In Situ
107 pages
Français

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Description

Cet ouvrage s'intéresse à l'articulation des questions épistémologiques et éthiques que pose l'immersion du chercheur sur le terrain. Quelle est la fécondité épistémologique d'une réflexion éthique en anthropologie ? Il ne s'agit pas de proposer des recettes ou des préceptes méthodologiques ni même de poser définitivement, à la manière de Kant, ce que l'impératif catégorique de l'enquête de terrain valable et applicable en tout temps et en tous lieux. Cette publication fait suite à IN SITU Situations, interactions et récits d'enquête, 2016.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 02 mars 2020
Nombre de lectures 1
EAN13 9782336894829
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0950€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
4e de couverture
Mouvement des savoirs


Mouvement des savoirs Collection dirigée par Bernard Andrieu
L’enjeu de la collection est de décrire la mobilité des Savoirs entre des sciences exactes et des sciences humaines. Cette sorte de mobilogie épistémologique privilégie plus particulièrement les déplacements de disciplines originelles vers de nouvelles disciplines. L’effet de ce déplacement produit de nouvelles synthèses. Au déplacement des savoirs correspond une nouvelle description.
Mais le thème de cette révolution épistémologique présente aussi l’avantage de décrire à la fois la continuité et la discontinuité des savoirs : un modèle scientifique n’est ni fixé à l’intérieur de la science qui l’a constitué, ni définitivement fixé dans l’histoire des modèles, ni sans modifications par rapport aux effets des modèles par rapport aux autres disciplines (comme la réception critique, ou encore la concurrence des modèles). La révolution épistémologique a instauré une dynamique des savoirs.
La collection accueille des travaux d’histoire des idées et des sciences présentant les modes de communication et de constitution des savoirs innovants.
Déjà parus
François Potdevin, L’intervention dans les pratiques physiques, sportives et artistiques, Responsabilités et stratégies des acteurs , 2019.
Gérard FATH, Le « sujet » en désarroi dans les pratiques à haut gradient relationnel , 2019.
Bernard ANDRIEU et Simon RAMBAUD (dir.), L’architecture des Staps. Quatre-vingt-dix ans rue Lacretelle , 2018.
Laurence JEAN, Mon chat chez Lacan , 2018.
Bernard ANDRIEU, Philippe POMAR, Florent DESTRUHAUT et Emmanuelle VIGARIOS, Visages hybrides. Vers une anthropologie de la prothèse, 2018.
Odile GIRARDIN-GANTIER, D’autres limites à la prison, Comment l’Art-thérapie peut aider à supporter le monde carcéral , 2018.
Éric DUGAS (dir.), Les violences scolaires d’aujourd’hui en question. Regards croisés et altérités , 2018.
Titre


