Yanomanis
176 pages
Français
176 pages
Français

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Date de parution 01 janvier 1985
Nombre de lectures 87
EAN13 9782296205918
Langue Français
Poids de l'ouvrage 6 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0600€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

YANOMAMIS
Les coureurs de jungle@ L'Harmattan, 1990
ISBN: 2-7384-0633-5Raymond ZOCCHETTI
YANOMAMIS
Les coureurs de jungle
Éditions L'Harmattan
5-7, rue de l'École-Polytechnique
75005 ParisDessins: R. Zocchetti
Photographies: R. TaurinesChaque passion fortifie l'homme, ce qui est bien
Et l'empêche de s'ennuyer, ce qui est mieux.
Pierre VicardPRÉFACE
On peut voyager pour vider sa mémoire, ou bien pour la
remplir, pour former sa jeunesse, pour placer sa fenêtre devant
un autre horizon, pour s'enfuir, pour revenir, pour apprendre...
Ce n'est pas ce qui intéresse Robert Taurines et Raymond
Zocchetti, Hauts-Savoyards d'adoption quand ils bouclent leurs
cantines et leurs sacs de voyage. Eux, ils veulent aller à la
rencontre des gens, mais pas n'importe lesquels, les indiens
aborigènes d'Amazonie, les Guahibos, les Waraos, les Yanomamis.
A l'inverse des missionnaires découvreurs, ils ne veulent rien
apporter à leurs hôtes, rien de culturel ni de confortable, encore
moins de religieux. Ils partent, sans même savoir que sévit
l'ethnocentrisme, à l'opposé de leurs préoccupations. Ils ne veulent
ni convaincre ni soumettre, ils veulent rencontrer. Rencontres du
er1 type dans la forêt amazonienne: contact, shori, ami...
Pas de goût du sensationnel, le quotidien est leur exploit.
Ce voyage n'était qu'un rendez-vous, il est devenu une
expérience humaine, rien de plus, mais totalement.
Un énorme travail de préparation, des formalités, des
recherches, des refus. Le matériel, les livres, les cartes.
Quatre ans plus tard, c'est le départ...
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AMÉRIQUE DU SUD. divisions politiquesPROLOGUE
Un vieux DC 10 nous emmène jusqu'à New York. Tout de
suite, c'est la folle ambiance des correspondances ratées, des
retards dans des aéroports de banlieue, des nuits d'hôtels sans
étoiles. Panama enfin, et la grande peur qui étreint à se
promener dans la capitale, mi-building, mi-bidonville, surtoUt quand
c'est la première fois que l'on débarque en Amérique Centrale.
De larges avenues bordées de bâtiments modernes et, juste
derrière, des amas de planches, de tôles, de voitUres cassées. Là,
la moitié de la population de la ville s'entasse et grouille dans
cet assemblage disparate au possible.
Panama-City, la nuit, les taxis, les vieilles guimbardes
américaines qui roulent plein pot, dans les tUes, en faisant la course,
ou bien sur les trottoirs, « quand ça ne passe pas ». Les piétons
ont l'habitude, l'instinct de survie sans doute. Ils marchent en
guettant le poteau ou le coin de mur, derrière lequel il leur
sera possible de se réfugier, le temps que toUt redevienne calme.
Au petit matin, deux « filles» nous font découvrir les
plages, la ville, les jolis quartiers, en fait les magasins de vêtements.
Pour nous, l'excursion s'arrête là, bien qu'ici la prostitution soit
avant tout le moyen d'assurer son existence.
Un court vol d'une heure et demie et Caracas s'offre à nos
yeux. Vue d'en haut, la ville paraît coincée entre la mer et une
chaîne de montagnes. Le premier choc, c'est immédiatement à
la sortie de l'aéroport: d'un seul coup, de larges bouffées de
chaleur nous transforment en ruisseaux de sueur. Les chauffeurs
de taxis s'arrachent nos bagages. Tiraillés de toute part,
bousculés, hélés, nous avons l'impression d'arriver dans une
fourmilière dans laquelle les fourmis mèneraient une vie à deux cents
à l'heure. Plus tard, nous aurons tout loisir de constater que
cette impression ne concerne que l'aéroport. Partout ailleurs, c'est
plutôt l'indolence.
Nous voilà enfin dans cette cité dont le nom seul nous a
déjà tant fait rêver, première escale d'un voyage qui doit durer
plusieurs mois. Depuis l'aéroport, au niveau de la mer, la roUte
9serpente jusqu'à 1 500 mètres d'altitude, ce qui offre à la
capitale un climat beaucoup moins chaud et beaucoup plus
