Faut-il interdire la revente à perte ? - article ; n°3 ; vol.17, pg 89-108
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Revue française d'économie - Année 2003 - Volume 17 - Numéro 3 - Pages 89-108
Cet article propose d'analyser la mesure d'interdiction de la revente à perte établie pour la première fois en 1 963 et dont la dernière formulation date de la loi Galland en 1996. La théorie de l'organisation industrielle offre différentes explications aux pratiques de revente à perte, et leur examen permet de discuter de la pertinence de cette règle.
This paper aims at capturing the ambiguous impact of the ban on loss leading that prevails in France since 1 963. We use the theory of indu strial organisation to understand the logic of loss leading practices. We then discuss loss leader banning, pointing out its impact on the competition between retailers, on the relationships between producers and retailers and on the consumers' surplus.
20 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 2003
Nombre de lectures 34
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Claire Chambolle
Faut-il interdire la revente à perte ?
In: Revue française d'économie. Volume 17 N°3, 2003. pp. 89-108.
Résumé
Cet article propose d'analyser la mesure d'interdiction de la revente à perte établie pour la première fois en 1 963 et dont la
dernière formulation date de la loi Galland en 1996. La théorie de l'organisation industrielle offre différentes explications aux
pratiques de revente à perte, et leur examen permet de discuter de la pertinence de cette règle.
Abstract
This paper aims at capturing the ambiguous impact of the ban on loss leading that prevails in France since 1 963. We use the
theory of indu strial organisation to understand the logic of loss leading practices. We then discuss loss leader banning, pointing
out its impact on the competition between retailers, on the relationships between producers and retailers and on the consumers'
surplus.
Citer ce document / Cite this document :
Chambolle Claire. Faut-il interdire la revente à perte ?. In: Revue française d'économie. Volume 17 N°3, 2003. pp. 89-108.
doi : 10.3406/rfeco.2003.1467
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rfeco_0769-0479_2003_num_17_3_1467Claire
CHAMBOLLE
Faut-il interdire la
revente à perte ?
la grande distribution française a long
temps bénéficié du soutien des pouvoirs publics qui voyaient
en elle une arme efficace pour lutter contre l'inflation, depuis
le début des années 1980 la tendance s'est progressivement
inversée. Plusieurs lois successives ont alors été adoptées visant
d'une part à rééquilibrer les rapports de force entre produc-
Revue française d'économie, n° 3/vol XVII 90 Claire Chambolle
teurs et distributeurs et, d'autre part, à garantir la loyauté de
la concurrence entre grande distribution et commerces tradi
tionnels. L'interdiction de la revente à perte est l'une des
grandes mesures prises dans ce sens.
Vivement critiquée, en particulier par les distributeurs,
cette mesure mérite un examen d'autant plus approfondi
qu'elle constitue une spécificité française. En effet, la plu
part des pays européens n'ont pas interdit ces pratiques, à
quelques rares exceptions près dont l'Espagne en 1996. Au
demeurant, à ce jour, la Commission européenne n'a pas
adopté de directive à ce sujet : les pratiques de revente à perte
ne sont pas interdites per se et ne peuvent être considérées
comme anti-concurrentielles que si elles sont mises en œuvre
par des entreprises en situation de position dominante sur
le marché considéré. De même, aux Etats-Unis les pratiques
de revente à perte semblent couramment utilisées par les
grands groupes de distribution. Selon la presse professionn
elle1, lorsqu'un supermarché Wai Mart s'implante dans une
nouvelle zone de chalandise, il procède souvent de la façon
suivante. Le commence par revendre à perte,
à des prix de 20 à 30% inférieurs à ses coûts, un ensemble
de produits visant à fidéliser « la ménagère » jusqu'à ce que
les concurrents alentour disparaissent, et pratique ensuite des
tarifs normaux.
Nous présentons, dans la première section, les grandes
lignes de l'évolution de la législation française sur la revente
à perte et les motifs qui ont conduit le législateur à son inter
diction. La section suivante passe en revue les diverses expli
cations offertes par la théorie de l'organisation industrielle à
ce phénomène paradoxal de revente à perte. Enfin, en reliant
les arguments théoriques à l'observation des faits, nous mont
rons les effets ambigus de cette mesure sur la concurrence
entre grande surface et commerces traditionnels, sur les rela
tions entre producteurs et distributeurs et sur le surplus des
consommateurs.
