Les Mëbarakònò
292 pages
Français
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Description

Dans cet ouvrage, l'auteur présente les traits fondamentaux de la culture bëti : ses coutumes, ses traditions, son évolution, sa dégénérescence et ses mutations actuelles. Son originalité se perçoit sur le groupe retenu : les Mëbarkònò et surtout sur la pratique du rite Mboman. Ce rite a été rétabli par les Mëbarkònò dont l'objectif était de rétablir le rayonnement de la société. Ce rite trouve sa pertinence dans le souci de ce peuple de relancer le débat sur l'héritage culturel d'un peuple qui tend à se complaire dans le chaos culturel.

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Date de parution 22 mars 2019
Nombre de lectures 1
EAN13 9782140117329
Langue Français
Poids de l'ouvrage 6 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,1300€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Claude BertinOK A L AETOGA
LESMËBARKÒNÒ Organisation socioculturellebëti, pratiques des rites et renaissance duMboman
Préface de Zachée Denis BITJA AKODY Postface de FrançoisXavierETOA
LesMëbarkònò
Claude Bertin OKALAETOGA
LesMëbarkònòOrganisation socioculturellebëti, pratiques des rites et renaissance duMboman
Préface de Zachée Denis BITJAAKODY
Postface de François-XavierETOA
© L’Harmattan, 2019 5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris http://www.editions-harmattan.fr ISBN : 978-2-343-16769-5 EAN : 9782343167695
Préface
Cet ouvrage paraît dans un contexte socioculturel marqué par une désuétudeprononcée despratiques linguistiques et culturelles endogènes. Jadis, les valeurs socioculturelles africaines authentiques étaient authentiques telles que la polygamie, le veuvage, le lévirat, le jugement coutumier, les tatouages et lespeintures corporelles identitaires ou ethniques, les rites d’initiation, le culte des ancêtres, les signes d’appartenance ethnique, la pharmacopée, sont pour la plupart en déliquescence, parce que jugées barbares, à tort ou à raison, et condamnées à disparaître. Jadisprospères, les langues bantoues avaient assumé des fonctions sociolinguistiques vitalisantes de langues d’intégration, dans les villes africaines naissantes et celles de langues de première scolarisation. Aujourd'hui, elles ont perdu ces prestigieuses fonctions sociales au profit des seules langues occidentales.
Dans le cas spécifique de la communauté beti-fangdont relève l’auteur, à titre d’exemple, la langue ewondo, variante du beti-fang, langue d’intégration à la ville de Yaoundéjusqu’en 1980, a cédé cette fonction au français. Le mongo-ewondo, variété véhiculaire du beti-fangjadis utilisée dans les gions administratives de l’Est et de l’Adamaoua, n’estplus uniquement parlé par des personnes très âgées, après avoir cédé la fonction véhiculaire du beti-fangau français. La scolarisation, les langues, les religions et les systèmes de valeurs importés ont bouleversé les civilisations bantouesquiploient sous les coups de boutoir conjugués des civilisations judéo-chrétienne et arabo-musulmane.
Dans ce contexte d’une société camerounaise fortement christianisée, islamisée et en perte de repères culturels endogènes, l’affichage des signes d’appartenance aux sectes ésotériques occidentales est à la mode et confère une stature sociale certaine au membre. En creux, la déclaration d’appartenance à une société secrète africaine sonne comme une révolte chez ses congénères et s’exprimer publiquement dans une langue camerounaise devient problématique.
Face à la déliquescence des valeurs socioculturelles africaines et dans l’optique de sauver ce qui peut l’être, chaque personne physique ou morale, consciente de l’intérêt des cultures endogènes,yva de ses moyenspour leur préservation. Legouvernement du Renouveau a créé, depuis la rentrée académique 2008-2009, un Département de Langues et Cultures camerounaises à l’École normale supérieure de l’Université de Yaoundé I. Ce
partement singulier forme depuis lors, desprofesseursqualifiéspour l’enseignement des langues nationales et despratiques culturelles communautaires qu’elles véhiculent. Les enseignants de Langues et Cultures camerounaises nantis d’un DIPES I ou II sont déjàprésents dansplus d’une centaine de Lycées de la République à l’effet de «former des citoyens enracinés dans leurs cultures ethniques et ouverts au monde», objectif principal de l’Éducation au Cameroun.
L’ouvrage du Zomelo’o OKALA ETOGA se situe résolument dans ce sillage de lapréservation, la sauvegarde, la conservation et lapromotion du patrimoine culturel endogène. Il grave dans la pierre, et pour les générations à venir, le rite depassageMbomandesMëbarkònò, en vue de sa transmission, via la scolarisation, aux futurs apprenants des langues et cultures beti-fangque l’on trouve au Cameroun, au Gabon, en Guinée Équatoriale, au Congo-Brazzaville et à Sao Tomé-et-Principe. C’est là toute la pertinence de cet ouvrageque nous recommandons à tous ceux, croyants ou non,qui voient en nos langues, en nos traditions, us et coutumes, des valeurs culturelles centrales dont on ne peut se défaire sans perdre son identité culturelle ethnique.
