Sur la piste du lion
175 pages
Français

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Sur la piste du lion , livre ebook

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Description

Le lion est un animal mondialisé, entre images locales et imaginaire global, représentations sociales et world culture. Autour de cette figure léonine complexe et voyageuse, l'ethnozoologie et l'anthropologie de la mondialisation convergent. La piste du lion part de Lyon pour nous conduire ensuite en Afrique, de l'Est et de l'Ouest, avec pour finir des indices collectés en Amérique du Sud et en Asie.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 janvier 2011
Nombre de lectures 181
EAN13 9782296707788
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0700€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Sur la piste du lion
Études Africaines
Collection dirigée par Denis Pryen et François Manga Akoa
Dernières parutions
Apollinaire NTAMABYALIRO, RWANDA, Pour une réconciliation, la miséricorde chrétienne. Une analyse historico-théologique du magistère épiscopal rwandais (1952-1962) , 2010.
Élieth P. ÉYÉBIYI, Gérer les déchets ménagers en Afrique . Le Bénin entre local et global , 2010.
Zygmunt L. Ostrowski, Soudan. Conflits autour des richesses , 2010.
Clotaire MOUKEGNI-SIKA, Production scientifique et pouvoir politique au Gabon. Esquisse d’une sociologie de la recherche universitaire , 2010.
Innocent BIRUKA, Sagesse rwandaise et culture de la paix , 2010.
Mosamete SEKOLA, Privatiser le secteur public en RDC ? , 2010.
Jean-Pacifique BALAAMO-MOKELWA, Les traités internationaux du Saint-Siège avec les États en Afrique (1885-2005) , 2010.
Kathleen GYSSELS et Bénédicte LEDENT, Présence africaine en Europe et au-delà , 2010.
Joseph BOUZOUNGOULA, Services de base et dynamique sociale au Congo , 2010.
Narcisse DOVENON, Le Bénin : Quelles solutions pour un développement durable ? , 2010.
Françoise UGOCHUKWU, Le pays igbo du Nigeria , 2010.
Valéry GARANDEAU, La Décentralisation au Gabon. Une réforme inachevée , 2010.
Ferdinand BARARUZUNZA, Performances des politiques économiques en Afrique subsaharienne. Théories et évidences empiriques , 2010.
Dieudonné IYELI KATAMU, Proverbes, paraboles et argot dans la chanson congolaise moderne , 2010.
Textes rassemblés et présentés par
Michèle CROS et Julien BONDAZ
Sur la piste du lion
Safaris ethnographiques entre images locales et imaginaire global
L’HARMATTAN
© L’HARMATTAN, 2010
5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr
ISBN : 978-2-296-12910-8
EAN : 9782296129108
Prologue
Si un lion était ethnographe...
Julien BONDAZ et Michèle CROS

« Si un lion t’attribuait une face, il jugerait qu’elle ne peut être que celle d’un lion. » Nicolas de Cues, 1453 1