Sous la direction de Yann Beldame et Éric Perera







In SITU

Repousser les frontières de l’enquête de terrain



Préface de Sylvan Ferez Postface de Loïc Wacquant
Copyright








***






















© L’Harmattan, 2020 5-7, rue de l’École-Polytechnique ‒ 75005 Paris
www.editions-harmattan.fr
EAN Epub : 978-2-336-89482-9
Préface Du courage ethnographique
Sylvain FEREZ 1
À parcourir trop rapidement cet ouvrage, d’aucuns pourraient y voir une nouvelle expression d’un exotisme des marges. Une manière de retrouver – sinon de reconstruire – du pittoresque et du fantastique par le choix de terrains extrêmes, l’observation de conduites excessives, le partage de pratiques délictueuses. Le militantisme, les pratiques illégales, la violence urbaine, la bagarre, la boxe, la triche, la guerre, peuvent ainsi sembler s’offrir au regard de la lectrice ou du lecteur comme autant de curiosités qui interpellent parce que, éclairant des conduites mal connues, elles mobilisent avec une force toute particulière affects et fantasmes. La démarche ethnographique visée n’implique pourtant aucun voyeurisme. Et les auteurs auraient sans doute volontiers repris à leur compte la maxime d’Héraclite par laquelle Devereux conclut son livre De l’angoisse à la méthode : Les yeux et les oreilles sont pour les hommes de piètres témoins, s’ils ont des âmes qui n’en comprennent le langage 2 . Ainsi, en décrivant des pratiques apparemment extra-ordinaires dans leur banalité, les affects et les fantasmes, loin d’être occultés ou déniés, sont restitués à leur juste place, dans le langage des yeux et des oreilles d’un ethnographe qui a le courage de s’assumer comme sujet doté d’une âme humaine, celle évoquée par Héraclite.
On l’aura compris, le propos porte ici moins sur la spécificité des terrains visités au fil des chapitres, sur lesquels il s’agirait simplement de produire une connaissance, que sur le défi que ces derniers opposent au travail même de production de la connaissance. Car par la résistance qu’ils offrent au projet d’être étudiés, ces terrains finissent par révéler ce que tout chercheur•e•en sciences sociales devrait a minima savoir, et ce pourquoi chacun•e d’entre eux•elles devrait être formé•e à l’observation participante. Par-delà les terrains d’enquête, les objets de recherche investigués restent d’ailleurs souvent labiles, parfois même difficiles à saisir. Peu importe, tous alimentent un récit qui éclaire sous un angle original les mêmes enjeux associés à la posture de recherche. Quel que soit le terrain et l’objet, c’est en définitive cette posture qui, per se , est aventureuse. Pour la caractériser, Élias n’hésite ainsi pas à recourir à l’image employée par un texte fantastique d’Edgar Allan Poe 3 où un pêcheur échappe à la noyade dans le Maelström :
En bref : le pêcheur s’était vu impliqué dans un processus critique qui semblait tout d’abord se soustraire totalement à son contrôle, [il s’était] cramponné un certain temps à de quelconques espoirs imaginaires. …] . Après quelque temps, cependant, il retrouva son calme. Il commença à réfléchir avec davantage de sang-froid, et, prenant du recul, contrôlant sa peur, se regardant lui-même, pour ainsi dire, à distance […], il parvint à écarter ses pensées de lui-même et à les diriger sur la situation dans laquelle il était enfermé. Il reconnut alors, dans ce processus incontrôlable, les éléments qu’il pouvait utiliser en vue d’en contrôler les conditions de déroulement au mieux des intérêts de sa propre survie. […] Le niveau d’autocontrôle et celui du contrôle du processus étaient ici, comme on peut le voir, indépendants et complémentaires 4 .
Malgré son caractère séduisant, cette métaphore de la posture de recherche, entre engagement et distanciation, se heurte selon nous à certaines limites que l’ouvrage qui suit contribue à questionner. Elle offre tout d’abord une lecture rétrospective du processus de production de la connaissance en sciences humaines et sociales qui peine à rendre compte de la situation qui marque les commencements. Car le chercheur se jette tout seul dans le Maelström, selon des objectifs flous et sans nécessairement mesurer au départ l’importance des risques auxquels l’expose son désir épistémique. Mais il y a plus. En insistant sur la dialectique de l’incontrôlable et du contrôlable, et sur la rationalité pragmatique qui, en dernière analyse, organise le travail de recherche, Elias est conduit à décrire la prise de recul avant tout comme un effort de mise à distance de ses affects – une prise de pouvoir de l’esprit sur le corps, de la raison sur la passion, etc. Mais comment parvenir à écarter ses pensées de soi-même ? S’agit-il seulement de contrôler une situation qui paraissait incontrôlable ou peut-il aussi s’agir de donner sens à une situation dont le sens incertain – et parfois même le non-sens – interpelle le chercheur ou la chercheuse ?
Les travaux qui suivent invitent tous à tenter l’aventure ethnographique en commençant par « se jeter à l’eau », parfois sans trop savoir pourquoi ! Pour cela, ils érigent tacitement un double principe : ne jamais avoir à se justifier de sa curiosité et de son désir épistémique, ni du fait que cette curiosité et ce désir soient lestés d’affects. Dans ce cadre, il ne saurait être question d’écarter ou de faire taire ces/ses affects. Au contraire, il convient de les faire travailler pour, dans un même mouvement, les polir et les réfléchir. À la lecture des textes, force est de constater qu’une telle posture implique une certaine dose de courage. Du courage institutionnel d’abord, souvent au sein même de l’institution universitaire, où il s’agit de faire face à ceux que Charles Wright Mills 5 avait, en son temps, désigné comme les nouveaux entrepreneurs universitaires , fustigeant le manque d’imagination de la tradition sociologique américaine dominante dans les années 1950. Aujourd’hui, peu soutenus et valorisés par l’institution universitaire, les travaux présentés dans ce volume s’exposent en outre aux résistances associées aux réflexes de contrôle des institutions qu’ils étudient – la Justice, la Police, le Sport, etc. 6 . Ces dernières semblent à bien des égards hantées par des logiques de reproduction peu soucieuses des enjeux liés à la connaissance en sciences humaines et sociales 7 ou à la transparence démocratique de leurs pratiques 8 .
Ce courage institutionnel se double d’un courage

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