Bienqueprofondément chrétien catholique, l’auteur de cet ouvrage ne s’en cachepas d’avoir bravé le rite initiatiqueMboman, d’en vanter les vertus et de scander les mérites de l’Afrique traditionnelle. Par ce rite, il a accédé au cercle très fermé des Zomelo’o desMëbarkònò.
Claude Bertin Okala Etoga commence son ouvragepar une relecture critique des thèsesgénéalogiques sur les Ewondo. Sa réflexion va déboucher sur la valorisation des rites et coutumesbëti. À cet effet, la pratique duMboman, un ritepropre auxMebarkònòen constitue le thème saillant. L’auteur,praticien de la tradition, met augoût dujour, comme il l’avoue lui-même, des perceptions, interprétations et déductions de la chose traditionnelle. En saqualité d’initié et d’habitué des rites etjoutes traditionnels, il reconnaît avoir une certaine autoritépourprocéder à des démonstrations scientifiquement pertinentes. Cet ouvrage seprésente comme une contribution d’un observateur dont lesprestations et les analyses tiennent de ses connaissances empiriquement acquisesgrâce à ses responsabilités au niveau de la hiérarchie traditionnelle. Il va finalement s’avérer comme un traité socio-anthropologique de par sa pertinence et la méthodologie retenue. Pr Zachée Denis BITJAA KODY Chefde Département de Langues et Cultures camerounaises École normale supérieure Université de Yaoundé I
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Avant-propos
La finalité de cette étude est axée sur la pratique du riteMbomandans la traditionmëbarkònò.Notre démarche s’inscrit dans une approche simple, interprétative des faits, en l’occurrence, la signification du riteque nous nous proposons de présenter aux lecteurs. Il va de soi que les anthropologues, les ethnologues et les sociologues ont instauré des méthodes, des théories et des démarches scientifiques ; canons sans lesquels tout discours, fut-il cohérent à propos d’une réalité donnée, n’aurait pas de légitimité scientifique.
Loin d’être iconoclaste ou anticonformiste, notre ouvrage estplutôt la mise augoût dujour desperceptions, interprétations et déductions d’unpraticien de la chose traditionnelle. En notrequalité d’initié et d’habitué des rites et joutes traditionnels, nous estimons avoir une certaine autorité pour procéder à des démonstrations scientifiquement pertinentes.
Revenons sur leMboman. Il faut signalerque ce terme est moins connu dans d’autres groupesbëti. Il en est de même de l’ensemble des chercheurs. Pourquoi notre choix a-t-il étéporté sur ce thème ? Est-cepour combler un vide là où lapremièregénération des chercheurs, encore moins la seconde, n’a pas apportéplus de renseigPrétendrons-nous alors maîtriser lesnements ? contours de ce rite ? Notre lectorat ne manquera pas de soulever cette problématique, d’autantplusque les traditions ancestrales ontperdu leur autorité, sous l’influence équivoq: leue de la colonisation et son corollaire christianisme. Leur résurgence peine à se maintenir à l’ère de la mondialisation.
De nosjours, les êtres humains sontplutôt interpellésparplusieurs défis. Si les uns se battent pour leur survie en s’accrochant à la nature qui était jusque-là, dans la société ancestrale, leprincipalpourvoyeur en moyens et en droits ; les autres, ayant dépassé le capdes besoinsprimaires, se lancent à la course vers lesplanètes. Aussi sont-ils à la une,pour les médias et les auteurs contemporains, des sujets économiques, politiques, sociaux et de divertissements plus attrayants.
