La lecture à portée de main
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Description
Sujets
Informations
Publié par | Nouvelle Cité |
Date de parution | 15 février 2018 |
Nombre de lectures | 16 |
EAN13 | 9782853139656 |
Langue | Français |
Poids de l'ouvrage | 1 Mo |
Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.
Extrait
Philippe Dautais
ÉROS ET LIBERTÉ
Clés pour une mutation spirituelle
spiritualité
nouvelle cité
La plupart des citations bibliques de ce livre sont issues de la Bible Segond.
Composition : Soft Office (38)
Couverture : Florence Vandermarlière
Illustrations de couverture :
p. 1, tableau de d’Élianthe Dautais, intitulé Arbre de vie
p. 4, portrait de l’auteur, Philippe Dautais, D.R.
© Nouvelle Cité 2016
Domaine d’Arny
91680 Bruyères-le-Châtel
ISBN : 978-2-85313-965-6
Table des matières
Introduction
1 – Tu aimeras…
2 – Liberté ou servitude
3 – Revenir à soi-même : retrouver le chemin de la vie
4 – L’accès à la liberté intérieure
5 – La question du mal
6 – Muter ou mourir
7 – Le rapport au cosmos
8 – Le rapport à l’autre, au collectif
9 – L’amour conjugal
10 – Le mariage : voie royale vers l’accomplissement spirituel et la réalisation de la personne
11 – Le sacrement de l’amour
12 – L’éclosion de l’éros
Avec Élianthe, je remercie tous ceux qui nous ont aidés et nous soutiennent par leur participation active lors des sessions. Grâce à eux, le Centre Sainte-Croix continue ses activités de séminaires et de retraites.
Merci à Pascale Gérard, Anne Nicolescu et Suzanne Giuseppi-Testut pour leur relecture, les corrections et leurs remarques pertinentes.
INTRODUCTION
À bien regarder, ces deux mots – éros et liberté – focalisent l’essentiel de l’enjeu personnel et collectif. Ils sont à la racine du dynamisme de l’humanité et tissent la trame de l’histoire. Nous envisagerons ici l’éros dans sa pleine dimension, dans sa profondeur originelle nommée par Jean-Pierre Vernant 1 « éros primordial », « qui est présent depuis la nuit des temps » et qui participe du surgissement de la vie à chaque instant. C’est à partir de cette dynamique que nous poserons un regard sur les différentes expressions de l’éros, notamment celle que Platon nomme « l’éros populaire ». Ce qui retiendra particulièrement notre attention, c’est le rapport entre l’éros et la liberté comme possibilité de donner du sens, d’orienter positivement l’histoire ou de se laisser glisser vers le chaos. L’éros peut fleurir dans l’amour, comme plénitude de la relation ou au contraire être facteur de destruction.
À l’originel de nous-mêmes, l’éros est puissance et moteur de vie. Rien ne se fait sans l’éros, sans l’élan vital. Par lui, les forces de vie sont mises en mouvement, interagissent et deviennent fécondes. Chacun porte en lui-même des qualités, des aptitudes, des compétences qui prendront leur ampleur et produiront des fruits, si elles sont dynamisées par l’éros. L’éros a pour fonction de rendre la vie vivante, à condition qu’il soit assumé dans cette perspective. L’humain a souvent beaucoup de difficultés à établir un juste rapport avec cette puissance de vie, à la canaliser et à trouver les voies de son épanouissement. Reconnue et intégrée, elle peut le conduire vers la plénitude de vie, mais s’il se laisse déborder par ces forces intérieures, elles peuvent devenir destructrices. L’éros se révèle être un feu dévorant qu’il convient d’apprivoiser pour ne pas subir le retour de flamme. C’est là un défi posé en permanence à l’être humain, défi qui le provoque dans la nécessité d’acquérir une maturité intérieure que nous définirons ici comme capacité d’intégration et d’éveil de conscience. La gestion du feu a été une préoccupation constante des êtres humains. Elle est au cœur des mythes grecs et des textes fondateurs de l’humanité. Elle demeure un axe central à partir duquel émergent les questions du bien et du mal, de la vie et de la mort. Détacher ces notions de leur lien avec l’éros nous conduit vers un moralisme qui n’a pas de racine et n’est pas d’un grand secours pour affronter les défis existentiels. Par contre, retrouver ce lien nous place face à notre responsabilité et à notre liberté tant sur le plan personnel que collectif.
