L Italie vue d ici
302 pages
Français

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Description

L'"ici" est en premier lieu la France : la conscience de l'altérité détermine alors l'élaboration de représentations, d'images, voire de stéréotypes sur l'Italie et les choses italiennes. Mais cet "ici" correspond plus largement au point de vue à partir duquel on regarde l'autre et l'ailleurs. A travers diverses situations migratoires, on observe les variations du regard sur la péninsule de la part des Italiens hors d'Italie, de leurs hôtes traditionnels mais aussi des immigrés en Italie.

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Informations

Publié par
Date de parution 01 février 2012
Nombre de lectures 74
EAN13 9782296483323
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,1350€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

L’ITALIE VUE D’ICI
Sous la direction de
Ada Tosatti
et Jean-Charles Vegliante
L’ITALIE VUE D’ICI
La traduction-migration
L’Harmattan
© L’Harmattan, 2012
5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr
ISBN : 978-2-296-55923-3
EAN : 9782296559233
AVANT-PROPOS
Cet ouvrage, fruit du travail de recherche du groupe CIRCE, rassemble des interventions qui avaient été présentées lors de la journée d’études « L’Italie vue d’ici : langue, culture, représentations nouvelles » organisée le 14 mars 2009 à la Maison d’Italie (Cité Universitaire de Paris). De nouveaux travaux sont venus élargir le premier noyau de contributions jusqu’à donner au volume son aspect actuel. S’il n’ambitionne pas à l’exhaustivité, ni à mettre un point définitif à des problématiques inépuisables et en constante évolution, il ouvre indéniablement un grand nombre de pistes de recherches, liées aux conséquences de la présence italienne hors d’Italie, et entend contribuer à soulever un certain nombre de questions allant au delà des seuls intérêts des études italiennes.
Nous avons voulu prolonger aussi par là une réflexion déjà engagée sur la « traduction-migration » * parce qu’il nous a paru important de donner à ce concept d’autres développements dans le domaine des représentations et des images mentales qu’elles génèrent. Le cadre général de la « translation », englobant déplacements, transferts et simples traductions de discours, comme dans l’ancienne translatio , fournit à tout le moins un instrument commode – de type surtout heuristique – pour la compréhension fine de contacts pluri-séculaires impliquant ces différents phénomènes, entre deux aires culturelles voisines telles que la francophone d’Europe et l’italo-romane, à la fois réduite au sein de la Péninsule et largement débordant ses limites : d’où le titre de « Quelques autres Italies » donné autrefois à deux numéros spéciaux des Langues Néo-Latines , dont La traduction-migration revendique l’héritage. Les deux pays concernés peuvent pour partie se référer à une histoire commune, issue tant bien que mal de ces échanges dont le feuilleté varié superpose fascination littéraire (comme, par exemple, entre France et Allemagne au temps de Mme de Staël), rivalité politique (parfois aussi exacerbée que celle traditionnelle entre France et Grande Bretagne), tensions économiques (pensons aux décennies entre XIX et XX e siècle à propos de la Méditerranée), conflits et compromis sociaux liés à un exceptionnel flux migratoire au moins entre 1851 et 1973. De quoi alimenter, en effet, encore d’autres recherches.
Celles-ci, croyons-nous, auraient tout à gagner à prendre en compte le point de vue civilisationniste qui est le nôtre, indispensable pour tenter d’analyser le malentendu italo-français, si souvent reconnu et toujours renaissant, jusque dans de petits détails sans importance en soi (les très fréquentes fautes d’orthographe, par exemple, qui affectent les termes italiens dans un grand sérieux quotidien du soir parisien) mais dont l’accumulation finit par ressembler à de la suffisance. Une bonne maîtrise de la langue, dans son épaisseur historique singulière (l’italien « commun » est à peu près fixé dans ses lignes de force vers la fin du XIII e siècle), et sa variation quasi infinie selon le canal, le milieu ou la région, demeure le seuil en deçà duquel il est vain de prétendre à une telle compréhension. Entre proches voisins, cela est bien connu, les gens comme les peuples finissent par ne plus se voir – et malheureusement parfois à ne plus pouvoir se voir du tout. Le presque-même , auquel nos travaux traductologiques nous ont par ailleurs rendus très attentifs, est en cela un piège de facilité illusoire et souvent un obstacle. Pour autant, le regard désincarné du pur linguiste – ainsi que