Entretien avec Philippe Séguin - article ; n°3 ; vol.2, pg 3-9
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Description

Revue française d'économie - Année 1987 - Volume 2 - Numéro 3 - Pages 3-9
7 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1987
Nombre de lectures 14
Langue Français

Extrait

Entretien avec Philippe Séguin
In: Revue française d'économie. Volume 2 N°3, 1987. pp. 3-9.
Citer ce document / Cite this document :
Entretien avec Philippe Séguin. In: Revue française d'économie. Volume 2 N°3, 1987. pp. 3-9.
doi : 10.3406/rfeco.1987.1148
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rfeco_0769-0479_1987_num_2_3_1148Philippe
SEGUIN
Entretien
estimez-vous liens entre la croissance nécessaire et de l'emploi, revenir sur pour la conception essayer de onsieur traditionnelle résoudre le Ministre, les prodes
blèmes d'une économie à faible croissance et chômage élevé ?
Philippe Séguin : Je continue à penser qu'un taux de crois
sance de 4 % nous permettrait de créer à nouveau des emplois
à un rythme susceptible d'atténuer notablement nos difficul- Philippe Séguin 4
tés. Le malheur est qu'une telle perspective est, pour l'heure,
eu égard aux contraintes notamment extérieures qui pèsent
sur notre économie, une utopie.
Observons, à cet égard, qu'emploi et chômage ne
sont plus des vases communiquants : jusqu'en 1980-1981
l'emploi augmente et le chômage aussi, le paradoxe s'explique
principalement par des raisons démographiques et sociologi
ques liées, pour ces dernières, à la demande de travail fémi
nin. D'ailleurs, j'observe que l'objectif de « plein emploi » est, à
l'heure actuelle, encore plus exigeant que par le passé puisque
l'emploi féminin vient s'ajouter au plein emploi des hommes
qui fut, à la vérité, au cours des trente glorieuses, le seul vrai
objectif.
De même, depuis trois mois, l'emploi globalement se
détériore et les chiffres du chômage s'améliorent. Il ne faut pas
y voir un renversement des tendances démographiques, mais
la conséquence des mesures de traitement social ou plutôt, et
de plus en plus, des traitements socio-économiques qui font
que les bénéficiaires ne sont plus des chômeurs au sens des
statistiques internationales.
Ces réalités rendent impérativement nécessaires une
réflexion sur l'emploi et une réflexion sur le chômage comme
questions spécifiques. Voici pourquoi j'ai, par exemple, utilisé
des formules provocatrices du type «l'emploi n'est qu'un
moyen parmi d'autres pour régler le problème du chômage » !
R.F.E. : Les autorités politiques ont-elles vraiment intégré cette
conception ?
P.S» : Peu nombreux sont ceux qui ont vraiment modifié
leurs credos... Pour autant la classe politique dans son ensemb
le ne peut plus dire ni que la reprise est au coin de la rue ou
au bout du tunnel, ni que le plein emploi était réalisable. La
discrétion est donc de mise.
R.F.E. : Est-ce à dire que face à une tendance lourde, l'État n'a guère
de moyens d'action ? Philippe Séguin 5
P.S. : Les moyens d'action traditionnels ne sont plus à la
mesure du défi. Il faut donc, et sans pour cela impliquer l'Etat
d'emblée, accepter une nouvelle définition du travail, de
l'emploi et de l'activité.
Le travail est un moyen de répartition de la richesse
et un instrument d'épanouissement personnel. Notre contrat
social reconnaît à chacun un droit sur ces deux aspects. Pour
quoi ne pas élargir notre conception traditionnelle et étroite,
assimilant le travail à un emploi marchand, et profiter des
évolutions en cours pour promouvoir une société plus conviv
iale ?
Dans l'intervalle, ceux qui détiennent un emploi ne
peuvent pas espérer maintenir durablement à la fois un
système de pure assistance aux sous-emplois et la totalité des
droits acquis.
R.F.E. : Par exemple le S.M.I.C.?
P.S. : Probablement, le S.M.I.C. si je me réfère à plusieurs
expériences étrangères. Mais, à l'heure actuelle, je ne puis que
constater que cette remise en cause n'est pas acceptée par le
bloc de ceux qui ont un emploi et qu'elle est socialement et
