Souvenirs anecdotiques - Médecine navale, saint-simonisme, chouannerie
178 pages
Français

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Souvenirs anecdotiques - Médecine navale, saint-simonisme, chouannerie , livre ebook

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Description

Peut-être est-il bon, en commençant, d’avertir le lecteur que je n’ai aucune prétention à me faire l’historien d’une époque et d’une institution, encore moins à me constituer juge des hommes et des choses dont j’aurai l’occasion de parler. Je raconte ici mes impressions d’autrefois ; tout ce que je puis garantir, c’est que je m’attache à les rendre avec une fidélité sincère. Cela dit, je me laisse aller au courant des lointains souvenirs ; ce qui a aussi son charme : meminisse juvat.

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Nombre de lectures 2
EAN13 9782346023431
Langue Français

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Extrait

À propos de Collection XIX
Collection XIX est éditée par BnF-Partenariats, filiale de la Bibliothèque nationale de France.
Fruit d’une sélection réalisée au sein des prestigieux fonds de la BnF, Collection XIX a pour ambition de faire découvrir des textes classiques et moins classiques de la littérature, mais aussi des livres d’histoire, récits de voyage, portraits et mémoires ou livres pour la jeunesse…
Édités dans la meilleure qualité possible, eu égard au caractère patrimonial de ces fonds publiés au XIX e , les ebooks de Collection XIX sont proposés dans le format ePub3 pour rendre ces ouvrages accessibles au plus grand nombre, sur tous les supports de lecture.
Charles Pellarin
Souvenirs anecdotiques
Médecine navale, saint-simonisme, chouannerie
PRÉFACE
Voici un livre (si toutefois c’en est un) dont le besoin ne se faisait pas généralement sentir. Il ne m’a été ni commandé par un éditeur ni réclamé par une fraction quelconque du public, pas même par une coterie, si petite qu’on veuille bien la supposer. Je n’ai donc pas d’excuse à alléguer, absolument aucune, pour la faute de l’avoir fait et de le mettre au jour.
Indépendamment de bien d’autres défauts, on pourra justement reprocher à cet opuscule de manquer d’unité ; il forme une trilogie dont les termes, assez disparates, sont indiqués dans autant de sous-titres :

Médecine navale ; Saint-Simonisme ; Chouannerie.
Passe-temps puéril d’un vieux qui s’est laissé griser un moment par ses souvenirs de jeunesse et de camaraderie ; — voilà pour la première partie du volume.
J’y raconte quelques-unes des sottises que j’ai faites, pas toutes, bien entendu : je ne suis ni un saint Augustin ni un Jean-Jacques pour m’arroger le droit et me sentir l’audace de faire au public ma confession générale.
N’étant à aucun titre un personnage, pas même de dixième ou de vingtième ordre, je ne pouvais me prendre pour un homme à Mémoires ; et pourtant c’est une sorte d’autobiographie que je me suis laissé aller à écrire.
Pourquoi, au surplus, ce genre là serait-il absolument interdit au vulgaire dont je fais partie ? Dans ce dernier cas il s’agirait, cela va sans dire, bien moins de l’ acteur que du spectateur, et de la façon dont il aurait vu les choses de son temps et dont il aurait été par elles impressionné dans sa petite sphère.
Un garçon d’esprit de mon voisinage me disait dernièrement qu’il ne se plaisait plus guère à lire que des autobiographies. « Non pas, ajoutait-il, que j’accorde la moindre foi à ce que l’auteur dit de ou sur lui-même : ceci est à bon droit suspect et non avenu, en tant qu’il s’agit d’un témoignage favorable ; mais je tiens compte de ce qu’il dit des autres. Ici la condition d’impartialité est souvent, sinon toujours, remplie... »
Appliquez-moi cette règle, ami lecteur, c’est votre droit ; je ne m’en plaindrai pas.
Suivant le propos d’un autre voisin (car je n’ai garde de dédaigner ni de négliger à l’occasion le procédé, beaucoup plus usité qu’on ne l’avoue, de l’abbé Trublet :

Au peu d’esprit que le bonhomme avait L’esprit d’autrui par supplément servait) ;
suivant ce propos, dis-je, il n’y a aucun de nous qui n’ait son livre au-dedans de lui-même, résultat de son observation et de son expérience personnelle : tout est de vouloir et de pouvoir l’écrire, ce livre intime, aperto corde, à cœur entièrement ouvert.
J’ai tâché de le faire dans une certaine mesure pour le mien ; j’espère qu’il me sera tenu compte de l’intention.
 
