L alcool
252 pages
Français

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Description

La consommation d'alcool obéit à des conduites culturellement codifiées et se présente comme un véritable objet anthropologique. Voici un regard comparatif sur deux sociétés culturellement éloignées, la France et la Mongolie, toutes deux productrices de boissons alcoolisées. L'imaginaire lié à l'alcool accorde à celui-ci un rôle central dans les processus de classification et de mise en ordre de l'organisation sociale, des rituels, des relations à la "surnature".

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Informations

Publié par
Date de parution 01 février 2012
Nombre de lectures 94
EAN13 9782296482418
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

L’ALCOOL
ANTHROPOLOGIE D’UN OBJET-FRONTIERE
Logiques Sociales
Collection dirigée par Bruno Péquignot
En réunissant des chercheurs, des praticiens et des essayistes, même si la dominante reste universitaire, la collection Logiques Sociales entend favoriser les liens entre la recherche non finalisée et l’action sociale.
En laissant toute liberté théorique aux auteurs, elle cherche à promouvoir les recherches qui partent d’un terrain, d’une enquête ou d’une expérience qui augmentent la connaissance empirique des phénomènes sociaux ou qui proposent une innovation méthodologique ou théorique, voire une réévaluation de méthodes ou de systèmes conceptuels classiques.
Dernières parutions
Philippe ZARIFIAN, La question écologique , 2011.
Anne LAVANCHY, Anahy GAJARDO, Fred DERVON (sous la dir.) Anthropologies de l’interculturalité , 2011.
André DUCRET et Olivier Moeschler (sous la dir. de), Nouveaux regards sur les pratiques culturelles. Contraintes collectives, logiques individuelles et transformation des modes de vie , 2011.
Frédéric MOLLÉ, Servir. Engagement, dévouement , asservissement... les ambiguïtés , 2011.
Bernard FORMOSO, L’identité reconsidérée. Des mécanismes de base de l’identité à ses formes d’expression les plus actuelles , 2011.
Hermano Roberto THIRY-CHERQUES, Survivre au travail , 2011.
Isabelle LOIODICE, Philippe PLAS, Núria RAJADELL PUIGGROS (sous la dir.de), Université et formation tout au long de la vie, Un partenariat européen de mobilité sur les thèmes de l’éducation des adultes , 2011.
Maxime QUIJOUX, Flaviene LANNA, Raúl MATTA, Julien REBOTIER et Gildas DE SECHELLES (sous la dir. de), Cultures et inégalités. Enquête sur les dimensions culturelles des rapports sociaux , 2011.
Isabelle Bianquis
L’ALCOOL
ANTHROPOLOGIE D’UN OBJET-FRONTIERE
L’Harmattan
Du même auteur 1988 : De l’homme au vin , G.Klopp. Thionville. 1994 : L’Art et la Vigne , Le Verger, Strasbourg. 1997 : Usages culturels du corps (dir. I. Bianquis, C. Méchin, D. Le Breton), L’Harmattan, Coll. « Nouvelles Etudes Anthropologiques ». 1998 : Anthropologie du sensoriel- les sens dans tous les sens , (dir. C. Méchin, I. Bianquis, D. Le Breton), L’Harmattan, Coll. « Nouvelles Etudes Anthropologiques ». 2000 : Le corps, son ombre et son double , (dir. I. Bianquis, C. Méchin et D. Le Breton), L’Harmattan, Coll. « Nouvelles Etudes Anthropologiques ». 2004 : Anthropologie des orifices (dir. I. Bianquis, C. Méchin, D. Le Breton), L’Harmattan, Coll. « Nouvelles Etudes Anthropologiques ».
© L’HARMATTAN, 2012
5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr
ISBN : 978-2-296-56640-8
EAN : 9782296566408
« L’univers tout entier concentré dans ce vin »
(Apollinaire)
Avant propos
Les travaux explorant les pratiques liées à la consommation de l’alcool sont nombreux. Pourtant, pendant très longtemps, avant d’intéresser les spécialistes des sciences sociales, ce sont surtout des approches de types biologique et médical, historique, géographique ou encore économique qui ont prédominé. Le retard a commencé à se combler dans les années 1970 aux Etats Unis avec des publications relevant des Alcohol studies 1 , puis en Europe des travaux sociologiques et anthropologiques de grande qualité vont voir le jour à partir des années 1980 avec pour exemple le texte important de Mary Douglas « Constructive Drinking : Perspectives on Drink from Anthropology», publié pour la première fois en 1987. En France, citons, entre autres, les études d’Alphonse d’Houtaud, « Sciences sociales et alcool » paru en 1995, de Véronique Nahoum-Grappe : « La culture de l’ivresse : essai de phénoménologie » en 1991, « Histoire et alcool » en 1999 jusqu’à « Soif d’Ivresse » paru en 2005, ou encore de