supportable que celui de la plaine. Caracas a d'ailleurs été surnomée
« la ville au printemps éternel ». Personnellement, j'ai trouvé que
le dit-printemps me tombait encore un peu trop sur le dos, mais
enfin, tout est relatif, et en octobre, à la fin de la saison des
pluies, il ne faut pas trop en demander.
Nous allons séjourner un mois à Caracas, le temps de faire
les démarches qui nous permettront de pénétrer en zone
indigène, et aussi de trouver un véhicule dans lequel prendra place
tout le matériel de reportage. D'abord, cela facilitera sa
surveillance mais surtout, nous serons autonomes et donc maîtres de
nos déplacements.
Des voitures, au Venezuela, ce n'est pas ce qui manque. Il
y en a de toutes les sortes! L'essence est presque donnée, son
prix varie de dix à trente-cinq centimes le litre, selon le taux
d'octane désiré, le mélange se faisant à la pompe. Si vous lui
êtes sympathique, le pompiste vous fait cadeau de quatre ou
cinq litres supplémentaires, sans compter le carburant qui s'écoule
en pure perte des réservoirs trop pleins ou des tuyaux percés,
à l'insu de l'employé, lancé dans un discours intarissable sur la
beauté des femmes. Je me souviens de la réflexion d'un
résident français, illustrant la passion des mâles locaux: «Mettez
une robe à un balai et agitez-le dans la me, aussitôt, vous
verrez accourir dix bonshommes au mOlls... ! » Ce qui est sûr, dans
les villes, c'est que les toilettes féminines sont recherchées. Les
femmes cherchent toujours à plaire et à attirer les regards
masculins. Ce n'est pas par hasard, si dans le passé, la
Vénézuélienne était désignée comme « la plus frivole du monde ».
Des voitures, je l'ai dit, il y en a beaucoup, et pourtant,
un vestige du passé comme celui que nous avons fini par
dénicher, il n'yen avait peut-être qu'un seul dans toute
l'Amérique du Sud. C'était une vieille 404 Peugeot, en mine, ayant
jadis appartenu à un ambassadeur français. Il fallait une sacrée
dose d'optimisme pour seulement espérer prendre la route avec
ce qui restait de cette voiture.
Vérifications d'usage, chargement du matériel. Cartes dépliées,
nous mettons le cap à l'est, vers Barrancas, là où la piste cède
le pas au fleuve. Soleil, bonheur, la musique de l'autoradio clame
notre joie de vivre. Par le toit ouvrant, nous avalons toute la
poussière du monde, cele ne fait rien. Nous partons... !
Mais à peine sommes-nous en route que déjà, notre noble
moteur donne de sérieux signes de faiblesse. D'ocre jaune
10qu'était devenue notre peau, après une heure, elle passe
brutalement à la couleur « rouille », assombrie par le jet de vapeur
qui s'échappe du moteur pour venir s'engouffrer dans
l'habitacle. Je suis promu mécanicien en raison de mes connaissances
en mécanique et, à ce titre, c'est à moi qu'incombent les
travaux de réparation. Et il y en aura... !
Mille cinq cents kilomètres séparent Caracas du Delta
Amaeuro. Il nous faudra deux jours pour les parcourir et pour
arriver à Barrancas qui n'est en fait qu'un petit village aux rues
sinueuses jonchées de boîtes de bière et de coca-cola. Sur les
habitations regroupées autour de la place centrale, des
pancartes annoncent des salons de bellesal, des refresquerias2, des
restaurants d'où s'échappent des vagues de décibels libérés par des
juke-boxes qui font la fierté de leurs propriétaires. Le soir, c'est
dans un de ces nombreux estaminets que nous recrutons celui
qui saura nous conduire chez les Waraos. Ces Indiens
représentent pour nous le premier pas vers la remontée des âges de
l'histoire de l'humanité, tous représentés sur ce fleuve: l'âge de l'arc
et des flèches, celui du curare, celui de la machette et enfin
celui du moteur à essence.
Tous construits dans le même style, les bistrots de Barrancas
se présentent le plus souvent sous la forme d'un hangar de tôles,
avec, dans un coin, deux ou trois piles de caisses de bière. Sous
les ventilateurs, qui jamais ne cessent de brasser la fumée et les
odeurs de friture, quelques tables boitent, cernées de chaises tout
aussi bancales.
Nous nous installons et nous avons la surprise d

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