Entretien avec François Hollande - article ; n°3 ; vol.13, pg 3-23
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Description

Revue française d'économie - Année 1998 - Volume 13 - Numéro 3 - Pages 3-23
21 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1998
Nombre de lectures 26
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Entretien avec François Hollande
In: Revue française d'économie. Volume 13 N°3, 1998. pp. 3-23.
Citer ce document / Cite this document :
Entretien avec François Hollande. In: Revue française d'économie. Volume 13 N°3, 1998. pp. 3-23.
doi : 10.3406/rfeco.1998.1060
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rfeco_0769-0479_1998_num_13_3_1060François
HOLLANDE
Entretien
bien voulu répondre à nos questions. ous Conformément vous remercions à la d'avoir voca
tion de la RFE, ces questions ont pour objectif de mieux com
prendre les fondements économiques de la politique et des pro
positions que soutient aujourd'hui le parti socialiste. Nous 4 François Hollande
voudrions tout d'abord vous interroger sur les perturbations
financières actuelles et les leçons à en tirer pour une réforme éven
tuelle du système financier international. Ces ont
redonné de la vigueur aux thèses favorables à la réglementation
des mouvements de capitaux, notamment dans le domaine des
taxes qui ont souvent eu la sympathie de la gauche. Pensez-vous
que de semblables propositions soient réellement opérationnelles
dans un monde globalisé et quels sont, selon vous, les éléments
nécessaires à la reconstruction du système financier internatio
nal ?
François Hollande : Avant d'en venir aux propositions, il faut
sans doute établir le constat. Des économistes, comme des re
sponsables politiques, avaient imaginé que la libéralisation de
l'ensemble des mouvements de capitaux et la flexibilité des
changes conduiraient à une situation optimale. Cette thèse n'était
pas sans fondement au regard des conséquences dommageables
de la fixité des changes ou de la rigidité des contrôles administ
ratifs dans les années soixante-dix. Cependant depuis plusieurs
années, la déréglementation a fragilisé l'ensemble du système
financier. La secousse qui a ébranlé l'Asie en est une illustra
tion. Elle n'est pas la première et ne sera sans doute pas la der
nière si un certain nombre de dysfonctionnements ne sont pas
rapidement corrigés. Pour en revenir aux causes, la première est
sans doute, avec la baisse des taux d'intérêt, la recherche par un
certain nombre d'organismes financiers des plus hauts rende
ments, ce qui a rendu les mouvements de capitaux plus volatiles.
La deuxième réside dans un système de change plutôt hybride
pour les pays émergents, qui présente tous les défauts de l'arr
image au dollar, et tous les inconvénients de la flexibilité brutale
lorsque cet outillage devient insupportable. La troisième c'est l'i
ncapacité des organisations monétaires internationales, au pre
mier rang desquelles le FMI, à intervenir de façon apaisante sur
les mouvements de capitaux. Enfin, le dernier facteur de crise tient
à la fragilité du système bancaire en général, celui des pays émer
gents à l'évidence, mais aussi, compte tenu des liens prévalant François Hollande 5
maintenant entre les places et entre les institutions, celui des
pays développés.
J'en arrive aux préconisations. Nous avons proposé trois
pistes qui ont été peu ou prou empruntées par les différents
gouvernements de notre pays depuis au moins vingt ans.
• La première vise à accroître la transparence et à renforcer les
critères prudentiels, et plus généralement à mettre en place des
mécanismes de supervision bancaire.
