Le projet, le territoire et autres contingences
162 pages
Français

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Le projet, le territoire et autres contingences , livre ebook

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Description

D'un côté, des politiques publiques, économiques, sociales et environnementales territorialisées qui peinent à aboutir. De l'autre, des actions collectives locales qui y parviennent. D'un côté, le projet déterministe, linéaire, simplificateur. De l'autre, le processus collaboratif, agile, holistique, né de et dans la complexité et la contingence des milieux locaux. En interprétant ces constats, l'auteur explore une approche originale des systèmes d'acteurs, de leurs organisations collaboratives et spatiales et des changements structurels dans les milieux locaux.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 10 décembre 2018
Nombre de lectures 2
EAN13 9782336858296
Langue Français
Poids de l'ouvrage 5 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Jean-Marie Funel






Le projet, le territoire
et autres contingences


Regards sur l’action collective











Du même auteur

Le développement régional et sa problématique, étudiés à travers l’expérience de Tahoua au
Niger, Paris, Éditions du ministère de la Coopération, coll. « méthodologie de la planification »,
1976, 336 p.

« Espace physique et développement rural en Afrique soudano-sahélienne : quelques variations sur
ce thème », in Maîtrise de l’espace agraire et développement en Afrique Tropicale, ouvrage
collectif, Paris, Mémoire ORSTOM n° 89, IRD Éditions, 1979, 600 p., pp. 229-239.

Politiques d’aménagements hydro-agricoles, Paris, Presses universitaires de France, coll.
« Techniques vivantes », 1981, 212 p. Ouvrage coécrit avec Guy Laucoin.





© L’Harmattan, 2018
5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris

http://www.editions-harmattan.fr

EAN Epub : 978-2-336-85829-6R e m e r c i e m e n t s
Pour leurs conseils, leurs lectures critiques, les informations qu’elles et ils m’ont apportées, pour
leurs encouragements à poursuivre, pour les idées que nous avons partagées ou confrontées, cet
ouvrage doit beaucoup, dans l’ordre de l’alphabet, à Sylvain Baudet, Pierre Cécil Brasseur, Gilles
Crague, Catherine Depont, Gwenaël Doré, Philippe Serizier, Julien Theisse, Patricia Vornetti. Je les
en remercie.A V A N T - P R O P O S
La quantité d’illusion était énorme sans doute, mais s’il n’y avait rien eu, mais s’il
n’y avait pas eu ce mouvement... ne serions-nous pas, alors, couverts de honte, et tout
autrement que pour les bévues que, dans le feu roulant des actions de soutien, nous
avons pu commettre.

1Jean-Christophe Bailly
1 Jean-Christophe Bailly, Le Paradis du Sens, Paris, Christian Bourgois, 1988.De l’importance des origines
Vers les années soixante, soixante-dix, deux modèles idéologiques « stables » dominaient le
2monde, ainsi que nous le rappelle Edgar Morin ; le premier, classique pour les uns, bourgeois pour
les autres, considérait que la société industrielle adossée à la science et à la technique, en se
développant à l’infinie, était à même d’apporter le bien être, la démocratie, de mettre fin à la guerre,
la faim, la maladie, ainsi qu’aux inégalités ; le second, que cet auteur qualifie de «
marxistestalinistique », considérait qu’un bon départ avait été pris à l’Est avec le socialisme qui apportait le
mieux-être, l’instruction et devait liquider la faim, la maladie, la guerre. Socialisme qui pour certains
3était la destination finale d’un monde en situation de transition .

Certes si ainsi la planète était pour chacun en bonne voie, il était admis que beaucoup restait à
faire, notamment pour le tiers-monde considéré comme étant en situation de transition vers un de ces
modèles (chaque impétrant souhaitant, activant, le sien). Et il était admis que cette transition (source
en son temps de nombreux écrits et colloques.), pouvait être chaotique, ce qui était vérifié avec la
récurrence des crises, alimentaires, sanitaires, politiques, sécuritaires, bref sociétales, ainsi
qu’écologiques.

C’est dans ce contexte qu’à l’instar de nombreux agronomes de ma génération nourris de
l’idéologie tiers-mondiste autant que de technologies agricoles, avertis toutefois par le professeur
4René Dumont que « l’Afrique Noire est mal partie » , je m’engageais dans la transition... à laquelle
les technologies et méthodes toutes fraîches dont nous étions porteurs, adossées aux aides bilatérales
et multilatérales massives qui étaient en place, devaient assurer un dénouement rapide et heureux. À
la même époque le même auteur dont la parole faisait référence nous alertait sur le fait que « nous
5allons à la famine » , l’horizon étant fixé à l’an 2000 ; il y avait le feu !