Pour les moins nantis, toutes lespréoccupations actuelles visent la survie. Pour y parvenir, « tous les moyens se révèlent bons, pourvu qu’ils permettent d’atteindre l’objectif escompCette ambition sembleté ». gagner toutes les sociétés, surtout, à notre époque. Elle n’est cependantpas sans inconvénient, puisqu’elle se traduit, le plus souvent, par des inégalités accentuées, des luttes
depositionnement au détriment du culte du mérite et de la vertu. Bref, le matériel l’emporte sur le culturel. Notons également qu’aujourd’hui, la civilisation occidentale, plus infléchie vers l’accumulation dupatrimoine matériel et financier et au combat pour la survie, frise même l’abandon des activités culturellesqui neprofitent pas directement auxpromoteurs. Dans les faits, l’on assiste à la disparition de l’éducation traditionnelle consacrée à l’étude des généalogies et permettant auxjeunesgens d’avoir unegrande capacité de mémorisation. Àquoi servent les connaissances dupassé ?(Mamya okoba), sinon à l’obtention des diplômes, diront certains aujourd’hui. Notre réflexion se veut bénévole. L’une des raisons de notre choix du présent thèmeporte non seulement sur notre contribution au multiculturalisme auquel sont voués les compatriotes, mais aussi à la mondialisation. La matière que nous avons choisie n’est pas, à notre avis, la chassegardée des experts. Nous ne saurons rester en marge de la mondialisation, même si nous n’avons pas suffisamment de moyenspour compétir avec les autres contemporains plus diligents. Nous pensons que nous ne devons pas être éblouis par la vitesse que cephénomène nous impose et nous nepouvons nonplusyassister sans un apportpersonnel. LeMbomanest de notrepoint de vue, l’une de nos contributions à l’édification du village planétaire.
Ensuite, nouspensons apporterquelques éléments de réponse à la curiosité des nouvellesgénérationsqui aimeraient connaître leurs origines, les us et coutumes de leurs ancêtres, maisqui s’adressent souvent à des notables non-initiés du clan qui ignorent les connaissances généalogiques, culturelles et même historiques. Les ouvragesqui traitent les sujets au chapitre coûtent cher ; ce qui explique peut-être leur rareté sur le marché du livre au Cameroun.
La pertinence de ce travail s’explique par le fait qu’il intervient au moment où le thème de l’inculturation est à la mode. Peut-être, faut-il le rappeler, le Concile Vatican II apermis aux fidèles catholiques africains de vivre la Parole de Dieu dans leur culture. C’est l’occasion pour les peuplesbëti-fang, en majorité d’obédience chrétienne, de revisiter leurs valeurs ancestrales. Le Mbomanpréconise le rassemblement, la confession, lapénitence, la morale, la prospérité, toutes choses qui le rapprochent du culte chrétien.
C’est pourquoi notre souci est de raffermir les liens de fraternité des membres de la société en leur inculquant legoût de l’effort, du mérite et de la vertu, au détriment du mensonge, du vol, de laparesse, du culte du moindre effort, de la médiocrité et du vice. Tout le tableau de nos ancêtres n’a certes pas toujours été blanc, maispourquoi nepasytrier des valeursqui, à en croire la légende et l’histoire, les ont hissés sur les cimes de lagloire, etqui font de nous les nains, face au passé et au présent ? Évitons que cela se reproduise indéfiniment ! Dans tous les cas, si nous voulons rejeter par pans entiers les
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méandres des civilisations étrangères, il faudra les remplacerpar notrepropre civilisation, débarrassée des défauts décriés hier et aujourd’hui, car la nature a horreur du vide !
Nous voudrions enfin attirer l’attention despeuples, desgroupes ethniques du Cameroun, du Nord au Sud, ainsique ceux despays voisinsque l’histoire a séparés, sur des rapports historiquesqui les lient, sur les cultures ancestrales positives dont le colon les a dépossédés. Un éveil de conscience et une volonté politiquepermettent, de notrepoint de vue, l’édification d’une société nationale, ou même transnationaleplus soudée, débarrassée de tous les fléaux qui divisent.
Un adage africain dit : « Tantque les lions n’aurontpas leurspropres historiens, les histoires de la chasse continueront àglorifier le chasseur ». C’est dire,pour le cas de la domination de la civilisation occidentale sur la culture ancestrale, que les traditions africaines font l’objet d’une abondante littérature depuis le début du siècle dernier. Les rites sont de temps en temps décritspar des chercheurs de divers horizons, dont certains visent des objectifs inavoués. Chaque fois, c’est la volonté du colonisateur qui est honorée. Il appartient aux initiés de les exposer auxyeux desprofanes intéressés et d’en décrire les contours aux curieux de bonne foi, sans toutefois dévoiler les principes qui doivent être gardés secrets. Cette volonté anime de plus en plus un certain nombre d’adep: Mates bantous yi Matip, Nkou Nkou, Fouda Etoundi, Mvogo Nganoma, etc.
La critique littéraire aura dugrain à moudre, car notre méthode, nos outils argumentatifs qui intègrent autant les éléments verbaux, linguistiques que les éléments ethnologiques, historiques et symboliques, ne sontpas lesplus usités par la communauté scientifique. Cela ne devraitpaspour autant susciter une polémique.
Pour ainsi dire, ce travail ne se veut ni une thèse, ni un mémoire, ni un article scientifique au sens académique du terme. Il s’agitplutôt d’une contribution d’un praticien de la chose traditionnelle. Les manquements, dérogations et insoumissions à l’orthodoxie académique ne devraientpas invalider la pertinence de cette réflexion inspirée de l’expérience.
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