Qui peut définir les femmes ?
130 pages
Français

Qui peut définir les femmes ? , livre ebook

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130 pages
Français

Description

“Qui peut définir les femmes ?” demande un des auteurs de l'article “Femme” dans l'Encyclopédie de Diderot et d'Alembert. Les deux textes rassemblés ici présentent la tentative la plus intéressante et la plus complète de définir la femme au XVIIIe siècle : non seulement ils sont riches en informations sur la réalité juridique, médicale et sociale des femmes de l'époque, mais ils remettent en cause les préjugés et questionnent l'objectivité du savoir qu'ils livrent. “Qui peut définir les Femmes ?”

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 mars 2014
Nombre de lectures 23
EAN13 9782336346472
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0750€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Collection Desfemmesdansl'Histoire dirigée par Milagros Palma
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“ Q U I P E U T D É F I N I R L E S F E M M E S ? ”
L ’ a r t i c l e “ F e m m e ” d e l ’ E n c y c l o p é d i e ( 1 7 5 6 ) S u r l e s f e m m e s d e D i d e r o t ( 1 7 7 2 )
INDIGO & Côté-femmes éditions
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Catalogage Electre-Bibliographie
Catherine Cusset  “Qui peut définir les femmes?” L’article “Femme” de l’Encyclopédie (1756) Sur les femmes de Diderot (1772). -Paris : Indigo et Côté-femmes, 1999. ISBN 2-911571-67-3 DEWEY :
© INDIGO & Côté-femmes éditions 4, rue de la Petite-Pierre 75011 Paris fttp://www.indigo-cf.com
e Dépôt légal, 3 trimestre 1999 ISBN 2-911571-67-3
Catherine Cusset
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“ Q U I P E U T D É F I N I R L E S F E M M E S ? ”
L ’ a r t i c l e “ F e m m e ” d e l ’ E n c y c l o p é d i e ( 1 7 5 6 )
S u r l e s f e m m e s d e D i d e r o t ( 1 7 7 2 )
Ouvrage publié avec le concours du Centre national du livre
INDIGO & Côté-femmes éditions
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«QUI PEUT DEFINIR LES FEMMES?»
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e Le XVIII siècle hérite de la dichotomie aristotélicienne qui assimile la femme à la matière et l’homme à la forme, ou à l’esprit, que l’on trouve également chez Platon, les philoso-phes néo-platoniciens, les Pères de l’Eglise et dans la théolo-gie du moyen-âge. Il semble légitime que le siècle des philo-sophes matérialistes et sensualistes s’intéresse tout parti-culièrement à la femme, incarnation de la matière sensible. Elle est au centre des préoccupations, de la réflexion, des salons, des tableaux, et des romans: objet de désir et sujet de son propre désir, on la voit au cœur des tableaux de Wat-teau, de Boucher et de Fragonard, des romans de Marivaux, e de Crébillon fils, de Laclos et de Sade. Le XVIII siècle, siècle de la galanterie, des philosophes et du libertinage, s’inter-roge sur les rapports entre les sexes, manifeste une passion pour la séduction, pose la question de l’éducation des fem-mes, se scandalise de l’injustice de leur sort, et critique ce phénomène du siècle nommé «galanterie». Le livre écrit par ee les Goncourt au XIX siècle,La femme au XVIII siècle, n’a 1 e pas d’équivalent pour les autres siècle . La femme au XVIII siècle est à la fois objet de fantasme érotique, de fascination esthétique et de critique morale et sociale.
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Deux textes sont rassemblés ici: l’article «Femme» de l’En-cyclopédie et un court essai de Diderot,Sur les femmes. L’En-cyclopédie, ouDictionnaire raisonné des Sciences, des mé-tiers et des arts, dirigé par Diderot et d’Alembert, est un pro-jet caractéristique de la volonté de savoir universelle des Lumières. Par son esprit encyclopédique, l’article «Femme» se propose de cerner sous tous les angles la réalité féminine. Il se divise en cinq parties de longueur variable: la première, rédigée par l’abbé Mallet, est intitulée «antropologie» (sic) et compte six pages; la seconde, «Droit naturel», longue de deux pages, est l’œuvre du Chevalier de Jaucourt; la troisième, «Morale», longue de six et demie, a été écrite par Desmahis; la quatrième, «Jurisprudence», qui comprend sept pages, est signée par le Chevalier de Jaucourt, qui dit l’avoir tirée de l’Encyclopédie anglaise. Enfin, la dernière partie, qui n’est pas sous l’entrée «Femme» mais sous une entrée différente, «Femme en couche», est un article médical long de cinq pa-ges également écrit par le Chevalier de Jaucourt. On im-prime également ici à titre de comparaison la partie morale 2 de