Technologies et financements étaient mobilisés essentiellement sous la forme de pro}ets formatés
par des organismes techniques spécialisés (que l’on appelait « sociétés d’intervention ») en même
temps que par les fameux bailleurs de fonds qui disposaient chacun de leur typologie fétiche de
projets et de leurs critères de financements. Il était admis, non sans perplexité pour nombre d’entre
nous, que ces pratiques étaient des contributions robustes à la sortie de la transition, et au-delà à ce
qu’il était convenu d’appeler le « développement ».

Une littérature abondante sinon partisane (ah, les heures passées à la librairie Maspero !) nous
avait abreuvés de ce concept... qui se révéla désespérément abscons lorsqu’en situation sur le terrain,
là, dans ces villages des brousses tchadiennes ou nigériennes... mais ça aurait pu être n’importe où...
il fallait lui trouver un contenu sinon un sens.

Les systèmes productifs agricoles, ceux par lesquels par formation je fus conduit à aborder ces
sociétés, me semblèrent à l’état zéro de la technologie (jugement sur lequel je revins par la suite).
Pour ce qui concerne le cadre de vie, aucune des fonctions urbaines minimales que nos schémas
implicites d’Européens nantis s’attendraient à trouver dans le moindre bourg n’existait. La question
quasi métaphysique de l’accumulation primitive du capital se révélait insolite... en l’absence de
capital à accumuler (en première analyse). La transition ne semblait pas commencée, ni près de l’être.
« tout était à faire »… en référence à notre modèle.

Pour les personnes de ces pays concernées, les facteurs de progrès portaient prioritairement sur la
lutte contre la maladie (dispensaires), la sécurisation de l’accès à l’eau (les puits), l’école, ainsi que
sur la réduction des pertes de récoltes dans les greniers (lutte contre les parasites et prédateurs). Elles
ne rêvaient pas d’un ordre nouveau mais de la satisfaction de ce qu’elles considéraient être leurs
besoins élémentaires, rêve d’autant plus légitimes qu’elles savaient que des solutions existaient.
Développement ? Transition ? On n’en était plus là, ces rhétoriques semblaient hors de propos,
tout au moins accessoires.. à tort ou à raison. La nécessité, l’urgence de parer à l’essentiel prenaient
le dessus. Problème, la mise en place de ces fonctions basiques représentait un coût considérable au
regard des capacités contributives de ces populations ; elles furent, mutatis mutandis, assurées par les
services publics locaux avec l’aide massive de financements extérieurs. Il en fut ainsi durant une
vingtaine d’années, jusqu’à ce qu’à partir des années quatre-vingt, les coûts correspondants et
l’endettement récurrent soient jugés insupportables par la communauté internationale, fraîchement
acquise au monétarisme en même temps que soumise aux premières tensions sérieuses sur ses
finances publiques. Avec l’argument vertueux de la rigueur de gestion, elle mit en route le rouleau
compresseur de l’ajustement structurel, réduisant de façon drastique jusqu’à le supprimer le
financement de ces fonctions, avec pour les pays les plus dépourvus de ressources, des régressions
violentes dans des services à la population déjà mal en point.

Si transition il y avait, elle se faisait dans le mauvais sens.

Tel fut le contexte de mes questionnements fondateurs, qui, même dans des environnements
totalement différents, ne devaient plus me quitter jusqu’à susciter l’écriture de cet essai. Ils
trouvèrent leur consistance dès mon premier contact avec le milieu rural, tchadien. C’était il y a
longtemps. Je participais en tant qu’agronome à une mission destinée en quelque sorte à faire
« l’inventaire » et « décrire » les populations qui se trouvaient le long du tracé d’une future route.
Les modes de vie, les modes de relations à l’espace et au foncier, les systèmes productifs, de ces
populations n’étaient pas connus. La particularité du Tchad notamment dans cette partie de son
territoire est (était ?) la coexistence sur des espaces somme toute restreints d’une grande diversité de
6groupes ethniques .

Ce qui aurait pu être un simple travail de routine de description de systèmes productifs agricoles,
un inventaire purement factuel additionnant des regards disjoints, prit une

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