La seconde partie est une contre-légende qui ne manque peut-être pas complétement d’utilité.
Ne voudrait-on pas nous faire accroire, encore aujourd’hui, qu’une Révélation nouvelle, une Révélation pour de bon (ne riez pas !) s’est produite, il y a cinquante ou quarante ans, par la bouche de Saint-Simon d’abord, puis d’Enfantin, son continuateur ? — Or, en fait de Révélations, je trouve que nous avons bien assez des anciennes.
Les inspirés sont un genre de fous dangereux. C’est parce qu’il a cru sur parole des inspirés, — inspirés quelquefois sublimes au point d’être divinisés comme Bouddha, — que l’esprit humain a perdu ses franchises naturelles, et que sur lui pèse encore partout une oppression à laquelle les savants et les sages ont tant de peine à l’arracher.
« Un seul Dieu tu adoreras, » a-t-il été écrit, et, nonobstant, la terre a produit ou reçu, pour sa part, toute une série de dieux, qui se disputent l’empire des âmes et l’encens des fidèles. Ne laissons pas semer ni lever cette mauvaise graine des superstitions, qui étouffe le germe de la raison dans l’homme et qu’il est si difficile ensuite d’extirper. Tel est le motif qui a fait tourner à la polémique frondeuse mes souvenirs du saint-simonisme. Au pis aller, on dira que j’ai enfoncé une porte ouverte.
 
Enfin le désir de signaler à l’attention, à l’admiration publique, un des plus beaux traits d’héroïsme de la Révolution, resté jusqu’à ce jour enseveli dans les chroniques locales de la contrée où le fait se passa, voilà ce qui m’a inspiré les quelques pages sur la chouannerie qui terminent ce volume 1 .
Puissent tous ceux qui auront la patience de le parcourir y reconnaître, en dépit de la ténuité du fond et de l’imperfection de la forme, l’œuvre, non, — le mot serait trop ambitieux, — mais le fait et le faire d’un ami fervent de la vérité, de la justice et de l’humanité !
Paris-Montrouge, le 8 avril 1868.
CH. PELLARIN.
1 La partie du récit qui se rapporte au fait dont il s’agit (l’invasion de Saint-Brieuc par les chouans en l’an VIII et la mort héroïque du procureur de la commune, Poulain Corbion) a été publiée par le Siècle, numéro du 23 janvier 1868, édition des départements et numéro du 27 avril, édition de Paris.
L’ÉCOLE DE BREST IL Y A QUARANTE ANS
Peut-être est-il bon, en commençant, d’avertir le lecteur que je n’ai aucune prétention à me faire l’historien d’une époque et d’une institution, encore moins à me constituer juge des hommes et des choses dont j’aurai l’occasion de parler. Je raconte ici mes impressions d’autrefois ; tout ce que je puis garantir, c’est que je m’attache à les rendre avec une fidélité sincère. Cela dit, je me laisse aller au courant des lointains souvenirs ; ce qui a aussi son charme : meminisse juvat.
I. Arrivée à Brest. — Première garde de nuit à l’hôpital du bagne
Lorsque j’arrivai à Brest (c’était en octobre 1823) pour y commencer mes études médicales, je fus moins émerveillé encore du spectacle de la magnifique rade qu’on aperçoit de la promenade dite le Cours d’Ajot, et de celui des constructions monumentales du port qui bordent, sur une longueur de trois kilomètres, les rives de la Penfeld, que je ne fus frappé de voir des escouades d’hommes en casaques rouges, qui balayaient les rues sous la surveillance de quelques argousins. Ce qui donnait pour moi un cachet spécial à la ville du grand arsenal maritime, c’était cette rencontre des forçats, employés par petits groupes au nettoyage de la voie publique, ou bien par masses aux grands travaux du bassin et des chantiers : une partie en casaques et en bonnets verts ; ceux-ci étaient les condamnés à vie, qui se trouvaient en forte proportion à Brest, parce que c’était la chiourme où l’on envoyait de préférence cette catégorie de condamnés. Parmi eux se trouvait à cette époque le prétendu comte de Sainte-Hélène qui avait ordonné des prêtres comme évêque, passé des revues comme général ; le fameux abbé Contrafatto, le curé Mingrat et quelques autres célébrités des drames judiciaires. Mais ces notabilités du bagne n’allaient pas à la corvée comme la plèbe des galériens ; il y a de l’aristocratie partout.
Quand l’étranger, passant pour la première fois sur les quais, se voyait accosté par ces hommes, objet traditionnel de répulsion et d’effroi, qui venaient lui offrir à acheter les petits travaux en os, en coco et en paille, produits de leur patiente industrie, il éprouvait, en général, une impression de défiance et même de crainte.
 
Je fus bientôt mis à une épreuve qui me causa d’âpres émotions. A peine inscrit comme élève externe dans le service des hôpitaux de la marine, je fus désigné pour une garde de nuit auprès d’un forçat qui venait d’être amputé de la cuisse dans la salle des blessés du bagne. Or, pour arriver jusqu’à mon poste, près du lit de l’opéré, il fallait parcourir, dans toute sa longueur, la salle des fiévreux d’abord

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