« Si le lion a une psychologie comme nous, alors le lion est un homme à visage léonin, ce qui finalement ne se distingue pas d’un lion à visage humain. » Vincent Descombes (Bensa et Descombes 2008 : 31)
Si un lion pouvait écrire...
En novembre 1841, Balzac publie un conte satirique intitulé « Voyage d’un lion d’Afrique à Paris, et ce qui s’ensuivit », dans le cadre d’un vaste projet initié par l’éditeur Pierre-Jules Hetzel, les Scènes de la vie privée et publique des animaux . Ce projet littéraire regroupe alors plusieurs écrivains à succès dont, parmi les plus connus et outre Balzac, George Sand, Alfred de Musset, Charles Nodier ou Jules Janin, ainsi que le fameux caricaturiste J. J. Grandville (par ailleurs illustrateur des Fables de La Fontaine en 1838).
D’abord parus en livraison entre 1840 et 1842, les textes sont rassemblés en 1841-1842 dans une édition complète illustrée qui s’ouvre par un « Prologue » tout à fait intéressant. Les animaux du Jardin des Plantes, évadés de leurs cages, organisent une Assemblée générale et décident d’écrire l’histoire des « révolutions animales ». A la fois « livre écrit par les bêtes » et « fable politique » préfigurant La ferme des animaux de Georges Orwell (Fortassier 1985 : 11-12), les Scènes de la vie privée et publique des animaux apparaissent comme un jeu sur la fonction d’auteur et sur la subjectivité des animaux.
Le conte de Balzac, par endroit repris et augmenté par Hetzel, débute par le portrait d’un lion surnommé le Cosmopolite :
« Au bas de l’Atlas, du côté du désert, règne un vieux Lion nourri de ruse. Dans sa jeunesse, il a voyagé jusque dans les montagnes de la Lune ; il a su vivre en Barbarie, en Tombouctou, en Hottentie, au milieu des républiques d’Eléphants, de Tigres, de Boschimans et de Troglodytes, en les mettant à contribution et ne leur déplaisant point trop ; car ce ne fut que sur ses vieux jours, ayant les dents trop lourdes, qu’il fit crier les Moutons en les croquant. De cette complaisance universelle, lui vint son surnom de Cosmopolite, ou l’ami de tout le monde. » (Balzac 1985 : 123)
Ce lion sans lieu précis, dont le récit de vie est un récit de voyage, est ainsi doté d’une identité bricolée, improbable, mélangeant des références géographiques, animales et humaines (on pourrait du reste se demander ce qui se joue dans cette proximité de l’animal et de l’homme). Autant de lieux communs qui participent à la construction d’une imagerie populaire de l’Afrique.
Un peu plus loin dans le texte, le cosmopolitisme léonin se change en orientalisme inversé, dans une phrase qu’Edward Saïd aurait pu citer : « Si les Hommes ont la question de l’Orient, les Lions ont la question d’Europe » (126) 2 . Le cosmopolitisme du lion est ainsi mis en regard avec l’orientalisme des Hommes, l’Afrique en miroir avec l’Europe. La frontière imaginaire (la construction imaginaire de l’Orient bouleversée par le point de vue du lion) est dès lors invitation au voyage d’étude.
C’est ainsi que le lion Cosmopolite envoie son fils, le prince Léo, à Paris, pour étudier les hommes. Le conte de Balzac devient alors une nouvelle épistolaire, où chaque lettre que le prince Léo écrit à son père rend compte de ses impressions, et en particulier des quiproquos dont il fait l’objet 3 . Le conte de Balzac met alors en scène, à travers ce voyage et ces lettres du prince Léo, des malentendus entre espèces animales différentes qui se donnent à lire comme des malentendus culturels. Le récit que le prince Léo fait de sa capture en Afrique du Nord et de sa mise en exposition parisienne (et de celles du « Tigre ordinaire » qui l’accompagne) est de ce point de vue particulièrement évocateur :
« Dès que votre auguste fils eut dépassé l’Atlas, il fut reçu à coup de fusil par les postes français. Nous avons compris que les soldats lui rendaient ainsi les honneurs dus à son rang. Le Gouvernement français s’est empressé de venir à sa rencontre ; on lui a offert une voiture élégante, ornée de barreaux en fer creux qu’on lui fit admirer comme un des progrès de l’industrie moderne. [...]. Conduits par les soins du Gouvernement français jusqu’à Paris, nous y sommes logés aux frais de l’Etat, dans un délicieux séjour appelé le jardin du Roi, où le peuple vient nous voir avec un tel empressement, qu’on nous a donné les plus illustres savants pour gardiens, et que, pour nous préserver de toute indiscrétion, ces messieurs ont été forcés de mettre des barres de fer entre nous et la foule. Nous sommes arrivés dans d’heureuses circonstances, il se trouva là des ambassades venus de tous les points du globe. » (127)
C’est ensuite l’un de ces ambassadeurs, un Ours blanc nommé Oursakoff, son voisin, qui lui révèle que le jardin du Roi est non pas un palais, mais une prison 4 . Il explique que ce sont les Lions de Paris, c’est-à-dire les dandies ou plus exactement les élégants qui suivent la mode anglaise, qui l’ont enfermé là. Le prince Léo s’évade alors et part à la découverte de ces fameux Lions 5 . La nouvelle fonctionne ainsi comme une satire de la société parisienne, le regard du lion introduisant une mordante ironie. Le prince Léo s’inscrit en effet dans la lignée de Zadig, le détour par le point de vue de l’animal renforçant
le décentrement orientaliste. A travers cette expérience interspécifique fictive, tout se passe ainsi comme si Balzac inventait une zoologie partagée 6 .
A la même époque où Balzac publie sa nouvelle, d’autres histoires de lion connaissent un certain succès. L’orientalisme y est bien sûr pour quelque chose, et notamment les contes orientaux, largement diffusés au cours du XVIIIème siècle et constitués en genre littéraire spécifique (Perrin 2005). C’est le cas notamment des fables attribuées au sage arabe Luqman (ou Loqman, ou Lokman) qui, après une première traduction latine en 1615, ne cessent d’être rééditées et sont particulièrement en vogue dans la première moitié du XIXème siècle. Dans la version bilingue publiée par Léon et Henri Hélot en 1847, la fable intitulée « Le lion et l&

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