Revue française d'économie, n" 3/vol XVII Claire Chambolle 91
L'interdiction de la revente à perte
L'évolution de la loi
En 1963, les supermarchés sont déjà largement implantés dans
le paysage commercial français lorsque le premier hypermarché
apparaît. L'interdiction de la revente à perte est alors formulée
pour la première fois dans l'article 1er de la loi de finances de
19632 : «[...] est puni d'une amende de 5 000 à 100 000 francs,
le commerçant qui revend un produit en l'état à un prix infé
rieur à son prix d'achat effectif».
Cette formulation distingue clairement la revente à perte,
qui fait l'objet de cet article et qui concerne l'activité d'inter-
médiation (distribution, centrales d'achats, grossistes, importat
eurs. . .), c'est à dire la revente de produits « en l'état », de la vente
à perte qui concerne la vente par les producteurs de biens qu'ils
ont eux mêmes transformés (au moins partiellement)3.
L'article de loi de 1963 précise ensuite que « [...] le prix
d'achat effectif est présumé être le prix porté sur la facture majoré des taxes sur le chiffre d'affaires, des taxes spé
cifiques afférentes à cette revente et, le cas échéant, du prix du
transport ». Il s'agit donc d'une simple présomption et non pas
d'une définition du prix d'achat. Les distributeurs peuvent
dès lors s'affranchir de ce qui est supposé être leur prix d'achat,
en déduisant du prix porté sur la facture diverses ristournes et
rémunérations pour coopération commerciale, telles que les têtes
de gondoles ou les activités promotionnelles4. Dès le départ,
plusieurs exemptions à l'interdiction de la revente à perte sont
ajoutées. En particulier, le « droit d'alignement » autorise un
distributeur à revendre un produit à perte lorsqu'il s'aligne
sur les tarifs d'un concurrent direct, situé dans la même zone
de chalandise. Cette mesure permet aux distributeurs de se pro
téger des différences de conditions d'approvisionnement et
vise essentiellement les petits commerces en leur permettant
de s'aligner sur les prix de la grande distribution. Une deuxième
Revue française d'économie, n° 3/vol XVII 92 Claire Chambolle
exemption importante concerne les produits à caractère sa
isonnier qui peuvent être revendus à perte à la fin de la saison
des ventes. Par ailleurs, les biens aux caractéristiques iden
tiques, dont le réapprovisionnement s'est effectué à des prix
inférieurs, ou les produits qui ne répondent plus à une évo
lution de la demande en raison de l'innovation technique ou
de la mode, peuvent être revendus à perte.
En dépit de cette loi, les pratiques de revente à perte
sont devenues très courantes pour certains produits de grande
consommation et ont largement dépassé le champ des produits
concernés par l'exemption. En fait, dans sa formulation de
1963, la loi pouvait être facilement contournée par les distr
ibuteurs du fait de l'imprécision des règles de facturation et de
l'absence de définition réelle de la notion de « prix d'achat ».
En outre, les sanctions annoncées ne se sont pas avérées suf
fisamment dissuasives.
En 1996, la loi Galland relative à « la loyauté et à
l'équilibre des relations commerciales »5, reformule de façon
plus précise l'interdiction de la revente à perte et édicté des
règles de transparence tarifaire. En particulier, la loi Galland
clarifie la méthode de calcul du seuil de revente à perte, et ren
force la sanction encourue par un commerçant en cas d'in
fraction.
En ce qui concerne les règles de facturation, l'article 31
de l'ordonnance de 1986 précisait que la facture doit comporter
« [...] tous rabais, remises ou ristournes dont le principe est
acquis et le montant chiffrable lors de la vente ou de la pres
tation de services, quelle que soit leur date de règlement ».
Depuis la loi Galland, la facture doit désormais mentionner
« [...] toute réduction de prix acquise à la date de la vente ou
de la prestation de services et directement liée à cette opéra
tion de vente ou de prestation de services, à l'exclusion des
escomptes non prévus sur la facture ». En outre, le prix d'achat
effectif était jusqu'alors « présumé être » le prix porté sur la
facture d'achat [...] ; la loi Galland remplace l&#

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