Thatcher, 20 ans après
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Description

Thatcher, 20 ans après Ile a d'abord été plébiscitée à New York, et à Londres, où « La Dame de Fer », incarnée par Meryl Streep, a fait un Imalheur sur les écrans, ressuscitant les nostalgies, et suscitant la controverse, de la Chambre des Communes à la Chambre des Lords. Nul doute que cette « Dame de fer », qui sera à l'affiche de nos cinémas dès le 15 février, ne réveille des passions oubliées, autour de Mme Thatcher qui fut, de 1979 à 1990, la première femme à être nommée Premier Ministre de Sa Majesté. La première-et la dernière à ce jour- à s'installer dans l'auguste décor du 10 Downing Street où l'avaient précédée les plus grandes figures de l'histoire politique du Royaume-Uni, de Gladstone à Winston Churchill, et d'autres, moins glorieuses, Clément Attlee, Harold Wilson, John Major ou Tony Blair et enfin, la droite étant de retour, le conservateur David Cameron. Comment sera-t-elle reçue en France, à la veille de l'élection présidentielle, cette héroïne de la droite anglaise et, pire que cela, cette militante du capitalisme, conservatrice en politique, mais adepte, s'agissant de 1' économie, d'un libéralisme déchaîné. En France, elle faisait peur, comme de nos jours Marine Le Pen. Face au « thatchérisme» envahissant, contagieux sans doute, nos intellos dressaient leurs remparts, fourbissant leurs armes, celles de la diabolisation. Rappelez-vous Renaud, le chanteur alors célèbre, lui consacrant ses venimeux couplets d'anarcho- gauchiste en colère !

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Publié le 28 janvier 2012
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Langue Français