l’article «Homme» de l’Encyclopédie., rédigée par M. le Roi L’article de Diderot sur les femmes a été écrit pour rendre compte d’un livre publié en 1772,Essai sur le caractère, les mœurs et l’esprit des femmes dans les différents siècles, par M. A.L. Thomas. Diderot rédige deux versions de ce texte: le premier paraît dans laCorrespondance littéraire le 1er avril 1772, et le deuxième en juillet 1772. Diderot continue à tra-vailler le texte. La version publiée ici est le texte de juillet remanié ultérieurement par Diderot. On a rassemblé ces deux textes parce qu’ils représentent à eux deux la tentative la plus complète de cerner l’idée e «Femme» au XVIII siècle. Elisabeth Badinter, qui a republié le texte de M. Thomas sur les femmes avec la réponse de Diderot et une lettre de Madame d’Epinay, a tenté de réhabi-liter le texte de Thomas et de le sauver des critiques virulen-3 tes de Diderot en y voyant des traces de protoféminisme . Mais le texte de Thomas n’est vraiment pas de la même étoffe. Ce ne sont pas les idées qui font la différence mais, comme 4 le dit Diderot lui-même, le style . Alors que Thomas écrit un
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long essai historique qui décrit le rôle des femmes dans la société de l’antiquité à nos jours, avec la distance sèche de l’historien qui se nuance parfois de jugement moral, le style de Diderot, comme celui de Desmahis dans la partie morale de l’article «femme» de l’Encyclopédie, manifeste une empa-thie de l’écrivain et du philosophe avec la femme, qui révèle la difficulté à dissocier la réalité du fantasme et à se distancier d’un objet si proche: c’est cette confusion, cette ambiguïté qui m’intéresse ici. Comment peut-on définir les femmes? Le peut-on, vraiment? Qui le peut? Ce commentaire introductif se composera de deux gran-des parties: la première envisagera la réalité de la femme au XVIIIe siècle sous ses trois aspects: physique, social et juri-dique. On conclura cette partie par un énoncé des critiques spécifiques aux Lumières, et des solutions que proposent les philosophes des Lumières pour remédier aux injustices et aux souffrances subies par les femmes. La seconde partie examinera la dérive vers le fantasme. On verra comment la difficulté à «définir» les femmes, à cerner leur être multiple, aboutit à la constitution d’un fantasme «femme». Celui-ci s’exprime à travers la fiction: la réflexion sur la femme con-duit à une «fictionalisation», on pourrait même dire une «hystérisation» du discours philosophique sur le féminin, permettant d’élaborer une nouvelle théorie esthétique.
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I. LA REALITE FEMME
Les idées dont le XVIIIe siècle hérite, et que l’article «Femme» de l’Encyclopédie nécessairement rapporte, pourraient se résumer en un postulat: la supériorité de l’homme sur la femme, à tous points de vue, dans l’histoire, chez les philo-sophes, les savants, et dans toutes les religions.
1.La réalité physique
La première différence entre l’homme et la femme est d’or-dre physique. Anatomique, pourrait-on dire: mais l’abbé Mallet commence par dire qu’il ne traitera pas de cette ques-tion, abordée dans l’article «Homme» qui, se référant au «homo» latin, examine l’anatomie de l’homme et de la femme: «Je ne parlerai point des différences de squelette de l’homme et de la femme (...). Je ne ferai point une description des organes de la génération». Malgré cette précaution rhétori-que, l’abbé Mallet dans la partie «antropologie» de l’article «Femme» ne peut s’empêcher d’entrer dans le débat du siè-cle concernant la différence sexuelle, toute la question étant de savoir s’il existe une différence ou simplement un rapport e de supériorité de l’homme à la femme. Le XVIII siècle, sur ce point, ne se dégage pas encore du mythe qui englue la science depuis l’antiquité et le moyen-âge: la femme comme mâle i n a c h e v é . L’abbé Mallet ne prend par parti mais se contente de rap-porter les positions sur ce sujet: elles penchent toutes en faveur d’une supériorité de l’homme, ou de ce que l’article nomme un «rapport d’excellence de l’homme à la femme». Il cite côte à côte Daubenton (1716-1800), naturaliste fran-e çais du XVIII siècle et collaborateur à l’Histoire Naturelle de Buffon, pour qui la seule différence entre les hommes et les femmes est la «matrice» en plus dans les femmes, et Galien, le médecin grec du second siècle après Jésus-Chris dont les e 5 idées dominent encore le XVIII siècle . Pour Galien, il n’y a pas d’autre différence entre les parties génitales de l’homme
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