (1).

En conséquence, il ne restait guère que 15 % d’ouvriers agricoles ni logés, ni nourris, sans doute des journaliers, déjà en nette diminution dans ces années-là (2) (voir tableau ci-après).



Ce salariat agricole comprenait autour de 50 % de célibataires. On peut en rechercher les causes dans leurs conditions de vie et de travail. Ce « Manuel d’éducation ménagère agricole », réédité en 1929 (3), laisse bien entendre que les domestiques (hommes) peuvent être appelés à coucher près du bétail (c’est-à-dire dans l’étable) « dans un but de surveillance de ce cheptel » . Que, de plus, ils peuvent « bénéficier en hiver de la chaleur de l’écurie » ! (page 83).

Comme l’écrit J.-P. GUTTON (4) citant l’Ancien Régime, « leur embauche est plus souvent orale qu’écrite, ce qui ne signifie pas qu’elle n’obéit pas à des règles » . Cependant, ce qui était valable sous l’Ancien Régime l’est resté après sa disparition. Dans ces mêmes années 1950, les modes d’embauches et les « règles non-dites » étaient toujours en vigueur et appliquées au plus grand nombre d’entre eux…

Nous en resterons là…

Venons-en à ce nouvel ouvrage dans lequel nous centrerons notre recherche à un autre niveau, celui des ouvriers agricoles en Europe.

Pourquoi ? Une première réponse : à notre connaissance, la question ouvrière agricole n’a pas été abordée à ce stade et il est bien temps qu’un essai soit tenté avant que l’oubli n’efface de la mémoire collective ce qu’a été le salariat agricole dans l’ancienne agriculture, dite aussi, concernant la petite et moyenne exploitation agricole, « la polyculture-élevage ». Ce salariat était le véritable prolétariat agricole, il a trimé dans l’ombre des paysanneries d’Europe sans en retirer la moindre reconnaissance, ni le moindre profit. Ils étaient « les sans feu, ni lieu » . Notre objectif n’est pas de nous livrer à une étude fouillée, comme nous avons pu le faire auparavant ; Ce qui est possible à ce niveau demande des moyens d’investigations que nous ne pouvons pas déployer à l’échelle de 20 à 30 nations, du moins en ce qui nous concerne.

Notre centre d’intérêt réside plutôt en un questionnement comme celui-ci : A quel moment de l’histoire des campagnes européennes les ouvriers agricoles sont insérés dans celle-ci ? Qui étaient-ils ? D’où venaient-ils ? Qu’elles étaient leurs conditions de vie ? En remontant dans le temps, on tombe sur le servage, on n’y parle pas, ou si peu, de salariat mais davantage de domesticité en ce Moyen Age.

On découvre dans tout cela le rôle et la place de la paysannerie au cours des siècles. Elle a été asservie au Moyen Age. Puis, ensuite, des serfs sont devenus des exploitants agricoles et des employeurs du prolétariat des campagnes européennes. Ce dernier atteignait de plus en plus largement les humbles et les laissés pour compte. Les ouvriers agricoles en sont issus. C’est, peut-on dire, la même histoire dans toute l’Europe du Moyen Age. Après, on parle d’Europe Occidentale (ou de l’Ouest), de l’Europe Centrale et Orientale, de celle plus au Sud des grandes « latifundia ». Toutes ont leur part d’histoire, mais toutes conduisent au même constat : du droit coutumier, des communautés de village, des biens fonciers collectifs, on est passé à la propriété privée, à l’« enclosure » (clôture des terres), à l’enrichissement d’une minorité et la prolétarisation du plus grand nombre.

On est passé à l’économie capitaliste sans transition, comme si elle était en gestation dès le Moyen Age, ou plus tôt encore ?

Ainsi que l’écrivent Marcel Mazoyer et Laurence Roudart (5), évoquant le métier de marchand très lucratif mais également très risqué au Moyen Age, « les marchands recherchaient avant tout la rentabilité de leurs investissements ; des seigneurs laïcs ou ecclésiastiques faisaient de même. Ils employaient des salariés qui ne participaient pas, en général, au financement des moyens de productions » . Ils citent J. Gimpel (6) (page 25) qui observe que « les moulins de la région de Toulouse donnèrent lieu au 12 e siècle à la constitution des premières sociétés par actions connues ». Il s’agissait de vraies entreprises capitalistes dans lesquelles la recherche du profit motivait le placement des capitaux et où la main-d’œuvre salariée ne participait pas au capital. Ainsi se développait cette économie capitaliste.

L’ouvrage se développe en trois principaux volets, avec en préambule, en quelques pages, un rappel de ce que fut l’esclavage aux temps des « Empires Barbares ».

Dans chaque volet, une première partie d’ordre général, mais également propre à la France, sur la période considérée. La deuxième partie traite de la situation de chaque pays européen observé.

Ensuite, les chapitres se déclinent ainsi :

1 – LE TEMPS DU SERVAGE (MOYEN AGE)

Le serf se substitut à l’esclave, lorsque l’on a dispersé les équipes d’esclaves domestiques et développé les parcelles de terre sur lesquelles le serf sera fixé et qu’il cultivera. Le seigneur et maître concédera cette terre (ou tenure) à son serf, moyennant une contrepartie : ce sera la corvée.

Ainsi le seigneur s’est établi une « réserve » sur son domaine. Elle peut être d’une superficie plus ou moins grande selon les us et coutumes locaux. Il exploitera cette réserve pour son propre compte directement avec ses domestiques agricoles ou par l’intermédiaire d’un intendant ou régisseur. Dans celle-ci, il puisera tous les produits nécessaires à l’entretien de sa « maison » ou « familia », depuis les produits de la terre et ce qui en découle…

Ses besoins sont énormes et son entourage familial, et au-delà même, selon ses moyens et son rang, peut être pléthorique. Ses seuls travailleurs domestiques attachés à sa « familia » ne pourront suffire à la tâche, tant la besogne les accapare. Surtout si la réserve est importante en terre à cultiver et en chemins à entretenir, le seigneur aura recours à ses paysans-serfs qui lui doivent des corvées fixées en nombre de journées, selon les règles établies par lui… et les usages locaux. Le serf, quant à lui, cultivera sa tenure pour satisfaire à ses propres besoins, surtout alimentaires et vestimentaires (laine, par exemple), s’il le peut.

2 – LE TEMPS DU SALARIAT (16 E , 17 E , 18 E SIECLES)

Le servage s’achèvera, vers la fin du Moyen Age (le bas Moyen Age), pour différentes raisons nous semble-t-il. L’une que le travail de la terre évolue, que des modes culturaux nouveaux s’imposent suite aux défrichements des forêts et autres guérets et landes. Mais c’est surtout le droit coutumier qui est mis à mal et rejeté : vaine pâture, glanage, parcours de troupeaux, etc

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