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Thatcher, 20 ans après
Ile a d'abord été plébiscitée à New York, et à Londres, où« La Dame de Fer », incarnée par Meryl Streep, a fait un Imalheur sur les écrans, ressuscitant les nostalgies, et suscitant la controverse, de la Chambre des Communes à la Chambre des Lords.
Nul doute que cette« Dame de fer », qui sera à l'affiche de nos cinémas dès le 15 février, ne réveille des passions oubliées, autour de Mme Thatcher qui fut, de 1979 à 1990, la première femme à être nommée Premier Ministre de Sa Majesté. La première-et la dernière à ce jour- à s'installer dans l'auguste décor du 10 Downing Street où l'avaient précédée les plus grandes figures de l'histoire politique du Royaume-Uni, de Gladstone à Winston Churchill, et d'autres, moins glorieuses, Clément Attlee, Harold Wilson, John Major ou Tony Blair et enfin, la droite étant de retour, le conservateur David Cameron. Comment sera-t-elle reçue en France, à la veille de l'élection présidentielle, cette héroïne de la droite anglaise et, pire que cela, cette militante du capitalisme, conservatrice en politique, mais adepte, s'agissant de 1' économie, d'un libéralisme déchaîné. En France, elle faisait peur, comme de nos jours Marine Le Pen. Face au« thatchérisme»envahissant, contagieux sans doute, nos intellos dressaient leurs remparts, fourbissant leurs armes, celles de la diabolisation. Rappelez-vous Renaud, le chanteur alors célèbre, lui consacrant ses venimeux couplets d'anarcho- gauchiste en colère ! Ce n'est pas d'être une femme qu'on lui reprochait, mais d'avoir balayé la gauche anglaise et chassé le labour party de Downing Street. Certes, nous étions habitués depuis Jeanne d'Arc à laisser les femmes ferrailler sur les champs de bataille pour sauver la France. Malgré cela, il nous fallut plusieurs siècles pour leur accorder un droit que les suffragettes d'Angleterre avaient conquis depuis longtemps : le droit de vote !
Margaret Thatcher est d'une autre trempe. Elle a joué, au début des années 80, un rôle
politique souvent comparé par les historiens à celui de Winston Churchill.
J'ai rencontré Margaret Thatcher plusieurs fois. La première, c'était au Cogrès de Blackpool, qui réunissait une fois par an les militants purs et durs du parti conservateur, les« tories » célébrant leur messe annuelle. Ce jour-là, il pleuvait des cordes et la blonde anglaise, sortie le matin même des mains de son coiffeur, se demandait comment elle allait faire, avant de haranguer ses amis,
pour remettre de l'ordre dans sa coiffure détrempée. Comme son tour arrivait de grimper à la tribune, elle avait tiré de son immense sac à mains un grand chiffon de soie qui, noué autour de sa tête, allait lui donner assez fière allure.
Elle n'était encore qu'une militante de base, mais sachant faire parler d'elle, exprimant sans équivoque ni détour ses convictions libérales. Elle m'avait accordé un bref entretien dans lequel m'était apparu son goût de l'ordre et sa volonté de participer au redressement d'un royaume que les socialistes de l'après guerre avaient réussi à conduire au bord de la faillite.
Quelques années plus tard, elle m'avait reçu à la Chambre des Communes, dans le petit salon réservé au«chef de l'Opposition», une situation officiellement reconnue et inscrite dans le protocole parlementaire. Celui, ou celle, qui la détient est, en effet, le successeur désigné du Premier Ministre en exercice en cas de renversement de la majorité. Margaret Thatcher, nommée à la tête du parti conservateur était devenue la première femme à occuper cette position. Elle venait d'avoir 50 ans. D'entrée de jeu, avant de parler d'elle-même, et de sa volonté de sauver l'Angleterre en chassant« le lamentable Harold Wilson »de Downing Street, elle avait attiré mon attention sur l'état désastreux du salon où elle me recevait, pointant du doigt le canapé de cuir usé jusqu' à la corde, la moquette tachée, décor indigne de la fonction d'un Leader de l'Opposition recevant, au Parlement d' Angleterre, à l'ombre de BigBen, un journaliste étranger. Un tel manquement trahissait à ses yeux ce laisser-aller qui, disait-elle, était la marque de l'équipe au pouvoir.
Ma troisième et dernière rencontre avec« la dame de fer»lieu à Hong Kong en 1997 où elle eut était venue assister, les yeux remplis de larmes, au cérémonial restituant à la Chine communiste la dernière Colonie de la Couronne du«British Empire». Onze années durant, de 1979 à 1990, elle avait été Premier-Ministre, battant tous les records, en Angleterre, de longévité politique. Ce n'est pas le féminisme, la recherche jamais aboutie de la parité entre les deux sexes pour mettre fin aux inégalités criantes, qui avait de Margaret Thatcher ce que nous appelons aujourd'hui«une femme de pouvoir».Le terme, à l'époque, n'était pas encore à la mode.
Il y a 21 ans la Dame de fer quittait le pouvoir : Mme Thatcher est toujours d'actualité.
L'Amérique avait inventé les working women, insupportable petites cheftaines en pantalons, qui trouvaient dans le privé l'occasion de prendre une revanche en exerçant, sur les hommes malencontreusement tombés sous leurs ordres, une autorité qu'elles n'avaient exercée auparavant que sur leurs enfants. Margaret Thatcher est d'une autre trempe. Elle a joué, au début des années 80, un rôle politique souvent comparé par les historiens à celui de Winston Churchill, son prédécesseur à Downing street. Sir Winston avait gagné la guerre certes, et sauvé l'Angleterre. Par son obstination, son refus obstiné d'une défaite menaçante, son caractère de Bull-dog prêt à dévorer l'ennemi plutôt que de lâcher son os. Les mêmes qualités ont fait de Mme Thatcher, dans la tourmente économique des années 80, le leader incontesté, même par les pires machos d'Angleterre, d'une autre victoire, celle d'une méthode appelée « thatchérisme » face à la ruineuse démagogie travailliste, aux promesses intenables, aux dépenses publiques inutiles et pharamineuses des hommes du labour party. Sa formidable popularité prouvait qu'en politique, l'intégrité et le courage finissent par payer plus que les recettes éculées des marchands de poudre aux yeux. Tout récemment leFinancial Times consacrait une page entière au style de«Maggie » qui, à l'exception de son fameux sac à main, évitait les accessoires trop voyants, ne ressemblant en
rien à Evita Peron, veuve du dictateur argentin, qui déployait, au pouvoir, plus de charme que de sobriété, plus d'éloquence que de réflexion. La nostalgie qu'elle inspire aux Anglais, 20 ans après avoir quitté le pouvoir, est à la mesure d'un pays en mal de leader. Pourtant, M. Cameron, remplaçant Tony Blair, a su remettre en selle le vieux parti des torys. En se tenant à l'écart des pièges de l'Union Européenne, en assurant la pérennité du sterling face à ce miroir aux alouettes de la monnaie unique, il a fait ce qu'aurait fait«La dame de fer»,inventé par L'étoile de surnom Moscou, le quotidien du parti communiste soviétique, pour stigmatiser l'entêtement hostile de Mme Thatcher.
Meryl Streep, hollywoodienne, star riche et glorieuse, mais coeur à gauche, ne cache pourtant pas l'immense admiration qu'elle éprouve pour Maggie, qu'elle incarne complètement dans le film à sa gloire, plongeant les jeunes générations dans une thatchermania ressuscitée. À Londres, ces jours-ci, Maggie est partout. Sur les côtés des grands bus rouges sous les traits de Meryl Streep, en photos sur les pancartes de manifestations spontanées dédiées à la vielle dame qui ne paraît plus en public. Le fer dont elle était faite laisse la place à la terrible maladie de l'oubli, celle d'Alzeimer, qui gagne jour après jour, la dame la plus inoubliable du dernier siècle. Un débat, ces jours-ci, passionne les Anglais : la dame de fer aura-t-elle droit, quand arrivera l'heure, aux funérailles nationales ? La question ne s'est posée à ce jour que pour les hommes d'état, jamais pour les femmes. Sauf les reines ou les princesses, telle Diana, qui repose à Westminster.
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