Organisation industrielle : la concentration d industries spécialisées dans certaines localités - article ; n°3 ; vol.5, pg 155-170
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Description

Revue française d'économie - Année 1990 - Volume 5 - Numéro 3 - Pages 155-170
16 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1990
Nombre de lectures 26
Langue Français

Extrait

Alfred Marshall
Organisation industrielle : la concentration d'industries
spécialisées dans certaines localités
In: Revue française d'économie. Volume 5 N°3, 1990. pp. 155-170.
Citer ce document / Cite this document :
Marshall Alfred. Organisation industrielle : la concentration d'industries spécialisées dans certaines localités. In: Revue
française d'économie. Volume 5 N°3, 1990. pp. 155-170.
doi : 10.3406/rfeco.1990.1260
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rfeco_0769-0479_1990_num_5_3_1260Alfred
MARSHALL
Organisation
industrielle :
la concentration
d'industries spécialisées
dans certaines localités
lux premiers stades de la civilisa
tion, chaque localité devait compter sur ses propres res
sources pour la «plupart des marchandises pondéreuses
qu'elle consommait ; à moins évidemment qu'elle ne dis- 156 Alfred Marshall
posât de facilités particulières pour les transports par eau.
Mais les besoins et les habitudes changèrent progressive
ment ; et il fut alors plus facile aux producteurs de satisfaire
les besoins des consommateurs, même lorsqu'ils n'avaient
que peu de moyens de communiquer avec eux; et il fût
possible même pour des gens relativement pauvres d'ache
ter des petites quantités de biens coûteux venus de loin et
d'agrémenter grâce à eux les jours de fête et de repos
pendant toute une existence, voire même pendant deux
ou trois générations. Par suite, les objets vestimentaires et
d'agrément personnel les plus légers et les plus coûteux,
de même que les épices et certains ustensiles de métal
utilisés par toutes les classes, et beaucoup d'autres choses
encore plus particulièrement destinées à l'usage des gens
riches, venaient souvent de distances étonnantes.
Quelques uns n'étaient produits que dans un petit nombre
d'endroits, voire dans un seul ; et ils étaient distribués dans
toute l'Europe, soit par l'intermédiaire des foires1 et des
marchands ambulants, soit par les producteurs eux-
mêmes, qui, abandonnant leur travail, voyageaient à pied
sur des milliers de milles pour vendre leurs marchandises
et visiter le monde. Ces hardis voyageurs acceptaient pour
eux les risques de leurs petites entreprises ; ils permettaient
ainsi à la production de certaines catégories de biens d'aller
directement satisfaire les besoins d'acheteurs très
éloignés; et ils créaient de nouveaux besoins chez les
consommateurs, en leur montrant dans les foires ou à leur
propre domicile des nouveaux produits en provenance de
pays lointains. Une industrie concentrée dans certaines
localités est habituellement désignée, bien que cela ne soit
peut-être pas tout à fait correct, sous le nom d'industrie
localisée2.
Cette localisation élémentaire de l'industrie pré
parait peu à peu la voie à bon nombre des développements
modernes de la division du travail dans les arts mécaniques Alfred Marshall 157
et dans les tâches de direction des affaires. Aujourd'hui
encore, nous trouvons des industries de cette espèce pri
mitive localisées dans des villages retirés de l'Europe cent
rale, et expédiant leur production jusqu'aux centres les
plus actifs de l'industrie moderne. En Russie, la fondation
d'un village consécutive au développement d'un groupe
familial a souvent été à l'origine d'une industrie localisée ;
et il existe un nombre immense de villages s'adonnant
chacun à une seule branche de production, voire seule
ment à une partie de cette branche3.
Diverses et nombreuses causes ont conduit à la
localisation des industries ; mais les principales ont été les
conditions physiques, telles que les caractéristiques du
climat et du sol, l'existence de mines et de carrières dans
le voisinage, les facilités d'accès par terre et par eau. Ainsi,
les industries métallurgiques se sont-elles installées en gé