• Mais il faut parallèlement assurer une meilleure régulation des
mouvements de capitaux, c'est à dire mettre en quelque sorte des
grains de sable dans le jeu, et c'est là qu'est souvent évoquée la
taxe Tobin. Tobin doit être très fier, vingt-cinq ans après avoir
émis cette idée, de la voir portée maintenant par des mouvements
qui substituent désormais l'auguste keynésien à Marx lui-même
dans leurs références théoriques. Il est vrai que sa proposition est
pertinente dès lors qu'elle est susceptible de mettre un peu de vis
cosité dans un système trop fluide et donc trop liquide. Est-elle
applicable ? C'est la seule question que doivent se poser des déci
deurs politiques. A regarder de près, deux conditions doivent être
réunies pour son effectivité :
- Il faudrait d'abord que tous les pays de la planète acceptent d'in
troduire un tel dispositif, car il suffirait qu'un ou plusieurs s'y
refusent pour que des places financières, pour le coup offshore,
deviennent extrêmement attractives et qu'à partir de là tout le
bénéfice soit perdu. Si dans un seul pays, un gouvernement
refuse de jouer au nom d'un capitalisme pur et parfait, alors
apparaîtrait une dérivation contradictoire avec les objectifs pours
uivis par la taxe Tobin.
- Il convient ensuite de s'assurer que la taxe Tobin décourage les
mouvements spéculatifs dont on ne veut pas, mais ne dissuade
pas en même temps les mouvements de couverture à court terme
dont toute l'économie a besoin. Or, il semblerait qu'un tel pré
lèvement pénaliserait les opérations saines de couverture de
change sans avoir d'effets majeurs sur les mouvements de court
terme. L'intérêt de la spéculation est en effet de gagner gros, or
la taxe par définition serait d'un taux faible. Il en découlerait une
disproportion entre le niveau du prélèvement et l'espoir de gain. 6 François Hollande
Voilà pourquoi, si nous ne sommes pas hostiles au principe d'une
taxe nous préférons vérifier au préalable que ces mécanismes
produisent des effets dont aucun ne soit pervers. Nous ne vou
lons pas en faire un slogan politique dont on saurait a priori qu'il
n'a pas de traduction concrète. Ceci nous amène en définitive à
préconiser plutôt le système chilien qui consiste en un système
de dépôt à la Banque centrale d'un montant proportionnel au
montant de l'investissement.
• Enfin, nous appelons à la définition d'une nouvelle architec
ture du système des changes. Il ne s'agit pas de revenir à la fixité
des taux de change partout dans le monde, comme Bretton
Woods l'avait permis, mais de favoriser la mise en place de sy
stèmes de change régionaux. Il serait souhaitable d'inciter chaque
grande région du monde à avoir des accords de change permett
ant une plus grande stabilité. Ceci vaut pour l'Asie, comme
pour l'Amérique latine. Certes, il ne s'agit pas que nous, Euro
péens, fassions de la monnaie unique un modèle pour le reste du
monde. Cela ne serait d'ailleurs pas forcément compris, ni suivi.
Mais nous pouvons démontrer que l'effort accompli, en vue de
resserrer les marges de fluctuation entre les principales monnaies
européennes, est sans doute transposable à d'autres régions du
monde. Des accords de change entre les zones ainsi constituées,
et à l'évidence entre l'euro et le dollar, sont également nécessaires.
Il ne servirait à rien, néanmoins, de vouloir à tout prix provo
quer de la fixité là où elle n'est pas possible. J'évoquais un peu
plus haut le problème des pays émergents. Une des raisons, et
ce n'est pas la seule, de la crise financière en Asie tient à l'att
itude jusqu'au-boutiste d'un certain nombre d'autorités monétaires
de ces pays, prêtes à tout pour que leur monnaie reste arrimée
au dollar. Ce n'est pas le lien au dollar qui est ici en cause. Mais
il y a un moment où il faut redéfinir les cours de change en fonc
tion de l'économie réelle, puis ensuite en assurer la stabilité.
D'où la proposition que nous faisons, d'accords régionaux.
RFE : Le Chili a supprimé cette année son système de dépôt préa
lable de 30 % afin d'attirer des capitaux internationaux sur les
entrées de capitaux. François Hollande 7
FH : Oui, cela souligne la difficulté pour un pays d'appliquer
seul un tel système. Cela ne condamne pas la proposition, mais
la justifie au sens où elle devrait être généralisée à l'ensemble d'une
zone économique. Mais convenons qu'un tel mécanisme est
quand même d'un usage plus simple que la taxe Tobin, qui sup
pose une assiette respectée par tous, un taux unique, éventuel
lement une instance de recouvrement et de ré

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