politiquement inenvisageable.
R.F.E. : Comment voyez-vous l'évolution du travail?
P.S. : Remise en cause fréquente de la notion de carrière,
mobilité professionnelle importante sont des leitmotivs de ce
genre de débat. Je voudrais insister sur la diversification crois
sante des durées du travail en fonction d'ailleurs du degré de
concurrence subi par le secteur. Il y aura aussi certainement
une montée des emplois conviviaux publics, semi-publics ou
privés.
R.F.E. : Comment concevez-vous le développement de ces types
d'emploi et ne sont-ils pas condamnés à être financés par la puissance
publique ? Philippe Séguin 6
P.S. : Les règles qui enserrent le marché du travail sont, je l'ai
dit, pour l'instant, des règles quasi immuables car le corps
social ne veut pas y toucher. Il est possible que dans vingt ans
elles aient disparu mais, dans l'immédiat, le seul moyen de
créer ces emplois est de déroger au fonctionnement normal
du marché du travail Pour un grand nombre d'activités,
l'emploi n'existe pas car le prix est trop élevé : il y a donc soit
une offre d'emplois potentielle, soit un renforcement du tra
vail au noir. Il faut donc, sur ce type d'emplois, abaisser le
prix par la suppression des charges sociales et fiscales et faire
rencontrer l'offre et la demande. Un exemple type est celui de
l'emploi à domicile pour lequel une déductibilité fiscale aurait
des effets très positifs, même si la présentation politique d'une
telle action est bien difficile en raison de la répugnance
sociopsychologique à considérer ces emplois comme nobles.
R.F.E. : Dans cet esprit, êtes-vous favorable à une modification du
système d'assurance-chômage ?
P.S. : II faut bien réaliser que cette assurance a été organisée à
une époque où le chômage n'existait pratiquement pas. Elle
consiste à l'origine à indemniser le chômeur et à l'empêcher
de cumuler cette indemnité avec une activité salariée. Je crois
qu'il faut accepter une modulation de cette indemnité en
fonction du recours à une activité, même à temps partiel,
exercée par l'ancien chômeur et remplacer donc l'aide versée
pour qu'il ne travaille pas par une incitation au travail. C'est
bien le sens du rapport Dalle favorable à la dégressivité plus
marquée de l'assurance-chômage.
Il n'y a plus de frontière clairement délimitée entre
l'emploi, le chômage et l'activité salariée. Cessons donc de
vouloir maintenir chacun dans sa catégorie : l'essentiel est de
procurer une forme de travail quelle qu'elle soit plutôt qu'une
assistance condamnée à être d'autant plus faible unitairement
que le nombre des « bénéficiaires » s'accroît. Sinon, les difficul- Séguin 7 Philippe
tés des chômeurs de longue durée, parfois à la limite de la
marginalité, s'accroîtraient.
R.F.E. : A vous entendre, on a le sentiment d'une nécessaire évolution
de la France vers une économie de services. Or, les pays qui ont
conservé ou développé une base industrielle solide sont ceux qui ont
créé le plus d'emplois dans les dix dernières années.
P.S. : Tout à fait ! Dans le secteur soumis à la concurrence
mondiale — qui s'exerce aussi sur le marché intérieur qui est
si j'ose dire le premier des marchés extérieurs... — , il faut lais
ser toutes les réserves de productivité être utilisées à plein. La
base industrielle ne doit pas avoir d'autre logique que celle de
la conquête de parts de marché, et n'a aucun devoir quantitat
if en matière d'emplois.
A l'inverse, je suis convaicu que pour des raisons
sociales et politiques, on peut et on doit ralentir l'utilisation
des réserves de productivité dans les services, et plus exacte
ment favoriser, dans les arbitrages, la qualité du service plutôt
que la productivité à tout prix.
R.F.E. : De quelle manière?
P.S. : Voilà un sujet pour économistes et sociologues. Les
modifications des modes de consommation auront peut-être
pour conséquence que la qualité du service sera désormais
plus recherchée que la simple productivité. Je pense à certai
nes initiatives de compagnies pétro

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