néral près des mines ou là où le combustible était bon
marché. Les industries sidérurgiques en Angleterre, recher
chèrent d'abord, les régions où le charbon de bois était
abondant et, ensuite, elles émigrèrent dans le voisinage
des houillères4. Le Staffordshire fabrique plusieurs sortes
de poteries, dont toutes les matières premières sont im
portées de loin ; mais on y trouve du charbon à bon marché
et un excellent argile pour faire les lourds «seggards» ou
boîtes dans lesquelles les poteries sont placées pour la
cuisson. La paille tressée a son lieu de prédilection dans le
Bedfordshire, où la paille a juste la proportion de silex qu'il
faut pour qu'elle soit solide sans être cassante ; et les hêtres
du Buckinghamshire ont fourni la matière première pour
la fabrication des sièges de Wycombe. L'industrie de la
coutellerie de Sheffield doit surtout son existence à l'ex
cellent grès avec lequel on y fait les meules.
Un autre facteur important a souvent été le soutien
d'une cour. Les riches personnages qu'elle rassemblait
créaient une demande pour des biens de très haute qualité ; Alfred Marshall 158
ceci attirait de loin des ouvriers spécialisés et permettait à
ceux qui étaient déjà sur place de se former. Lorsqu'un
potentat oriental changeait de résidence — et cela arrivait
souvent, en particulier pour des raisons sanitaires — la ville
abandonnée pouvait se tirer d'affaire en développant l'i
ndustrie spécialisée, qui avait dû son origine à la présence
de la cour. Mais, très souvent, les souverains ont délibér
ément fait venir les artisans de loin afin de les regrouper.
Ainsi, la spécialisation du Lancashire dans la mécanique
serait due à l'influence des forgerons normands qui avaient
été établis à Warrington par Hugo de Lupus au temps de
Guillaume le Conquérant. Et la plus grande partie de l'i
ndustrie manufacturière anglaise, avant l'époque du coton
et de la vapeur, s'est développée sur les lieux d'établiss
ement des artisans flamands ou autres ; nombre de ces éta
blissements s'étaient faits sous l'impulsion directe des rois
Plantagenet et Tudor. Ces immigrants nous apprirent à
tisser la laine et les étoffes peignées, bien que pendant
longtemps nous ayons envoyé nos draps aux Pays-Bas pour
le foulage et la teinture. Ils nous apprirent à saler les ha
rengs, à travailler la soie, à fabriquer la dentelle, le verre et
le papier et à satisfaire beaucoup d'autres de nos besoins5.
Mais comment ces immigrants avaient-ils acquis
leur habileté ? Leurs ancêtres avaient sans doute tiré avan
tage des arts traditionnels issus des civilisations antiques
des rives de la Méditerranée et du lointain Orient; car
presque toutes les connaissances importantes ont des ra
cines qui remontent loin en arrière dans le passé ; et ces
racines étaient si largement répandues et capables de don
ner vie à des pousses si vigoureuses, qu'il n'y a guère de
parties du vieux monde où n'auraient pu fleurir depuis
longtemps de nombreuses et belles industries hautement
perfectionnées, pour autant que leur développement ait
été favorisé par le caractère des peuples et par leurs inst
itutions sociales et politiques. Tel ou tel accident peut avoir Alfred Marshall 159
déterminé la prospérité d'une industrie particulière dans
telle ou telle ville; le caractère industriel d'un pays tout
entier peut même avoir été largement influencé par la
richesse de son sol et de ses mines, ou par ses aptitudes
au commerce. De telles dispositions naturelles peuvent
elles-mêmes avoir stimulé l'initiative individuelle ainsi que
la libre entreprise ; mais c'est l'existence de ces dernières,
de quelque manière qu'elles aient été favorisées, qui est la
condition suprême du développement des formes supé
rieures des arts de la vie. En esquissant l'histoire de la libre
industrie et de la libre entreprise, nous avons déjà incidem
ment souligné les causes de la localisation de la suprématie
industrielle mondiale, tantôt dans un pays, tantôt dans un
autre. Nous avons vu comment la nature physique agit sur
l'énergie de l'homme, un climat vivifiant le st
imule, et comment l'ouverture de

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