le jugement de valeur du critique littéraire, du reste – ne suffit pas non plus à restituer l’épaisseur du silence derrière les mots (et les gestes) dont une étude sensible, diversifiée, ouverte et accueillante à cette « épreuve de l’étranger » globale que représente une telle interaction sur le temps long, à tous les niveaux de nos possibles analyses, comme celle qui a profondément transformé les populations concernées, d’arrivants et d’autochtones, devrait contribuer désormais à préciser les contours. Nous avons peut-être acquis enfin, pour la première fois dans notre histoire relativement récente, la juste distance – non le détachement – qui devrait nous aider en cela. Plus que nos propres forces, assez limitées il faut bien le dire, l’émergence de nouvelles formes de migration communicantes (ou, si l’on préfère, connectées ) permet le projet de cette compréhension plus adaptée à son objet. Les contributions les plus en prise sur ces réalités contemporaines récentes, on le verra, avancent déjà dans cette direction, dont certains sites et blogs italo-français portent concrètement témoignage, moderne translatio en effet, de Paris comme de Toulouse, Metz ou Grenoble.
Voilà qui pourrait sembler assez éloigné de l’image de l’Italie (ou des Italies) vue par les autres. Mais c’est que cette réalité d’un État-nation elle-même est sujette à questionnements, au-dedans et à l’extérieur, entre le souvenir de l’Italie fasciste et l’Italie en crise des années soixante-dix, la nostalgie inévitable des exilés au loin et la violence de certains mouvements contestataires, le pays émietté par l’absence d’un État fort et l’italianisation à son corps défendant opérée à l’étranger, sous le regard des habitants du pays d’accueil ; et en partie « grâce » à lui. Plus peut-être que pour d’autres grandes émigrations des temps modernes, la complexité même de ces multiples facettes explique aussi que la rapide mutation du pays (admis au rang des grandes puissances, dans l’imaginaire collectif, seulement à partir du début des années 1980 du siècle dernier ; nous aimons à suggérer la date de 1982, Mundial de football et traduction du Nom de la rose en français) n’ait pas été perçue, en tout cas jusqu’aux phénomènes récents des migrants connectés, ni par les représentations des émigrés ni dans la richesse intime de leur propre souvenir. À un malentendu massif externe semble correspondre donc, symétriquement, une illusion d’identité intérieure, précieuse néanmoins, et tant bien que mal préservée avec une langue bricolée, mouvante, en rapport (imaginaire) à ce qu’Ungaretti appelait « pays innocent ». Mais c’est aussi l’époque où la Fondation Agnelli s’avise intelligemment qu’il y a un urgent besoin de s’occuper de « l’autre » Italie : la diffusion de Notizie dall’Italia commence, en attendant justement Altre Italie , aujourd’hui en ligne.
C’est néanmoins le point de vue du pays d’accueil que ces réflexions prétendent privilégier. De là un « ici » qui est en premier lieu la France, mais qui correspond plus largement au point de vue, au sens premier de l’expression, à partir duquel on regarde l’ailleurs. Nous venons de le suggérer avec l’émigré Ungaretti, cet ailleurs peut correspondre à ce qui a été ou qui pourrait être un « ici », réel ou rêvé, effectif ou en réserve, sans toujours tendre à devenir définitivement « autre » au sens de l’ alius que l’anglo-américain a conservé. Aussi, dans ce premier cas de figure, l’ailleurs et l’ici s’articulent-ils dans un rapport dialectique qui non seulement nécessite de l’ un pour que l’ autre existe, mais qui, plus profondément, les unit dans une expérience commune dont ils deviennent deux éléments indispensables et inséparables. Cette expérience est celle du déplacement, en un mouvement réel ou métaphorique : une véritable « culture de la mobilité » italienne, où la migration est physique, exil mais aussi mouvance des textes et conscience d’une appartenance plurielle. Deux conditions qui supposent un aller-retour constant entre le connu, l’inconnu, le mal connu. Ce volume présente à cet effet une assez vaste typologie de situations migratoires, permettant de s’interroger sur les variations et les transformations qui touchent à la constitution du regard sur la péninsule de la part des Italiens hors d’Italie (entre les immigrés de première génération et ceux de deuxième ou troisième génération) mais également de la part de la communauté des immigrés étrangers en Italie.
En revanche, la conscience préalable de l’altérité – de ce qui vient d’ailleurs, le « horsain » de naguère – détermine le deuxième

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