Nous traversons une époque marquée par le déferlement de l’éros dans la revendication permanente de la liberté. Cette tonalité s’inscrit dans tous les domaines : culturel, sociologique, économique. On veut pouvoir jouir de tout, tout de suite, sans entrave à notre liberté. Les limites sont vécues alors comme des contraintes qu’on tentera de repousser jusqu’à vouloir les effacer. La tendance générale aujourd’hui est de faire disparaître les frontières tant culturelles que naturelles. Or, les limites et les frontières définissent la séparation entre le dehors et le dedans pour une bonne gestion des flux. La peau en est un bon exemple. Elle enveloppe tout l’organisme, par là, elle définit la distinction entre dehors et dedans et, simultanément, elle est poreuse et permet ainsi une adaptation au milieu pour une juste gestion de l’équilibre interne. Effacer les frontières fragilise la sauvegarde de l’intégrité de l’organisme et de ce fait l’affaiblit dans sa capacité d’assumer les échanges. Plus les frontières sont poreuses plus il est difficile de gérer les flux. Cette réalité est caractéristique de l’état pathologique. Dans cet état, le dynamisme de l’éros se transforme en mal-être, en maladie, en feu dévorant qui consume et détruit. À tous les niveaux, le juste rapport à l’éros pose la nécessité des structures et des frontières.
Tôt dans mon existence, j’ai été confronté à la nécessité de ce juste rapport. De lui dépendait mon équilibre intérieur. Au-dehors, je devais assumer la pression des conditionnements tant physiques que culturels et sociaux. Je percevais le monde extérieur comme étrange et étranger, mais je devais l’accepter sous peine d’être rejeté. J’avais peur de m’y perdre ou plus précisément d’y perdre mon âme. Au-dedans, j’étais face à une immensité, à un infini, qui avait surgi par bouffées lors d’expériences du numineux 2 . Il me fallait pour sauvegarder mon équilibre intérieur assimiler les codes du monde extérieur et entrer dans le décryptage du monde intérieur pour en faire un allié alors qu’il présentait une menace.
Cela, je ne le verbalisais pas à l’époque, mais j’étais habité par une quête de compréhension et par une soif de sens qui se sont révélées insatiables. Ces défis ont été stimulants. Par eux, la vie me posait des questions auxquelles il me fallait répondre. Tout d’abord, ce fut la pénombre voire la nuit avec ses dangers, puis, à la faveur de rencontres, la levée des voiles. Ce chemin est passé par le corps, par l’ancrage dans le corps, par la structuration physique et psychique. Comme s’il fallait d’abord planter les racines en terre et assurer les fondations. Puis, ce fut la rencontre presque simultanée avec Annick de Souzenelle 3 et les Pères du désert d’Égypte 4 .
Avec Annick, je découvrais le sens biblique de l’Homme 5 , de l’Adam. Adam, un être de désir, saisi dans la dynamique de l’image vers la ressemblance, appelé à nommer les Hayoth (Gn 2,19) ou « énergies de vie » pour les intégrer et, ce faisant, les associer au processus de croissance spirituel. Adam, un être en devenir qui a pour vocation d’accéder au « Je suis » en disposant son terreau intérieur à la croissance du Yod, du fils divin qu’il est potentiellement. Chemin d’accomplissement présenté dans les évangiles en trois étapes ou trois baptêmes : d’eau, de feu et du crâne.
Sa lecture pertinente du livre de la Genèse ouvre sur l’univers dialogal du symbole. Les cieux et la terre, la lumière et les ténèbres, les Eaux d’en haut et les Eaux d’en bas, s’ils sont distingués ne sont pas séparés. Un cordon les relie, l’information circule. Tout l’univers visible s’enracine dans le Verbe qui fonde sa réalité d’être. Rien n’est séparé, tout est relié avec tout, tout communique, tout est en interrelation, en interdépendance, c’est dire que tout est vivant et