Sylvie Fainzang sur l’« Ethnologie des anciens alcooliques. La liberté ou la mort », paru en 1996. Comme le rappelle très justement Lionel Obadia dans son introduction à un numéro de la revue Socio-Anthropologie consacré au « Boire » 2 , les sciences humaines ont largement dissocié le biologique du social et du culturel, et c’est « dans l’opposition entre un ethos et un pathos du boire que se joue la résistance ou l’implication des Sciences de l’Homme dans le domaine des études alcoologiques ». L’ethnologue a vocation à se pencher sur les pratiques et les représentations, or l’alcool, dont les usages obéissent à des conduites culturellement codifiées, s’avère un véritable objet anthropologique.
L’étude que nous présentons ici cherche à porter un regard comparatif sur deux sociétés pour mieux éclairer l’étonnante articulation qui se dessine à l’observation entre l’objet alcool et l’ensemble des représentations qui, dans ces sociétés, donnent sens et forme au monde. Ainsi, dans cet ouvrage il sera moins question d’alcoolisation et de pathos que de pratiques sociales et culturelles en relation avec des alcools et les fonctions qui leur sont associées au cœur d’un système de correspondances multiples destinées à penser l’organisation sociale. Etudier la place accordée à l’alcool dans une société représente en réalité une voie d’accès magistrale à la compréhension de celle-ci. Marcel Mauss écrivait que l’étude des boissons fermentées conduit tout droit à la religion, mais le rapport à la religion n’épuise pas le sujet et nous verrons qu’au-delà du lien entre religion et alcool, les pistes suivies nous conduiront à envisager bien d’autres objets, parce que l’alcool non seulement permet de saisir les manières dont les sociétés construisent leur rapport à leur environnement, leur relation à l’autre, proche ou lointain, mais aussi les modalités de transformation des catégories culturelles en prise avec l’histoire et les contextes sociaux et économiques. Les pratiques de consommation livrent à l’ethnologue des clés de lecture pour décrypter valeurs et idéologies dans leurs temporalités.
La multiplicité des questions, des approches disciplinaires et des auteurs ayant abordé le thème d’alcool, force à la modestie. Nous ne chercherons pas ici à faire œuvre d’exhaustivité, nous proposerons simplement à partir d’une longue expérience de terrain d’explorer une voie anthropologique, utilisant la consommation alcoolisée comme « outil » capable de matérialiser le raffinement et la complexité de la pensée humaine. Cette réflexion sera menée à partir de la comparaison de deux sociétés que l’on pourrait qualifier de traditionnelles, mais il est certain que de nombreux éléments auraient pu être ajoutés si nous avions élargi notre propos en prenant en compte les foisonnants travaux consignés dans des enquêtes ethnographiques menées par nos collègues dans une multitude de sociétés.
Ces derniers nous ont été indispensables pour penser notre objet, cela étant, nous avons choisi délibérément de nous concentrer sur les terrains que nous connaissions le mieux pour construire notre démonstration.
Vingt-cinq ans de recherches en France et en Mongolie, auprès des viticulteurs alsaciens ici et des éleveurs nomades là-bas, dans des sociétés productrices de boissons alcoolisées m’ont conduite à explorer la relation intime qu’entretient l’homme avec son environnement entendu au sens large du terme. Si l’étude de l’alcool, de sa production et de sa consommation, fut à l’origine un sujet relativement circonscrit, il s’avéra, au cours des années, une clé ouvrant sur les multiples registres qui constituent les formes de pensée de soi et de sa relation aux autres, du monde environnant proche et lointain. Il devint ainsi un fil conducteur pour interroger le rapport que l’on entretient avec son propre corps, les représentations de l’espace (organisation de l’habitat, paysage viticole ou relation aux animaux, maîtrise et communication avec les espaces physiques naturels et surnaturels...), ou encore les conceptions relatives aux cycles temporels. Le fil directeur des alcools constitue une entrée possible pour « dérouler » une culture et c’est celui que nous avons privilégié mais, l’habitat ou l’alimentation en générale, les rituels, les règles matrimoniales, auraient de la même façon pu être envisagés.
La recherche ethnographique a toujours été sous-tendue par une réflexion

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